Acharné des tournées, de side projects tout azimut, Ty Segall pond ses albums sur un rythme aussi soutenu que le firent en leur temps les grosses machines à tubes des sixties et force le respect par l’intégrité de sa démarche low profile. Comme chez ses amis des Oh Sees, la force du blondinet est de ne pas nous laisser le temps de la digestion et de faire sans cesse bouger sa zone de confort. Ces jours ci, il sort le premier album de Fuzz, projet néo Black Sabbath avec son ami de toujours Charles Mootheart dont le son est plus chevelu que les cul de Demis Roussos et Vangelis réunis. Demain il pourrait très bien sortir un album de Country Folk avec White Fence ou se tailler un psyché sauvage avec Mikal Cronin.
Aujourd’hui, l’appellation garage à son encontre est aussi désuète que l’idée de faire votre vidange à la maison sans passer chez votre garagiste, qui désormais tripatouille des ordinateurs en blouse blanche tout en vous servant un café.
Et en parlant de blouse blanche, j’ai moi aussi décidé d’en endosser une pour pratiquer lors de notre rencontre filmée à la mi-juillet une sorte de psychanalyse de troisième zone dont le sérieux médical n’est pas plus à mettre en question que le respect de la convention de Genève par les geôliers de Mordovie. Cette idée saugrenue m’est venue après l’écoute de « Sleeper », son album acoustique, et la lecture du cortège d’éloges diarrhéiques. Persuadés que la pompe à reluire et le malheur font encore recette, les plumitifs n’hésitaient pas à invoquer les fantômes de Syd Barrett et T Rex, tirer la larme avec le décès du père de Ty – événement déclencheur de l’écriture de l’album – et s’étendaient sur sa brouille avec sa mère un tantinet siphonnée. Rajoutez une couche sur la jeunesse de Ty et son génie précoce, argument éculé s’il en est, et vous obtiendrez le consensus du moment.
Histoire de mettre une pointe de relativité dans ce concert de louanges, Dylan a pondu « Blonde on Blonde » et Lennon écrivait Strawberry fields forever au même âge que Ty qui se fout comme de son premier T shirt de Black Flag de se voir comparer à ces piliers du songwriting. Une fois ce storytelling psychanalytique de café du commerce oublié, il faut reconnaître que « Sleeper » est une œuvre au noir vraiment attachante qui ne requiert pas d’explications de textes et de chroniques avec une note sur dix en bas de page. Comme l’idée d’essayer de faire cracher Ty Segall au bassinet sur les turpitudes de son existence avait des relents de voyeurisme malsain et impudique, une interview déguisé en psy de pacotille pouvait bien l’affaire. Alors Ty, parle moi de ton enfance…
Ty Segall // Sleeper // Drag City
http://ty-segall.com/
10 commentaires
Hormis le fait que je viendrai pas frapper à ta porte si je chope un rhume, cool moment merci Bobby.
Et le J.C Satàn, il a aimé ?
Oui il aime bien l’énergie de Satan et est bien au jus de la scène française. Simplement on a condensé la video pour ne garder que les meilleurs moments en tout cas les plus articulés . Je peux même te dire qu’il est aussi fan du Grateful Dead jusqu’en 72. On a bu un coup plus tard et on a évoqué Magnetix, Crash Normal, Feeling of love. Par contre il pensait que Hubble bubble était français. Il a une très grosse culture musicale, très éclectique.
C’est combien la discothérapie?
J’sais pas, t’es riche combien ?
Je suis riche en vin et bonnes bières.
Mouais bof, ça nous convainc moyen. Envoies nous une photo de tes pieds, ça fera l’affaire !
Une des meilleures interviews ever.