Certains le connaissaient sous le nom de Jack-Alain Léger, Paul Smaïl, d’autres de Melmoth ou de Dashiell Hedayat : mais qui était vraiment Daniel Théron, cette comète de Haley-Davidson à l’origine du tube underground Chrysler Rose et qui, d’échecs en incompréhensions, se tourna vers la littérature à ses risques et périls ? Avec Vous direz que je suis tombé, aux éditions Séguier, l’auteur Jean Azarel se penche sur cette énigme digne de la disparition d’Alain Kan. Pour Gonzaï, il explique la chute du Français aux 1000 visages qui décida de se défenestrer, voilà pile 10 ans.

Il se rêvait Iggy Pop, il avait le corps de Daniel Balavoine. Fin des années 60 en France, pas facile de se faire une place au soleil quand on était rondouillard, qu’on ne savait pas vraiment chanter et qu’on était davantage attiré par les hommes et les stupéfiants que par la facilité des plateaux télé.
C’est pourtant l’incroyable exploit, éphémère, réalisé par celui dont le nom (Théron) était une prédiction. Une autre : l’un des titres de son premier album pionnier du talkover, bien avant Gainsbourg, se nomme Vous direz que je suis tombé. On le retrouvera, cinquante-quatre ans après son premier album « La devanture des ivresses », récompensé par le prix Charles Cros en 1969, écrasé sur le sol suite à une défenestration. C’était le 17 juillet 2013, et l’arc tendu par les dates de début et de fin de la carrière du schizophrène en quête de reconnaissance ressemble à une scène de meurtre résumant en elle-même tous les zigzag du personnage, en pointillés.

Trop underground pour le rock français, trop esthète ou fantasque pour le monde très fermé de l’édition, Jack-Alain Léger aura mené sa vie comme on changerait de carte d’identité; multipliant les noms de scène comme autant de tentatives pour tantôt repartir à zéro, tantôt gommer, corriger cette trajectoire étrange qui l’aura vu signer l’un des plus beaux albums de rock français des seventies (« Obsolète ») et plus de 40 livres dont certains adaptés au cinéma.

C’est cette histoire en 1000 chapitres que Jean Azarel raconte avec force détails dans Vous direz que je suis tombé, un ouvrage de pure méticulosité où les vies de Daniel Théron sont passés au peigne fin; délivrant ainsi la clef de compréhension d’un homme multiple dont l’oeuvre musicale, aux côtés de Gong, est à écouter comme le pendant bordélique du « La solitude » de Léo Ferré accompagné par le groupe Zoo.

Karl Lagerfeld aimait à citer son écrivain préféré, l’inconnu du bataillon Keyserling : « Les Helmt étaient si distingués qu’ils pouvaient à peine vivre« . Pour Jack-Alain Léger, la délivrance mit du temps à venir mais cette mort multicolore éclaire désormais une oeuvre désormais compilée dans L’opéra du moi, dans la collection Bouquins. Comme quoi. Tombé, peut-être, mais pas forcément dans l’oubli.

Jean Azarel // Vous direz que je suis tombé // Editions Séguier

Vous direz que je suis tombé, de Jean Azarel – Autour des Auteurs

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