Diplomé de la promotion CELSA

Diplomé de la promotion CELSA 1987, Jack Facial est tour à tour artiste incompris, journaliste incongru, menteur occasionnel ou barde lucide. La vision par le petit trou, où lorsque l’ordure côtoie les plus grands, cela donne un papier dans ta face. La force du premier jet, Jack Facial en action, un article fictif mais pas sans friction.

Les journalistes sont des cabots. Donnez leur une pitance infecte et ils n’y toucheront pas. Mais recouvrez-la d’une couche de gras si puant de phéromones concoctées en laboratoire, et vous les verrez se jeter dessus, poussés au ventre par un désir plus brûlant que n’importe quelle saillie. The Pierces, du canigou ? J’affirme que oui.

J’avais conscience en recevant Thirteen Tales Of Love And Revenge qu’on m’adressait une farine animale. L’essence du désir de milliers d’hommes mise en musique. Ce disque est une abomination : étudié pour être dansant et relativement efficace en ce sens grâce aux miracles d’un bon arrangeur, on serait tenté de parler de pop, dans le sens où ce mot est utilisé pour Britney Spears ou Madonna ; des femme qui prennent encore la pilule pour se faire défoncer la boite à rythme. Comme ça nous serons un peu plus proche de l’esprit d’un supermarché.

Supermarché, supercherie. Tout d’abord les interprètes : deux sœurettes fraîches et candides en apparence qui jouent la carte de la sobriété dans des petites robes qu’Ursula Andress n’aurait pas renié. La bio nous promet un conte de fées si gnangnan qu’on ne peut que s’en énerver. Elles juraient leurs grands dieux que leurs chansons sont autobiographiques et bourrées de second degré, mais lorsque je scrollai à travers l’EPK qu’on m’avait envoyé, tout le marketing s’était évertué à montrer ce qui devait asseoir leur succès : des minois de girl next door, et un physique de student homemade porn. 
Avant même de prendre le temps de lire les paroles, je les haïssais déja. Evocations de crêpage de chignon et de secrets à garder jusqu’à la mort, l’importance de se coucher sans se démaquiller, sortir avec une rock-star, être blasée par tout, de la mode et du ménage à trois. Je savais que cela aurait un jour une influence plus forte sur nos sociétés que la simple réalisation de navets comme The Devil Wears Prada ou Bridget Jones Diary. Je l’avais dit, mais personne ne m’écouta.

Pourtant une chose est simple à entendre : les hommes viennent de Mars ; les filles viennent nous faire chier.

A la troisième écoute de Make Love With Your Lights On j’ai compris qu’en plus ces filles devaient gober leurs propres couleuvres. Ce n’était plus Desperate Housewives mais Annie Aime Les Sucettes. Et se faire sauter par Albert Hammond Jr n’était pas autre chose qu’un acte de gratitude pour le remercier de les avoir prises (en première partie je précise). Je crois que c’est exactement pour ça que je voulais les rencontrer. Les ramener à la réalité. Leur coller une trempe.

Après les recommandations d’usage de leur attaché de presse qui m’accueillait au siège de leur distributeur dans le 9e, on me fit entrer dans une pièce coupée en deux et immédiatement j’entendis glousser. Les deux frangines étaient assises sur un canapé, jambes croisées et mains fermées autour d’un genou, riant comme deux gamines dans une pyjama party. Peinture néo-classique, deux ondines lézardant sur quelque rocher. Sirènes mythiques. Pendant que je vérifiai la batterie de mon dictaphone numérique -pressant force boutons auxquels je ne comprenais rien et maudissant de ne pas m’être fait accompagné par le jeune qui réalisait mon émission au studio- le journaliste, de dos devant moi, terminait son entretien avec les deux naufrageuses.

Sa question me laissa pantois : « Vous qui savez utiliser vos charmes à des fins bienveillantes, vous n’aimeriez pas faire de la politique »?

Bouche bée, je me redressai et les fixai, suspendu à leur réponse. Les journalistes sont généralement de parfaits imbéciles, autoproclamés, vantant une culture exhaustive en apparence mais bien souvent déficiente et inégale, à fortiori dans les webzines qui pullulent, ceux là même qui, voués à répandre la bonne parole des labels, font tout le tort de la toile et sa réputation d’amateurisme.
Ici on était face à un cas plus qu’emblématique, peut être même son incarnation la plus essentielle.
 Moi je voulais leur demander si Albert Jr était un bon coup, si elles étaient si proches comme sœurs qu’elles partageaient leurs histoires de cul, et si comme le rêvait tous les garçons qui se jettent dans une carrière rock’n’roll, elles accumulaient les plans d’un soir dans leur tourbus à se faire croquer le bonbon backstage. Les deux produits de l’Alabama ont finalement répondu un truc banal, vaguement apolitique malgré la fierté patriotique républicaine qui leur a été inculqué.  A mon tour maintenant.
 J’ai fait le plus beau sourire que pouvait offrir toutes ces séances de détartrage que m’offraient mes piges grattées et puis j’ai finalement lancé le dictaphone. Allison se grattait le genou, ce qui faisait des plis sur son fuseau. L’autre avait un air de bon chien. J’ai posé ma première question:

« Avez vous choisi ce pseudonyme en hommage à William Luther Pierce, le physicien de l’Alliance National ? »

Vague silence désarçonné. Un point pour moi.

Catherine : « Ce n’est pas un pseudonyme nous sommes vraiment soeurs, c’est… notre nom. »

Ne pas baisser la garde : « Il fut célèbre vous savez, il a fondé la religion Cosmothéiste avant de s’associer au parti nazi. »

Pas de réponse. J’ai l’avantage dès mon premier service, ce qui est plutôt pas mal.

« Allison j’ai entendu dire que vous aviez vécu avec des bohémiens. Les nomades pratiquent fréquemment le viol collectif ; en avez vous été victime ? »

Je crois qu’elle a bredouillé un truc mais la bouche et les yeux grands ouverts on aurait dit un poisson crevant hors de l’eau. L’autre a dit que c’était un préjugé désagréable et inconvenant mais en vrai je m’en foutais. Un dernier ace et le set était mien.

« Allez, avouez que vous n’êtes pas du genre à refuser un homme, quel qu’il soit, et encore moins plusieurs… »

Sans attendre leur réponse je me suis levé. Devant le regard ahuri de l’agent devant la porte, j’ai pris un air répugné et suis re-rentré ramasser mon dictaphone qui tournait encore. 
J’ai bien claqué la porte derrière moi et j’ai marché précipitamment en feignant la colère. L’agent m’a demandé ce qui se passait tandis que je filais vers la sortie en pestant.  Avant de franchir le pas de la porte, j’ai daigné lui lâcher : « Ces filles sont folles à lier. Provocatrices et… et libidineuses. Des séductrices, qui jouent à vous séduire au lieu de répondre au questions, et qui… qui organisent des orgies ou je ne sais quoi au lieu de… de faire leur boulot. »

De toute façon, je n’ai jamais pu sentir les gouines. Encore moins dans le travail que dans mon pieu.

http://www.myspace.com/thepierces

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