Actuellement en préparation de son second long métrage, "Les Mouvements du Bassin" avec Éric Cantona, le pionnier du gonzo français n'a jamais été du genre à enfiler des perles. Redoutable de sexentricité, HPG séduit certains grands noms du cinéma traditionnel et en exaspère beaucoup d'autres. A Gonzaï, on a vite choisi notre camp. Interview non cryptée, réalisée quelques jours après le traditionnel festival de Cannes.

Hervé-Pierre Gustave – j’abrège ici toute éventuelle volonté du lecteur quant à la recherche d’une signification cachée – n’est pas le genre de spécimen qu’on invite serein à un chic dîner mondain. Faut pas compter sur lui pour garder sa bite dans sa poche. Il y mettra forcément de son petit grain de sel ainsi que de sa sauce maison, pas forcément du goût de tous les culs-serrés présents et habitués à la fadeur extrême. Une addition inique et pas de pourboire.

Le documentaire Il n y a pas de rapport sexuel de Raphael Siboni est sorti il y a quelques mois. T’as été déçu du résultat ?

HPG : Je ne suis pas déçu mais c’est un film que je n’assume pas, parce qu’on m’y voit comme une petite ordure. Ce que je suis parfois, je ne m’en cache pas, mais je ne peux pas être satisfait d’un film qui me montre tout le temps bourré et en train de manipuler les autres. Dans l’art, j’aime bien me perdre et ne pas assumer ce que je fais, donc au final je suis content.

Le festival de Cannes s’est achevé il y a quelques jours, t’as suivi un peu ou tu t’en fous royalement ?

On avait une projection pour le film avec Cantona, réservée aux distributeurs, j’ai donc suivi cette partie-là. Quand j’y suis pas, je suis jaloux et envieux, un autre défaut. Cannes ne m’intéresse que quand j’y suis.

Dans le lot cette année, y a des réalisateurs que t’apprécies ou pas ?

Je suis assez éclectique. J’ai vu De Rouille et d’Os avant hier, c’est pas mal. Haneke est un mec que j’aime bien aussi. Mais ce que j’aime surtout, c’est parader sur le tapis rouge et essayer de me sauter des actrices du traditionnel. N’étant pas en sélection, je n’ai pas pu parader ni traîner ma libido là-bas.

« T’aimerais pas que ta sœur travaille avec moi. Je ne me recommande à personne. »

T’aimerais qu’il y ait un prix du porno à Cannes ?

Le porno, je m’en fous aussi. Ce sont des mecs ratés qui voudraient faire du traditionnel. Ils sont tous nullissimes et ne m’intéressent vraiment pas.

Y a plus de cons dans le milieu du porno qu’ailleurs ?

Non, mais les réalisateurs sont des ratés. Si t’aimes le fric, les nanas et le cinéma, t’es pas dans le porno, t’es dans le traditionnel.

Tu n’inclus donc pas les acteurs ?

Non, les acteurs c’est différent, y a des personnalités intéressantes, ils ont un côté Bukowski qui me plaît.

Question à 10 000, est-ce que le porno c’est la réalité ?

Ça fait 25 ans que je suis dedans, donc c’est ma réalité en tout cas.

Ok. Je vais reformuler ma question autrement. Ce qu’on voit à l’image, c’est le reflet de la réalité ou pas ?

Quand je vais faire une scène, je vais le faire partout sauf dans un lit alors que le mieux, c’est quand même de le faire au pieu. C’est une partie de la réalité fantasmée, comme un jeu. La pure réalité ne serait pas intéressante à filmer.

C’est une bonne chose que des gosses aient accès au porno sur Internet ?

Je suis contre le fait d’interdire. C’est plus dangereux que de ne pas interdire à mon avis. Les fantasmes seront toujours là et un môme trouvera toujours le moyen de regarder du porno d’une manière ou d’une autre. C’est normal pour un enfant d’être dans la transgression, c’est comme ça aussi qu’on se forme. Mais il est vrai que ce n’est pas de leur âge, fixer la limite de 18 ans me paraît très bien. Le film de Raphael Siboni n’a pas à être vu par une personne de moins de 18 ans. Les problèmes évoqués sont des problèmes d’adultes.

« C’est sûr que c’est pas Alain Delon qui aurait pu faire « Branlette sous les bambous »

Pour toi, être gentil est en contradiction avec faire du cinéma. Explique-moi ça.

Non, mais j’imagine que t’aimerais pas que ta sœur travaille avec moi. Je ne me recommande à personne.

Tu penses quoi de la qualité des pornos ces temps-ci ?

Pas pire ou mieux qu’avant. Le porno ne s’est pas dégradé. Pas grand chose ne change, que ce soit au niveau des sentiments, de l’amour ou de l’art. Les modes passent mais la réalité reste. 

Tu te considères comme un obsédé sexuel. Au final, ça t’apporte plus de joies ou plus d’emmerdes ?

Je ne pense pas être plus obsédé qu’un autre, seulement je n’ai jamais bridé ma libido. Je n’ai jamais agressé sexuellement quelqu’un non plus. Par contre, je perds un peu de temps tous les jours à me branler sur YouPorn, mais c’est aussi un plaisir.

T’as fait plus de films qu’Alain Delon ou Belmondo. C’est pas épuisant ?

C’est sûr que c’est pas Alain Delon qui aurait pu faire Branlette sous les bambous 1,2,3,4,5,6. Mais je ne me suis jamais lassé de mon boulot, ni d’un corps d’ailleurs. Je fais mon travail comme un artisan. Un boulanger peut très bien faire des baguettes de pain pendant 40 ans sans en avoir marre. Moi c’est pareil. Y a pas que du cul en plus, ce sont aussi les aventures humaines qui m’intéressent.

Tu t’es jamais levé le matin en te disant « ça me fait chier d’aller bosser » ?

Si, sûrement, mais aujourd’hui j’évite de me lever le matin. Je me tape une queue en me réveillant et je reste parfois toute la journée à bosser à poil. J’ai de très bonnes conditions de travail, j’ai pas à me plaindre.

À quel moment t’as décidé de passer au film traditionnel ?

C’était une suite logique. Le porno est soluble dans le traditionnel et réciproquement. Fondamentalement, je ne fais pas la différence. Le porno c’est la pudeur de la nudité du corps et le traditionnel la pudeur de l’esprit.

Qu’on ne te propose au début que des rôles de cul dans des films classiques, ça t’as agacé ?

Non, parce que je suis pas spécialement un bon acteur. Sachant que dans le porno je disais juste « Bonjour, je te saute », on n’allait pas m’appeler pour un rôle shakespearien. Je n’ai que ce que je mérite, et ceux qui se plaignent se ghettoïsent davantage dans un rôle.

« Tant qu’il y aura des banquettes et des physiques ingrats, je serai là. »

Est-ce que, comme dans On ne devrait pas exister, on s’est foutu de ta gueule quand t’as voulu te lancer dans le traditionnel ?

Faut dire que j’y mets le paquet pour qu’on se foute de moi, je suis pas toujours très fin. Y a plein de cons et d’envieux dans le milieu, comme moi d’ailleurs. Mais disons qu’en étant sélectionné à Cannes, tu gagne en intérêt aux yeux des larbins. Certaines personnes de la Cinémathèque Française comme Jean François Rauger m’ont toujours suivi depuis mes débuts, comme Karine Durance aussi d’ailleurs. C’est grâce à eux que je peux mieux évoluer.

Tu continues à faire du porno en tant qu’acteur?

Sans arrêt. Pour mes propres productions maintenant. Il faut en tourner, des pornos, pour financer un film ! Les gens s’évertuent à croire que j’ai arrêté, mais tant qu’il y aura des banquettes et des physiques ingrats, je serai là.

Quand t’étais gigolo, tu couchais avec des mecs. Tu te considères comme bisexuel ?

Je le redeviendrai en vieillissant. Quand je perdrai ma virilité, je me ferai sodomiser par des petits jeunes pour ressentir ce que je n’ai plus. Mais j’ai encore de la marge.

Ça t’effraie de vieillir et de perdre ta virilité ?

Clair qu’aujourd’hui je suis moins performant. Auparavant, je me masturbais juste avant une scène, maintenant j’évite. On peut pas faire autrement que d’être en accord avec son âge. Ce serait vain de refuser ce qui est inéluctable.

Le court-métrage Hôpital psychiatrique de Garnison, c’était un fantasme, une performance que tu voulais réussir, ou tu voulais juste être dans le Guinness du cul ?

Les trois. J’aime bien vivre mes fantasmes et qu’ils véhiculent aussi une histoire.

T’as encore des fantasmes sexuels non assouvis ?

Tu serais une nana, j’irais plus loin… J’en ai, oui, je vais pas te dire lesquels de peur qu’on m’arrête… Non, pour être sérieux, aller à Cannes, prendre une suite et me taper plein d’actrices connues. Elles auraient ensuite peur de croiser mon regard, n’assumant pas d’avoir couché avec moi. Ouais ça, ça me botterait bien.

Tu t’es brûlé le sexe avec un projecteur sur un tournage, un peu comme Michael Jackson… T’as pas peur de finir comme lui ? 

Une autre fois, alors que je sautais une nana à côté d’une baignoire, le projo est tombé, je l’ai retenu à même pas cinq centimètres de la surface de l’eau tout en continuant la scène. J’aurais pu mourir comme ça.

T’as failli être le Claude François du porno, en fait.

Exactement.

Dernière question qui n’a rien à voir. Paraît que t’es porté sur la world music, c’est vrai ?

Hum, j’aime pas mal de choses différentes en fait. Récemment par exemple j’ai bossé avec Christophe qui a composé la musique du film Les Mouvements du Bassin. Je connaissais pas très bien son univers mais sa B.O. est d’enfer. Dans ce film j’ai aussi voulu mettre une chanson de Peter Gabriel mais ça coutait 70 000 balles… J’aime bien sa façon de foutre des instruments égyptiens en plein milieu d’une chanson. Les Rolling Stones ont fait ça aussi. J’écris beaucoup en écoutant ce groupe.

70 000 balles…

Et encore, c’est le minimum. Tu comprends mieux pourquoi y a jamais de bonnes B.O. rock dans le porno.

http://www.hpgnet.com/

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