Toute la jeunesse assoiffée d’Ille-et-Vilaine s’était donnée le mot. Les réserves de cervoise se remplissaient. Ce week-end, la cuite, ce n’était pas chez Yannick, bien que ses parents soient absents. Non, tout le monde allait aux Trans Musicales de Rennes. Et quand les derniers festivaliers sont arrivés, j’ai commencé à m’inquiéter de la salubrité des issues de secours. Ceci est le carnet de bord de mon hypocondrie.
Jeudi – 20h : Une pluie fine s’estompe. Le vent d’Ouest se charge de vapeurs de galettes-saucisses. Mon anneau pylorique me chatouille. Audrey Katz accueille les refugiés. Faire les sets de transition un jeudi soir peut paraître difficile, mais elle touche son calot et le public rennais est heureux. J’interroge Keltan, casté pour sa crête : « nickel ». Puis Lars & The Hands Of Light essaient de détendre une foule amorphe. Ils jouent Me Me Me et les ménagères remuent tristement leurs bouts de gras. Je m’échoue chez le crêpier. Meilleur accueil des Trans.
Jeudi – 22h15 : Alors que mon diabète et mon agoraphobie se battent en duel pour remplir ma jauge de névropathie, je rencontre Lady Late qui joue ce soir à la Green Room. Elle me dit qu’elle prépare une galette de drum and bass pour 2011. La drum and bass, mais ça existe encore ? Sa réponse : « Oui, ça m’énerve un peu quand les gens disent ça, bien sûr qu’il y a une scène et elle est très prolifique. Après, c’est sûr que c’est underground et qu’il faut traquer les raretés. J’adore chercher les petits trucs que personne ne connaît pour mes sets. » Trente ans, des yeux d’enfant sage qui me font oublier de brancher mon enregistreur. Elle me fait aimablement ravaler mes clichés. « Non, on ne joue pas dans des camions dans la forêt » et « non, ce n’est pas de la musique pour la drogue ». Mais alors, expliquez aux néophytes ce qu’est la drum and bass ! Que reste-t-il une fois qu’on ôte le rythme et la ligne de basse ? « Les nappes. Je me rappelle de choses de mon enfance, j’en fais une mélodie. Ça ne part pas de rien, mais d’une idée. » Un bon set de Mademoiselle Late n’est pas linéaire, pas toujours énervé, et beaucoup d’ambiances différentes doivent s’y mêler. On partage un peu de nostalgie en évoquant les free parties, le grisant de l’interdit techno. Et, plus tard, dans la petite pièce aménagée, je l’écoute. Elle avait raison, c’est naturellement très dancefloor. Quelques stéréotypes sautent dans ma tête, autant que d’abrutis sur la piste.
Jeudi – 22h45 : Les gens sont de plus en plus étranges. Je rencontre de faux bénévoles, de vraies Indiennes. J’erre entre les tôles des hangars, et manque de chavirer sur du vomi. Les plus malins ramassent les gobelets consignés, et dansent avec leurs tours de plastique. L’éclairage de Funeral Party shoote le public toutes les dix mesures. Quelqu’un m’observe ? Rien ne me retient, je prends la poudre d’escampette.
Vendredi – 00h07 : « Je ne partirai pas avant Beataucue » me dit Mathilde. J’ai sincèrement cru que cette Rennaise voulait m’entraîner aux toilettes. Ma frustration est exacerbée lorsque je la suis au Hall 4 devant ces grands adolescents salement libidineux. Beataucue est ce que l’on aurait été fier d’appeler « la nouvelle french touch » au Régine. Rennes adore, Rennes acclame. Je prends un bus puis un taxi qui fait des détours mais ne cherche pas d’ennuis, en hypotension.
Vendredi – 21h : Les Paris Suit Yourself sont fous. Les deux premiers morceaux, joués au Korg, mettent le chanteur en transe, enrubannée dans une longue écharpe blanche cachant son visage. Les quidams s’inquiètent : « il est normal ? » Non, certainement pas. Le groupe ouvre grandement la soirée avec un rock puissant et des textes à claques. Mais quand même, ils ne se la jouent pas un peu ? Lorsque je rencontre Luvinsky, le chanteur, il s’est changé et porte un trois-quarts fourrure. Il me toise. J’interview alors Marie (basse) et Victor (clavier). Heureusement, en vrai, ils sont moins étranges, à coups de « on ne demande pas son âge à une dame, enfin » ou « on n’avait pas un son terrible, mais on est condamné à être des débutants je crois ». Le tout avec un grand sourire honnête. Je tente de les démystifier :
Le clip qui circule sur internet avec le mec qui joue avec les vagues au ralenti, c’est un peu beaucoup, quand même…
Marie : Beaucoup, c’est à dire ?
Euh… (tout penaud) Vous pouvez me parler du clip ?
Marie : Bah, beaucoup, pourquoi pas ? On s’est beaucoup amusé à filmer ça. On était en vacances, il y avait des vagues géantes. Et alors Joe, notre ancien batteur, comme à son habitude, escalade une grille et va dans un endroit interdit, super dangereux.
Victor : Il n’était pas prévu que j’aie une caméra. Et j’ai filmé. Ce n’était pas sensé être un clip.
Bonne caméra quand même…
Victor : Oui, c’était une caméra des Beaux Arts de Bordeaux si tu veux tout savoir. Je bossais sur d’autres trucs à l’époque et du coup je l’ai prise.
Marie : Disons que quand on a besoin d’un visuel, on prend dans ce qu’on a déjà.
Victor : C’est juste une photo d’instant.
Puis leur manager me fait comprendre que c’est l’heure de la french food. Un ovni lui aussi, un mec de Manhattan qui vient du textile. Quand je demande au boss depuis quand il est manager, sa réponse coupe net notre semblant de conversation : « depuis que je suis né, mec ». Puis il emporte les Paris Suit Yourself en me pointant du doigt, comme le font les commerciaux qui se disent entre eux « you’re the man ».
Vendredi – 22h10 : Oy est belle. Seule avec quelques instruments de fortune (flûte minuscule, séquenceur), elle maintient l’attention d’une salle complète. Sa soul est moderne, j’ai beaucoup pensé à Zap Mama, avec un rythme plus rapide, mais un groove intact. Elle présente les quelques poupées vaudous qui l’accompagnent : Oy n’est pas seule, elle en vaut double. Les quelques désagréments techniques n’atteindront même pas son sourire incassable durant le show. Je m’y sens comme dans du coton, apaisé.
Vendredi – 22h40 : Calme, je vais chatouiller mes zygomatiques chez Connan Mockasin. Les vieilles fringues, les grosses distos, ok. Mais se coiffer comme Dave ?
Samedi – 00h14 : Emporté par la foule qui m’entraîne à point au Hall 9, pour DJ Ordoeuvre. Ce mec est Beat Torrent a lui tout seul. Les kids adorent. Je m’autorise à revenir plus tard pour M.I.A. Erreur fatale. À mon retour devant la plus grande salle du festival, les videurs affichent « complet » sur le front des festivaliers. Les vagues de marée humaine s’éclatent sur les gros rochers. De dehors, ça a l’air pas mal, j’interroge les gens qui sortent. « Non, elle se fout un peu de notre gueule, c’est que du bruit », « pas assez féminin » ou « pas mal » pour les indulgents. Oppressé, je vais calmer mon ochlophobie à un petit stand de spécialités sénégalaises.
Samedi – 01h50 : Je ne sais pas ce que j’ai pu avaler, mais mon intolérance au lactose me tord les boyaux. Fake Blood ne transcende pas la foule, je me joins à la moue globale. Et puis je rôde entre les vapeurs d’oignons et les pissotières improvisées, en me retournant régulièrement pour être sûr de ne pas être suivi.
Et puis arrive l’heure où les marchands de liqueur, le staff et moi-même tombons d’accord : il faut rentrer maintenant. Les derniers rappels se feront dans le bus. Allez la chatte, La bite à Dudule et autres classiques. Décidément, on n’arrête jamais la déconade aux Trans Musicales. Deux Xanax plus tard, on peut mettre la viande dans le torchon, dormir deux heures et prier pour ne plus jamais avoir à travailler au Disneyland des alcooliques.
Crédits photo: Renan Péron
10 commentaires
Comme l’année dernière, article décevant sur les Trans.
Vous parlez peu de musique et alignez les clichés…
Je pense que ce festival mérite un peu mieux qu’un énième report/essai gonzo d’amateur…
Putain, mais comment peut-on encore, en 2010, attaquer un article sur les Transmusicales en parlant de l’odeur de la galette saucisse ?
C’est juste un tuyau. Le porc est un allergène puissant, de la même famille que les tomates. On ne se méfie pas assez des vapeurs, aussi dangereuses que l’absorption. Prévoir zyrtec, clarytine…
peut être que ce festival mérite une autre prog, ces dernières années sont franchement en dessous et les concerts de hangar …
J’ai rarement lu quelque chose d’aussi mal écrit et dénué du moindre intérêt. Le festival vous accrédite pour écrire des futilités pareilles ?
Article aussi décevant que la buche de noël de ma tante Huguette, faudrait que les trans soient un peu mieux traitées, surtout que la prog est déjà dégueulasse depuis pas mal de temps, si ça s’étends aux articles…
Le bordel n’a ni queue ni tête et j’avoue qu’à part le stand de sénégalais et le bide à M.I.A j’ai rien retenu, je me suis emmerdé à lire et au final je sais même pas ce que valaient les groupes que j’ai pas vu!
Ca a été relu ça? Je me demande comment ça peut être publié sur un si bon site
Boh non, il existe, outre l’odeur de la galette saucisse, une bonne ligne directrice à ce texte, nan ? J’ai un ganglion sous l’aisselle et quelque part j’ai l’impression que ça me rapproche de l’auteur.
Et moi j’vois pas de clichés mais bon j’ai jamais fait les transmusicales de Rennes (ou les « Trans’ » mais ça fait un peu congrès annuel du footing).
C’était Laurent Chalumeau, un mec bien donc, qui disait que la critique c’est avant tout du sérieux, du respect de son sujet et de son lecteur, quelque chose d’appliqué et de scolaire même.
mockasin semble davantage chercher à ressembler à warhol qu’à dave.
mais un report est-il un papier sur la musique ou sur une coupe de cheveux?
si intérêt capillaire il y avait, il aurait pu être gardé dans la vidéo, avec des plans lisibles, cadrés, … et du son audible!
C’est pas le meilleur article vu sur gonzai. Mais je peux vous dire que justement, il faut en parler des trans. Parce que ca devient juste ridicule depuis 3 ans, plus personne ne vient aux hangars pour le son mais pour realiser sa première cuite. Le son est pourri. Les groupes sans interêts. Ce festival devient ringard. Et c’est bien triste.