26 ans, 24 heures en moyenne par enregistrement, la peur d’oublier et le besoin de calme pour composer, Twin Shadow peut se résumer en deux faces : moitié papillon noir, moitié paillettes, mais rien à éclipser. Il y a 3 ans, il ne voulait pas faire de musique. Un déménagement et des milliers de kilomètres de bitume bouffés plus tard, on oublie ses vieilles idées et ça donne Forget.

Twin Shadow, c’est l’histoire d’un jeune mec qui roule sa bosse à 200 à l’heure, confiant en l’avenir, mais qui aurait peur d’oublier des morceaux sur la route. À la recherche du temps qui vient, son album shoote le présent, mais appeler un disque Forget, c’est se faire une petite thérapie, non ? Interview mal drivée, question pataude, pas de réponse… On enquille donc sur les bagnoles. Entre deux coussins de cuir usés par les interrogatoires, George Lewis Jr attend le moment pour aller manger ; il est tout de même treize heures. Mes questions sont mal gribouillées et Twin Shadow semble fatigué. Teint pâle et mal rasé, le lonely Twin semble se faire chier. Et ce sont ses vrais cheveux ou un épi ? J’en rajoute. C’est juste que je ne sais pas quoi écrire. La rencontre est maigre en sensations, rapport à la claque que j’ai prise en écoutant l’album. Forget, comme un disco avec trente ans de retard et l’assombrissement qui va avec. Un album chargé du passé mais résolument tourné vers l’après : le pop moderne ; When we’re Dancing où la ligne de basse ferait bander n’importe quel naufragés des eighties, Shooting Holes, track miraculeusement transformé par Prince Language, le lifteur funk de New York.

« Twin » ? Ca vient des moteurs de bécanes, c’est technique j’ai pas bien compris. Et « Shadow »?  C’est rapport à la Honda Shadow, un cruiser et la première moto qu’il voulait – NB : penser à demander à mon rédac’ chef si je peux mettre une photo parce que cette motocyclette est magnifique. « Twin Shadow »: deux mots que George Lewis Jr adore. Encore ce montage de techno & vintage qu’il se refusera à arborer au fil de la conversation à propos de ses influences, de l’empreinte des souvenirs sur sa musique. Parce que Forget, ça évoque quand même un antécédent, non ? « Oui il y a plein de souvenirs, mais pas de nostalgie. Se languir du passé, vouloir revenir en arrière ce n’est pas ce que je ressens dans ma musique. Je me suis juste souvenu de choses que je n’ai pas cherché à embellir. Et puis c’est aussi basé sur mon imagination, mon espoir en le futur. » Des souvenirs largement orientés pistons tout de même : « rouler vite, rouler seul, aller à des fêtes dans les bois (surement en voiture, ndlr), sortir avec mes amis plus vieux déjà diplômés (là aussi, surement en voiture, ndlr). » Sourire ravi quand on aborde le sujet de son premier 4X4. Alors qu’il n’avait pas son permis, il s’était acheté ce SUV pour une poignée de dollars. Une Jeep Trooper qu’il conduisait dans l’arrière-cour de ses parents. « Et lorsque j’avais les couilles, je prenais la route jusqu’à chez mon ami Ricky. » Notons une adolescence lambda, sans traumatisme apparent.

S’ensuivent quelques routinières questions, puis on revient sur l’album. S’il n’est pas né aux abords d’une autoroute, c’est bien le déplacement qui en est à l’origine. Il y a trois ans, Twin Shadow n’aurait pas pu exister : pas envie de faire de la musique, pas envie d’avoir un groupe. Puis à l’été 2008, George bouge  à Berlin. Et là, le coup classique, une révélation : « J’ai découvert que j’étais effrayé de ne pas travailler dans la musique ». C’est à ce moment-là, me dit-il, qu’il décide de mettre tout son cœur dans son projet. Aujourd’hui il vit à Brooklyn, dans le quartier dominicain et il ne peut composer que les fenêtres fermées, gêné par le boucan ambiant du merengue et du bachata. Influences qu’on ne retrouve pas sur l’album d’ailleurs. Plutôt disco ou funk, new wave moins, ce n’est pas le disque d’un groupe, mais d’un seul gars avec des choses différentes à l’intérieur. « Je voulais que ça soit les paroles, et non les sons, qui lient l’album. Regarde Madonna : sur un même disque elle a des influences techno, espagnoles, dance. » Il a la fascination du mainstream et voue un culte aux voix R’n’B. « Alicia Keys, Chris Brown, Rihana, tout ces gens qui font de la musique populaire pour ados. Je pense que je pourrais apporter quelque chose, c’est là que je veux aller pour mon prochain projet. »

« J’ai besoin d’enregistrer vite, c’est important de rester dans le même état d’esprit. Généralement, j’ai en tête ce que je veux et j’ai besoin de le poser vite sinon je le perds. (…) Parfois, tu peux imaginer quelque chose d’unique, et si tu passes à autre chose, tu vas détériorer l’idée, c’est inévitable ». C’est important d’avoir le portrait d’un mec qui se lasse, qui change. J’aurais dû prendre une photo. Il me dit que les gens sont toujours surpris quand quelque chose sonne comme référant à une autre époque, mais qu’on se souvient toujours de ce qui est bon. T’inquiète, on t’oublie pas.

Twin Shadow // Forget // 4AD
Sortie en France le 16 novembre

http://www.myspace.com/thetwinshadow

2 commentaires

  1. mortel le commentaire .ca donne envie de se baigner dans l ambiance …
    pour infos , un twin c est un moteur bi cylindre donc qui vibre , qui vit et qui pisse l huile …
    bref une bonne vieille anglaise rouquine qui boit de la biere !!!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages