Il y a quelque chose à comprendre à propos de cette jeune génération : contrairement aux trentenaires qui sont nés au moment où tous les maux de fin de siècle se sont mis en place, (

Il y a quelque chose à comprendre à propos de cette jeune génération : contrairement aux trentenaires qui sont nés au moment où tous les maux de fin de siècle se sont mis en place,  nous n’avons connu que cela. Naître à la fin des années 80 met dans une drôle de posture. À la recherche d’un âge d’or veut dire pour nous « regardez avant votre naissance ». Et si l’histoire nous intéresse un peu, que l’on prend la période comprise entre la seconde guerre mondiale et le premier choc pétrolier… nous avons en main l’époque qui nous passionne tant.

Il faut la trouver cette putain de potion magique. Celle qui nous fera comprendre pourquoi, à un moment, on a le truc ou pas. Voilà, c’est cela… le mojo. Que les Stones ne soient pas foutus de faire un blues convenable aujourd’hui ou que Neil Young fasse des albums sans âme. Quand on perd le Mojo. Comme les Redwalls tenez. Implacables sur scène, beaux, d’une décontraction intenable. Et surtout, quels sons. Pourtant, les chansons ne le font pas, bancales. Enfin, les chansons qui sont allées chercher la modernité, capter l’année 2005 ou 2007. Celles-là sont d’une tiédeur telle qu’on les a déjà oublié. Et il y a ceux qui ne vieillissent pas, comme Tom Waits ou Tony Truant. Ceux qui ont été mordus à la gorge et ont su faire saigner leurs plaies. Garder le style prisonnier, à aller botter le cul de quelqu’un pour rire, faire des clins d’œil complices et du cabotinage à outrance. Se comporter comme un gamin, en fait. C’est ce que l’on a essayé de capter dans cette interview. Trouver les éléments qui font d’une passion un savoir faire durable. Comment faut-il planter la graine pour qu’elle donne un arbre robuste. Car Gonzaï, ce n’est que cela, une envie de capter l’époque. Une vue d’ensemble par le détail.


Il paraît que le vrai Little Johnny Jet c’est vous ?

Le vrai Little Johnny Jet, c’est ni toi ni moi. Le vrai Little Johnny Jet c’est un petit avion, le dessin animé de Tex Avery. Mais je crois que c’est vraiment la sonorité du titre qui plaisait a Dominique. Quant à moi en tant que Little Johnny Jet… c’est pas que je sois très bon danseur… L’énergie, tout cela… j’ai toujours fait le con sur scène.

Alors comment ça s’est passé, vouloir aller à Rouen, faire du Rock ?

Quand j’étais tout petit, il y a un truc qui me bottait : c’est Bob Dylan. Parce que je l’avais entendu en vacances dans les Cévennes. Ma cousine n’écoutait que cela. Elle avait une compile et comme j’avais pas le droit d’aller nager après manger, j’attendais trois heures en écoutant que ce disque. C’est à partir de là… il n’y avait que cela que j’aimais. La musique. Que cela qui me branchait vraiment. Et puis j’aimais vraiment les gueules des mecs. Pour moi, les types super chics c’était Skip Spence, Albert Marker et Moby Grape. Et pourtant je les avais jamais entendus. Ce qui est marrant, c’est que quand j’ai enfin pu les entendre, c’était à la hauteur de mes espérances, j’adorais la gueule de tous ces freaks qui détonnaient. Moi qui habitais au milieu de nulle part en bourgogne, voir la gueule des mecs de Quicksilver, ça me faisait rêver. La même sensation que celle que tu as en jouant à d’Artagnan.

Le choc visuel de la musique…

Après j’ai tout de suite essayé de trouver la musique. Mais il y en a que j’ai vraiment pris du temps avant de découvrir, mais j’ai tout de suite aimé le rock and roll. En passant par Dr Feelgood et les Famin’ Groovies. Puis Gene Vincent et Cochran. Mais il faut dire qu’on était peu nombreux à s’intéresser à ces gens. Surtout à Dijon. Pour s’approvisionner, François, avec qui on a fait les Snipers, montait à Paris pour acheter une trentaine de 45 Tours puis passait par une librairie de Hippies qui était tenue par le mec qui est devenu patron de I-Télé… Bernard Zekri (passé aux Inrockuptibles, NDR). Ca s’appelait Les Doigts dans la Tête. Un truc de gauche, qui passait du free jazz. Nous on appelait cela « Les Doigts dans le cul ». François revendait ses 45 Tours à Dijon, c’est là où on s’est rencontrés, parce qu’il devait avoir un badge des Groovies. Alors on a dit: on va faire un groupe. On avait chacun un Vox, je suis venu avec le mien et il a cramé. On faisait des reprises comme les Dogs et j’écrivais quelques chansons en français.

Vous avez toujours chanté finalement…

Oui. Mais j’ai arrêté un moment…. Parce ce que moi j’avais qu’un but : aller jouer avec les Dogs. En écoutant le 45 tours et le maxi, je me suis dit que c’était tout ce que j’aimais. Après je les ai vus au Rose Bonbon, avec les Olivensteins, ils jouaient deux jours avec deux concerts par jour chacun. C’était pendant les vacances de la Toussaint. J’étais allé voir Dominique alors que Mimi il était au service militaire, et on a parlé. Ils m’ont filé le numéro de Melody Massacre. Alors quand mon père était pas là, j’appelais Melody Massacre avec la super trouille pour demander à Lionel si les Dogs avaient besoin d’un guitariste. Il se demandait ce que c’était que ce mec. Deux jours après le Rose Bonbon, il y a eu un concert des Kinks à Mogador. Alors je me suis retrouvé avec Eric et Gilles, qui étaient certainement les deux seuls punks dans la salle. On est tout de suite devenus vachement potes parce que j’adorais les Olivensteins, le meilleur groupe de Punk rock en français. Quand ils ont arrêté, Gilles a eu envie de refaire un groupe et il m’a appelé. Quand je suis rentré chez moi, j’ai dit à mon père que je voulais me casser, il m’a dit: casse-toi.

C’est la où vous arrivez à Rouen?

Totalement. On allaient voir les Dogs répéter avec Gilles et après j’ai commencé à jouer un peu. Je faisais Pins de Bo Diddley à leur rappel. Quand ils ont eu une petite tournée dans le sud-ouest, je ne suis pas allé au lycée et on a fait des supers concerts. L’été d’après, j’ai fait la moitié du set dans un festival avec Feelgood et Magma. Et après cet été, je suis rentré complètement dans les Dogs… Quand ils n’avaient plus de maison de disques.

Ca se passait comment entre les groupes français à ce moment ?

On ne parlait pas avec des gens comme Magma. Avec Feelgood ont été potes, mais Magma on se ne parlait pas. Dominique détestait particulièrement. À l’époque on était très sectaires. On frimait. Puis on a tourné avec Feelgood en Angleterre, dans les universités avant les fêtes de noël. Les mecs en avaient rien à foutre et venaient pour se bourrer la gueule. Ca apprenait à jouer.

Il y a eu des concerts un peu durs ?

Une seule fois, au Havre, avec Gilles, quand on ne jouait pas encore avec les Dogs, il avait foutu un coup de pied dans la gueule d’un mec. Déjà, ils nous traitaient de bourgeois parce qu’on était de Rouen, et parce que Gilles chantait en français.

C’était quoi le public de cette musique ?

Il y avait pas mal de gens à nos concerts. Ça aurait pu marcher. Comme on jouait beaucoup. Mais on n’a jamais vendu de disques parce qu’on chantait en anglais, et donc on ne pouvait pas passer à la radio. On était une clique assez moqueuse. Donc on n’était pas très potes avec les mecs des autres groupes. On aimait Daniel Jean Renault. Un super mec qui est à Londres et joue tout seul. Sinon, je n’aime que les perdants… Enfin ceux qui ne changent pas de truc tout le temps. « La clinique du docteur schultz », Don Cavalli… Alexis Mazzoleni, qui est l’un des meilleurs guitaristes du monde, personne n’en parle. Parce que ce n’est pas dans le vent.

Pourtant tout le monde n’a fait que cela à un moment, jurer par le Rock & roll !

Oui, mais au final, qu’est-ce qu’on a eu? Les BB Brunes pour qui ça marche et les autres pour qui ça ne marche pas. Tant mieux que ça marche pour eux, mais bon… Moi j’aime bien les Mantis dans tous ces jeunes groupes. Puis bon, la culture Rock a ses limites. Les gamins, ils ont 30 000 chansons dans leur iPod, tous les Stones…et tu leur dis Play With Fire et ils ne connaissent pas. Et puis il y a des révisionnistes aujourd’hui qui racontent plein de conneries. Alors…

Maintenant vous faites quoi ?

Je joue avec les Wampas et j’ai un trio. J’aimerais bien aller enregistrer chez Lucas Trouble. Voilà un chouette mec chez qui viennent des gens du monde entier pour enregistrer. Il a eu un one man band terrible: Blood Shot Bill. 

3 commentaires

  1. « FAIS PAS CHIER QUAND JE TRAVAILLE » une des chansons solo de TONY, l’expression m’est restée même si je la dis rarement à quelqu’un…
    RESPECT au TRUANT

  2. Dijon:
    François avait un petit coin disquaire dans la boutique de Zekri, fils de bonne famille dijonnaise et qui d’ailleurs a eu une carrière de bon fils de famille.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages