Oui, il faut lire. Et c'est encore mieux de savoir qui lire, comment, pourquoi et quoi. Comme vous êtes tous un peu paresseux, on vous mâche le travail dans une subjectivité parfaitement assumée. Peut-être même que, si vous êtes vraiment flemmard, vous trouverez souvent ici de quoi frimer sans avoir besoin de lire quoi que ce soit. Mais ça c'est mal. Lisez donc!

Frederick Exley : Écrivain américain mort  en 1992 et né en 1929 à Watertown. Un paquet d’articles, et trois romans dont deux traduits en Français (le troisième le sera bientôt)

C’est qui ?

Un demi-raté, un loser magnifique, un artiste de génie comme seuls les Etats-Unis savent en produire. Promis à une vie planplan dans les relations publiques d’une société de chemins de fer, Fred sombre dans l’alcoolisme, l’instabilité, avec en prime un détour par la case hôpital psy. Il a quand même réussi à être admiré par ses pairs, et de son vivant, et à ramasser un certain nombre de prix littéraires pas sales (nomination pour le National Book awards, Prix Faulkner, Prix Rosenthal du Centre National des Arts et des Lettres, et prix Rockfeller de 10 000$). Pas mal pour un pseudo écrivain raté qui a soigneusement claqué sa fortune en bitures.

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Il parle de quoi ?

De lui. Fred Exley parle de lui, de la vie, de ses aspirations, de ses espoirs, de son enfance, de ses errances, de sa solitude, des femmes, de son sale caractère, de l’écriture, d’alcool, de football (beaucoup!), de ses errances, de sa folie et de sa sensibilité. Sensibilité qui lui permet de surnager dans les marasmes sordides dans lesquels il se plonge, avec un sens de l’embrouille qui rappelle Bukowski en moins trash. On croise des gens simples, des espèces d’escrocs loufoques, des piliers de bars, des pauvres gars, des gens internés… Exley parle simplement de la vie qui se déroule, des hauts et des bas qu’on peut éprouver, des gens qu’on peut croiser, et des situations de merde qu’on va chercher sans avoir la moindre idée de comment s’en dégager. Ses romans ne seraient pas non plus totalement autobiographiques, même si son histoire constitue la majeure partie du terreau de son écriture. Il parle aussi beaucoup d’écriture, et de l’absence de l’inspiration. Exley n’était pas satisfait de son succès d’estime, et se voyait comme un super loser complexé par des modèles grandioses (Edmund Wilson, tout simplement le plus grand critique littéraire jamais imprimé) et des pairs reconnus, comme Nabokov.

Pourquoi c’est bien ?

Parce qu’Exley réussit à ne jamais nous apitoyer. Il ne se plaint pas, il ne se complait pas dans sa vie un peu pourrie, même s’il ne semble pas trop chercher à en sortir. Il arrive à décrire des événements difficiles qui lui arrivent avec une sensibilité étonnante. Jamais on ne tombe dans le pathos, dans le lourd ni dans le sordide. Une p(o)inte d’humour, une pincée de cynisme ou d’auto-dérision décalent toujours le propos. Ce type est capable de rendre drôle un séjour en HP, sans non plus la jouer Tex Avery. Exley alterne passé et présent, introspection et exaltation, et finit par nous captiver totalement par son sens de la narration et de la description. Il rend chaque personne attachante, à commencer par lui, qui pourrait bien être un vieil oncle un peu loufoque mais gentil. Même s’il est bourré 90 % du temps.

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Il faut lire quoi ?

Avec deux livres, pas de risque d’exploser le budget loisir du mois ! Cependant, Le Dernier Stade de la soif est bien bien bien meilleur qu’A l’Epreuve de la faim, qu’on appréciera sans doute mieux en étant déjà familiarisé avec la plume d’Exley. Et puis c’est toujours mieux de lire les livres d’un auteur dans l’ordre, surtout quand ils se suivent plus ou moins. Les allusions aux épisodes passés de la vie d’Exley faites dans A l’Epreuve de la Faim seront aussi plus clairs. En attendant, vivement le troisième!

1 commentaire

  1. Ai adoré « Le Dernier Stade de la soif », qui résonne encore longtemps après l’avoir refermé dans mon cerveau déglingué. « A l’Epreuve de la Faim » m’attend sagement sur mon étagère, j’attend juste d’avoir décuvé.

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