« Roll over Beethoven » ! Renversez Beethoven, roulez-lui dessus ! Et c’est aux côtés de Beethoven, Mozart, Bach, de chants traditionnels, d’un peu de flûte de pan et de Louis Armstrong que le morceau Johnny B. Goode a été embarqué sur la sonde Voyager en 1977. S’il avait été blanc, Chuck Berry aurait eu la place d’Elvis sur la planète Terre. Mais dans le cosmos, il sera gravé pendant un milliard d’années sur ce disque de musiques et sons terriens.
Devant l’épidémie de RIPs de 2016, une marque underground de T-shirts DIY sérigraphiés rappelle et clame que pendant ce temps « Chuck Berry is not Dead ! ». Tel le punk, le rock déclaré mort prématurément puis ressuscité atteint en ce début de 21eme siècle sa plus haute cote. Les enfants et les parents l’écoutent ensemble. De nouveau en plein dans le vent, et à l’instar de Bowie et Cohen (cela deviendrait presque une habitude dorénavant), il décide de sortir son « chant du cygne ». Seulement, l’album sera posthume, à l’instar de Michael Jackson. Après le dernier album de Chuck Berry sorti en 79, c’est John Lennon qui, depuis décembre 1980, a eu là-haut la primeur du disque suivant.
Les tubes de Chuck sont non seulement les bandes originales mais les emblèmes des films Pulp Fiction (You Never can Tell) et Retour Vers le Futur (Johnny B. Goode). Ce dernier film s’est efforcé de tout pronostiquer pour le retour de Marty, le 21 octobre 2015 : drones (qui promènent les chiens), chat sur Skype, vidéo sur grand écran plat, casques de réalité virtuelle, ciné 3D, tablettes, Star Wars 19 (pardon, Dents de la Mer 19), éco-carburants, biométrie, ils ont même su prévoir que Biff deviendrait Président (Trump) ! Manquait juste un élément de taille auquel ils n’avaient pas pensé, c’est que Chuck Berry serait toujours là !
Un an après le retour de Marty, le guitariste a même eu l’audace de fêter son 90e anniversaire le 18 octobre 2016, et celle d’annoncer la sortie d’un nouvel album.
Après 38 ans, c’était un évènement hors norme. Comme un Retour Vers le Futur 4, en 2028 par exemple (38 ans après). « Pas tant que je suis en vie » rétorque Zemeckis. (Roll) over my dead body, dirait-il ?
Chuck Berry était a priori l’unique musicien qui pouvait jouer n’importe où dans le monde, sans s’encombrer d’un groupe, recrutant sur place, parfois le jour-même dans les bistrots, des musiciens pour l’accompagner ; ces derniers connaissant déjà son répertoire, devenu déjà classique de son vivant « Route 66, Johnny B. Goode, Roll over Beethoven, Rock and Roll Music », etc. Une bête de scène, et une bête féroce, avec le Duck Walk. On est bien loin de la danse des canards. Ni Strawberry (Fields), ni Blueberry Hills (d’un autre pionnier, Fats Domino), ni Raspberry Beret, ni Blackberry (pour les nerds), Chuck est pour sûr un Wildberry (en français : la baie sauvage), ingérable et impulsif, à l’image de la lignée qu’il a engendré : les rockeurs. Avec la musique, il a aussi initié l’attitude. Génie et voyou (il fait plusieurs années de prison), il demande des rallonges de cachet, juste avant l’entrée en scène, ou donne en 1970, un coup de poing à Keith Richard qui, passé backstage dans le but de rencontrer son idole, a eu le toupet de caresser la guitare du maestro. Bémol : Chuck ne connaissait pas Keith Richards. De même il fera peu de cas de Clash, dont le chanteur est grippé estime-t-il, ou des Ramones, qui lui semblent prendre leurs premiers cours de guitare.
La paternité du rock se partage et se discute quelque part en 1955, entre Rock Around the Clock de Bill Haley et Maybelline de Chuck Berry. Il faut croire que le premier en est le père, tandis que l’autre en est la mère; et que ce fut le début d’une grande famille dynastique. Ainsi, Chuck Berry crée la rencontre de couples fertiles, comme Jagger et Richards, Lennon et McCartney. Chuck Berry a été repris un nombre incalculable de fois comme Dylan, et comme lui, ils ont en commun ce fait d’avoir un répertoire déjà classique de leur vivant : Roll over Beethoven repris par les Sonics ou les Beatles, Rock and Roll Music par les Beatles, les Beach Boys, Come On par les Rolling Stones, Johnny B. Goode par Jimi Hendrix et d’autres, et dont l’intro seule est reprise sur d’autres morceaux, Fun, Fun, Fun des Beach Boys, Hygiaphone de Téléphone… Surfin’ USA des Beach Boys est une reprise, calquée sur Sweet Little Sixteen, avec d’autres paroles.
Ains Chuck aura survécu à Arthur Lee, Sky Saxon, Alex Chilton, Kevin Ayers, Kim Fowley, les frères Asheton, James Brown, George Michael Jackson (!). Il faudra se souvenir que jusqu’en 2017, le rock était encore incarné, il était vivant de chair et d’os. C’est fini, c’est la fin du siècle musical. Le 18 mars 2017, le rock est mort pour la première fois.
2 commentaires
Never died………
Il manque une virgule : » lui, survivrait encore ». Sinon la phrase ne tient pas grammaticalement, comme vous l’avez constaté. C’est pas moi, c’est le SR 🙂
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