Les mauvaises langues souvent disent qu'un mois sans nouvel album de Bonnie Prince Billy c'est un peu comme un concert sans liste d'invités. Les mauvaises langues ayant souvent raiso

Les mauvaises langues souvent disent qu’un mois sans nouvel album de Bonnie Prince Billy c’est un peu comme un concert sans liste d’invités. Les mauvaises langues ayant souvent raison, Syd Charlus a délié la sienne: tentative de post-report à l’occasion du passage du barbu moustachu à la Cigale, avril 2009.

– Ta mailing list est impressionnante. Tu as vraiment beaucoup de contacts !

– Oh, pas tant que ça. Mais j’ai réussi à rassembler des gens très différents, c’est ça qui est sympa.

Mes voisins discutent. Ils ont le droit.

– J’étais plié de rire en lisant ton Facebook. « Matthieu a une humeur de bûcheron et une gueule de bois. » Trop bon.

Il faut que le concert commence. Un bruit doit en couvrir un autre, c’est dans l’ordre des choses.

Justement, premier morceau et avec lui tout est dit. Le groupe hésite, pédale d’abord dans le vide puis resserre les boulons. « Death to everyone ! ». Bonnie Prince Billy a cessé de chevroter et la version est parfaite. Triomphe, d’entrée. Seulement voilà, il faudra s’habituer à ces montagnes russes tout au long du show. Père très saint, par où avons-nous donc pêché pour mériter ce groupe : Will Oldham à la guitare avec un autre type discret, pas si mal, une violoniste qui assurera le « crincrin » country et un batteur… jazz, compétent, technique, affuté. Et le plus souvent ignoble. Pourquoi ce type refuse-t-il de cogner simplement, à peu près dans le temps, plus ou moins fort selon les morceaux, au lieu de nous imposer sa démonstration de singe savant. Pour faire Tim Hardin, jazz-folk ? Tu parles. Je commence à décrocher, dressant mentalement la liste des grands batteurs rock en activité. Il y a deux écueils en la matière: le technicien avec ses finasseries de cymbales, ses roulements incessants et le type pondu par le hardcore, qui joue toujours un peu trop vite. Steve Shelley de Sonic Youth est devenu un classique, notre Ringo Starr.

Coup d’œil vers la scène, Will Oldham s’empêtre dans l’un de ses travers bien connus : le chanteur triste, habité, qui en fait des caisses. Toujours son vieux problème de quantité : trop d’albums, trop de pseudos, trop de pathos. Divisé par deux, Will Oldham écrase une bonne partie de la concurrence. A plein régime, il se dilue, un vrai panaché, de l’eau dans le réservoir. Tout est question de dosage avec cet homme : écouter un album sur trois, sauter une chanson sur deux. Si on mettait les bouts, histoire de faire l’impasse sur une tournée ? Le Wepler n’est pas loin et, à cette heure, il donne son meilleur dans le registre « brasserie bouillonnante », porte battant à tout va, « chaud devant ! », avec son public du soir un tiers Théatre/un tiers Place de Clichy /un tiers Touriste, tous les âges sur des banquettes en moleskine, le contraire de cette Cigale trentenaire, graphiste, moustachue, uniforme, back to monochrome.

Tout est question de dosage, pas vrai ? Allez, on décampe. On comparera la taille de nos mailing list devant un plateau d’huîtres.

Pas si vite. Bonnie Prince Billy chope le col. «I don’t belong to anyone, there’s no one who’ll take care of me / It’s kind of easy to have some fun when you don’t belong to anyone : les trois voix chantent en harmonie, le batteur se fait discret. Ca y est, nous y sommes. Nous entendons de la country qui ne se prétend ni indie, ni « alternative ».  Oldham est l’un des derniers à pouvoir lâcher un classique, premier degré, sans clin d’œil et composé par ses soins. Peu après, I see a darkness débute. Il choisit de l’interpréter sans batterie, avec un violon sombre, mélodramatique. J’aurais aimé l’entendre autrement mais ce n’est pas moi qui décide, je ne suis pas sur scène et il y a sans doute bien des raisons à cette répartition des rôles. Par exemple, je n’ai jamais écrit : « Well, you’re my friend, and can you see ? Many times, we’ve been out drinking ; Many times we shared our thoughts. But did you ever, ever notice, the kind of thoughts I got ?” Et Johnny Cash n’est pas venu me proposer d’en faire un duo. Ce morceau, les Fleet Foxes ne l’ont pas, Conor Oberst, Radiohead, Jeffrey Lewis, Herman Dune, Blitzzen Trapper ou Piers Faccini encore moins. Depeche Mode fait des Unes de magazines –alors que l’échafaud attend leurs faces de boucs depuis 1985 – mais ne sait pas comment on l’écrit. Will Oldham, si. C’est aussi con que ça. Qu’on le veuille ou non, cet homme est sur le haut de la pile, malgré ses efforts pour noyer sa carrière sous les tics et les albums moyens. Suite du concert avec des hauts assez rares, des bas creusés profond et un rappel Nashville parfait dans son genre. Lumières, brouhaha, voisins :

– Demain, je le poke.

(London calling des Clash retentit en guise de sonnerie de téléphone)

– Allo, T’es où ?

Au Wepler, à côté de touristes hollandais, chantonnant I see a darkness sur la moleskine.

http://www.myspace.com/princebonniebilly

 

 

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