Difficile d’être passé à coté de l’information, « Mon pays c’est l’amour », album terminus de la discographie Hallyday est enfin disponible au public. Mais ce disque, que vaut-il ?  Après lui avoir consacré un numéro spécial en kiosque il y a pile un an, Gonzai se devait de répondre à la question.

Pour la première et la dernière fois depuis sa mort, Johnny Hallyday est de retour parmi nous comme si de rien n’était. Ce qui permet aux fans les plus concernés d’entretenir la flamme tout en faisant le deuil, mais cette fois, comme on dit chez TF1, la sentence est irrévocable, Johnny a définitivement passé l’arme à gauche le vendredi 19 octobre à minuit pile tout en se payant le luxe d’être instantanément disque de platine.

L’attente était, c’est peu de le dire, à son paroxysme : aucun extrait diffusé, juste une écoute pour la presse quatre jours avant. Rapidement, cette même presse s’emballe et compare « Mon pays c’est l’amour » au « Blackstar » de Bowie. Il n’en est rien. Le requiem de Johnny n’est pas du tout un disque crépusculaire et morbide, bien au contraire, c’est un disque de vivant. L’analogie avec Bowie aurait du sens avec un disque comme « The Next Day »; comme celui-ci, « Mon pays c’est l’amour » est un best of avec des chansons inédites. Par exemple, J’en parlerai au diable est un Que je t’aime spectrale, taillé sur mesure pour le seul interprète au monde capable de chanter L’envie et autres Vivre pour le meilleur les doigts dans le nez.

On lit ici et là que la volonté première était de faire un véritable disque de rock, et d’éviter à tout prix la variété.
Mais cela fait déjà bien quarante ans que la limite entre les deux est particulièrement floue, la faute à Goldman et Berger. L’intention y est, on appréciera le fait qu’il n’y a aucun fade out en conclusion, mais la production est bien trop propre. Le morceau titre, et surtout Made in rock’n’roll, font écho à la période yéyé de l’idole des jeunes, avec une adaptation de Let the good times roll de JD McPherson. Pardonne moi a des allures de Excuse moi partenaire passé à la sauce Requiem pour un fou, l’interprétation est superbe et dense. C’est probablement le grand moment du disque. On regrettera de ne jamais connaître ce morceau en live – à moins qu’un show en hologramme ne soit prévu avec Jean-Claude Camus ?

Interlude, comme on s’en doute,est le seul morceau de l’album qui fut enregistré sans Johnny. Il s’agit en fait de la session de cordes d’Abbey Road du titre J’en parlerai au diable, et finalement supprimé au mixage par Maxime Nucci pour éviter de tomber dans la variété. Cela rappelle les courts intermèdes que l’on pouvait trouver sur « Hamlet », mais c’est probablement involontaire, la composition possédant surtout ce coté épique qu’on retrouve sur Lettre à France de Polnareff. A part L’Amérique de William (écrite par le parolier et musicien indie Jérôme Attal) la seconde partie du disque est plus quelconque. Ce morceau est une ballade country type Tennessee qui relate une dernière fois ce continent tant fantasmé par le taulier, où il n’hésite pas à faire rimer kodachrome avec mobile-home. L’interprétation est formidable, cela rappelle à quel point Johnny excelle dans ce domaine. Et ce disque clôture malgré lui une trilogie entamée avec « Rester Vivant » et « De l’amour ».

« Mon pays c’est l’amour », en dépit de son titre, est loin d’être un mauvais cru mais pâtit de la qualité supérieure des deux autres. Il est même en dessous du trop sous estimé « Jamais seul » sur lequel apparaissait pour la première fois Maxime Nucci (ainsi que -M- et Brigitte Fontaine), véritable bide commercial, alors que l’on assistait là à un retour vraiment rock.

Mais ce disque est bien plus touchant que les autres, car c’est le dernier. Et dans cette optique, il est difficile d’en dire du mal. Alors en plein enregistrement, Johnny était alors certain de partir en tournée; l’album, lui, était parfait pour le stade. Au final, et la mort aidant c’est encore plus fort, ce disque posthume reste un sacré anti-dépresseur pour des millions de fans qui, à nouveau, seront heureux d’être tristes. Qui d’autre que lui sera encore capable de cet exploit ?

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