« Space is the place », disait l’autre. L’autre en question, c’est le regretté Sun Ra, mort voilà presque 30 ans et à qui un trio de blancs becs rend aujourd’hui hommage avec une K7 fumante qu’on aurait aimé pouvoir enfoncer dans un autoradio intergalactique du côté de Saturne, précisément là où « Switched on Ra » semble en orbite infinie.
Le nombre de définitions de ce qu’on appelle la « musique psychédélique » est au moins aussi important que le nombre de groupes affirmant en faire quand bien même ils ont davantage tiré sur la weed que sur le potentiomètre. Pour mieux comprendre, on peut s’en tenir aux pochettes du 13th floor elevators de Roky Erickson, on peut tout aussi bien se défoncer en réfléchissant au sens profond du « Taking Drugs To Make Music To Take Drugs To » de Sonic Boom ou l’on peut encore rester éveillé toute la nuit en regardant les longues improvisations nocturnes de Terry Riley, dans les années 70, sur des tapis et joints persans. C’est cette dernière version qu’on retiendra pour qualifier le « Switched on Ra » de Bitchin Bajas.
Depuis une dizaine d’année, leur musique expérimente cette zone obscure qu’on a pris l’habitude d’appeler la musique planante, faute d’autre qualificatif plus adapté. Disons que les tapis volants semblent ici plus adaptés qu’un tank à chenilles pour expliquer comment ces Américains sortis d’un sitcom fictif pour geeks névropathes sponsorisés par Yamaha réussissent à faire monter la sauce.
C’est notamment le cas, malgré quelques langueurs discographiques, sur ce nouvel album dont le mérite est qu’il restera quasiment inaccessible, puisque uniquement disponible physiquement en version K7. Excusez-nous, on n’a pas vraiment le temps de se lancer dans une digression sur l’évolution des formats ni sur l’éternel retour raté de l’analogique à bande, mais le fait est que oui, « Switched on Ra » est une belle torgnole de psychédélisme.
Inspiré par le grand maitre du soleil Sun Ra (disparu en 1993) mais aussi par Wendy Carlos (et notamment son « Switched on Bach »), le film sans images d’une cinquantaine de minutes qui est ici servi directement dans la rétine est sublime de bout en bout, du décollage à l’arrivée en somme. L’espace ? Oui, il en est clairement question sur ces 8 morceaux composés à partir de 19 modèles de claviers (des Rolands, des Korgs, des Casios, un MicroMoog, l’orgue Ace Tone ou encore le Crumar DS-2 qui, en dépit de son nom, ne désigne pas un méchant de la série Avengers). Et en trame de fond, on retrouve l’esprit très jardinier de Mort Garson, cet autre Américain dont l’essai le plus célèbre (« Plantasia ») consistait à aider les fleurs à grandir.
On ne vous conseillera pas de faire des boutures à partir de chacune des chansons de , « Switched on Ra », mais il y a là assez de THC pour une après-midi le cul coincé sur un divan, les yeux rivés sur le plafond. Arrivé là, on ne saurait pas trop dire quel est le vrai sens du mot psychédélique, ni si cet album sous le signe de la musique d’illustration saura trouver un large public ; ce qu’on sait en revanche, c’est qu’il distance assez facilement tous les albums d’autres imposteurs défoncés à la mauvaise herbe, jusqu’à réussir ce que le récent album de Marc Melià a partiellement raté : se plonger dans la matière noire et en ramener un moment lumineux, libre et sans arrières pensées. Thanks for the trip, captains.
Bitchin Bajas // Switched on Ra // Drag City
https://bitchinbajas.bandcamp.com/album/switched-on-ra
7 commentaires
acheté validé y’a 3 jrs-
gros pétard de nantes….
j’ai arrêté l’enregistrement au bout de dix minutes.
j’ai fait still flute de tenderlonious à la place.
+ le shit rend au minimum depressif et tu t’en rendras pas compte evidemment.
c’est ton corps qui baissera la dopamine en compensation. Tu te prendras pour qqun de dark,c’est bien ,t’auras des hauts des bas,et tu pourras siffloter bipolar babes en allant feed achim le sarrasin qui pourra faire son jihad contre ta petite gueule de pédale culturelle.
Belle musique
Une sorte de résistance au brouhaha général
Merci pour ce groupe que je ne connaissais point.
A peu près le seul groupe qu’on prend le temps d’écouter. En entier. Et de réécouter.
j’ai volé talking heads & devo a la mediatheque de Bérierres. (pas tous!)
la braguetta descendra d’entre t bas