Mystère… A côté de la station Louvre Rivoli, depuis 1945, une enseigne en néon vert, le cabinet Duluc. « Duluc, Détective Privé ». A en croire les commentaires « googliens », et le bouche-à-oreille, Duluc, une référence en la matière.
Pas d’imper beige, pas de cigare, pas de moustache. Mais la goutte au nez. Martine Baret, 61 ans, responsable de la maison a pris froid. La pauvre. Après nous avoir accueillis, Martine nous fait patienter dans la salle d’attente avec le portrait de son glorieux aïeul à moustache. Celui qui créa en 1913 cette affaire où l’on déterre adultères, comptes frauduleux et autres vicissitudes sociétales.
Pendant ce temps, dans son bureau, la dame de fer doit sans doute ranger des documents compromettants afin de ne pas éveiller les suspicions journalistiques. Chez Duluc, la parano est de mise. D’où l’intérêt de fendre l’opacité autour de cette profession…
Quels sont les champs de compétences et les méthodes utilisées par le cabinet Duluc ?
Nos clients viennent nous voir pour différentes raisons, la surveillance, l’enquête, la recherche de personnes ou de débiteurs. La recherche représente d’ailleurs une part majeure dans nos affaires. Il nous arrive aussi de vérifier si une entreprise ou une association sont saines. Au niveau de l’aspect matériel, nous utilisons des appareils photos, des caméscopes, des jumelles ou des dictaphones pour ne laisser filtrer aucune information.
Quels tarifs pratiquez-vous ?
Pour la partie enquête/recherche, nous avons une fourchette qui dépend de ce que les gens demandent et des « éléments » préalables qui constituent leurs dossiers. Pour le tarif « surveillance », c’est 58 euros HT de l’heure. En tout cas, la première étude de cas, appelons ça une consultation, n’est pas facturée. Contrairement à certains autres cabinets de détective…
Tout ceci touche à de la recherche « humaine ». Mais imaginons que je veuille retrouver Mirza mon chien, vous êtes prête à aller chercher dans ses crottes, si j’aligne un million d’euros ?
Pourquoi pas. Moi je regarderai surtout si votre dossier est solide. Je gagne bien ma vie et je ne fais pas dans le bénévolat. Avant, il y avait détective pour animaux du côté de la Samaritaine, comme Ace Ventura, mais il n’a pas duré longtemps. Après la discrétion fait que chacun travaille pour soi donc je ne peux pas en dire beaucoup plus sur la concurrence.
Votre portail Internet est en français et anglais : avez-vous beaucoup de clients anglophones ?
Grâce à Internet, on a effectivement beaucoup de clients anglais, américains, allemands ou autres. Puis, on peut tout à fait travailler en dehors du sol français, à l’aide de correspondants implantés dans chaque pays. Dans le monde entier, on doit en avoir une cinquantaine…
Etant donné le succès. Avez-vous l’idée de vous implanter ailleurs, de créer une parabole Duluc à l’étranger ?
Non. J’essaie déjà de gérer mon affaire du mieux que je peux. Mais une femme doit s’occuper de sa famille, son boulot, ses enfants. Moi, je suis encore de la génération où les hommes sont servis à table. D’ailleurs, il y a très peu de femmes détectives. Et un détective « homme » passe beaucoup mieux, même si c’est le premier clampin venu… J’ai commencé ce métier quand j’avais 25 ans et il m’est arrivé de me retrouver face à des types qui me disent « j’aime pas les femmes », d’autant plus que le gars était là pour une histoire de tromperie. Du coup, on doit en faire encore pour faire ses preuves. L’imaginaire a encore un poids très fort : le détective, c’est un homme.
Par rapport aux filatures, est-il possible de faire suivre son fils ou sa fille si on le suspecte de quoi que ce soit, comme par exemple, fumer de l’herbe ?
Bien sûr. C’est courant même. Vous verrez quand vous aurez des enfants ! Attendez, le gamin, il fait plus rien, il sort la nuit… On lui pose des questions, il ne veut pas répondre, il a des comportements bizarres, il pique le fric parce qu’il se drogue… Dans ce cas, les parents peuvent alors faire appel à nous. Il y a d’ailleurs de plus en plus d’affaires dans le genre. Quand j’étais jeune et que je sortais, je disais à ma mère : « je suis à tel endroit, je reviens à telle heure », etc. Il y a un certain malaise vis-à-vis des jeunes aujourd’hui…
Mais ça ne vous choque pas d’arriver à ce point, où l’on décide de fait filer son gosse ?
Et alors ? Personnellement, ça ne me pose absolument pas de problèmes. Puis vis-à-vis du gamin, on ne va pas le buter non plus… On sait ce qu’il fait, on fait un rapport, point. De toute façon, on est payé pour ça. Je suis là pour constater, je suis un témoin privilégié : je raconte ce qu’il se passe, même si le mari infidèle va donner à manger aux canards et ne fait que lire son journal au bois de Vincennes. Et si je découvre des choses en plus, je ne vais pas faire un rapport de façon à faire plaisir à X ou Y. Le truc, c’est de contrôler l’emploi du temps, au jour J, à l’heure H. Les gens viennent ici et ils ne savent pas ce qu’ils vont découvrir : c’est pour ça qu’ils sont là d’ailleurs.
Vous n’êtes pas trop blasée par l’humanité avec tous les secrets que vous dévoilez ?
Je reste quelqu’un de très positif même si j’ai vu beaucoup de gens malheureux ici. Je ne calcule pas plus que ça. S’il y a quelqu’un qui a besoin de parler, je l’écoute mais je me pose pas plus de questions.
Qu’est-ce que vous faites quand vous n’êtes pas détective ?
Mon truc, c’est les voyages. Puis ce que j’aime, et qui est beaucoup moins coûteux, c’est les mots croisés. Avec ça, je m’évade (sic). J’ai aussi depuis quelques temps un Ipod. En musique, je suis plus porté « années 60 », c’est ma jeunesse. Ray Charles, Otis Redding, Aretha Franklin. Souchon, Julien Clerc, Little Richard, les Shadows ou Louis Prima. Niveau 70’s : Apache, Cliff Richard, les Spoutniks : je suis une rockeuse (et re-sic)!
La musique sur le site, c’est vous qui l’avez choisie ?
C’est une copine qui m’a fait écouter cette musique que j’ai beaucoup aimée. C’est très lent et très rapide (sic). C’est un peu à notre image. J’avais pas envie d’un truc à la Mission Impossible…
A vrai dire, je savais pas trop quelle musique choisir. Mais j’ai pas trop le temps pour ça… D’ailleurs, si vous avez des idées…
En voila une suggestion qu’elle est bonne ! Et l’occasion d’organiser le premier concours (presque) lucratif sur Gonzaï. Ou le syndrome de la notoriété bondissante. Connectez-vous sur le site de Duluc Détective et envoyez en commentaire à cet article vos propositions à Martine Baret pour une musique (très lente et très rapide donc) pouvant agrémenter son portail web. En plus, désormais, vous connaissez un peu ses goûts…
Les gagnants, au nombre de onze, bénéficieront d’une ristourne de 50% chez Duluc Détective (hors période de soldes) sur la prochaine recherche de musiciens perdus ou de conjoints infidèles pris en train d’écouter les Spoutniks ! Alors méfiez-vous les cocus !
9 commentaires
Je suis passée dans la rue du Louvre il y a peu et l’enseigne est toujours présente. Inoxydable.