Le sadisme est un sentiment terriblement humain et il suffit pour s’en rendre compte de regarder Fucking Kassovitz, le documentaire réalisé par François-Régis Jeanne, sur le deuxième film américain de Kassovitz après « Gothika ». Bras de fer avec la production anglo-saxonne, incompréhension avec la star du film (Vin Diesel) et rabotage en règle du script inspiré par le roman de Dantec, tout y passe. Le docu relate, œil pour œil et dent pour dent, les méandres de ce qui deviendra un B-Movie, pour citer le réalisateur français découvrant, semaine après semaine, que le film lui échappe, que les décors ne sont pas prêts et que toutes les scènes pensées plusieurs années plutôt ne ressembleront, in fine, qu’à un vulgaire blockbuster, mais sans les moyens.
De Hollywood à holy shit !
Plus que Babylon A.D., le film, reste donc surtout ce Fucking Kassovitz qui, à rebours, permet non seulement de mieux comprendre pourquoi le réalisateur de La Haine s’est peu à peu détourné de la caméra – un seul film après cet échec – et surtout pourquoi, en terme de production, il ne faut jamais faire confiance aux Américains. « Je ne suis pas Orson Welles, je suis fucking Mathieu Kassovitz ! » déclarera pendant le tournage le principal intéressé, excédé. Ce qu’il ne sait pas encore, à ce moment là, c’est qu’il se trompe : Welles, lui aussi, finira par fuir Hollywood (à moins que ce ne soit l’inverse) et trouvera refuge en Europe. Et, coïncidence ou pas, mourra sans avoir pu finir son film maudit à lui, Don Quichotte.
Quant à Babylon A.D., aux dernières nouvelles et contrairement aux craintes de la production près de ses sous, il aurait généré 70 millions de dollars de bénéfices (contre « seulement » 45 millions de budget selon The Numbers). Pas mal pour une daube, d’autant plus que celle-ci a paradoxalement permis la naissance d’un film dans le film. C’est à regarder dès à présent, et gratuitement qui plus est.