Pete et Mary (mariés, deux enfants) vont vivre une semaine décisive. Ils fêtent tous les deux leurs quarante printemps et Pete (propriétaire d’un label de musique indépendant) sort le nouveau disque de Graham Parker avec lequel il espère se refaire une santé. Crise du couple et crise financière sous fond de crise du disque.

L’histoire est simple vous me direz ? Oui, mais Judd Apatow est un homme intelligent. Il multiplie donc les personnages secondaires, les scènes sans trop de rapports avec l’histoire pour mieux étirer son film et cacher le déroulement sans encombre du scénario. On n’est pas dans le systématisme d’un conflit entrainant une résolution. On est dans le conflit permanent car les solutions sont toutes aussi connes les unes que les autres. Le film dure 2H04 et quand on lui dit que ses films sont trop longs, Apatow nous sort une belle citation d’Harold Ramis : « C’est une manière de dire que les personnages en valent la peine.» Sauf qu’ici, les personnages principaux s’effacent face à la profusion de personnages secondaires sans grands intérêts, sinon celle de fournir une bonne blague. Le meilleur exemple reste la présence de Megan Fox. Il n’y a presque pas d’enjeux scénaristiques autour d’elle. Elle aurait pu joueur les briseuses de couple ; elle est juste là pour montrer ses nibards. Elle joue Megan Fox : la bombasse de service. Mais peut-être que les attentes sont désormais trop fortes autour des films de mister Apatow ?

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Au commencement il y a eu sa première réalisation : 40 ans toujours puceau.

A voir le titre et le pitch je m’attendais à une comédie américaine bien grasse de plus; ce fut tout le contraire. Depuis, son style est devenu familier. Et Apatow est devenu un label qualité en terme de comédie. Pour This is 40, la logique aurait voulu qu’il poursuive cette lignée, cette marque de fabrique. Mais non, c’est son film le plus drôle mais pas forcement le plus abouti.
Sa force est surement de mettre à jour la vie quotidienne d’un couple comme on ne l’avait jamais vu. Il propose une vision non angélique du couple : perte de mystère, demi-molle, envie de meurtre de son conjoint. Évidemment tout cela est dit sur le ton de la blague en mode trash talk. On est plus proche de la coloscopie que de la radiographie précise. Les scènes sont très courtes, très drôles mais on perd l’émotion et donc l’attachement à l’histoire et aux personnages. L’humour tue tout. Etonnant car venant de quelqu’un dont la doctrine qu’il dispense partout est de ne jamais se cacher derrière une blague, de ne pas avoir peur de l’émotion. Il nous fait tout le contraire ici. Funny people, son chef d’œuvre, réussissait le dosage parfait entre profondeur et blagues de cul.

Le grand problème du King de la comédie US, c’est que ce n’est pas un grand formaliste.

Judd Apatow l’avoue lui même, la mise en image lui est totalement indifférente. Non pas qu’on aille voir un de ses films pour un esthétisme renversant. Mais Funny people sortait du lot pour ça aussi. Il avait pris Janusz Kaminski, le chef op’ de Spielberg, et toute la plastique du film en découlait. Ici, on tourne à plusieurs caméras et on a toujours les mêmes valeurs de plans soit donc du champs/contre-champs plutôt resserré. Bilan des courses : un résultat morne et plat.

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Apatow n’a jamais caché son admiration pour John Cassavetes, à tel point qu’il a pris Phedon Papamichael à la photo, soit l’ancien directeur artistique de Sir John. En tirant bien par les cheveux, on pourrait voir This is 40 comme un mix entre Husbands (l’homme voulant fuir son couple et ses responsabilités) et Une femme sous influence (Leslie Mantoujours entre deux crises de gueulante inexpliquées avec son mari ou ses gosses). Mais en disant cela, je ne vous dis rien. Il n’y a pas plus éloigné qu’un Apatow et un Cassavetes. Aucune logique, ni morale chez John. Chez Apatow, elle est empreinte d’un certain conservatisme. On ne divorce jamais dans ses films. Et ne lui parlait surtout pas d’avortement. Encore le premier est défendable tant il est à la mode, le second est limite. Dés que l’ovule a rencontré le spermatozoïde vainqueur, il n’y a jamais de retour en arrière possible, aucune échappatoire. D’ou une vision assez carcérale du couple.

Alors vous me direz : est-ce que je ne deviendrais pas un peine à jouir ?

Pourquoi ne pas me contenter de rire à devant cette bonne comédie ? Tout simplement parce qu’on attend toujours plus d’une comédie d’Apatow, plus que du rire. Et si finalement il n’était l’homme que d’un chef d’œuvre, Funny People ? Ou peut être, est-il plus fort quand il est en retrait, en tant que producteur ? Il n’y a qu’à voir comment il supervise et pousse Lena Dunham pour sa série Girls, journal intime d’une vingtenaire paumé. Girls, c’est ce qu’on attend du label Apatow : drôle, profond et sincère. Il manque les deux derniers adjectifs à This is 40 pour être brevetél. En attendant, on se régale avec la saison 2 de Girls qui vient de commencer et qui jusque là, est un sans faute. This is 20.

Jude Apatow // 40 ans : mode d’emploi // Sortie dans les salles françaises le 13 mars

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