J’avais rangé Madness dans la boîte aux souvenirs, classé parmi les instantanés d’une époque révolue. Le g

J’avais rangé Madness dans la boîte aux souvenirs, classé parmi les instantanés d’une époque révolue. Le groupe, au fil des albums, avait insufflé de la sophistication dans son ska avant de devenir un groupe pop hors pair, donnant un peu de fantaisie à l’Angleterre plutôt grise de la fin des années soixante-dix.

À l’instar des Kinks et de Pulp, Madness est devenu un concentré d’Angleterre, un miroir à vignettes sociales. Le tout avec une élégance et un panache que l’on ne retrouve guère au pays du ska festif frankaoui (laissez donc le ska aux anglais et aux jamaïcains les gars). En collaboration avec Suggs pour les paroles, Christopher John Foreman alias « Chrissy boy » est le compositeur majeur de Madness, et c’est immédiatement un plaisir de rencontrer cet homme affable et sympathique. Ça tombe bien, alors que personne ne les attendait, Madness offre avec The Liberty of Norton Folgate l’album pop majeur de 2009. Le Village green preservation society de la génération Ipod. Dans une Angleterre qui ne ressemble plus qu’a l’ombre d’elle-même, à l’intérieur d’une Europe qui perd chaque jour un peu de son identité à coup de Multiplex, de centre commerciaux périurbain, de novlangue hyper festive et de zones résidentielles, il est bon de se plonger dans l’histoire d’un quartier populaire de Londres.

Comment en êtes-vous venu à penser au concept de Norton Folgate, une sorte d’enclave libertaire à Londres?

Suggs, le chanteur du groupe, s’occupe d’un programme pour la télévision au sujet de Londres. Toutes les choses qui ont disparu dans la capitale, etc etc… Il en connaît un rayon sur la ville, c’est lui qui a découvert cet endroit et a écrit cette chanson. Et voilà que des protestations s’élèvent de cette place, c’est une coïncidence. Il y’a un vieux film anglais, Ealing Comedy, dans le même genre.

Comme Passeport pour Pimlico?

Oui, le même genre de film. Les habitants se mettent à vivre en autonomie comme dans une enclave.

C’est une manière de montrer votre indépendance?

Ha, ha!! C’est surtout une bonne chanson!

Madness est un groupe très anglais ce qui est plutôt bien car je ne vois pas trop l’intérêt des groupes britannique qui singent les américains.

Oui on a jamais fait ça. On a jamais écrit sur le fait d’être à L.A , bien que l’on soit déjà allé dans ces endroits. Les gens parlent de concept album avec toutes ces paroles basées sur Londres. Lovestruck (sorti en 1999 et qui a marqué le retour du groupe ndt) parle, tout comme Bingo, de nos vies,  quand on sort et qu’on se saoule. C’est ce que l’on a fait la nuit dernière d’ailleurs.

Londres a beaucoup changé depuis vos débuts?

C’est une ville qui ne cesse de se modifier.

Il semble que Londres soit de moins en moins abordable pour les classes populaires.

Je ne sais pas trop…les populations vont et viennent. En ce qui me concerne je ne vis plus à Londres, je suis près de la côte à Brighton. Je me suis lassé de la capitale, j’ai des enfants maintenant. C’est drôle de voir les choses qui me manquent à Londres, comme les parcs. Je ne vois plus si souvent Suggs alors que j’habitais  à Kentish Town près de chez lui. Après, oui…. je vois ce que tu veux dire, c’est cher, mais comme l’est Paris. En même temps il y a des endroits très pauvres qui jouxtent des quartiers très riches.

Il y a toutes cette standardisation à Londres: les Starbucks à la place des pubs et des MacDo à la place des fish and chips.

Oui c’est terrible. Je suis surpris qu’il y ai des Starbucks à Paris. En Italie ils ne laisseraient pas passer ça.

Depuis que l’Angleterre n’est plus une île avec l’eurostar, pensez-vous que cela à changé la perception qu’ont les sujets de sa majesté du reste de l’Europe?

Les gens de la classe ouvrière vont tous en Espagne. Ils y mangent de la nourriture anglaise tout en y parlant leur langue. Le sentiment d’appartenance au pays n’est pas permanent, parfois il m’arrive de me sentir européen….

Dans la chanson The liberty of Norton Folgate, on parle de la peur de l’immigrant. Londres a connu beaucoup de vagues d’immigrations, c’est une plaque tournante.

Oui, et cela depuis des centaines d’années…

Les attentats du métro de Londres ont il généré une paranoïa?

Il y a toujours eu des xénophobes. En même temps, les anglais aiment le curry qui a été apporté par les indiens (Rires). Tu absorbe les autres cultures sans t’en rendre contre. Oui comme le dit Suggs « there was a fear of the immigrants » puis il y’a eu l’immigration de la Jamaïque, et c’est pourquoi nous avons eu le reggae.

Quel est le processus créatif que vous  avez suivi pour ce nouvel album?

Ça dépend. Dans l’édition de luxe de l’album il y’a huit chansons supplémentaires qui sont aussi bonnes que celle de l’album. Certaines ont été écrites il y a longtemps. Il y a quelques années j’avais quitté le groupe, à l’époque des Dangermen sessions, puis ils sont revenus mee chercher pour cet album. Tout a commencé en 2006, ça été un long processus créatif et c’est important de dire que nous nous sommes produit nous-même, sans maison de disque. C’est le secret de notre succès, il n’y a pas de leader omnipotent.

Votre come back est très bon mais que penser des retours uniquement motivés par l’argent? Par exemple revoir les Sex Pistols en concert aujourd’hui , c’est tout de même pathétique.

Moui…On s’est arrêté en 1986 et reformé en 1992. À l’époque je n’avais plus d’argent, pas mal d’autres dans le groupe non plus. Je ne voulais pas revenir, je jouais alors dans les Nutty Boys qui avait leur petit succès en France. J’avais de grandes idées sociallistes sur le fait de ne pas se vendre. Puis nous nous sommes reformés. Le succès des concerts est allé crescendo et il nous a fallu sept ans avant d’enregistrer de nouveaux titres. Nous faisions la même chose que les Sex Pistols, alors je ne peut pas vraiment les critiquer. Et puis il y’a les nouvelles générations, pour eux c’est nouveau et ça c’est bien. Pour un gamin nous voir c’est une expérience, car il y a une bonne atmosphère. Maintenant nous jouons de nouveaux titres sur scène. C’est bien.

En Angleterre il y’a cette obsession de la jeunesse, surtout dans la presse musicale hebdomadaire. Vous, en tant que Madness, êtes-vous resté fidèles à vous même?

Le premier et le second album sont similaires, puis sur le troisième album nous avons évolué. Ce nouvel album est à notre image, nous n’avons pas changé, peut être que nous sommes de meilleurs musiciens. Les paroles sont peut- être plus adultes aussi. Il n’y a rien de politique chez nous. J’ai 52 ans et c’est peut-être un peu vieux pour chanter Baggy trousers. Nous avions peur de nous répeter, mais ça ne dérangerait pas d’écrire une autre chanson comme ca! (Rires) . On n’a pas eu pour ce nouvel album la pression d’écrire un nouvel hit.

(Nous parlons de la pluie qui tombe un peu pendant l’interview)

Vous n’êtes pas un groupe politique, certe, mais j’ai toujours considéré Madness comme un groupe d’extraction populaire. Le système de classe me paraît encore plus criant de votre coté de la manche.

C’est difficile de définir les classes sociales. J’envoie mes enfants dans une école privée, mais ce n’est pas un établissement snob. C’est plutôt une école un peu hippie. Si tu as un peu d’argent, tu veux le meilleur pour tes enfants, tu veux qu’ils aient une bonne éducation. Si tu m’avais dit il y a quarante ans que j’aurais envoyé mes enfants dans une école privée… J’ai été marié trois fois, mais ma femme actuelle  m’a énormément changé. Elle est végétarienne et si tu m’avais dit ca il y a des années quand je mangeais du steak et des frites… (Rires) Dans le groupe on est tous devenu un peu plus sophistiqués qu’a nos débuts, voila tout.

Quelle est votre opinion de l’évolution politique de l’Angleterre?

Ça me rend triste. J’ai toujours voté pour les travaillistes, mais c’est déprimant. Depuis j’ai voté pour les verts, mais la politique anglaise est vraiment déprimante, et bien que j’ai des idées plutôt à gauche, je dois bien avouer qu’en matière de crime et de punitions je suis plutôt de droite. Sans être pour autant pour la peine de mort. La preuve, c’est que je n’aime pas beaucoup Nicolas Sarkozy, pour le peu que j’en vois. Les ouvriers qui prennent leurs patrons en otage, ou les manifestations de camionneurs…on n’a pas vraiment ça en Angleterre.

Et les live pour Madness?

On à joué au Suger and Spice. Et la tournée se poursuit…

Ce serait bien de jouer l’album dans son intégralité, c’est un mini opéra!!

(Rires) J’aimerai bien. À Hackney nous y avons joué huit titres.

Madness // The Liberty of Norton Folgate // Lucky 7 records/Naïve

http://www.myspace.com/madnessofficial

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