Un envahisseur décoloré et sous acide revient tambour battant étriller les carcasses rock’n’roll jonchant le sol. Se multiplie aussi vite qu’un foutu pékinois en détresse et s’invite impunément dans les festivals et lieux hypes du moment. Son cocon puant, cradassé par la moisissure de sa transpiration, domine crânement Big Apple. Le psychédélisme est notre mort heureuse, blafarde et tamisée, mélodique et spontanée. Et sachez que vous n’y couperez pas. Inodore, incolore, nous le sommes déjà. Contaminés.
Superflu, génial, craignos, rétro. Tout point de vue est recevable. Un seul ne l’est pas. Dès lors que « psychédélisme » est lâché, « révolution » lui, doit être remballée. Il est trop tôt pour en sceller le sort, trop tard pour martyriser le phénomène. Je pourrai parler de l’étalage psyché que représente la Route du Rock 2009 mais il me semble plus judicieux de fouiner dans le Minnesota et raconter la non histoire des paumés de Velvet Davenport. Je ne sais rien d’eux. Et j’en suis heureux. Pas de photos cheveux au vent, regard ténébreux et bras croisés suspicieux. Pas de tournées nationales et a fortiori internationale. Pas de vidéos youtube en mode making off surprise-surprise. Tout à leur honneur. Ces enfants de Minneapolis ne se mélangent pas, incestueux et avares d’un talent qu’ils ne veulent partager. Car si les Velvet venaient à s’exporter, ils seraient perdues. Vendues. Contaminés, eux aussi, par le néo psyché de Brooklyn. Ils crèveraient la gueule ouverte, vomissant tour à tour leurs propres bambins. Alors je souhaite que les Velvet Davenport s’enterrent vivant, au sous sol de leur squat de pecnot. Vide à l’éternel leur pack de vingt cinq poussiéreux au pieds de la grosse caisse. Et dans dix ans, que l’on vienne fêter l’évolution zéro de leur groupe. Un groupe cool avant toute chose .
La vision déchue d’un rodéo qui s’emporte, une poussière de sable qui irrite et les larmes d’un premier amour ; cette douce déconvenue crève cœur qui s’attèle à vandaliser l’espoir minime de bonheur (Square). La beauté luxuriante d’une liberté retrouvée, détachée et esseulée, le cœur hermétique et les pupilles désertées (Lemon). L’épopée adolescente des Velvet Davenport, premier tome d’une marche sans fin vers l’antre de la coolitude. Moi par exemple, je suis un mec cool. Je suis célibataire, je haie les chiens, je me fringue au secours populaires et j’ai l’air de savoir ce que je dis. Je traine dans les endroits à la mode tout en prétendant ne pas y prendre goût. Je suis un fake à taille humaine, un chieur de l’extrême et un ringard à l’éternel. Je ne supporte pas l’enfermement et la patience. Je suis ce que tu ne seras jamais moi. Et c’est cette impression abusive d’être seul au monde que j’aime à l’écoute, l’attentat du bon sens, la morale en berne et la quéquette en l’air (Drop, Run).
Si l’échelle du cool existait et était officialisée par une législation bien ficelée, les Velvet Davenport seraient tête de classe, la raie sur le côté et le regard niais d’un vainqueur looseur. Moi, je ne les aime que pour ça. Ils sont cools, tout comme moi.