Obsession des obsessions… Le rock est un folklore émanent du grand fantasme populaire sur la jeunesse. Cette musique s’est toujours jouée en boots, le regard haut et la moue dédaigneuse. Une musique furieuse, pleine de cris, de sueur et de sang. Le problème est que plus personne ne la joue comme cela.
Personne, sauf un groupe, irréductible duo de kids nommé les Mantis, signé sur le label Bonus Tracks, celui de Yarol Poupaud. Vous vouliez vous réconcilier avec cette génération? Voici déjà un début de réponse.
Quelle était la première intention du groupe?
On habitait en banlieue avec mon batteur. On était voisins, les deux seuls avec les cheveux longs. Mon père a des guitares, le sien une batterie. Alors on a fait un groupe. On s’est cultivé tout en jouant ; on a grandi avec ce groupe. C’est pour cela que l’on a failli l’abandonner pour se mettre à une autre pratique artistique. Sauf que le groupe, c’est une arme. Ca te permet d’ouvrir des portes, de prêcher. Un concert, c’est comme une messe : tu enfiles ta soutane, pousses ta sape à l’extrême…
Et vous prêcher pour quoi?
A mon avis, ce message, s’y on pouvait l’exprimer par la parole, ce serai déjà fait. C’est donc un message qui passe par l’attitude, un message de sensation… de sens. Ce n’est pas qu’une excitation de colère… c’est une transe qui résulte d’une excitation extrême. Tu peux être illuminé ou juste complètement écrasé. Rien de manichéen là-dedans. On voit le rock comme la musique du mal uniquement si l’on prend en compte les principes moraux. Face à une morale catholique… c’est sûr que c’est une musique du mal. Mais le rock & roll, c’est très païen comme délire. C’est la religion païenne que l’on n’a plus la possibilité d’avoir, mais que l’on est extrêmement heureux d’avoir créé.
Et pour arriver à cette prêche alors…
Il faut s’oublier soi-même. C’est primordial. Quelqu’un comme Lou Reed ne s’est pas assez oublié. Et d’une manière générale, les groupes sont trop préoccupés par leur image.
Et pourquoi le Rock n’est il plus une musique Sexuelle ?
Parce que l’époque ne s’y prête plus. Dans les années 60, c’était vraiment dans l’air. À la base, c’est juste la recherche d’un contact. Je pense que l’on a beaucoup moins de contact physique aujourd’hui qu’il y a 40 ans. Dans les années 60, c’était ce contact physique qui se transformait et c’était un bon contact. Aujourd’hui on comble notre manque de contact par de la grosse baise.
Tu as l’impression de faire partie d’une génération qui idéalise les années 60?
Comme on a plus de paradis, on l’a vraiment déplacé sur les années 60. On se dit « c’était idyllique… » Et même les vieux le croient alors qu’ils les ont vécues ces années. Alors qu’en fait, ça devait être aussi chiant, mais juste avec un autre cadre. Tous les petits gars qui disent : « j’aurais trop voulu vivre »… ça n’a pas de sens.
Et la frustration de votre chanson « Where are you my generation »…
C’est la frustration basique de l’homme : pas assez de fringues, pas assez de meufs… Tout cela s’est exprimé parce que je n’étais pas encore arrivé là où je voulais aller. Mais au final, le fait que l’on soit… ça rend les choses possibles. On va forcément avoir un impact sur la marche du monde.
Aujourd’hui votre, vous essayé de changer la démarche du groupe ?
On est partagé entre deux choses. On compare le rock à la religion : il y a des gimmicks, des saints, les martyrs et presque de la prière… une transe. Même les Shakers (prêtre noir américain qui « shaker » le diable)… ça vient de là. Il y a donc toujours cette structure mélodique. Le côté folklorique du rock que j’aimerais garder. Mais maintenant on est partagé entre cela et une recherche de sons. On n’a pas encore trouvé comment allier les deux.
Vous hésitez juste à faire quelque chose de nouveau ou rester dans le folklore.
On essaye plus d’explorer que de faire quelque chose de nouveau. La nouveauté, c’est s’incarner en créateur. On recherche en partant de la base. En écoutant de la musique contemporaine. On la théorise pas. C’est une recherche au sens pratique. Il y a d’autres sens de lecture à la musique. On peut la construire par des rythmes, par le timbre, oublier la note. J’aimerais faire une musique qui ne soit que de l’énergie, bousculant la simple structure : intro-couplet-refrain-break. Trouver un autre sens de lecture à cette musique. Voilà vers quoi on veut aller.
http://www.myspace.com/themantisband