Il y a à peine un mois, Israël nous a envoyé une petite bombe cinématographique. On a pu découvrir à la cinémathèque un réalisateur israélien jusqu’ici inconnu au bataillon : Uri Zohar. Des films libres et choc entre les comédies italiennes et Cassavetes, mais qui permetent surtout de découvrir l’itinéraire d’un cinéaste qui après avoir été une icône de la contre culture est devenu un rabbin ultra orthodoxe. Le fameux humour juif ? Non même pas. Un peu comme si en France Joël Séria ou Bertrand Blier devenaient subitement prêtres. Un peu comme si Olivier Dahan se mettait à faire des films. Un choc, un vrai.

Zohar est une énigme. Un type qui est allé dans beaucoup de directions et à chaque fois à fond les manettes et pas autrement. Il n’y a pas grand chose à se mettre sous la dent quand on se penche sur le cas Zohar, surtout quand on ne parle pas hébreu. Tout au plus une trentaine de pages partagées sur deux bouquins. Pour éclaircir le mystère, j’ai contacté l’instigateur de la rétro Zohar à la cinémathèque,Ariel Schweitzer, via skype. Il est en Israël et me prévient qu’il y aura surement des sirènes sonnant l’alerte à la bombe. Il n’en sera rien ; la seule alerte qu’on recevra sera pour moi. Une alerte du site Vente Privées pour une vente flash de slips.
Et Ariel Schweitzer donc. Il a vu Uri Zohar il y a quelques jours, il lui a parlé de la conférence qu’il a donné à la Mecque du septième art sous le titre : « Qui es tu Uri Zohar ? » Ce à quoi le désormais Rabbin lui a répondu : « je la regarderai car même moi à 70 ans, je ne sais toujours pas qui je suis ». La belle affaire. Si même l’intéressé ne sait pas qui il est, on est vraiment mal barré. Reste donc ses films et une mince trace biographique. Montre moi tes films et je te dirais qui tu es. Le mystère est sur le point d’être résolu. Malback est sur le coup les enfants. Jean Malback : détective privé pour femmes et Rabbin.

On est donc face à un homme né le 4 novembre 1935 à Tel-Aviv (un scorpion donc),  mesurant au moins un mètre soixante-quinze, cheveux bruns bouclés. Hum, on avance à grandes enjambées là. Il débute dans les cafés théâtres et commence tous ses spectacles par « Vous me trouvez comment ? Je suis beau ? » Un homme plein de doute, tellement typique des scorpions. Le type veut plaire. Est-ce cette raison qui l’a poussé à devenir rabbin ? Pour se faire accepter de ceux qui le détestaient ? La question est lancée. Mais dis moi Malback tu nous ferais pas de la psychologie à deux balles là ?  Tout a fait les amis, mais Gonzai doit aussi séduire la ménagère.

Zohar enclenche de suite la cinquième, il commence à être connu, passe à la TV, se fait la main sur quelques courts métrages puis réalise en 1965 son premier long métrage Un trou dans la lune. L’histoire de deux mecs qui se retrouvent seul dans le désert et décident de faire du cinéma. Le film est un grand foutoir, parodie de western américain et de film d’aventure sioniste très en vogue à l’époque. Mais surtout n’ayant aucune logique, rien ne rattache une scène à l’autre. On passe d’une scène de fusillade d’indiens à un reportage où Zohar demande à de jeunes actrices pourquoi elles veulent faire ce métier. « Pour être riche et célèbre » répondent-elles. En menant cette enquête où j’ai bien failli y laisser ma santé, j’ai découvert que ce film a eu une influence majeure. Il lança ce qu’on appela la « nouvelle sensibilité ». La nouvelle vague israélienne. Un mouvement puisant ses inspirations de l’occident avec une équipe technique légère et se détachant de la religion. Zohar se pose en leader du mouvement. C’est les fesses bien au chaud sur son trône qu’il organise un système lui permettant de faire les films qu’il entend. Entre deux longs-métrages personnels, ils réalisent des films de commandes, essentiellement des Bourékas (films comiques). Notre quartier et Tout bâtard est roi réunissent à eux deux 1,6 millions de spectateurs. Assez d’argent et assez de visibilité pour faire des films plus confidentiels. Une méthode qui ressemble beaucoup à celles de John Cassavetes. La méthode du cinéma indépendant : cachetonner et réinvestir. Il l’avoue d’ailleurs lui même, c’est avec le néo-réalisme qu’il a compris comment envisager un film : « un bout de rue, deux comédiens et si tu as quelque chose à dire, cela suffira. »

Le futur rabbin arrive aussi à confirmer dans les cercles d’auteur puisqu’en 1967, il revient de Cannes avec le prix d’interprétation pour son acteur Oded Kotler. Trois jours et un enfant est surement son film le plus ambitieux narrativement. L’histoire d’un homme qui se voit confier la garde d’un enfant par une ex. On y voit une sorte de pré-hipster avec grandes lunettes et l’arrogance qui va avec. Sûr de lui et de sa supériorité intellectuel (Monsieur est professeur) sortant avec une femme mais ne l’aimant pas car surement pas assez belle et intelligente pour lui. Mais une faille existe, cette ex qui lui a confié son enfant. A l’aide de flash back, on entre dans son histoire. Le fantasme de l’ex laisse place à la réalité, une première fois ratée, l’impuissance. Comme dans tous ces films, les façades sont démolies pour montrer le creux, le vide et dynamiter une société machiste forte en gueule. Les coqs qui paradent. Mais aussi se montrer à nu.

Take off (1970) jusqu’ici invisible car bloqué par les acteurs eux-mêmes, raconte une partouze qui ne peut pas se faire car chaque mari refuse de voir sa femme couché avec un autre homme. Tout cela relève du jeu sociétale, le jeu du masque. On joue à l’homme libre, on a des grandes idées mais dés qu’arrive la pratique ; il n’y a plus personne. On bombe le torse et on sort les poings.

En 1972, il lui faudra juste un bout de plage pour faire Les voyeurs. Uri Zohar réalise et y joue un maitre nageur totalement obsédé, l’hormone à fleurs de peau. Son meilleur pote est pareil sauf qu’il a une femme et un enfant. Bref deux hommes voulant niquer et reluquer tout ce qui bouge. Dés que l’un baise l’autre se démerde toujours pour mater. Notamment une scène où Zohar mate son pote pendant au moins cinq minutes, la bave aux lèvres et la main sur son short en jean. Le film ne les juge pas; ce sont juste de grands enfants. Un film frais et drôle qui s’inscrit dans la trilogie de la plage. Trois films ayant le même sujet l’infidélité, l’immaturité, le manque de repère. Et c’est surement là où se trouve le génie d’Uri Zohar. Car tout en creusant le même sujet, il se réinvente à chaque film en offrant une autre mise en scène et donc un autre sens. Les yeux plus gros que le ventre, deuxième film de trilogie, est une version noire et pessimiste des voyeurs. Benny Forman interprété encore par Zohar a tout pour lui : une femme, des enfants, un job. Mais il a la braguette en feu et n’arrive pas à se contrôler.

C’est le destin beaucoup d’hommes, quand t’es maqué tu veux plonger dans le moindre cul. Une femme, c’est indéniablement quelque chose de chaud mais ce n’est plus la même chaleur quand tu l’as tous les jours dans les bras. Et une fois célibataire, plus aucunes ne t’attire. Un seul cul vous manque et tous les autres sont plats. Down Juan.

Il n’y a aucun filtre chez Zohar, sa vie, ses doutes sont à l’écran. Et c’est peut-être en cela qu’on peut comprendre son envie de se tourner vers la religion. Pour remplir le vide qu’il montre à chaque film. On se rappelle de Linda Lovelace aka gorge profonde qui devint pieuse et renia sa carrière dans le X. A la différence que Zohar est désormais en paix avec ce qu’il appelait la période noire de sa vie.  Il fut même touché par cette rétrospective (tardive) à la cinémathèque déclarant : « je suis tel Abraham qui eut un fils à cent ans. » Zohar a accouché de plus d’une dizaine de films en dix ans. Son revirement religieux fut un choc pour la communauté de cinéaste Israélien mais fut considéré comme une aubaine par les ultra-orthodoxes. Zohar leur servit de vitrine pour prêcher la bonne parole. La brebis galeuse qui retrouve finalement le droit le chemin, la pub parfaite. Le titre de son dernier film, le dernier de la trilogie de la plage, est on ne peut plus clair : Il faut sauver le maitre nageur.

Les enfants, je crois bien avoir résolu l’affaire: Films + Sexe + Vide = Rabbin. Et comme le dit si bien Abraham : « si t’as plus de sperme à cent ans, c’est que t’es impuissant.»

1 commentaire

  1. C’est marrant, y’a de la verve, de la plume mais les bien trop nombreuses réflexions moqueuses, méprisantes & négatives sur les juifs ou le judaisme sentent l’antisémitisme – ou pas loin.
    (Non non, pas rabbin : Blabla + vide = qqfois Malback)
    Pis sans vouloir vexer (ben non, quand même), faudrait retourner faire un petit tour au collège (Goodback to school) pour soigner ses infinitifs/participes passés. Là, ça la fiche mal.
    Sinon, Uri Zohar est tout de même un peu plus connu que ce que l’intro laisse entendre, et on peut trouver de quoi se mettre sous la dent si on lit l’anglais.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages