(C) Gerard Love

Vous en avez marre des années 80 ? Remerciez le duo de producteurs dance Red Axes : les Israéliens ont décidé de regarder définitivement vers les années 90 avec un nouveau disque sous haute influence Chemical Brothers. C’est le moment de ressortir votre trousse Fido Dido et vos vieux t-shirt LC Waikiki.

Il y avait une rumeur qui courait au sujet de la marque de t-shirt à succès des années 90, LC Waikiki. Sur absolument tous les dessins représentant le singe mascotte, ce dernier y faisait un signe avec les doigts. Apparemment, cela s’apparentait à un hommage AU GRAND SATAN et ses cornes de Belzébuth.

Bien sûr, en fait il s’agissait évidemment du signe des surfeurs. Mais dans ma province des années 90, les kids que nous étions, étaient persuadés que c’était un truc vaguement satanique, un peu comme un message subliminal qui donnait un frisson de perversité à cette marque ; et donc un certain attrait à nos yeux.

Les couleurs flashy de ces t-shirt – orange ou rose, putain – semblables aux drogues de synthèse en vogue pendant ces années, allié à une certaine sympathie pour le Diable : c’est ce qui ressort aussi, trente ans après, avec ce nouveau disque des DJs-producteurs de chez Red Axes. Intitulé sobrement « Red Axes » – la marque des albums dit de la maturité, comme « Metallica » en 1991 ou celui de Céline Dion en 1992 – le duo de Tel Aviv a décidé de puiser son influence esthétique dans les années 90. Dès la première track, They Game, le ton est donné : un instrumental qui sonne comme une production indie-dance UK armé d’un sample vocal sur une rythmique baggy-dance circa 1991. Le disque se poursuit et ça continue ! Le morceau Zeze avec ses vibes psyché-909 et son riff de guitare garage sur motif breakbeat. Stick and Stone et son featuring vocal d’Adi Bronicki dont le phrasé mi-chanté, mi rappé prolonge l’expérience anglaise à la Basement Jaxx. Plus loin c’est le fantastique morceau Brotherwood, avec leur compatriote Autarkic qui se prend pour Bernard Summer derrière le micro pour une parfaite contrefaçon de New Order à la sauve Tel Aviv.

Red Axes Celebrate 10 Years with Dark Entries Album | XLR8RCette impression plus que persistante de se retrouver quelque part à en Angleterre en 1992 avec un bob Kangol sur la tête et des pilules dans la poche de notre pantalon baggy se précise en lisant les notes de pochettes de « Red Axes ». Comme un faisceau d’indices probants, le nom de Steve Dub y est crédité timidement pour le mixage de l’album. Who the fuck is Steve Dub ? Rien de moins que le collaborateur de l’ombre des Chemical Brothers. Ce discret producteur anglais a façonné et mixé toutes les productions des frères chimiques de Manchester, depuis leur premier album « Exit Planet Dust » en 1994 en passant par « Dig Your Own Hole » ou « Surrender ». En plus de ça, on trouve dans le CV de Steve Dub une certaine expérience qualifiante auprès des Stone Roses, The Prodigy, Leftfield, Death In Vegas, Moby ou New Order. C’est donc vers ce Steve Dub – qui est crédité comme la « troisième paire d’oreilles » des Chemicals bros – que les Israéliens ont remis leur album à mixer. Avec comme objectif de commande à demi avoué : le son UK 90’s à fond les ballons, please. Les Red Axes sont-ils de simples archéologues pop ?

Brothers Gonna Work It Out

Dans son manifeste du mouvement Futuriste de 1909, M.T Marinetti écrivait : « Admirer un vieux tableau c’est verser notre sensibilité dans une urne funéraire, au lieu de la lancer en avant par jets violents de création et d’action ». Rassurons-nous : aux niveaux « jets violents », Red Axes répond toujours présent. Ce n’est pas un simple disque de revival big-beat ou indie-dance, car les deux Israéliens – Dori Sadovnik et Niv Arzi – ont conservé leur patte sonore : ce côté bordélique et sale dans leurs productions. Leur approche de réalisation de morceaux n’est jamais parfaite mais au contraire toujours un peu bancale, comme si le tout sonnait de façon mal accordée et qu’il y avait toujours un instrument dans le lot qui ne joue pas dans la même partition. Si le duo décide de bosser avec un producteur qui a façonné ce son anglais des années des années 90, c’est sans doute pour mieux s’approprier cette palette sonore et de nous donner à entendre quelque chose de nouveau avec une sensation sensorielle de déjà-vu.

Après avoir sorti des disques sur leur propre label, les Red Axes sortent ce disque attendu chez les Américains de Dark Entries Records : les spécialistes des reissue new wave 80 obscures. On leur doit notamment la réhabilitation de centaines d’artistes dont le catalogue du Moroder-porno : Patrick Cowley. Les Israéliens ont décidé d’y poser leur valise le temps d’un album de new nave-falafel qui a été conçu pour une lecture domestique ou nomade, et non comme une collection de morceaux calibrés pour le dancefloor. Le seul défaut de ce disque est d’être trop court, les morceaux auraient pu demander à plus d’expérimentations sur des formats longs. Certains auditeurs tout tristes vont encore se plaindre devant cette muséification de la pop et ce malaxage sans fin du post-modernisme. D’autres, devant ce que l’essayiste Andreas Huyssen appelle un « boom de la mémoire », vont insoucieusement gober ces nouvelles pilules auditives signées par ces nouveaux magiciens. Et pendant ce temps-là, les horribles t-shirts LC Waikiki vintage des années 90 se revendent à prix d’or sur internet. Gloire à Satan.

Red Axes // Red Axes //  Sortie le 8 mai 2020 chez Dark Entries
https://red-axes.bandcamp.com/album/red-axes

Red Axes | Red Axes

 

 

3 commentaires

  1. Gérard, quand tu vas découvrir Beethoven, toutes ces merdes encensées vont certainement finir à la déchèterie du coin. Cela t’aura nourri pendant quelques temps (sans que jamais tu ne fasses la pute).

  2. Gégé quand tu vas t’apercevoir que « La danse des canards »est le premier tube de dance au monde
    ça va être un séisme, mec.

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