Crème fraîche, beurre ET huile d’olive. « Quelque chose ne va pas » dit le foie. « Oui mais moi j’aime tellement le gras » lui répond une voix. Les oreilles dégoulinantes de graillon, le commis sort ses poubelles en rêvant de devenir un jour le chef. Le patron. Avec étoiles et compagnie. Sûr qu’il engagera les meilleurs. La crème de la crème. L’huile d’olive de l’huile d’olive. Le beurre du beurre. « Quelque chose ne va pas » dit une voix. « Ressers moi une louche de chantilly » lui répond le client de la trois. Ou quand Gonzaï fait le guide Michelin des supers cuisines sonores où tout le monde a la toque du chef vissé sur le crâne : ça leur bouche les oreilles. Ou pas.
Le problème, ça n’est pas l’obésité. Le problème c’est toutes ces sauces mélangées, ces féculents par camions et toutes les bouches signant les yeux fermés en faveur de la surcharge pondérale. Bouches et (à) oreilles, même combat. « Mets m’en ras-la-gueule que je souris bê(a)tement ». « La tambouille des meilleurs chefs, c’est trop bon ». « Plus c’est gros plus ça passe ». Suprême hypocrisie, les « Petits pois ». Comment ça vous ne suivez pas ? Them Crooked Vultures vient jouer à Rock en seine. Pour ne pas déflorer le projet avant la sortie d’album, les trois supers musiciens se choisissent un pseudo qui monte et qui descend dans un ascenceur.
Name dropping : John Paul Jones. Dave Grohl. Josh Homme. Verdict : Led Zeppelin, c’est fini les gars. QOTSA, bof et Nirvana, je te dis pas. Une demi étoile en carton et puis c’est tout.
Deadweather ? Un contrôle des services de l’hygiène a mis fin à la blague : y avait des bandes blanches partout, avec des pailles périmées plantées dedans.
Name dropping : pas que ça à foutre. Verdict : une étoile de mer pour (ne pas) nager SOUS l’eau.
Choix suivant : Soulsavers et son Broken. Pas mal. Une flopée d’artistes underground décident de claquer un menu pas XXL avec des ingrédients plus ou moins inédits : il y a les oignons pour faire pleurer, la purée envoyée à la (grosse) cuillère et le piano pour garder le tout au chaud. Dans les temps faibles, le client mange tiède mais en profite pour se rattraper sur le dessert.
Name dropping : Mark Lanegan, Mike Patton, Jason Pierce, Richard Hawley. Verdict : une grosse étoile de shériff pour régner sur un village désert.
Passons aux choses sérieuses. AU PLAT DE RESISTANCE. Passons à Blakroc. Et rangez vos couverts, ça se mange avec les mains.
C’est terrible mais ce truc va plaire à tout le monde : le branché à mèches qui ne marche pas encore sur les traces de papa et qui se la kiffe à ambiancer le dancefloor de son salon pour basculer sur le canapé la pauvre petite fille riche qui a A-DO-RE Lost in Translation et qui a l’air vraiment chaude ce soir (« Dis donc, ils sont forts ces noirs »).
Ca va coucher tous les sceptiques à la « ouais, moi tu sais, le hip hop, c’est pas ma culture, je mange que des truc raffinés ». Tu parles ! Les artys seront les premiers à se remonter les manches pour tâcher leur duffle-coat.
Les rappeurs et sans reproche vont faire la grimace mais s’en iront rapido au fast food recommander ce truc de ouf, MC Do à la sauce Bayou, Katrina for ever dans le baggy (putain les mecs, remontez votre froc !) et la guitare qui se rajoute à leur menu.
Les clubbers diront « c’est booty ton truc, il me le faut dans mon I Phone ». Les rockers, jaloux comme des poux feront les malins : « ouais mais c’est normal, le rock et le rap, ça vient de la musique noire ». Putains de petits blancs. Coochie man est un tube. Servable à tous les repas. Stay off du trip hop flottant sur le delta avec une casquette à l’envers sur la tête. Ain’t nothing like you, un hymne à siffler en crachant de la mayonnaise sur le pare-brise au sortir du drive-in. What you do to me, un sommet : clavier chaud comme une baraque à frites un samedi soir, du cruising de parking avec l’espoir d’apercevoir les étoiles parce que merde, c’est trop cool, ça mord et ça dégouline, et « j’ai pas mis toutes ces enceintes dans ma caisse pour finir la soirée tout seul… ».
Name dropping : Les deux p’tits gars des Black Keys aux instrus, RZA, Mos Def, Billy Danze et Noe aux mics, chacun fait ce qu’il sait faire et le résultat se gobe à la cuillère. Verdict : Trois étoiles dans un motel borgne muni d’une scène, d’une sono d’occase et d’un fast food 24/24. Les pantalons aussi vont finir tâchés.
Le problème, ce n’est pas la malbouffe. C’est les goûts de merde.
Vernon
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Blakroc / / Blakroc / / V2