L’écoute attentive de « Tetrahedron », troisième album de Leisure Birds à paraître en aout, a tout de même de quoi faire cligner des yeux. Les voix directement sorties de l’UFO Club du Londres de 1967, l’impression qu’on va voir débarquer Rick Wright avec son regard de fennec avec ses claviers vaporeux, les guitares d’époque qui sentent bon le henné et l’amour à plusieurs ; en bref la couleur de la Tamise avec l’ombre de Syd Barrett s’enfonçant lentement dans les abysses de ce qu’il faudra bien nommer un revival psyché ; autant appeler un chat un chat.
On peut y voir un clin d’œil, une œillade. Mais dans tous les cas : certainement pas une coïncidence. Cela est d’autant plus surprenant que jusque là, Leisure Birds était passé complètement inaperçu sur les écrans de contrôle. Deux disques, en 2010 et 2012, publiés sur le label (Totally Gross National Product) fondé par un groupe originaire de Minneapolis, une région paumée des Etats-Unis où les hivers s’avèrent plus rugueux que les groupies et où les flamands roses se feraient certainement bouffer par les loups.
Reste que « Tetrahedron », s’il ne brille pas par son originalité, fait tic-tiquer avec son coté machine à remonter le temps. Le couplage des synthés analogiques à ces mélodies gonflées à l’hélium renvoie évidemment vers un passé chargé en narcotiques, mais se distingue de la concurrence indie par une capacité à la lévitation où drone, krautrock et psyché se relaient au volant destination, euh, nulle part : « Tetrahedron ça symbolise l’inconnu explique le leader Jake Luck, ça représente ce que l’être humain est incapable de comprendre. Quand on se retrouve face à des formes abstraites et rayonnantes, la seule chose qu’on puisse faire est d’accepter notre ignorance. Notre disque parle de ça. L’ambition de Leisure Birds c’est de créer une musique jouée dans une dimension parallèle, qu’il s’agisse de l’année 1967 ou 2067 ». OK, hum, allooooooooo. A défaut d’avoir vu la Vierge ou Roswell, en voilà quatre de plus pour qui la vérité – et les réponses rationnelles – sont ailleurs. « Si Syd Barrett avait continué à composer des chansons passé la trentaine rajoute Jake, auraient-elles sonné pareilles ? ». C’est une foutue bonne question, Jake. On peut également se demander si le cerveau cramé du Floyd aurait pu tenir le manche dans le groupe de Jake 45 ans après s’être fait évincé de celui qu’il avait fondé. Et tant que nous y sommes, on peut également s’interroger sur le syndrome retromania qui condamne tous les groupes qu’on aime actuellement, de Tame Impala empruntant à Lennon à Foxygen à Dylan, à mimer les ainés au point d’être dignes du concours de sosie. La nostalgie camarade, cet inusable vice qui nous pousse à aimer le reconnaissable, le déjà entendu, le mille fois fredonné. Ou alors le fait qu’on construit toujours sa propre histoire à travers celle des autres. Allez savoir.
Quand on nous a proposé une sorte d’exclu sur le nouveau clip de Leisure Birds, on a bien évidemment commencer par NE PAS regarder ladite vidéo, puis on a accepté. Pas tant parce qu’un clip ne sert plus à grand chose que parce le morceau Waveforms condense dans sa version courte – une autre existe sur le disque au format Interstellar Overdrive, 15 minutes de logorrhée sonique pour junkie – tout ce que les 60’s et 70’s ont su faire de mieux : alchimie des instruments amplifiés, production de cathédrale, groove de blanc en descente d’acide et d’organes, psychédélisme soft ouvrant sur l’espace à la manière de Hubble scannant l’infini à la recherche d’un battement de cœur.
Le bémol de cette odyssée martienne, c’est évidemment que Leisure Birds arrive quatre décennies après l’âge d’or du genre ; genre Marty McFly redécouvre le futur trois plombes après que le mot psychédélique soit rentré dans le dictionnaire comme un poncif. « Je ne suis pas certain que tout le monde sache vraiment ce que le mot psyché signifie » précise Jake, c’est devenu un terme fourre-tout, une blague dont la conséquence est que pas mal de chansons sonnent maintenant comme un ‘freaky cartoon’’ ». Psychédélique, okay, mais pas que, Leisure Birds cherche avec « Tetrahedron » à visiter les grands espaces ; et pour ça rien de mieux que le synthétiseur, omniprésent sur ce disque très Kubrickien, et par ailleurs instrument du futur par définition – on peut discuter ce point mais le son d’une Gretsch évoquera toujours l’Amérique gominée des sixties, celui d’un Arp Odyssey la conquête spatiale et l’imminente colonisation de Mars, c’est comme ça.
Tel Ayrton Senna, maintenant projetons-nous : comment Leisure Birds envisage-t-il son propre futur ? « Je ne vais prétendre qu’on n’a pas envie d’être écouté par le grand public, et si ça se passe comme ça, c’est formidable. Mais si les gens découvrent nos albums dans plusieurs décennies, voire plusieurs siècles, c’est cool aussi. Vu l’histoire du groupe, ce serait peut-être même encore plus cohérent ».
On résume : un groupe qui vise la post-postérité avec du psychédélisme made in 1967, un nom d’album qui ne veut rien dire avec des chansons taillées pour la troisième dimension…. Leisure Birds, de drôles d’oiseaux drogués à l’acide Barrett.
Leisure Birds // Tetrahedron// Sortie le 18 aout chez Totally Gross National Product
http://totallygrossnationalproduct.com/artists/leisure-birds
4 commentaires
faites plutôt un article sur les lumerians
Coucou :
http://gonzai.com/lumerians-transmissions-from-telos-vol-iv/
http://gonzai.com/lumerians-exclu-le-clip-de-smokie-and-lady-chronus/
et programmé sur une soirée Gonzaï il y a 1 an : http://gonzai.com/gonzai-xv-lumerians-eternal-tapestry-steeple-remove/
Cette chute est interdite par la convention de Genève depuis quatorze ans.
Un groupe de ‘jeunes’ qui font de la musique de vieux (99% du rock indé aujourd’hui), avec de vieilles machines (super pas originale), de vieilles ficelles technique (super ennuyeux) devant un publique de vieux (faut pas rêver non plus). Et avec la prétention de se positionner entre 1967 et 2067!?? … Cherchez l’erreur!