Nous y voilà, après deux EPs, Chester Remington signe son premier album, « Almost Dead ». Pari réussi pour Odilon Horman qui confiait en 2022 vouloir mélanger les approches musicales des années 60 et 90 dans ses chansons un peu barrées. 

Désormais, Chester Remington sera toujours assimilé à ce volatile anthropomorphe affublé d’un ciré jaune qui incarne de manière allégorique l’aboutissement musical d’Odilon Horman. Le multi-instrumentiste autodidacte qui provient de la scène de Reims, plutôt inventif et sacrément déterminé, s’est acharné à accompagner divers groupes pendant des années – notamment Grindi Manberg, Den House ou Black Bones en tant que batteur – avant de gagner assez d’estime pour ses compositions et lancer son projet personnel en 2019. « J’avais envie de faire mon style et puis un groupe avec mes règles », confiait-il au micro de Radio Campus Bordeaux. Le Rémois fonce alors comme un goéland sur la gaufre d’un vacancier un jour de beau temps dans une station balnéaire.

Il n’attendra pas de recevoir la bénédiction d’un label et autoproduit son premier EP, baptisé non sans ironie « Nobody Cares About My 4 Tracks Record ». Il s’entoure dès lors de Renaud Drapier (chœurs et claviers), Paul Villars (deuxième guitare), Julien Brochard (batterie) et Thomas Gossein (basse) pour interpréter ses propres créations musicales. 

Son coup de bec audacieux s’avère aussi fructueux que ne l’est pour un canard l’arrivée d’un retraité armé d’un morceau de pain rassis au bord de la mare. Le personnage au second degré déglingo qui se distille dans ses morceaux rock aux diverses influences commence à cette altitude son vol de croisière. L’anonymat du second couteau se mue en curiosité pour ce Chester Remington qui se démarque de ses congénères par l’esthétique originale et le caractère fantasque de ses compositions. Pour son deuxième EP qui sort sur Le Cèpe Records en 2022, il esquisse d’autant plus son identité sonore et, avec le titre Beach dans lequel il s’applique à crier comme une mouette dalleuse, son alter ego à tête d’oiseau.

Oiseau migrateur

Après « Doldrums », Chester Remington voit sa popularité s’envoler dans le circuit indé hexagonal et ce drôle de volatile vient migrer vers le doux climat de Howlin Banana qui signe une collaboration avec le label d’un territoire ensoleillé, À Tant Rêver du Roi, pour sortir son premier album. Coup du hasard ou complot de la confrérie Remington qui s’arrache au soleil, le fabricant d’armes qui a fait connaître son nom au monde entier annonce délocaliser ses usines de production séculaires d’Ilion dans le nord de l’État de New-York pour le deep south, en Georgie. 

En fait, ce n’est pas tellement les influences qui varient entre pop, psyché, garage, grunge ou quelques éléments empruntés au post-punk qui font de Chester Remington un parti intéressant mais les dynamiques versatiles de ses morceaux, la passion d’Odilon pour les onomatopées rythmiques au micro et les sonorités incongrues qui marquent un excentrisme à caractère psychédélique assez singulier. Celui qui confiait il y a deux ans lors d’une interview à Gonzaï : « mon kif ultime serait de faire un disque qui fusionne les sixties et les nineties, mais j’y suis pas encore arrivé », semble finalement s’y être plutôt bien pris sur « Almost Dead ».

Alors que de You Liar, Shake It ou Call 911 émanent les délires nineties avec une dimension un peu skate punk ou carrément grunge, Black Hole Fireworks se distingue par une construction beatlesque renforcée par les chœurs et ses « shalalalala lalala » d’une candeur digne des balbutiements de la pop. Life Is Weird, après son intro un peu à la 13th Floor Elevators, vient quant à elle sonner comme un groupe beat de l’époque enregistré en live.
Sur certaines chansons, ce sont ces deux faces qui se télescopent.
Chemicals débute avec une intro qui peut de manière capillotractée rappeler le Pink Floyd de Syd Barrett avant de filer dans le grunge de Kurt Cobain. Quel point commun entre ces deux légendes du panthéon rock ? Certainement leur santé mentale déliquescente.
Et justement, les questionnements à dimension introspective nourrissent les thématiques d’ « Almost Dead ». Sur
Love, titre d’ouverture de l’album, Odilon semble scander « It doesn’t make sense until it’s funny inside », formule qui pourrait tout à fait définir sa démarche musicale. Fort d’une nouvelle notoriété qui leur a permis d’ouvrir pour les Libertines à La Cartonnerie de Reims et à chercher à voler dans le sillage d’artistes maudits, souhaitons à Odilon de ne pas y perdre ses plumes comme ces figures consumées par un succès fulgurant dans le show-biz.

Chester Remington // Almost Dead // Sortie le 15 mars chez A Tant Rêver Du Roi et Howlin Banana Records.
https://howlinbananarecords.bandcamp.com/album/almost-dead

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