Avec « Satan’s graffiti or God’s art? », les Blacks Lips se sont mis à réfléchir d’une façon qu’on ne leur connaissait pas. Produit par Sean Lennon, ce huitième album studio accueille les contributions de Saul Adamczewski de Fat White Family mais également de « l’icône » Yoko Ono, mais ne nous promet rien de très rassurant pour la suite.

On les connaissait sales gosses (au propre comme au figuré), les voilà devenus aujourd’hui littéralement des « bad men ». Les Black Lips crachent, boivent et jouent toujours aussi fort qu’à leur habitude mais laissent désormais une impression en demi-teinte. Leur fougue et leur éthique punk semblent s’être pris une bonne claque. Surtout lorsqu’ils avouent sans remords « êtres des punks heureux et plus sensibles ».

Sensibles, peut-être malgré eux. En même temps, quand on travaille avec Sean Lennon et Yoko Ono, le résultat sera toujours un peu plus fleuri que d’habitude. Crystal Night en est la parfaite illustration avec ses faux airs de Beach Boys, et que le groupe assume complètement. Si le disque paraît plus lent, sur scène les Black Lips continuent de jouer vite, comme on a pu le constater lors de leur passage au Silencio à Paris le vendredi 7 avril. J’ai pu m’accaparer les 5 membres du groupe (depuis l’arrivée de Zumi Rosow au saxophone) le temps qu’ils digèrent leur repas pris sur le pouce.

Bon, ne vous inquiétez pas, je ne vais pas vous poser de questions au sujet du président Trump car on n’est pas là pour faire une interview politico-rock intelligente.

Jack Hines : Merci ! De toutes façons tu parles aux mauvais types si tu voulais des réponses intelligentes.

C’est pour ça que je vais plutôt me concentrer sur votre nouvel album : “Satan’s graffiti or God’s art ?” Pourquoi ce titre ?

Jared Swilley : En fait, on était en Amérique du Sud et en passant devant une église, on a vu un panneau d’affichage sur lequel était écrit une phrase que le prêtre avait prononcée. En le voyant, on a trouvé ça vraiment drôle et un peu psychédélique.

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Et les illustrations, la maison en feu, l’OVNI… ça veut dire quoi ?

Cole Alexander : On était tous à différents endroits à ce moment. Il fallait qu’on fasse une séance photo, sauf que c’était trop cher de voyager en avion chez chacun pour faire la couv’ de l’album. Donc on a juste pris des photos rapidement de chaque membre et on les a collées dessus comme ça. C’était vraiment pratique pour le coup. Mais après, concernant la maison en feu et le reste, il n’y a pas de signification.

Jared Swilley : Non, c’est juste purement esthétique.

Oakley Munson : Zumi et moi on est juste en dessous de l’OVNI et ça fait comme si on était piégés par le vaisseau.

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Mais est-ce qu’on peut dire que l’OVNI est une sorte de clin d’œil au fait que votre album soit différent de ce que vous faisiez avant ?

Jack Hines : Il a peut-être un champ plus élargi et une détermination plus profonde.

Oakley Munson : Yeah, quelques-unes des chansons sont de vraies classiques du 100% Black Lips alors que d’autres sont plus instrumentales avec des cordes, des cuivres et d’autres trucs dans le genre qu’on n’avait pas l’habitude d’utiliser avant.

Dans mon communiqué de presse j’ai lu : « Cet album est le plus évolué musicalement à ce jour mais ne renie pas pour autant les origines du groupe. » Question bête mais nécessaire donc, quelles origines ?  

Jared Swilley : Les origines ? Oh tu sais, Chuck Berry, Link Wray, tout ce qui touche au blues, à la country musique, au punk rock et tous les classiques de la musique américaine en fait. Oui, on peut dire que c’est ça nos origines, et parfois ça me rappelle même du Carl Perkins.

Vous êtes aussi souvent associés aux Kinks…

Jared Swilley : Ah oui ! Ça, ça peut être ok. C’est une comparaison décente, mais les Kinks nous ressemblent trop. Ils font la même chose que nous : de la musique basée sur les pionniers du Rock’n’Roll américain.

Pour cet album vous pouvez toujours dire que le style et les influences sont toujours les mêmes qu’à vos débuts ?

Jared Swilley : Je pense que nos influences sont restées les mêmes. J’ai toujours écouté le même genre de musique depuis que je suis un adolescent, donc je ne pense pas avoir élargi mon champ de connaissances tant que ça.

Cole Alexander : On a beaucoup été inspirés par Pete Drake qui est un guitariste de pedal steel qui a rajouté la talkbox à son instrument. Ça a donné un son nouveau et on peut dire que ça a été une grande inspiration pour nous pour le disque.

Justement, votre album a été produit par un certain Sean Lennon. Mais quand on écoute vos précédents morceaux et les siens, on se rend bien compte que ce n’est pas vraiment la même chose. Ce n’est pas un peu trop différent, justement ? 

Jared Swilley : Oui, mais on est restés les mêmes. Sean aime beaucoup les choses qu’on a pu faire jusque-là. Et puis tu sais, son père était un Beatles, ça a toujours été une grande influence pour nous et c’est pour ça je pense, qu’on avait à peu près des idées similaires lors de l’enregistrement.

Jack Hines : Je pense qu’on lui a pris une partie de ses arrangements fleuris mais aussi que d’un autre côté notre style a un peu déteint sur lui.

« C’était vraiment super de bosser avec Yoko Ono, elle a traîné avec nous, genre pendant trois jours il me semble ! Mais en même temps, il me semble que c’était leur maison… donc on était vraiment chez elle en fait. »

J’ai appris que Saul Adamczewski de la Fat White Family, ainsi que Yoko Ono, ont travaillé avec vous. Sur quelles chansons exactement ?

Jack Hines : Saul joue sur presque tout l’album. Yoko a participé sur le titre qui s’appelle Occidental Front et elle sera aussi sur une autre chanson qui n’est pas encore sortie.

C’est comment de bosser avec eux ?

Jared Swilley : Génial !

Cole Alexander : C’est vraiment super !

Jack Hines : Enchanteur, magique,…

Jared Swilley : Il s’avère que Saul vivait à ce moment-là chez Sean et on n’était pas au courant. Mais il s’est avéré qu’il était là tout simplement. Et tu sais, on s’est super bien entendus avec lui, tout comme avec Sean évidemment. Avec Yoko, c’était… c’était juste un honneur d’être dans le même studio qu’une icône comme elle.

Oakley Munson : Oui, on pensait qu’elle allait juste faire des apparitions ou à la limite, entrer, faire son truc et repartir tout de suite après. Alors qu’en fait c’était elle qui traînait le plus avec nous, genre pendant trois jours il me semble ! Mais en même temps, je crois que c’était leur maison donc on était vraiment chez elle en fait.

Jared Swilley : Je me souviens que quand on a connu Sean, c’était Mark Ronson qui nous avaient présentés, il y a presque sept ans maintenant. Et depuis on était restés amis. Un jour il m’appelle et me dit de venir bosser avec lui et quelqu’un de Fat White Family. C’était du genre : « Ok, vous voulez venir et peut-être enregistrer ? » C’était vraiment cool parce qu’à l’époque on n’avait pas de moyen d’enregistrer, car plus de label, et donc au final, ça s’est passé comme ça.

« On voudrait enregistrer un EP de musique country à Berlin. »

Sur le titre Crystal Night, on est sur quelque chose de plus lent qui rappelle un peu le style des Beach Boys, de Burt Bacharach et même de Buddy Holly. Vous assumez ce genre de comparaisons ?

Jack Hines : Oui, je peux entendre ça aussi, quelque chose comme les Beach Boys c’est sûr,…

Oakley Munson : Pour moi ça me rappelle plutôt du Harry Nilsson surtout quand on regarde de plus près les arrangements qui sonnent très années 1970, comme un rêve un peu pop.

Jared Swilley : C’est ma chanson favorite de l’album, parce qu’elle a un son vraiment beau et pourtant les paroles sont super tristes et tragiques.

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Ça va faire bientôt dix ans que vous êtes sur scène. Êtes-vous toujours les sales gosses avec ce discours « on est jeunes, américains et on se fiche de tout », ou vous vous êtes un peu calmés ?

Jack Hines : En fait, ça fait bien plus que dix ans. Je crois que c’est même dix-sept ans maintenant, et aujourd’hui ce qu’on peut dire c’est que nous sommes des « bad men » ! Aha.

Oakley Munson : And woman !

Vous venez tout juste de terminer cet album, vous allez enchaîner avec une tournée aux États-Unis ce printemps, c’est quoi la suite ? Vous comptez vous poser un peu ou avez-vous déjà un nouveau projet en tête ?

Jack Hines : On voudrait enregistrer un EP de musique country peut-être à Berlin cet été. Sauf que la tournée va nous fatiguer un max, mais on garde l’idée en tête.

Pourquoi de la musique country ?

Oakley Munson : Parce qu’on adore ça. Je pense qu’on peut faire une bonne version country des Black Lips, notre son irait vraiment bien avec celui des musiques américaines plus traditionnelles.

Jared Swilley : Et puis la musique country c’est dans notre sang. C’est un genre qui vient du sud des États-Unis et vu qu’on vient d’Atlanta en Georgie… c’est presque naturel.

Black Lips// Satan’s Graffiti or God’s art ? // Sortie le 5 mai chez Vice Records
black-lips.com

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