27 octobre. Alerté par Lazlo Hamlin, un des co-dialoguistes de The Lost Door, je reçois par mail des nouvelles de Roy Stuart. Il a appris que la diffusion de son film sur Ciné Cinéma m’intéresse. Il me demande de l’appeler, ce que je fais. Au téléphone, ce n’est pas Roy le réalisateur ni Roy le photographe qui décroche, mais Roy l’attaché de presse, celui de son propre premier long métrage – The Lost Door donc. Le Roy qui rame pour que quelques médias en parlent. Il voudrait savoir si je ne pourrais pas profiter de ces cinq soirs où le film sera diffusé sur Ciné Cinéma pour en parler enfin dans les journaux où je bosse. Voire si je ne pourrais pas en parler aux Inrocks. Là-dessus tombe l’argument massue : « Dis-leur que Houellebecq aime mon film ».
L’argument avait déjà surgi à la fin de l’échange que lui et moi avions eu il y a près de 2 ans. « Mais dis-moi, qu’est-ce qu’il faut pour qu’un magazine fasse un sujet sur moi ? Un nouveau Rock&Folk ? » Il me demandait si Technikart serait intéressé par un article sur The Lost Door. J’avais répondu « peut-être », mais que ce n’était « pas gagné ». Pour ça il fallait que son film soit un vrai rendez-vous culturel, et qu’il bénéficie donc d’une vraie sortie en salle. Ce n’était pas le cas. Jusqu’à présent il n’avait été projeté qu’une poignée de fois début décembre 2008 au riquiqui Studio Galande et l’était encore pour quelques soirs de plus en ce début de mars 2009. Hormis ça et quelques fumeux espoirs qu’il soit aussi diffusé dans la salle de Jean-Pierre Mocky, Roy comptait plutôt sur la sortie DVD et les éventuelles ventes en TV.
Mais comment lui en vouloir de revenir me seriner avec son film et son argument de crevard ? Roy est en effet « très bon pour filmer les femmes, leurs danses… » comme l’a dit l’auteur de La possibilité d’une île dans le Technikart de septembre 2008, et The Lost Door vaut vraiment le détour. Tellement que je suis allé le revoir, alors qu’il ne m’arrive jamais de voir un film deux fois, exception faite de Retour vers le futur, Romeo + Juliet et Mullholand Drive. Je ne serais jamais allé le voir si une attachée de presse ne m’y avait convié. Ce n’est pas mon genre de sortir de chez moi et de rejoindre des inconnus pour voir ce qu’on décrit comme un film « érotique ». Et puis à l’époque, à part ce mail qui me disait qu’il avait joué dans Le Parrain 2, tourné un moyen métrage produit par Tinto Brass et signé 5 best sellers de photographies érotiques chez Taschen, je ne savais rien de ce juvénile quinquagénaire new yorkais.
Dans les années 70, à New York, Roy était musicien. En tant que tel il avait fricoté avec la clique junkie beat de la ville, Allen Ginsberg compris. Avec le poète cubain Nelson Villamor, il y avait fondé un groupe du nom de Pigeons of the Universe. Faut être au moins défoncé pour appeler son groupe comme ça. C’est là qu’il commencera à penser cinéma en se mettant à tourner dans des films, dont pas mal de pornos. Dans les années 80, il s’installe à Londres, officiellement pour fuir l’american way of life, officieusement parce qu’une affaire de trafic d’héroïne l’y aurait contraint. Il y devient photographe érotique en shootant sa compagne, et de temps à autre photographe de mode. Puis c’est les années 90, Paris, la rencontre avec Taschen…
Tout ça donne une petite idée de ce que peut être The Lost Door, un film musical, anarchique, déroutant, cheap par moments, cheap tout du long, intrinsèquement cheap, iconoclaste et beau surtout, sensuel, troublant, magnétique. Tellement que je n’ai pas oublié son trio d’actrices me rappelant qu’« il n’y a de vraiment bon que les femmes qu’on n’a pas eues » dixit Huysmans, tellement que j’en ai parlé en vain aux Inrocks, à Technikart, à Chronicart, à Vice, à Transfuge, à GQ. Merci à Gonzaï d’accueillir enfin cette interview. The Lost Door passe encore sur Ciné Cinéma les 22 (22h10), 24 (00h40), 26 (2h30) et 28 (00h20) novembre.
Bonjour Roy. A la base vous êtes connu comme photographe érotique chez Taschen. The Lost Door est votre premier long métrage. Comment vivez-vous ces premières séances ?
J’aimerais le voir dans une salle où le son serait meilleur (« Je vais commencer par la soupe de lentilles ») parce qu’un film c’est moitié audio moitié vidéo.
En gros, l’histoire est celle d’un couple bancal, Alex et Nicole. Elle est bombasse, lui est neuneu. Elle a des envies d’ailleurs inavouées, lui de la retenir alors qu’il ne la rend pas heureuse, et elle lui échappe concrètement le jour où elle s’inscrit à une étrange école de danse. Kristina, la prof, se met à la convoiter ardemment, de même que Marc, un ami à elle. Je m’arrêterai là pour ne pas « spolier » l’histoire mais on peut préciser qu’elle est racontée en flashback par le personnage de Kristina qui, présentement, fait face à une jeune psy du nom de Catherine. Comment ce scénario est-il né ?
Au début c’était simplement l’histoire des problèmes de couple d’Alex et Nicole. Une histoire assez classique où lui vit un enfer parce qu’il est avec une femme trop jolie pour lui. Mais on a trouvé que ce n’était pas assez intéressant. Que ça ne décollait pas. On a donc changé le scénario et l’histoire de ce couple est devenue secondaire.
Mais l’idée de départ était de faire un film sur les problèmes d’un couple ?
Oui (« Quelqu’un veut de la soupe piquante ? C’est très piquant ça ! J’avais demandé que ce ne soit pas piquant ! »). Parce qu’on a beau avoir déjà vu ça 10 000 fois, on ressort toujours de ces films en n’ayant rien appris. A part peut-être dans les films de Woody Allen mais c’est souvent ridicule, les personnages tournent en rond, se mentent et ne trouvent jamais satisfaction ; ça reste un divertissement, c’est drôle.
Vous ne vouliez pas que votre film soit drôle ?
Ce ne serait pas mieux si on continuait de parler de ça après manger ?
Essayons de faire les deux à la fois, non ?
Ok, c’est absurde mais ok.
Vous vouliez donc faire un film où on apprenne quelque chose sur le thème du couple ?
Oui et au final ce n’est donc pas vraiment un film sur le couple mais un film sur l’amour. Un film qui tente d’explorer et de comprendre ce qu’on appelle l’amour romantique. Un film qui pose les grands problèmes de l’humanité. Comment vivre en couple ? Comment vivre sans être en couple ? Comment rester dans l’amour romantique ?
C’est pour ça que vous dites, comme je l’ai lu quelque part, que The Lost Door est un film sur l’érotisme plutôt qu’un film érotique ?
Oui, c’est une exploration et une réflexion sur ce qu’est l’érotisme, l’amour, le désir, le sexe et comment on passe ou non de l’un à l’autre. Au plus bas de l’échelle on satisfait seulement des besoins physiques et plus l’érotisme s’affine plus tu as de chances d’accéder à une autre dimension où l’érotisme se confond avec l’amour romantique. Ca devient l’amour. Enfin ce qu’on appelle l’amour. Après c’est un problème de mot. C’est pourquoi c’est difficile d’en parler et c’est pour ça qu’il faudrait trouver d’autres manières de communiquer sur le sujet. Peut-être faudrait-il alors user de la poésie, du cinéma ou de la musique.
Il y a d’ailleurs tout ça dans votre film, de la musique, des poèmes – on y lit Apollinaire, on y cite du Shakespeare – et du théâtre dans des scènes de dialogue en huis-clos où les mots claquent comme sur des planches. Et virent parfois au monologue philosophique. Tout ça ne ferait-il pas de The Lost Door une sorte de « poème filmique » ? Un film qui, au-delà de sa narration, cherche à initier le spectateur en l’emmenant dans un univers quelque peu déconstruit, psychédélique. Je me rappelle qu’Eric Briones du site Darkplanneur l’avait qualifié de « drug trip »…
Oui, il y a de ça mais c’est aussi narratif (« On pourrait avoir du pain ? »). Les dialogues sont importants. Il faut une dynamique de dialogues. Qu’on entende bien ce qui se dit. C’est dur de créer ça au cinéma. C’est plus facile au théâtre car les acteurs sont devant toi, vivants, il y a cette dynamique-là, qui suscite l’attention, l’écoute, mais au cinéma il faut s’y prendre d’une autre manière, il faut réussir à émouvoir et enseigner quelque chose dans le même temps. En fait mon film c’est un peu du Carlos Castaneda.
Caroles Castaneda ?
Oui, un anthropologue américain. C’est un peu du Castaneda au sens où tu n’es pas en train de regarder un prof en train de donner un cours mais où, au fond, le film que tu regardes t’adresse quand même des messages. Tu regardes et tu apprends. Et le film tient des arguments un peu polémiques. Une partie du film dit : « L’amour c’est une drogue ridicule et dangereuse ». Ca c’est le côté droit du cerveau nous dit Castaneda, celle qui nous sert à survivre, à manger. Et une autre dit l’inverse. C’est le côté gauche, celui de l’irrationnel, celui qui sert à ressentir. Cette partie-là est beaucoup plus subtile.
En effet, parce qu’en sortant du film, question dialogues j’avais surtout en tête la scène où Marc serine va vision pessimiste de l’amour à Nicole. Au final le film donne l’impression de dominer sa vision des choses et personne ne vient vraiment le contredire…
Non (« Je pourrais avoir un thé vert sans sucre ? »), je vois plutôt Marc comme quelqu’un qui provoque par plaisir de faire polémique. Il fait son Platon, il prêche sa vision de l’amour mais en même temps il s’en fout un peu. Mais ça discute et l’intérêt c’est ce qu’on apprend de ces deux positions opposées (« Ce plat, c’est servi avec des pommes frites ? »)
Cette scène entre Marc et Nicole ne serait-elle donc pas la scène-clé du film ?
Oui, avant on pensait en faire la scène principale du film. Son fil directeur. Mais comme on n’a pas réussi à en tirer assez de matière dramaturgique on l’a finalement remplacée par les scènes d’interrogatoire entre Catherine et Kristina. Cette scène a donc été coupée pour n’en garder que l’essentiel, mais moi je me serais bien vu faire un film sur cette seule discussion. Un peu comme dans Mon dîner avec André.
Mon dîner avec André ?
C’est un film de Louis Malle qui date de 1982. Ce sont deux personnes qui discutent pendant 1h30 et c’est incroyable.
Dans le film, une scène m’a fait penser à la scène-clé sur laquelle se construit Eyes Wide Shut, la fameuse scène où le personnage jouée par Tom Cruise apprend de la bouche de sa femme jouée par Nicole Kidman qu’elle a déjà fantasmée sur un autre que lui…
Oui, c’est la scène où Alex et Nicole sont au lit avec un autre homme qui symbolise son rêve à elle – tromper son mari – et son cauchemar à lui – être trompé par sa femme. Mais ce qui est marrant quand il voit l’amant de sa femme dans leur lit, c’est que ça l’étonne mais qu’à la fois ça ne l’étonne pas plus que ça ; il regarde, interloqué, mais il accepte, il est impuissant face à ça.
Ca donne une scène grand-guignolesque géniale à milles lieues de la scène que Kubrick a tournée avec Tom Cruise où, dans le gros plan silencieux sur son visage sans émotion, on ressent que quelque chose vient de s’effondre en lui…
Oui, et j’aime bien cette scène. Elle est très importante. C’est aussi un peu le sujet d’un film comme L’enfer, où un mec parano suit sa femme partout de peur qu’elle le trompe.
C’est aussi un film sur la jalousie ?
Oui, totalement (« Qui a fait L’enfer ? », demande-t-il à son attachée de presse – « Chabrol ». « Et c’était qui l’acteur ? » – « François Cluzet ». « Et elle ? » – « Emmanuelle Béart ») Toi, tu ne manges pas ?
Si, si. Vous, comment avez-vous casté les acteurs et actrices de The Lost Door ?
Certains comme Kristina et Nicole étaient déjà mes modèles en tant que photographe. D’autres comme Marc et Alex sont des acteurs professionnels.
Aviez-vous une idée précise des physiques que vous vouliez pour tel ou tel rôle ?
Oui, pour Nicole il fallait évidemment quelqu’un de superbe, de plus grand que la vie.
La « femme parfaite » comme il est dit dans le film ?
Oui, physiquement. Qui déborde les sens. Trop puissante pour son mec. Tellement que c’en est presque caricatural. En comparaison il était important que Catherine, la psy, soit d’une beauté moins évidente, moins charnelle, moins tapageuse.
Sa beauté est plus androgyne, plus neutre. C’est le personnage initiatique du film, celui qui symbolise le spectateur… J’ai appris qu’elle avait déjà joué sous votre direction…
Oui, quand elle était plus jeune elle a joué dans Giulia, mon premier moyen-métrage produit par Tinto Brass. C’est mon actrice préférée de The Lost Door. Je voulais faire plus de choses avec elle mais ce n’était pas possible. Pour moi, c’est elle qui joue le mieux. C’est d’elle dont viennent les surprises. Mais à la fin Kristina a aussi sorti de bonnes choses : « C’est le sorcier qui mène la danse », ce genre de phrase, c’est important.
D’où cette citation de William Blake placée en exergue du film : « Si le fou persévérait dans la folie il rencontrerait la sagesse » ?
Oui, parce que Kristina devient de plus en plus folle. A un moment elle dit à la psy : « Sais-tu au moins dans quelle dimension on se trouvait cette nuit-là ? Tu t’apprêtes à nous juger mais tu ne sais même pas dans quel monde on était. On était ailleurs. » C’est une question légale. Quand quelqu’un te lance un couteau et que toi tu as un pistolet et que tu le tues, es-tu coupable ?
Avec ses traits fins et anguleux, ses longs cheveux noirs, ses yeux très clairs et sa longue silhouette androgyne, Kristina dégage un sex-appeal de conte Dracula lesbien…
Il fallait qu’elle apparaisse comme quelqu’un de fier, de magnifique et de supérieur à tout le monde pour qu’on comprenne entre autre son indignation à se retrouver en prison. L’actrice qui l’interprète a ça, parce qu’elle est très grande, très belle et que ce n’est plus une jeunette.
Au départ, comme l’actrice qui interprète Nicole, vous la connaissiez en tant que modèle : vos actrices et vos modèles sont-elles des muses pour vous ?
Des fois oui.
Des fois plus ?
C’est un risque et, de par son âge et sa beauté étrange, c’en était surtout un avec Kristina. Mais je n’aime pas travailler qu’avec des jolies jeunes femmes comme Nicole, j’aime prendre des risques, j’aime le mélange. Dans le film il y a aussi Rémi Martin. C’était bien de voir Rémi Martin. Tu connais Rémi Martin ?
Non.
C’est celui qui joue le rôle du juge. C’est un acteur français. Dans les années 90 il était beau, il était jeune, c’était le plus prometteur de sa génération. J’ai bien aimé travailler avec lui.
Comment met-on tous ces acteurs dans l’ambiance d’un tel film ?
C’étaient beaucoup de répétitions. Après c’est une question de montage. J’ai passé beaucoup de temps sur le montage. The Lost Door c’est un peu comme du Godard : un film de montage.
C’est aussi un peu comme du Lynch, non ? J’imagine qu’on vous a parlé de lui, que vous n’avez pas dû y couper parce que votre film, comme les siens, entremêlent sexe, onirisme, noirceur et qu’à l’instar de son dernier, Inland Empire, il est lui aussi composé d’images HDV. Avez-vous choisi ce genre d’images pour leur charge érotique ?
Oui, parce qu’elles ont ce côté « vrai ». D’ailleurs dans le film cette illusion est renforcée par le fait qu’on y voie des filles se filmer elles-mêmes. Par contamination, ça laisse un peu croire que toutes les autres images du film sont de même nature, documentaire. Et oui j’aime Lynch et j’ai aimé Inland Empire. C’est un film qui demande beaucoup d’attention, comme The Lost Door. C’est un grand luxe de pouvoir faire un tel film sur 3h00. Le mien dure 1h45 mais à la base il faisait plus de 3h. Le DVD est intéressant parce que tu y retrouves cette version-là, en plus des bonus, du making-off, des gaffes, des scènes coupées…
Tel que présenté en salle, le film est-il très différent de sa version de 3h00 ?
Il y a plus de sexe dans la version longue. Parce qu’à la base j’ai travaillé avec un producteur qui voulait beaucoup de sexe et comme j’étais d’accord, The Lost Door a démarré comme un film érotique. Mais après j’ai entrevu mieux, je voyais quelque chose avec moins de sexe et comme ça ne l’intéressait plus, je lui ai rendu son fric et j’ai fait mon film. Après j’ai dû de nouveau couper des scènes pour que le film ne soit pas interdit aux moins de 18 ans.
Vous avez eu du mal à couper ?
Oui parce qu’encore une fois, comme la musique, ce film est un tout abstrait où chaque chose était à sa place pour générer une certaine impression d’ensemble où le spectateur pouvait apprendre quelque chose.
Vous n’arrêtez pas de dire qu’il y a quelque chose à apprendre dans votre The Lost Door. Avez-vous le sentiment que ses premiers spectateurs aient saisi là où vous vouliez en venir ?
Oui, mais encore une fois, ce film c’est comme une musique et un poème, tu reçois un ressenti global plus qu’un message précis, analysable. Je ne peux donc pas savoir ce que ces gens ont vraiment compris. Et ça renvoie à cette mission de l’art qui me plaît bien : rappeler aux gens des choses qu’ils savent sans savoir qu’ils savent. Mais d’une manière artistique, en restant dans l’émotion. Sans émotion on n’y arrive pas. Et là dans le film je crois qu’une grande partie de l’émotion vient de la musique.
Elle est de vous ?
Oui, moi avec une violoncelliste.
Vous parlez beaucoup de musique. Avez-vous un rapport privilégié avec elle ?
J’en ai beaucoup fait avant. Quand je vivais à New York j’étais musicien.
Guitariste ?
Non, je jouais du clavier. Comme j’aime beaucoup mélanger poésie et musique, ça me permet de facilement accompagner des lectures de poèmes, ce que je fais dans le film.
Quelles furent vos expériences musicales à New York ?
J’étais dans des groupes pas connus. Mais je suis parti. Il fallait que je quitte New York.
Pourquoi ?
Trop d’agitation, de consumérisme… Il me fallait autre chose. Et puis ce n’est pas très joli New York. Vu d’avion c’est superbe, mais dans la rue ce n’est pas joli, même si c’est plus propre aujourd’hui, tout est trop droit.
Quel genre de musique aimez-vous ?
J’aime bien le rock, des groupes comme Oasis, The White Stripes, The Dandy Warhols mais d’autres choses aussi, comme Philipp Glass.
Et niveau films alors, les réalisateurs que vous aimez ?
Alexandre d’Oliver Stone, Miami Vice de Michael Mann, No Country For Old Men des frères Coen, The Assassination of Jesse James d’Andrew Dominik, tout ce qu’ont fait Ridley Scott et David Lynch… Et Lady Vengeance de Chan-Wook Park. J’ai vu ça au moment où je faisais The Lost Door, ça a été très important.
J’ai appris que vous n’étiez pas fan des films de Catherine Breillat. Pourquoi ?
Tout. C’est prétentieux. C’est contre le sexe, très catholique, très chrétien.
Vous, votre film est un peu ésotérique mais pas religieux.
Il est contre les religions. Sinon, en livres, j’aime beaucoup Houellebecq. J’ai beaucoup aimé son avant-dernier livre.
Qu’est-ce qui vous a plu dans La possibilité d’une île ?
Tout. Il est très drôle. Et il dit que l’amour va nous sauver. Il dit ça au début du livre. Il croit toujours en l’amour.
Derrière sa façade de grand désabusé se cache un romantique, c’est ça qui vous plaît ?
Il dit juste à sa manière qu’il faut être totalement désespéré pour pouvoir tomber amoureux, ce que dit Marc dans le film. L’amour romantique provient d’un malheur, d’un mal-être, et c’est cette tentative de résoudre ce mal-être, ce manque, qui nous pousse à croire en l’autre.
Ce qui est vrai !
Oui, et finalement l’amour c’est comme le cinéma, c’est une illusion, tu sais que c’en est une, alors parfois elle est bonne et tu peux vivre avec, tu oublies que ce n’est pas vrai… En anglais on parle de « willing suspension of disbelief » (« Karine, comment on dit ça en français ? ») Voilà, la suspension volontaire d’incrédulité. C’est ce qu’on fait au cinéma.
De tous les personnages de The Lost Door, lequel vous ressemble le plus ?
Je me suis mis un peu partout, si ce n’est dans Nicole ! Parfois je suis Marc.
Sans être aussi provocateur ?
Oui, parce que lui provoque. Il dit par exemple que s’unir à une femme c’est s’unir à un être inférieur, peu fiable et peu courageux.
C’est le discours d’un artiste mégalo qui se nourrit de l’illusion de s’auto-satisfaire ?
Oui, il y a de ça, et en tant qu’artiste je m’y reconnais un peu, mais il faut être vraiment un être supérieur pour ne pas être touché par l’amour. En même temps, si on y parvient on ne devient plus jaloux, et on peut mieux aimer que les gens qui tremblent tout le temps pour un rien.
Il faut un juste milieu.
Il faut arriver à ce point-là.
Site du film : http://www.thelostdoor.com/
Site de Roy Stuart : http://www.roystuart.net/