Y'avait quelque chose qui foirait. On avait dépassé la zone de frêt, ses hangars miteux et ses engins couverts de poussière de ciment. Sous les arcades du pont devant nous, le soleil

Y’avait quelque chose qui foirait. On avait dépassé la zone de frêt, ses hangars miteux et ses engins couverts de poussière de ciment. Sous les arcades du pont devant nous, le soleil pénétrait la seine comme une boule de geisha. On s’était rapidement retrouvé au milieu d’une bande de types qui semblaient tous du genre à pas sucer que des glaçons. Une demie heure qu’on avait passé le Bateau Phare et la Dame de Canton. Péniches pleines de vie, de couleurs aux allures mystérieuses.

On avait quand même fini par la trouver cette putain de péniche. Oublié les efforts et engueulades pour trouver le chemin. Trônant comme une déesse dans les ténèbres, Esie, dominait la salle. Un portable pour tout orchestre, elle allait se livrer à une prestation déchirante de rage et d’émotion. Ceux qui s’arrêtèrent sur son envoutante beauté et sa tenue minimaliste en furent pour leurs frais. La dame avait des choses à dire, et elle les dit sans fard. En rupture totale avec l’image de la femme Japonaise soumise et effacée, l’ancien modèle allait s’engager dans une lutte avec ses démons et ceux de toute une société aux moeurs bien trop polies. Pas de temps morts. La musique éléctro hardcore balance  déja des vibrations qui mêlées à la voix déchirée d’Esie prennent l’auditoire comme un shibari. Au bord de la rupture. Un regard autour d’elle, un demi sourire avant de repartir de plus belle. Elle a quelque chose de Nina Hagen touillé avec Kelis ( I hate u so much) dans la voix. Les morceaux se succèdent sans que jamais l’intensité ne baisse. Au contraire  elle  se libère peu a peu, se laisse posséder par les morceaux qu’elle interpréte comme des exutoires.

Même des titres comme le très intimiste et Bjorkien I will not sing in the rain deviennent oppressants. La Belle devient bête, se contorsionne, se livre encore un peu plus sur Under my skin et les influences indus’ se retrouvent dans la voix comme dans les rythmes. Elle réussit a faire oublier ce qui entoure la scène, elle fait oublier sa beauté, elle n’est plus qu’un instrument vibrant de tout son être. Comme possédée, elle se pousse enfin vers une prestation à la violence paroxysmique. Le dernier morceau s’arrête. Elle  sourit comme si elle venait de se réveiller. Douce  et terriblement sensuelle. 20 ans et tellement femme. Un dernier « -merci Paris » et rideau.

Quelqu’un a eut la bonne idée d’apporter des litres de saké. J’en avais bien besoin. Il est tiède âpre mais savoureux. Et surtout , il fait effet très vite.

Un type avec un masque de zombie hindou et des lunettes de soleil traverse la salle et d’un bond s’installe sur scène. Il saute en l’air comme un tennisman, droit dans son costume sorti des eighties et sa chemise fuschia du plus bel effet. Le beat  répétitif est bon, d’après ce que j’ai pu comprendre la chanson s’appelle Sucez-vous. un grand morceau de poésie, la provoc presque marrante, et malgré l’énergie déployée, le truc manque de piquant. Depuis le Cabaret Voltaire, et probablement depuis les bouffons de Calligula, on en avait pleinement fait le tour.

Peu à peu petit, le son kraftwerkien modernisé – comme seul un membre de la french touch peux le faire –  commence à faire son effet. Effet paradoxal s’il en est quand on sait que la DJ nippone TOMOMIX est aux commandes pour mixer. Intéressant de voir cette adorable fille en kimono jaune bombarder la salle d’un beat dont l’entrainante agressivité est tout sauf kawai. À mi-chemin entre le monde parallèle et le soixante-sixième degré, Xerax impose son style déroutant, voir même parfois énervant, mais qui n’en demeure pas moins efficace. Les têtes commencent a osciller, les pieds à battre le parquet de la péniche boer 2. Ce fantomas electro passe à la vitesse supérieure, essayant d’entrainer un public  qui le regarde comme il regarderait Ravi Shankar ou un pigeon rose. Paris boboland, ville sclérosée par la convention, ou la bonne table est celle au milieu du resto, celle ou tout le monde peut vous voir les samedis soir; e contenu de l’assiette devenant aussi superficiel que les conversations prés de la machine à café. Qu’importe le duo poursuivra son combat. Et somme toute avec panache.

On aurait pas du boire autant de saké. On a encore du se gourer de trajet et on vient de passer la zone de frêt. Au loin des silhouettes revêtues de cuir et aux moustaches luisantes sous la lune nous regardent bizarrement.

Photos: Muntz Termunch

www.myspace.com/esiemusic

www.myspace.com/xerak1

www.myspace.com/tomomix_kawaiibbqcrew

 

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