Lüger ? Phantom Band qui aurait croisé Black Mountain à la machine à café pour se lancer dans une longue discussion quant aux possibilités de délocaliser le rock stoner, kité kraut pour l’occasion, dans l’espace. En réalité, cette antenne musicale de la NASAP (Noise As Soon As Possible) est installée à Madrid. Et leur fusée n’est pas prête à décoller : elle est déjà partie.

Chronique depuis la stratosphère avec un tuba dans la bouche en guise de combi respiratoire (remember) et un drapeau Gonzaï dans la main, dès fois qu’on atterrisse sur une planète inconnue, de mémoire de Gonzaï boy pas une fois nous n’avons usé nos plumes sur du rock tortilla. Si l’Espagne était un fief du binaire, ça se saurait. En attendant, je me trouve quelque part entre la terre et el cielo et, nom d’un churros, mon Dieu que c’est beau. Pour en arriver là, moi et mon tuba avons pris place dans le compartiment Belldrumer Motherfucker, qui ouvre le disque. Drôle de décollage blip blip où des cyber-dauphins joueraient du synthé à coups de nageoires, en hommage à Stanley Kubrick. Le fader à moins dix, les fesses pas encore collées au fauteuil, on attend tout sourire d’entendre « Ignition ! » dans le haut parleur. A 6’16, Lüger enfonce le bouton « start » et on prend direct un coup de pédale de grosse caisse au cul. Vamos !

Tandis que la Terre rapetisse par le hublot, les joues plus tirées en arrière que celles de la mère de Sam Lowry, on mâchouille son tuba en pensant à Black Mountain qui ferait une overdose de café solo, à Queen of the Stone Age défoncé à l’hélium, et une fois son tuba bien réglé, on se demande déjà où l’on peut bien être. La réponse tombe, nette et sans bavure : dans ton Kyuss. Sur l’écran digital de la cabine, le nom de cette déflagration post-décollage défile : Monkey’s everywhere. On tourne la tête à droite, à gauche ; pas un singe en vue. On pense quand même à Pierre Boulle et, pour les plus jeunes, à Tim Burton. On n’a pas fini de se demander comment sera la Terre à notre retour, que débarque Dracula’s chauffeur wants more. On sort son donut à l’ail qu’on avait pris au cas où, on dit « oh pinaise » et on regarde par le hublot : no vampires, no monkeys, mais une mer d’étoiles. On voudrait appeler sa mère au secours, mais la batterie fait trop de bruit et ici, c’est pire que dans le tunnel sous la Manche, réseau is dead. De toute façon ça va trop vite : un calamar géant tient la batterie, des fourmis dansent le jerk sur la corde de mi aigu et la basse est branchée sur les réacteurs. On vomit son quatre-heures, qui flotte dans la cabine, on pense au capitaine Haddock et on attend que ça passe. Pas facile avec cette odeur d’ail, mais bon.

Objectif (ta) Lune 

Les joues de retour à leur place, décélération oblige, on se rend compte qu’on nage le crawl en apesanteur au beau milieu de Hot stuff, sans savoir comment on en est arrivé là. Le bassiste fait le malin en tricotant une loop diabolique (bassiste, c’est chiant mais indispensable) et tous les copains se mettent au diapason. C’est parti pour cinq minutes d’aquagym et la pudeur m’oblige à ne pas signaler que j’ai oublié mon maillot. Mon tuba et moi smurfons donc sur ce truc chaud très kraut et je pense à Véronique et Davina. Je préfère ne pas m’expliquer l’érection qui s’ensuit et, pour faire diversion, j’appuie sur « next ». Débarque alors Shoirokousvy pallasite I, où le bassiste continue de faire le malin en dessinant des montagnes russes, ce qui permet au batteur de taper partout en même (contre) temps et au guitariste de se tirer sur le manche. Puis soudain, l’atterrissage : Shoirokousvy pallasite II dégaine les guitares à l’équerre, tout le monde se met en rang pour amorcer la descente et j’en profite pour ravaler mon vomi. Ce que c’est, la gourmandise. Malpoli, je proclame la bouche pleine que c’est leur tube. Ça fait marrer mon tuba. Qui opine. Car tout y est : derrière les strates en sphère d’instruments se chevauchant d’un air martial, capt’ain mélodie est aux commandes. Bon, c’est du tube pour headbanger barbu (je pense aux Dupont et Dupond), du tube bruyant, du tube de pub mais du tube quand même. Je me cogne la tête au plafond. On est arrivés.

Pschitt des portes qui s’ouvrent, échelle qui se déroule au sol, cœur qui bat la chamade et, au premier bout d’inédit horizon qui se dévoile, mon tuba m’empêche de faire « Whaouh ! » correctement. Je serre fort mon drapeau dans la main gauche. Que d’émotions. C’est la faute aux cithares de Zwischenspiel / Quidquid latet apparebit. Punaise, se prennent pour les Beatles de l’outer space, les Espingouins ! Fort heureusement, ça ne dure pas trop longtemps puisqu’ils se lancent ensuite dans une drôle de cavalcade où Phantom Band aurait pu venir claquer un chorus de cornemuse sans que ça me défrise. Je décide d’aller danser la carmagnole sur le premier cratère venu, et l’apesanteur m’envoie direct sur la face cachée de la lune. Je mettrai trois heures pour revenir à la fusée. En route, je perdrai mon drapeau. Quelque part dans l’espace, Hunter S. Thompson et son drôle de G se promènent. On va peut-être dégoter de nouveaux lecteurs.

Lüger // Concrete Light // Giradiscos
http://luger.bandcamp.com/ 

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