Après plus d'une heure d'entretien avec Mathias, du jeune groupe Broken Letters, j'éteins mon magnéto à piles, l'air

Après plus d’une heure d’entretien avec Mathias, du jeune groupe Broken Letters, j’éteins mon magnéto à piles, l’air satisfait. Je suis assez content de moi. L’interview que je viens de réaliser sera de qualité et le dérushage plutôt agréable à écouter. Je termine ma salade grecque en dansant un sirtaki imaginaire avec mon ego. Mathias en profite pour terminer son tartare et pour la petite histoire ne prendra pas de dessert.

Vendredi 24 juillet, 12H30 PM, Clichy

« On a réussi à la faire cette interview finalement, hein ? », dis je en tirant comme un malade sur une cigarette qui partait en fumée.

« Ouais, ouais, c’est cool ! », me répondit Mathias en bougeant la tête et les cheveux qui vont avec.

L’heure commençait à tourner en rond. On décida de décamper après avoir avalé les cafés de circonstance. On se quitte devant une bouche de métro à l’haleine contrariée. Mathias plonge en apnée vers son destin, un passe Navigo entre les mains. Je remonte la rue Martre dans le sens inverse des aiguilles d’une montre et décide de passer illico en mode loukoum pour au moins 48 heures. Jet lag vital. J’écouterai l’enregistrement plus tard. Il est 14h30 (PM). Sur mon bloc note imaginaire, je note : penser à écouter le silence.

Mercredi 24 juin, 20h00 PM, Paris XV

Terrasse du Regalia : 1ère rencontre avec Mathias Durand. Le garçon est plutôt timide, jeune, blond et du genre poli. On s’assoit. On s’observe. On parle de la pluie et du beau temps mais surtout de la pluie en fait. Je lui demande de me préparer un autoportrait et une playlist de 8 titres (pas plus, pas moins). J’ai l’impression de lui demander la lune. Mathias note consciencieusement tout ce que je dis sur un petit calepin labellisé étudiant en arts beaux. Il boit mes paroles et une bière aussi. Je tente de le rassurer en lui expliquant que c’est un exercice de style compliqué, certes, mais indispensable à la compréhension de l’univers d’un artiste. Mathias semble rassuré. Paniqué mais rassuré. Mathias me tend son 1er album autoproduit, intitulé Broken Letters, que j’ai écouté en boucle sur sa page MySpace. Ces lettres, Mathias ne les a jamais envoyé. Ca, c’est pour la petite histoire. C’est ce qu’on appelle dans le jargon de la chronique musicale un concept album. Comprendre : une idée, un fil conducteur, un album. Qu’on écoute généralement une fois! Et encore, d’une oreille distraite et le plus souvent pas entièrement. Parce que faut pas déconner non plus. Un concept album, c’est généralement plutôt sympa dans l’idée mais souvent très chiant à écouter. Oui, mais là, non ! L’album de Mathias est d’une beauté sans nom qui s’étale sur 10 plages sonores paradisiaques, empruntes de mélancolie et de mélodies à faire pleurer Nike Drake et Arthur Lee  comme deux madeleines un peu jalouses. Mathias Durand est un songwriter hors pair (il fait tout tous seul en même temps, ça aide) et sans conteste l’un des jeunes talent Français à guitare les plus brillant et prometteur. Voilà, c’est dit ! Comme on dit quand c’est dit. Mathias me propose de venir le voir jouer en concert incessamment sous peu. Je ne dis pas non mais pas oui non plus. Sur mon bloc note imaginaire, je note : penser à aller voir Mathias en concert.

Samedi 18 juillet, 20h00 PM, Théâtre du Ranelagh

Voir Mathias sur scène, c’est comprendre à quel point les compositions de ce jeune artiste sont denses, bigarrées et influencées par des notes distillées avec parcimonie venant de contrées lointaines qui louchent méchamment sur les bindis coquins de jolies femmes indiennes. Math and the Broken letters, c’est le nom du groupe qui accompagne Mathias sur scène, est composé de Shlomo, un flutiste à flute, de Charlie, un percussionniste qui percute, de Maï, une clarinettiste qui chante aussi, mais sans clarinette parce que c’est juste impossible de chanter avec une clarinette, et de Itah, une jeune vidéaste qui balance des vidéos avant-gardiste un peu chelou derrière le quatuor pendant les concerts. 1h45 de show plus tard, la salle est subjuguée. Mathias et ses Broken letters ont littéralement cloués les spectateurs sur place assise. Les fauteuils engoncés et un poil prout prout du théâtre du Ranelagh viennent de se prendre un sacré coup de jeune dans l’accoudoir. L’album de Mathias a été sublimé en mode tribale. La salle se vide ni une ni deux, sans tambours ni trompettes mais avec le son de la flute et la voix de Mathias qui résonnent comme un écho au loin dans ma tête.

Vendredi 24 juillet, 00h30 AM, Paris

Je loukoumise à fond les ballons. Affalé sur mon canapé, je zappe mon attention entre la chaine LCI qui radote particulièrement ce soir et un réseau social avec des pouces levés de partout (soupirs). J’ai le magnéto à piles à portée de main gauche. J’hésite à appuyer sur la touche play. Je sors fumer une cigarette puis une deuxième cul sec. Je rentre. Le canapé me tend  à nouveau les bras. Je m’affale dessus sans lui demander son reste. Même s’ils sont plutôt beaux. J’appuie sur la touche play pour écouter un extrait de l’interview de Mathias. Full (?). J’appuie à nouveau sur la touche, calmement. Full (?). HEIN ????? C’est quoi ce bordel ?????? (je mets pleins de points d’interrogations partout quand je comprend pas). J’appuie encore une fois sur la même touche mais super fort et pas du tout calmement. Full (?) NON ? Il déconne là ! C’est juste une mauvaise blague. Je le connecte direct sur l’ordi avec le cable USB de rigueur. Full (?). Bon, là je vous passe les détails mais en gros la terre s’est écroulé direct et moi avec. Je zappe sur LCI. L’information est confirmée (misère). Sur mon bloc note imaginaire, je note : penser à observer le vide.

Je n’ai pas osé rappeler Mathias pour lui raconter ma mésaventure mais je lui ai écrit une lettre. J’hésite à lui envoyer.

http://www.myspace.com/mathiasmusic

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