Budgie n’aura jamais fait grand bruit de ce côté de la Manche, mais il aura laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du heavy metal. Burke Shelley en était le bassiste-chanteur, fondateur et leader. Il s’est discrètement éteint le 11 janvier dernier. Il laisse derrière lui une discographie d’acier remarquable qui continue d’interroger et d’influencer.
Cardiff, Pays de Galles, 1967. La scène musicale pop est largement dominée par la capitale londonienne, dont l’essentiel des formations du moment est issu. Seuls les Beatles, de Liverpool l’ouvrière, font miroiter une possibilité de rock hors de Londres. Mais c’est bien là qu’ils vont connaître le succès et signer leur contrat avec Parlophone en 1962. La pop music bascule en 1967 dans deux tendances : le psychédélisme et le blues. Les expérimentations acides de Pink Floyd et Soft Machine influencent les groupes installées. Les Beatles s’en sortent merveilleusement avec le superbe « Sgt Pepper Lonely Heart Club Band », les Rolling Stones moins avec « Their Satanic Majesties Request ».
De l’autre côté, le blues anglais s’installe avec les Yardbirds, les débuts des Rolling Stones, mais surtout ceux du Jeff Beck Group, les Bluesbreakers de John Mayall avec Eric Clapton, et Fleetwood Mac avec Peter Green. La jonction se fait entre les deux grâce à un jeune prodige américain du nom de Jimi Hendrix, et avec le projet suivant d’Eric Clapton, Cream.
Du riff à Cardiff
En 1967, Burke Shelley a 17 ans, et il dévore cette formidable musique. Il ne se passe pas un mois sans la parution d’un disque majeur, et Shelley se les achète avec son petit salaire d’apprenti-géomètre. Il vient de quitter l’école, et a donc pris un travail, sans grande passion. Son truc, c’est la musique. Il joue de la guitare, pas trop mal. Mais du fond de sa banlieue de Cardiff, il voit tout cela de bien loin, comme un rêve inaccessible. Les Beatles de Liverpool ont réussi, ça c’est sûr, mais quel talent ils ont ! C’est finalement en assistant à un concert qu’il décide d’en faire sa carrière. Il s’agit de Love Sculpture, le trio blues du guitariste Dave Edmunds. Egalement de Cardiff, ils vont signer un immense tube en Grande-Bretagne en 1968 avec Sabre Dance.
Shelley cherche des musiciens. Il embauche d’abord deux guitaristes : Brian Goddard et Kevin Newton. Puis il dépose une petite annonce dans la seule boutique d’instruments de musique de la ville : Gamlin’s Music Centre. Le jeune Ray Phillips y a fait l’acquisition en guise de cadeau de Noël d’un kit de batterie double grosse caisse Premier comme celui de Keith Moon des Who. Shelley vient frapper à sa porte, et lui propose le poste de batteur, ce que Phillips accepte.
Le groupe doit se trouver un nom. Il s’appelle d’abord Hill’s Contemporary Grass, un truc vaguement psychédélique et en vogue. Le groupe ne sait pas bien jouer. Shelley, qui a pris la basse et le chant, joue mieux de la guitare que Goddard. Plutôt que d’intervertir les instruments, il lui donne quelques cours, notamment pour les reprises des Beatles, pensant qu’il sera plus difficile de retrouver un bassiste qu’un guitariste. La formation est primitive dans ses interprétations, elle alourdit ses reprises à la sauce Cream/Hendrix. De toute façon, le groupe joue la plupart du temps dans les Working Men’s Clubs, ces foyers d’ouvriers nombreux dans ce bassin minier et sidérurgique, en liaison étroite avec l’autre bassin industriel voisin, anglais, de Birmingham, Sheffield et Newcastle, le Black Country.
Ces ouvriers n’aiment rien d’autres qu’une musique qui les défoule, le tout arrosé de pintes de cidre et de stout. La musique branchée des hippies, très peu pour eux. Il faut donc que ça cogne, qu’il y ait du boogie. Ce sont aussi dans ces clubs que Chicken Shack, Black Sabbath, Status Quo ou Judas Priest vont se faire les crocs.
Kevin Newton ne fait pas long feu, et il est remplacé par Tony Bourge. Il lui est conseillé, car il sait jouer The Stumble d’Albert King, que reprend également Dave Edmunds avec Love Sculpture. Ce que Bourge n’a pas dit, c’est que c’est le seul morceau qu’il maîtrise vraiment. Ils ont entre 18 et 20 ans, et font au mieux pour jouer chaque week-end. Mais Burke Shelley a déjà de l’ambition. Il a déjà quelques compositions personnelles qu’il injecte modestement dans la setlist. Curieusement, Bourge se sent rapidement à l’aise avec les compositions de Shelley, sur lesquelles il improvise avec une grande facilité, comme libéré de la contrainte de « jouer comme ».
Sonic wave
Nous sommes en 1969, et parallèlement à l’arrivée de Bourge, le groupe change de nom. L’anecdote traduit à elle seule l’étrange esprit de Burke Shelley. Il décide de nommer son groupe Budgie, car il veut opposer la lourdeur du son du groupe à la référence de cet oiseau, qu’il voit la plupart du temps dans des cages aux fenêtres de vieilles dames bourgeoises du centre-ville. D’ailleurs, le nom exact sera Six Ton Budgie, avant d’être raccourci en Budgie pour être plus simple et percutant.
En 1969, Shelley, Bourge, Phillips et Goddard prennent en pleine poire le premier album de Led Zeppelin. C’est une révélation. Ils veulent jouer un truc comme ça : ultra-violent, saturé, agressif, arrogant, avec une batterie énorme. Ils se trouvent une salle de répétition permanente. Il s’agit d’une grange dans le village de The Drope, en périphérie de Cardiff. Le groupe répète ses premiers riffs heavy propres comme Bullfrog, ou You Are The Biggest Thing Since Powdered Milk, un de ces titres surréalistes provenant tout droit de l’esprit facétieux et bouillonnant de Shelley. A la fenêtre, les vaches et les chevaux les regardent jouer, interloqués par ce raffut au milieu de leur calme campagne. C’est dans le pré voisin que le groupe se fera photographier pour le verso du premier album.
Début 1970, Budgie a déjà enregistré une première démo l’année précédente pour tenter de trouver un contrat discographique. Tous ont un emploi, mais pour Shelley, Bourge et Phillips, il n’est que temporaire. Pour Goddard, les choses se compliquent. Il pique la nana du manager du groupe, et la met enceinte. Désormais appelé à une vie de famille, il lâche le groupe. Budgie devient un trio.
Led Zeppelin fut un choc en 1969. Budgie découvre qu’un groupe voisin, Black Sabbath, de Birmingham, est en train de s’imposer avec sa musique heavy avec l’album « Paranoid ». Le groupe prépare son troisième album dans un tout nouveau studio de la campagne de Cardiff, à Monmouth : les Rockfield Studios. Ils sont avec leur producteur et leur ingénieur du son attitrés depuis deux albums : Rodger Bain et Tom Allom. Via une amie d’un ami, Budgie finit par réussir à obtenir une audition devant Rodger Bain. Le groupe joue ses quelques morceaux originaux, le producteur adore. Il propose de les enregistrer, mais ils n’ont ni argent, ni contrat. Bain leur conseille alors de monter jouer à Londres où tout se passe, et de revenir vers lui dès qu’ils ont un contrat. Il leur promet de les produire.
Le conseil est judicieux, puisqu’au bout de quelques dates dans des clubs, David Howells de MCA les repère. Il est ébloui par leur rage et leur énergie. Le contrat est signé quelques semaines plus tard, et en février 1971, Budgie se retrouve en studio, aux Rockfield à Monmouth, avec Rodger Bain à la production, comme promis.
Le groupe y grave huit morceaux en quasi direct, comme l’aime Bain. Il a fait de même avec Black Sabbath, et est persuadé que les groupes que l’on qualifie alors de « progressif » nécessitent d’être saisi ainsi sur bandes. Le résultat sera « Budgie », qui paraît en juillet 1971. On y voit au recto une perruche chevauchant un cheval, tel un guerrier celte.
De l’autre, on voit trois garnements souriants, une photo les montrant jouant avec un cheval dans le fameux pré voisin de leur salle de répétition. Burke Shelley est un frêle garçon aux cheveux bruns et aux épaisses lunettes. Son physique sec est sculpté par la natation qu’il pratique assidûment, normalement pour se forger un corps plus musclé. Ray Phillips à un visage aux traits quasi latino, alors qu’il est un pur enfant de Cardiff, avec ses cheveux noirs ondulés, sa petite moustache et son teint halé. Tony Bourge ressemble à un émigré italien, le cheveu brun et épais, le visage rond, un peu corpulent, le sourire en coin. Ce curieux équipage semble être prêt pour jouer une sorte de folk, et la pochette pourrait le confirmer. Mais dès que le diamant se pose sur le vinyle, la guitare gronde et gargouille, la basse vrombit, la batterie tape. La voix de Shelley, aigu, naïve, semble être celle d’un enfant perdu, qui survole ce tapis de bombes sonores. Le premier morceau s’appelle Guts, boyaux en français. On peut dire que d’entrée, Budgie saisit à la gorge l’auditeur.
Sa musique est un étrange blues-rock lourd et menaçant, grondant comme un moteur de blindé. Même Black Sabbath n’a pas engendré une telle musique. Son troisième album, « Master Of Reality », doté du même son ultra-saturé et gras, sort à peine quelques semaines après ce premier album de Budgie, également produit par Rodger Bain. De là à dire que l’enregistrement avec Budgie aurait pu donner des idées à Bain pour Black Sabbath…jusqu’à ces pastilles acoustiques qui servent de soupapes de respiration au milieu de la heavy music. En cela, Budgie s’en sort mieux que Black Sabbath, car Shelley est un merveilleux compositeur folk. On retrouve ainsi les superbes Everything In My Heart et You And I, mais aussi la dualité douceur-lourdeur avec The Author, où Budgie alternent les climats.
Le disque est hélas un four commercial, hormis en Australie où il accroche la 36ème place des classements alors que le pays bascule dans le heavy sound avec Billy Thorpe And The Aztecs, Coloured Balls et Buffalo. Budgie fera une de ses rares apparitions en France en jouant à la Taverne de l’Olympia en 1971.
Un avion de chasse
Rodger Bain est à nouveau à la création pour le second disque de Budgie, qui deviendra « Squawk ». Influencé par Humble Pie, Budgie fait glisser son heavy-metal vers une sorte de heavy-blues-soul. La fascination de Shelley pour Steve Marriott d’Humble Pie est telle qu’il nomme une de ses chansons : Hot As A Docker’s Armpit, une expression employée par Marriott dans une interview pour décrire la folie d’un concert.
La pochette est ornée d’un avion à réaction orange coiffé d’un crâne d’oiseau. Elle est l’oeuvre de l’artiste et génie psychédélique Roger Dean, qui sera notamment l’auteur des pochettes de Yes. L’avion de chasse semble mieux évoquer ce qui se trame sur le disque. Si « Squawk » semble plus aigrelet, moins frontalement heavy que le premier disque, très sabbathien dans l’esprit, il reste d’une puissance inouïe, avec des compositions plus élaborée. L’enchaînement Whisky River/Rocking Man est un sommet. Les capsules folk sont également superbes : Rolling Home Again, Young Is A World…
Et puis il y a le morceau final. Le premier album avait offert Homicidal Suicidal, repris par Soundgarden à presque chaque concert. Que l’on s’arrête d’ailleurs sur ce morceau au titre fou. Comment une telle chose a pu émerger en 1971 au milieu des hippies et des bonnes vibrations ? Le titre est presque un slogan. Le second album va offrir Stranded. Depuis oublié, c’est un torrent de brutalité. C’est presque du Motorhead avant l’heure. La basse et la guitare font jeu égal dans le riff. Tony Bourge s’enflamme comme un Eric Clapton, il est talonné par une percussion de double grosse caisse signée Ray Phillips. Le morceau est heavy, agressif… et puis il y a ces « toudou toudou toudou » sur le refrain. Et le morceau continue à ramoner le charbon. L’esprit de Burke Shelley semble partagé entre la brutalité sociétale de son environnement, et ses fantasmes de garnement, qui vont du riff assassin à la poésie folk. Stranded est un condensé total de ce qu’est Budgie, entre violence sonore, et mélancolie folk.
Ce second album est un nouveau four commercial, bien que sollicité comme un des albums majeurs du son heavy en 1972 par Rock & Folk. Le groupe ratisse encore le pays, et fait l’unanimité sur ses concerts. La promotion est totalement provocatrice : la perruche de Budgie en officier nazi, la cantatrice wagnérienne au visage de perruche qui dit « Eine Kleine Budgie Musik »…
En février et mars 1973, Budgie enregistre un nouvel album aux Rockfield Studios. La pochette sera encore signée Roger Dean, avec la perruche guerrière celte luttant avec un oiseau de proie, et un titre d’album percutant : « Never Turn Your Back On A Friend ». Sur cet album, Budgie inscrit un premier titre au nom curieux : Breadfan, qui signifie… Ventilateur. Il sera repris par Metallica. Le morceau est composé de deux phases distinctes : une première ultra-électrique et abrasive, la seconde acoustique et mélancolique. Deux ans plus tard, Black Sabbath fera exactement de même sur son morceau Symptom Of The Universe.
Budgie commence également à y développer plus largement ses morceaux épiques de six minutes et plus, au nombre de quatre sur sept. Il y a bien sûr Breadfan, You’re The Biggest Thing Since Powdered Milk, In The Grip Of A Tyrefitter’s Hand et Parents. Tous deviendront des classiques sur scène, avec leurs longs développements électriques. « Parents » réussit le tour de force de croiser électricité et mélancolie folk propre aux chansons plus courtes.
Depuis fin 1972, un projet de première tournée américaine est dans l’air. Elle capote par deux fois, la seconde car « Never Turn Your Back On A Friend » n’est pas distribué aux USA. Secrètement, cela convient bien à Ray Phillips, qui, très ancré au Pays de Galles, n’a pas envie de se déraciner trop longuement de sa famille. Mais il sait que tôt ou tard, la dite tournée américaine arrivera, et il sera mis au pied du mur. Il décide donc de prendre les devants, et annonce fin 1973 qu’il quitte Budgie.
Tempête sous les crânes
Il est rapidement remplacé par Pete Boot. Un peu trop rapidement d’ailleurs, car la greffe ne prend pas. Bien qu’excellent batteur, plus technique, il s’oppose régulièrement à Bourge et Shelley. Cela ne les empêche pas d’enregistrer ensemble un de leurs grands classiques : « In For The Kill ». Brutal quasiment de bout en bout, hormis la capsule folk mélancolique Wondering What Everyone Knows, il n’est constitué que de charges électriques redoutables, dont le dantesque « Zoom Club » et ses presque dix minutes de folie heavy. Le nom du morceau est inspiré d’un club de Francfort où le groupe a joué régulièrement les années précédentes. Le disque contient aussi le mythique Crash Course In Brain Surgery, morceau rendu célèbre par Metallica, qui l’a repris dès 1987. Ce curieux morceau de deux minutes et trente secondes, ultra-brutal, est en fait un simple paru en 1971, et ne figurant alors sur aucun album. Budgie trouvait cela dommage, il trouva logiquement sa place sur cet album au contenu au diapason.
Le travail finit finalement par payer, puisque l’album atteint la 29ème place des ventes d’albums en Grande-Bretagne. Sans avoir fait la moindre concession musicale, Budgie est sur le point de s’imposer. Il retourne rapidement en studio pour boucler un nouvel album. La question du batteur doit être soldée, et Boot est remplacé par Steve Williams, solide batteur à la rythmique impeccable.
« Bandolier » atteint la 36ème place des ventes en Grande-Bretagne. Le contenu du disque offre de superbes morceaux heavy et épiques, dont l’extraordinaire Napoleon Bona Part One And Two, qui est un de leurs grandes œuvres. Parallèlement, Budgie flirte avec des sonorités plus funky, qu’il croise avec son heavy-metal. Cela donne notamment l’excellent Who Do You Want For Your Love ?.
Néanmoins, le disque n’est toujours pas poussé aux Etats-Unis par MCA, et Budgie commence à perdre patience. A la fin de l’année 1975, Budgie signe avec A&M, le label voulant les promouvoir sur le continent américain. A ce titre, il s’engage à racheter les droits de « Bandolier » pour le sortir là-bas. La perspective d’un vrai succès commercial d’envergure requinque tout le monde, mais les membres du groupe entame une période complexe : tous se retrouvent plus ou moins en même temps à divorcer. Aussi, lorsqu’il faut retourner en studio pour un nouvel album, les musiciens n’ont pour la première fois rien de prêt, juste deux bouts de chansons datant du disque précédent. Il faut donc composer en direct, toujours aux Rockfield Studios, dans un état d’esprit général pas vraiment positif. Budgie pense alors que A&M va publier « Bandolier » aux USA en attendant, mais il n’en sera rien. Le dit album sera publié là-bas après le nouvel enregistrement, ce qui sera considéré par Budgie et son management comme une erreur stratégique majeure.
« If I Were Brittannia I’d Waive The Rules » sort en avril 1976, et échoue dans les charts, atteignant une laborieuse 73ème place en Grande-Bretagne. Si globalement, l’album est très bon, il marque le pas par rapport à ses illustres prédécesseurs. Le groupe a notablement fait évoluer sa musique faire un heavy-metal funk, dont les titres sont plus simples dans leurs structures. Les bonnes choses sont toutefois encore légion : Ann Neggen, If I Were Brittania I’d Waive The Rules, Sky High Percentage, Black Velvet Stallion. Toutefois, mieux distribué, le groupe gagne une solide base de fans aux Etats-Unis, sans perdre celle en Grande-Bretagne. Rapidement, Budgie décide de s’installer au Canada, dans l’Ontario, où il est plus facile de rayonner pour aller tourner aux Etats-Unis. Budgie sont quatre sur scène depuis la fin 1975, avec l’arrivée d’un second guitariste uniquement pour les tournées : Myf Isaac.
A la conquête des USA
Les dix-huit mois qui suivent sont exclusivement consacrés à la scène sur le continent américain pour bonne part, et une série des universités britanniques en avril et mai 1976 pour conserver le lien. Le groupe est aussi une des têtes d’affiche du festival au château de Cardiff avec Status Quo et Hawkwind. Toutefois, le groupe n’est plus suffisamment en Grande-Bretagne pour voir arriver le punk qui bat son plein en 1977.
Le groupe se consacre alors à son invasion du continent Nord Américain, avec toujours plus de dates. Le groupe capte « Impeckable », qui sort en février 1978, au Springfield Sound Studio dans l’Ontario. Budgie y poursuit avec davantage d’inspiration que sur son prédécesseur la mixture heavy-metal/funk qui sur ce nouveau disque, carbure à plein. Melt The Ice Away, Love For You And Me, All At Sea, Pyramids, Smile Boy Smile, Don’t Dilute The Water sont autant de nouveaux excellents morceaux à intégrer aux set-lists de concerts.
Toutefois, le cours de l’année 1978 va être une succession de tuiles qui va mener Budgie aux portes du split. D’abord, c’est le départ de Myf Isaac suivi de près par Tony Bourge, tous deux épuisés par les tournées incessantes entre les deux continents. Et puis c’est A&M qui décide virer Budgie. A l’été 1978, Burke Shelley et Steve Williams se retrouvent seuls. Une série de dates est prévue en Grande-Bretagne, il faut donc recruter. Pendant quatre semaines, Shelley et Williams auditionnent quasiment tout et n’importe quoi, au bord du désespoir. Finalement, se présente Rob Kendrick, ancien guitariste de Trapeze. Ce dernier est un groupe originaire de Birmingham qui révéla notamment Glenn Hughes avant que Deep Purple ne leur vole en 1973. Le groupe a connu un succès bien plus grand aux USA, et notamment au Texas, qu’en Grande-Bretagne. Kendrick vit d’ailleurs à Dallas, et n’a pas abandonné l’idée de réussir, musicalement parlant, aux Etats-Unis.
Kendrick joue magnifiquement le répertoire de Budgie, et il est aussitôt embauché. Toutefois, les tournées qui vont suivre vont révéler son vrai caractère. Sûr de lui, persuadé de son talent, manipulateur, il tente de faire de Budgie sa chose. Les quelques démos destinées à un nouvel album le voit chanter à la place de Shelley sur la majorité des compositions. Il emmène également clairement Budgie sur le terrain du hard-funk à la Trapeze, l’éloignant de ses rivages heavy-metal et de sa personnalité musicale unique.
Des dates sur le continent américain et les îles britanniques sont programmées, mais il est de plus en plus clair que Kendrick n’est pas l’homme qu’il faut à Budgie. Il s’en va finalement de lui-même fin 1979, voyant le groupe végéter, toujours sans label. De nouvelles auditions ont lieu, et cette fois, l’homme providentiel se présente : il s’appelle Big John Thomas.
Un nouveau guitariste providentiel
Thomas n’a pas spécialement le profil du guitar hero de l’époque, à la Eddie Van Halen ou Randy Rhoads. Surnommé Big John pour sa bonne bouille moustachue, il vient d’un groupe à la petite réputation nommé Georges Hatcher Band. Fort de trois albums, dont les deux premiers avec Thomas, le Georges Hatcher Band va assurer la première partie de Ted Nugent et AC/DC en 1977.
La rencontre entre Budgie et Thomas s’effectue le 16 août 1979. Le trio joue au club Music Machine à Londres, toujours avec Rob Kendrick à la guitare. Le groupe Bombshell, la nouvelle formation de John Thomas, se produit en première partie. Le technicien du son fait du tellement sale boulot durant leur set, que Thomas jette sur lui son pédalier de guitare de colère. Steve Williams assiste à la scène, et se dit que ce garçon a décidément de l’attitude. Ce sera l’argument qui va séduire Burke Shelley pour auditionner Thomas.
Big John fait le trajet depuis Birmingham dont il est originaire, et se présente début décembre 1979 dans un lieu étrange. Il s’agit d’un pensionnat de personnes âgées de Cardiff. Il y trouve Shelley et Williams dans la salle de spectacle de la maison de retraites, louée pour les auditions. Vendeur dans un magasin de musique, Thomas a amené son matériel en bon professionnel : amplis, guitares, pédales. Malgré l’aspect vieillot du lieu, le son est époustouflant. Sérieux, Thomas a aussi travaillé des morceaux de Budgie, car il ne connaissait que très vaguement le groupe. Tous ces points, plus sa sympathie naturelle, vont en faire le candidat idéal. Il est aussitôt embauché, et les jours d’auditions se transforment en répétitions en vue d’un premier concert le 15 décembre 1979 à Birmingham.
Budgie est alors en plein dans la tourmente de la scène anglaise. Après avoir subi la vague punk, rejetés comme des vieillards un peu prog du rock, le trio est en pleine déconfiture avec Kendrick alors qu’émerge la New Wave Of British Heavy-Metal (NWOBHM). Plusieurs formations anglaises confirmées ont su tirer profit de ce nouvel élan du hard-rock et du heavy-metal, en Grande-Bretagne comme aux USA. UFO est en train de s’imposer avec son double live « Strangers In The Night » aux Etats-Unis. Thin Lizzy, qui a quelque peu foiré sa conquête américaine, connaît un beau succès européen avec le splendide « Black Rose ». Motorhead impose le son de la nouvelle génération heavy, lourd et punk, avec l’album « Overkill ». Quant aux copains du Black Country Judas Priest, qui firent plusieurs premières parties de Budgie entre 1973 et 1975, ils sont en train de s’imposer aux USA, En Grande-Bretagne, et même au Japon avec leur live « Unleashed In The East ». Budgie fait partie de ces prestigieux vétérans, appartenant à la seconde vague hard anglaise, coincé entre la première dominée par Led Zeppelin, Deep Purple, et Black Sabbath, le punk et la nouvelle génération qui pointe déjà le bout de son nez, piétinant en attendant que le punk dégage des clubs.
Le concert du 15 décembre 1979 à Birmingham au Bingley Hall est presque un fantasme pour les fans de heavy-metal de cette période dorée du début de la NWOBHM. On trouve ainsi un quasi festival, avec Jameson Raid, pionnier culte du style issu du Black Country, et surtout Samson et Iron Maiden. Les répétitions à l’hospice ont soudé le trio. Shelley et Williams ont retrouvé avec Thomas le même niveau d’alchimie qu’avec Tony Bourge.
Si Budgie est très respecté par ses premières parties, notamment le bassiste Steve Harris d’Iron Maiden qui est un grand fan, le trio n’a pas l’intention de jouer les crooners sur le retour. Cela ne fait pas partie de l’ADN de Shelley, petit bonhomme incroyablement déterminé. Il porte son groupe sur ses épaules depuis 1967, il n’est pas question de faire de la figuration. Le répertoire de scène est revisité, et ce soir-là, Budgie joue heavy. On y trouve les riffs tranchants, mais aussi un le talent tout personnel de Thomas à injecter de la rage et du hard-blues dans les coins. Techniquement, il est un bien meilleur musicien que tous ses prédécesseurs, mais n’en fait pas la démonstration crâneuse. Il est au service du groupe et de sa musique, que ce soit dans son jeu comme dans son attitude. Et cela plaît énormément à Shelley et Williams. Si le concert a connu quelques bégaiements, normal après à peine deux semaines de répétitions pour se mettre en place, le résultat est déjà impressionnant, notamment sur des morceaux comme Parents.
La renaissance
Début 1980, Budgie est en plein coeur de la NWOBHM. Les membres se reconstruisent rapidement, et le contexte leur est favorable. Malgré leur carrière déjà longue pour un groupe de rock de cette époque, ils ont aussi la rage au ventre. Et cela ne dépend pas uniquement de l’arrivée de John Thomas à la guitare. Burke Shelley bouillonne des échecs passés, toute cette musique, toutes ces tournées à cravacher dans le mépris le plus total, à part celui de John Peel de la BBC, qui les adore, ou Kid Jensen qui les a soutenu à leurs débuts. Ils sont revenus penauds du continent américain. Ils ont embauché un type, Rob Kendrick, qui n’a fait que les mener nulle part. Ils ont perdu femmes et enfants à tenir bon la ligne de Budgie. Et les voilà en 1980, treize ans après les balbutiements de Hill’s Contemporary Grass en 1967, à devoir ferrailler dans les clubs à côté des jeunes groupes comme Iron Maiden, Def Leppard, Samson ou Saxon (dont certains membres ne sont pas si jeunes, par ailleurs).
Shelley sait qu’il a de l’expérience, et deux brillants musiciens à ses côtés. Il laisse donc la place à la fureur de la vengeance d’un destin trop mesquin. Une petite déconvenue va commencer l’année. Thomas et Shelley pensent qu’il faut embaucher un vrai chanteur-hurleur pour être en phase avec le heavy-metal du moment. Thomas connaît un gars qui bosse dans un garage, et qui a fait partie de groupe de hard-glam nommé Geordie. Cet homme s’appelle Brian Johnson. Shelley et Thomas le rencontrent dans un pub après le travail. Johnson vit chez ses parents à trente balais, et la proposition de Budgie l’intéresse. Il ne donnera toutefois pas suite, car il sera embauché quelques semaines plus tard pour être le chanteur d’AC/DC.
Shelley abandonne rapidement l’idée du chanteur, et se consacre à la composition. Ils sont signés par la sous-division de la major RCA nommée Active. La raison ? Elle a été formée par les frères Charles et Kingsley Ward, également propriétaires des studios Rockfield à Monmouth, où Budgie enregistra tant d’albums.
Aussitôt, il est proposé à Budgie de capter un EP en éclaireur pour rappeler aux fans de heavy-metal que Budgie est toujours vivant. Le trio ne va pas faire dans la dentelle. Capté par Kingsley Ward lui-même aux Rockfield Studios, le groupe offre quatre morceaux. Il n’y a aucun temps mort ni ballade, juste du heavy-metal direct et sale. Le EP croise cet esprit et celui des noms tordus de chansons de Shelley. Il s’appelle : « If Swallowed, Do Not Induce Vomiting ». Le trio pose sombre, en jeans et blousons de cuir, avec une tête de mort comme seul avertissement sanitaire.
Quatre uppercuts musicaux se succèdent, comme un mélange d’AC/DC et de Judas Priest, mais toujours avec cette patte unique. Wildlife est un galop terrifiant de cinq minutes, sans répit, alternant riffs et solos de Thomas. High School Girls est une fantaisie salace à la AC/DC. Le plus emblématique des morceaux sera Panzer Division Destroyed, justement pour sa référence à l’armée allemande de la Seconde guerre mondiale. Shelley ne fait qu’y conter une histoire de guerre, mais la référence à l’armée allemande nazie n’est autre qu’une provocation punk. Ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il est aussi un précurseur sur ce type de sujet de chansons, par la suite largement employé dans le heavy-metal et le thrash-metal.
Budgie se rôde sur scène comme un damné. Le trio carbure à pleins cylindres, et se remet définitivement en scène au coeur de la NWOBHM. Preuve de ce retour, Budgie est à l’affiche de l’édition 1980 du festival de Reading au milieu des nouvelles figures du heavy-metal anglais : Iron Maiden, Def Leppard, Angelwitch, Sledgehammer, Tygers Of Pan-Tang, Praying Mantis, mais aussi de vieux briscards du son heavy qui connaissent un nouveau souffle : Gillan, Whitesnake, UFO. D’ailleurs, là, au milieu du public, un drapeau émerge. Il est écrit : « Budgies eat Whitesnakes ». La performance enregistrée par la BBC ne laisse aucun doute. Solidement campé sur une section rythmique en béton armé, John Thomas offre un festival de riffs et de solos abrasifs. Burke Shelley, galvanisé par son nouveau guitariste, fait désormais front sur le devant de la scène, et s’affirme encore un peu plus comme un vrai frontman.
La quintessence du nouveau groupe sort le 10 octobre 1980. Il s’agit de « Power Supply ». ce qui avait été défini sur le EP se confirme, avec encore plus de force et de talent. Il y a les titres uppercuts comme Forearm Smash ou Power Supply. Il y a aussi les virulences proto-thrash époustouflantes comme Hellbender, Gunslinger, ou Crime Against The World. Il y a enfin ces alliages entre électricité et écriture folk, qui fut l’une des qualités de Shelley. Elles se rejoignent désormais, se synthétisent, et donnent les superbes Secrets In My Head ou Time To Remember. Cette dernière chanson est l’expression la plus pure de la power ballad, à la fois intensément mélancolique et hard. Le son est dur, sans concession. La pochette, signé Adrian Chesterman, également auteur de la pochette de « Bomber » de Motorhead l’année précédente, reflète bien toute la puissance de Budgie sur scène, confirmé par le verso, une photo prise au Lyceum de Londres le 29 juin 1980.
L’album rencontre d’excellentes chroniques dans la presse musicale anglaise, et notamment chez ceux qui soutiennent la nouvelle scène heavy. « Power Supply » fait forte impression, considéré comme l’un des disques les plus puissants de l’année, dépassant même le premier Iron Maiden, ou le second disque de Saxon, « Wheels Of Steel ». Budgie a su retrouvé sa force, galvanisé par les embûches du passé et l’arrivée d’un brillant guitariste, élément indispensable à l’alchimie de ce nouveau disque. « Power Supply » a le souffle de « Back In Black » d’AC/DC, et la dynamique et le côté dangereux et sale des jeunes formations de heavy-metal anglaises.
Budgie connaît déjà la reconnaissance dans le milieu musical. Il est invité à assurer la première partie de la tournée anglaise d’Ozzy Osbourne, qui vient de monter son nouveau groupe Blizzard Of Ozz après son départ de Black Sabbath avec le jeune prodige de la guitare Randy Rhoads. C’est grâce aux connaissances de John Thomas que le trio bénéficie de cet honneur en septembre 1980. Vendeur d’instruments à Birmingham depuis des années, il connaît bien les membres de Black Sabbath, dont Ozzy Osbourne, qui passent prendre du matériel, pour discuter, ou manger un morceau avec lui.
Lorsque Blizzard Of Ozz, alors à peine connu, tente sa chance en Grande-Bretagne, c’est donc Budgie que l’on appelle. Aussitôt, certaines dates, comme l’Hammersmith Odeon de Londres, le Birmingham Odeon, ou Glasgow, affichent complet. Durant ces dates va naître une vraie amitié entre Thomas et Randy Rhoads, et Budgie sera appelé à jouer avec Ozzy Osbourne à plusieurs reprises.
Un son plus américain
Pour les premières formations émergeant de la NWOBHM, c’est déjà l’heure d’une nouvelle étape : réussir aux USA. Si la Grande-Bretagne, qui sort du punk, a accroché à Motorhead, Saxon et Iron Maiden, il n’en est pas de même sur le continent américain. Les groupes de rock rois dans les charts sont Foreigner, Journey, Heart, Fleetwood Mac et Genesis. Il faut donc faire en sorte de se montrer plus mélodiques, adoucir quelque part, tout en gardant du mordant, mais pas trop non plus.
Un drôle de compromis va donc se faire de la part des groupes de hard-rock anglais, un alliage subtil entre mélodie et brutalité. La ligne de conduite est fine. Un ingrédient en trop, et c’est soit le disque trop hard et impassable par les radios US, soit le tube hard-FM trop calibré. Les groupes ne veulent pas perdre leurs crédibilités chèrement acquises en Europe, si jamais le succès américain ne venait pas. Ainsi vont sortir une série d’albums synonyme de ce fin mélange : « Slide It In » de Whitesnake, « Hold On » de Trapeze, « Abominog » de Uriah Heep, « Diary of A Madman » d’Ozzy Osbourne, « The Wild, The Willing And The Innocent » et « Mechanix » de UFO, « Straight Between The Eyes » de Rainbow, et bien évidemment Budgie, avec ses deux albums suivants.
Active veut envoyer Budgie réussir aux USA. Mais pour cela, il faut que le trio s’impose en Europe de manière évidente, ce qui n’est pas encore le cas. Si leur nom remplit les salles, que ce soit en tête d’affiche ou en première partie, les ventes d’albums restent modestes. On ne peut même pas soupçonner une mauvaise prise de son. Les disques sont parfaitement représentatifs de ce que Budgie offre sur scène. Pourtant, ils ne sont pas de gros vendeurs de disques, malgré leur identité forte. Ils sont même les précurseurs de la mascotte. Budgie a sa perruche sur toutes ses pochettes. Iron Maiden aura son fameux zombie : Eddie The Head. Ce dernier sera d’ailleurs dessiné par Derek Riggs, artiste qui signe la pochette du nouvel album de Budgie : « Nightflight ».
Le contenu de ce disque conserve la puissance de « Power Supply », mais il est incontestable que le son est plus américain, moins brutal, plus ample. Il s’agit littéralement d’un nouveau chef d’oeuvre de Budgie, toujours capté aux Rockfield Studios. Shelley et Thomas signent toutes les compositions. Richard Dunn, un musicien de Cardiff, vient apporter les quelques touches de claviers nécessaires, comme il le fit sur « If I Were Brittania I’d Waive The Rules » en 1976.
Le disque commence par la superbe power-ballad « I Turned To Stone », qui se termine en cavalcade de guitare. La finesse mélodique s’incruste dans tous les morceaux, qui gardent leur puissance heavy à tous les étages : Reaper Of The Glory, She Used Me Up, Superstar, Change Your Ways. Le don mélodique de Shelley fait merveille dans ce heavy-metal subtil. Apparatus est de cette espèce nouvelle, brillant alliage de rock mélodique gorgé d’orage électrique.
Le trio n’a pas non plus oublier son identité pour les sessions photos. Les jeans rapiécés ont laissé la place à l’uniforme heavy : bottes de cuir, perfecto, jeans. La session de 1981 sur un pont est significative du Budgie de l’époque : brutal, sans concession. Ils ne jouent pas un rôle. Ils sont dans leur élément, aussi heavy dans le look que Motorhead à la même époque, les cartouchières à la ceinture en moins. Le malingre Burke Shelley a encore gagné en charisme. Le cheveu plus court, il est cet étrange bonhomme teigneux qui gueule le heavy-metal. Sa voix a perdu son aspect enfantin. Toujours aigue, elle s’est légèrement voilée, lui donnant encore davantage de charisme.
Budgie est partout sur scène, et surtout avec les meilleurs groupes : Saxon, Riot, Ozzy Osbourne, que ce soit en tête d’affiche ou en affiches communes. Car il n’est plus possible pour certains groupes de rabattre Budgie à une sorte de première partie. Il s’agit de co-headlining. Ce premier pas vers un rock plus mélodique porte ses fruits : « Nightflight » accroche la 68ème place des ventes en Grande-Bretagne. C’est encourageant, vu que le disque précédent n’a été classé nulle part.
Ultime tentative de conquête
La dynamique est excellente, et RCA met le paquet. Budgie enregistre un nouvel album dans la lignée de son prédécesseur. Mais cette fois, les claviers seront plus présents. C’est Duncan MacKay de Camel qui s’en occupe. Considéré comme un album FM, « Deliver Us From Evil » est un nouveau chef d’oeuvre, beaucoup plus marqué par son époque. Les synthétiseurs sont plus présents, le côté mélodique gagne encore, notamment via les choeurs, comme sur Bored With Russia. Les uppercuts sont encore bien présents, notamment avec Don’t Cry et Hold On To Love. L’album est une vraie réussite, notamment dans l’équilibre de l’utilisation des sons électroniques dans du heavy metal percutant. Car Budgie n’a absolument pas baissé la garde sur ce point, même si les fans du groupe le considéreront comme l’album le plus consensuel de leur discographie.
Les chroniques sont une fois de plus élogieuses. Ozzy Osbourne les convie en première partie de son concert à l’Hammersmith Odeon, cette fois aussi en hommage à Randy Rhoads, mort quelques mois plus tôt. Le trio bénéficie aussi de son glorieux passé en devenant l’un des rares groupes occidentaux à venir jouer en Europe de l’Est. Les Rolling Stones eurent cet honneur en 1967, Eric Clapton en 1979.
Budgie est invité à une tournée de quinze dates en Pologne. Le trio découvre qu’ils y sont des superstars, et ce grâce à Radio Luxembourg. La radio frontalière avait notamment un DJ, Kid Jensen, qui dès 1971, programma du Budgie en boucle. Les pays de l’Est, bien que verrouillés, pouvaient capter Radio Luxembourg via les grandes ondes. Et ainsi, Budgie y deviendra une star. Début août 1982, le trio débarque en stars du rock : voyages en avion, grand hôtels, salles prestigieuses combles.
Budgie y vit ce qu’il n’a jamais pu connaître depuis quinze ans : la reconnaissance et le succès public. Malgré les belles salles et les premières parties prometteuses, Budgie reste un groupe laborieux, qui doit sans cesse prouver sa valeur, redoublant d’énergie et de créativité, alors que d’autres groupes n’en font pas tant pour être entendus. Ce sera toute l’amère destinée de Budgie : reconnu des fans et d’une multitude de groupes prestigieux comme Iron Maiden, Metallica, Megadeth et Soundgarden, ils ne connaîtront jamais la reconnaissance majeure qu’ils méritaient.
Disparition discrète
L’échec de « Deliver Us From Evil » et la tournée qui suivra, malgré le méga-show en tête d’affiche du festival de Reading 1982 avec guitare Flying V géante qui descend du ciel et costumes de scène, n’y feront rien. Tout s’effondrera progressivement autour du groupe. Les nouvelles démos, brillantes, bien dans la lignée de « Deliver Us From Evil », ne convaincront pas Active de poursuivre. Budgie continue de s’accrocher comme en 1979, espérant un contrat. Le groupe joue encore régulièrement entre 1983 et 1985. Mais leur musique n’intéresse plus personne, à part un noyau de fans. Finalement, Budgie officialise sa séparation en 1988.
Le trio se reformera à la fin des années 1990 dans sa configuration Shelley-Williams-Thomas. Le live « Life In San Antonio » est encore la preuve que Budgie est une formation culte à plusieurs endroits du monde. Là encore, c’est un DJ local qui fera leur réputation dans cette ville américaine en les diffusant sur les ondes régulièrement.
John Thomas n’y tient plus la guitare, parti pour raisons de santé, et remplacé par Andy Hart en 2002 et 2003. En 2006, Budgie publie un nouvel album nommé « You’re All Living In Cuckooland », avec Simon Lees à la guitare. L’album est… intéressant. Assurément, Budgie n’a pas voulu recycler ses anciens riffs, mais a eu le courage de proposer une musique plus moderne. Toutefois, le son des guitares est un peu trop surchargé d’effets. Budgie continue à tourner, d’abord avec Simon Lees, puis avec Craig Goldy à la guitare. Puis Budgie s’arrête en 2010. Burke Shelley est atteint d’un anévrisme sérieux, et toute fatigue excessive ou mouvement brusque pourrait le conduire directement à la mort. Il se replie dans sa famille. Il s’éteindra douze ans plus tard, s’effaçant aussi discrètement que son groupe.
7 commentaires
Bien meilleur dans les Banshees !
marcel t une kraute kreature
Bah za vaut mieux qu’être un zyber klik, non ?
pas dako vive les’zybers’ attacks va rendre les collections & essaie de maigrir comme l’acteur makeup ketchup
Va mourir fils de pute
T’es qu’un pauvre facho qui s’ignore, trou du cul
Et t’as vu moi je me cache pas derrière mon écran grosse pelle à merde