D’un coté, Bob Dylan qui ressemble tellement à un clodo qu’il s’est fait arrêté par la police cet été; de l’autre Soko qui chante qu’elle était enceinte d’un gros caca. Qu’il soient plus ou moins talentueux, les folkeux adeptes du dépouillement savent s’y prendre pour récolter les ricanements.
Les gratouilleurs mélancoliques pullulent tant que pour sortir de la masse, adopter un style far-west ne suffit plus. En France, Zak Laughed va pourtant faire sa rentrée fracassante dans la case folk avec un look de lycéen: il fait en même temps sa rentrée en classe de première. Il ne coupera donc pas aux railleries dues à son âge et à sa voix non muée. Et si c’est surtout grâce à cette économie d’années qu’il assure une couverture médiatique à ses chansons mignonnettes, ses chansons restent mille fois meilleures que tout ce que peut offrir un open mic’ au Pop In.
La preuve? Il lui aura même suffit de décharner The End Has No End des Strokes pour un concours Inrocks CQFD célébrant l’anniversaire de Rough Trade pour que ça bourdonne autour de son berceau et qu’il signe chez Wagram.
A tout juste quinze ans, Zak Laughed sort donc son premier album, The Last Memories Of My Old House. La comparaison avec la bande de mineurs savoyards de Coming Soon sera inévitable, tout comme celle avec Adam Green enlevé par sa babysitter Kimya Dawson pour former les Moldy Peaches. Zachary a lui aussi une voix frêle qu’on aurait pu placer dans Juno et Les Choristes mais elle sonne juste et frais. Léger, bien loin de Dylan et Cohen auxquels il réfère, Zak Laughed a tout de même des textes bien amenés et sincères, des mélodies efficaces et une vraie sensibilité de folk singer. Son single Each Day renvoie lui à l’impertinent album de Ben Kweller, sur son album Sha Sha en 2002, celui où il planquait sa tête lunaire derrière sa brosse à dent.
Zachary a lui planté une casquette au sommet de sa bouille ronde et arbore une moue qui passe vite au sourire. Il a encore une innocence qui énervera ceux qui croient encore que le folk ne peut se jouer qu’en mode rébellion, qu’il faut s’appeler Hazlewood ou Young pour s’y coller. Le folk c’est juste la façon la plus simple de porter ses titres en musique même avec trois notes d’un putain de ukulele, ce qu’a d’ailleurs fait Zak au départ. Pas aussi anti-folk qu’on pourrait le croire, car ses titres ne laissent pas entrevoir un contrôle de l’amateurisme et la dérision génial à la Daniel Johnston, il s’égare un peu sur son titre agaçant mais entêtant (ca va souvent de paire, bizarrement) où il chante No I don’t want to be like Mick Jagger sur du ukulele. La mélodie un peu niaise nous rappele qu’il vient de Clermont-Ferrand, la ville de Cocoon. S’il n’a pas choisi sa ville, en revanche il n’a pas l’air peu fier que Clermont ait gagné le concours de la ville la plus rock en 2009 contre Bordeaux. Possible, donc que Zak soit affilié injustement à la scène de Clermont chérie de la FM et en profite pour répandre ses mélodies avisées.
Une fois la vague passée et la voix muée, il sait qu’il lui faudra évoluer et vu qu’il vient de s’entourer comme il le dit d’adultes de dix-huit ans.
Il se voit bien muter vers le rock. Car il aime aussi la musique indé et des groupes pas très connus, selon lui toujours, comme les Jesus & Mary Chain. Car il apprécie leur amateurisme. En fait, il pense avant tout s’inspirer des Dandy Warhols. Alors là, j’entends les puristes en boots monter sur leurs grands chevaux. Mais Zak est bien pur lui aussi et son album est la véritable bouffée d’oxygène d’un vrai musicien pas encore blasé et déprimé qui n’espère pour l’instant que vendre assez d’albums pour pouvoir en faire d’autres.
Zack Laughed // The last memories of my old house // 3ième Bureau