En 1999, une poignée de zigues grenoblois créent RIEN, le meilleur groupe du monde. Et décident qu’il mourra quinze ans plus tard. Le temps nécessaire pour pondre deux chefs-d’œuvre et trois EP en forme de compte-à-rebours. Après « 3 » et « 2 », c’est « 1 » qui s’apprête à sortir. Il est en écoute juste en dessous.

Les salauds, ils ne nous épargnent rien ; les grands espaces balayés, la tristesse de la fin en doux warning clignotant au milieu des guitares qui dansent sur ta peau pour la dernière fois, les regards en biais sur le player pour ne pas voir l’inéluctable . « 1 », le dernier disque, le compte-à-rebours déroulé pour de bon et ton cœur sur les rotules de se dire que ça y est, le temps est venu : l’estomac dans les chaussettes, les oraisons à déployer, les mains refermées sur le vide ; celui qu’ils vont laisser, ces salauds. Voilà, RIEN a tout dit. Et déballe une Ballade, raconte que Ca barde chez les bardes, s’invente une Défaite des vainqueurs et, bien sûr, termine sur ses Dernières volontés.

C’est quand même con de commencer par la fin. Je n’ai jamais rien écrit sur RIEN (enfin presque, c’était ailleurs, une autre histoire, avec des corsets et des garde-fous, ça ne compte pas). Je n’ai jamais dit l’immense importance de ce groupe de Français à une époque où les disques s’empilent au rayon médiocrité de peur de saisir sa chance ; je n’ai jamais dit leurs folies, leurs sourires malins au milieu du cinquantième bridge tordu, je n’ai pas aligné les adjectifs érudit, bruyant, inventif, je n’ai pas sorti mon stabylo des grands soirs pour signaler les pas de côté, la poésie assumée des textes, les larsen dans la colonne vertébrale et la batterie qui propulse et caresse, ça dépend. Jamais je n’ai dit les larmes tirées, les solitudes au casque dans la foule et ces vagues en soulèvement, les incendies de sternum, la main cent fois passée sur la joue qui accroche, comme un pincement pour être bien sûr de rêver ; la joie simple d’avoir enfin trouvé des musiciens à admirer pour toujours.

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Mais ils l’avaient dit, et ils l’ont fait : RIEN était né en 1999 à Grenoble et mourrait quinze ans plus tard. Nous y sommes. Pour finir, ils ont rangé le boucan (enfin presque) et sorti quelques (très beaux) violons et des textes à mettre au fond de l’infusion tandis que leur dernière fusée s’envole pour aller mourir au Japon, si on en croit ce qui est dit sur leur site, l’Amicale underground.

Ce dernier EP s’achève sur leurs Dernières volontés, titre reprenant le modus operandi utilisé il y a longtemps lorsqu’ils avaient mis en musique celles du général De Gaulle. Mourir, oui. Mais ne pas arrêter de rire. Le testament de RIEN commence ainsi : « Si RIEN meurt ailleurs, RIEN veut être rapatrié chez lui, sans la moindre cérémonie. » Chez RIEN, c’était un peu chez moi, les mecs. Longue vie à vous.

RIEN // 1 // L’Amicale underground
http://www.amicale-underground.org/

Dernier concert à Paris le 28 novembre à la Maroquinerie avec Aquaserge et Centenaire

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22 commentaires

  1. Même si je dois reconnaître que je ne voulais pas croire à cette fin programmée, elle se produit de la plus belle manière qui soit. Avec ce que RIEN a toujours su manier avec la plus grande intelligence : le génie et l’humour. En somme, les tréfonds de l’intime et l’urgence de la distance.
    Et puis comme ça fait du bien de lire que RIEN est le plus grand groupe du monde. Car c’est peut être le seul instant où la notion de vérité peut prendre un sens certain. C’est dans ce hurlement arraché et excessif qu’émerge la justesse du propos.
    Ces quelques dates vont, dans l’obscurité, faire partie des plus grands moments musicaux de cette décennie. Et je constate avec bonheur que je suis toujours incapable de savoir où caser RIEN dans le paysage musical contemporain.
    Donc, enfin, merci d’avoir éclaté nos certitudes et de nous rappeler que chaque seconde est un commencement.
    Et à l’orée de la mort, et de ce(s) commencement(s), j’espère simplement que RIEN sait au fond de lui même qu’il a construit tout un monde qui ne ressemblera jamais à rien, et qui transcendera inexorablement toute création musicale à venir.

    Bientôt orphelin mais heureux, je vous dis bonne route.

    PS : Non mais putain vraiment, RIEN a été, est, et sera toujours le plus grand groupe du monde.

  2. La première fois que j’ai entendu Rien je me suis dit qu’ils étaient l’un des meilleurs projets musicaux français. Trop humbles, trop modestes, au niveau de leur comm, ils n’ont pas (eu) la notoriété qu’ils méritaient.

  3. merci infiniment les gars, votre modestie, votre créativité et votre humour font de vous l’un des meilleurs groupes « rock » de tous les temps. et malheureusement pour vous petit à petit vous serez intimement connu

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