Que faire quand son groupe fétiche s’est plongé dans un sommeil discographique qui pourrait bien être éternel ? Aller voir ailleurs s’ils y sont. En plus de vingt ans d’intense activité, la formation emmenée par Tim Gane et Laetitia Sadier a influencé un nombre considérable de musiciens qui continuent d’éprouver la fameuse formule chimique qui compose sa pop protéiforme en y injectant leurs propres molécules. On vous brosse le portrait de quelques compatriotes inspirés.

Stereolab: Electrically Possessed: Switched On Vol. 4 – “pristine and  almost hallucinogenic” – Sun 13

Pearl & The Oysters

Le coup classique : un homme et une femme, un couple, un groupe de pop. Pearl & The Oysters est né de la rencontre entre Juliette Davis et Joachim Polack sur les bancs d’une école parisienne. Rapidement, le duo franco-américain rejoint le pays de l’oncle Donald afin que sa musique solaire et luxuriante puisse s’y épanouir pleinement, d’abord en Floride puis en Californie. Quatre albums plus tard, le groupe a réussi à imprimer un univers sonore et visuel clairement identifiable, à coup de vidéos old-fashioned on ne peut plus léchées et de pop rétrofuturiste teintée de bossa, de soul, d’électro, d’exotica et de psychédélisme sucré. Bref, « on est sur du tropicool », comme on disait en 2015 dans les rédactions des magazines lifestyle pour lesquels j’ai bassement commis quelques papiers tendance.

Chez eux, dès les premières mesures, l’influence de Stereolab saute aux oreilles. Une influence qui passe d’abord par la case The High Llamas, un groupe qu’ils ont découvert à peu près en même temps que celui de Gane et Sadier, à la fin du lycée. « Il y a un bien une parenté indéniable avec Stereolab mais d’abord via l’influence que Sean O’Hagan a pu avoir sur le son de Stereolab période Emperor Tomato Ketchup ou surtout Dots and Loops, et qu’il a eue sur nous par la suite », nous explique Joachim. « En revanche, bien qu’on appréciait déjà Stereolab sans trop les connaître à cette époque, c’est d’abord le son des productions Tricatel de la fin des années 1990/début 2000 qui a été pour nous la porte d’entrée vers une certaine conception de la musique électronique à laquelle souscrivait aussi Stereolab, soit en gros l’idée d’un retour en arrière vers des sonorités synthétiques plus anciennes et novelty (les bleeps/bloops des disques space age, etc). C’est vraiment quand on a déménagé en Floride en 2015 qu’on a commencé à se plonger dans leur discographie ».

S’ils découvrent également leurs disques plus rock à ce moment-là, c’est bien le versant pop du groupe qui semble d’emblée les attirer. Impossible à l’écoute de Flowerland, Treasure Island, Konami ou Pacific Ave – le style de chansons infusées dans une sorte de féérie pop ouatée que rêveraient d’entendre les fans d’indie-pop à leur arrivé au paradis – de ne pas penser aux classiques made in Stereolab que ce sont Fluorescence, Ping Pong ou Captain Easychord, avec un petit côté west coast en prime.

« À priori l’influence de Stereolab a commencé à être plus évidente avec notre deuxième ou peut-être même troisième album ; la période qui nous plaît le plus étant celle des disques d’inspiration lounge, même si avec le temps on apprécie davantage l’esthétique plus kraut des débuts », précise Joachim qui pourrait « parler du groupe pendant des heures tant il est inspirant ». « Bien sûr, le son et le style de production de Tim Gane qui fait la part belle aux sons de synthés est pour nous l’influence principale mais il y a aussi des morceaux de Pearl & The Oysters – je pense à Bit Valley ou au couplet de Read the Room – qui ont été directement influencés par leur manière de construire du discours sur une trame harmonique (et/ou des paroles) très minimales et répétitives. D’ailleurs on adore vraiment le côté hypnotique de certaines paroles de Laetitia Sadier, qui jouent beaucoup dans l’esthétique tantôt avant-gardiste tantôt énigmatique ou même absurdiste du groupe, comme John Cage Bubblegum ou Metronomic Underground ».
Cette même Laetitia Sadier qu’ils ont invitée à pousser des vocalises sur leur dernier album en date, le radieux Coast 2 Coast, et retrouvée lors de leur passage à Londres l’hiver dernier, en compagnie d’un certain Sean O’Hagan. La boucle est bouclée, comme on dit.

Aquaserge (& Co.)

« Aquaserge, le groupe parfait pour les orphelins de Stereolab », titraient des confrères journalistes espagnols. C’est vrai qu’entre la formation anglaise et le collectif toulousain à géométrie variable, les similitudes sont grandes, à commencer par ce goût pour l’amalgame entre pop et musique savante.
Signe d’une certaine filiation, les seconds se sont d’ailleurs régulièrement produits en ouverture des premiers lors de tournées internationales. Fondé en 2004 par Julien Barbagallo, Manon Glibert, Audrey Ginestet, Benjamin Glibert et Julien Gasc, Aquaserge a déjà connu mille vies, couvert des styles aussi différents que le jazz, le rock progressif ou la pop psychédélique et collaboré avec quelques pointures dont l’ex-égérie Tricatel April March. Leur album April March & Aquaserge, injustement passé inaperçu en 2013, reste un bijou de pop d’obédience Stereolabienne où le groupe de la Haute-Garonne confectionne un écrin idéal à la plus francophile des chanteuses américaines.

Depuis, Aquaserge a publié une pelleté d’albums aux formats et styles très libres et s’est taillé une sacrée réputation chez les musiciens qui comptent, notamment outre-Atlantique. Surtout, le groupe s’est recomposé. Julien Barbagallo a été appelé pour tenir la batterie chez Tame Impala (dont le leader Kevin Parker a produit le premier album de Melody’s Echo Chamber, très Stereolab friendly lui aussi) et Julien Gasc (qui avait été choisi pour jouer des claviers sur la tournée Chemical Chords de Stereolab – tout se recoupe !) s’est lancé dans une carrière solo en écrivant – pour résumer – des disques beaux à pleurer. On l’a également entendu l’an dernier dans La Bibliothèque de La Bergerie, un projet initié par Emmanuel Mario « Astrobal » pour lequel il a convié des amis musiciens dans une ancienne bergerie isolée du Sud de la France et qui contient pléthores de morceaux cosmiques que n’aurait pas reniés le groupe à l’honneur aujourd’hui (on pense à Loterie Solaire).

Quant à l’entité Aquaserge, ils ont sorti il y a peu un LP baptisé La Fin de l’économie garni de morceaux plutôt engagés (ça veut dire de gauche). De toute évidence, ils ne partiront pas en vacances avec Gérald Darmanin.

 

Dorian Pimpernel

On les avais vus débarquer en troupe – sept musiciens et un panel d’instruments foisonnant – au milieu des années 2000 sur à peu près toutes les scènes que comptait alors la capitale puis publier un EP en forme de manège enchanté sur un obscur label japonais (aujourd’hui inécoutable sur internet, chose plutôt rare) avant de signer, en formation resserrée, leur premier album chez Born Bad Records en 2014. Ils y développaient le concept de moonshine pop, le versant sombre et moderne de la fameuse sunshine pop californienne des années 60. Depuis : quelques chansons sur un disque partagé avec Julien Gasc et Forever Pavot, une poignée de concerts et pas grand-chose d’autre. C’est qu’en bon dilettante, Dorian Pimpernel sait se faire désirer, creusant nonchalamment son sillon au gré des propositions. On leur pardonne : ces types « plus brillants, cultivés et drôles que vous et moi » – dixit Vice Magazine – ont le chic pour composer des pop-songs labyrinthiques truffées de synthés analogiques, de chausse-trappes harmoniques, de références philosophiques et de refrains riches d’une multitude d’accords. Une description qui n’est pas sans rappeler Stereolab.

Pour Laurent Talon, bassiste du groupe, « dans la géologie des paysages sonores, Stereolab est un mirage irisé, dressé dans le désert musical de la fin des années 1990. Le groupe a offert sa protection aux contemplatifs solitaires pour qui les noms de Brian Wilson, Free Design, Delia Derbyshire, Piero Umiliani ou Sven Libaek sonnaient comme un talisman ; précieux sésames entrouvrant les portes d’une société très secrète ». Les jeunes pairs de cette « constellation céleste » ont à présent tout le loisir de malaxer ce nouvel idiome musical et d’en élargir le vocabulaire, en gardant comme cap « cette même passion des enluminures chamarrées et des collisions baroques », poétise-t-il.

Sans surprise, Dorian Pimpernel est désormais un membre éminent de cette société d’érudits inspirés. Johan Girard, compositeur en chef, explique avoir eu une révélation « tant musicale que visuelle » en découvrant pour la première fois Stereolab via le titre Miss Modular sur MTV. « L’influence de Stereolab sur notre musique est à la fois souterraine et obvie, je pense. Nous partageons le même langage, mais ne disons pas tout à fait la même chose. D’un côté, des aurores boréales, polychromes et élastiques, de l’autre, des couchers de soleil fumants sur un paysage désolé. Ou encore, de manière plus technique, un parti pris ligne claire, et, dans notre cas, des salissures et des imperfections, etc, etc. Toutes choses égales par ailleurs, Stereolab reste pour nous une influence majeure », résume-t-il tout en citant la période Sound Dust comme sa préférée – « le moment où, à mon sens, Stereolab dépasse la somme de ses influences pour créer un langage nouveau, qui s’étend de Messiaen à Raymond Scott, en passant par les plages les plus élégiaques des Beach Boys, sur fond de sunshine pop et de rythmes motoriques ».

Trêve de bavardages : le groupe s’est remis au travail ces derniers mois et annonce – enfin ! – la sortie d’un nouvel album pour le début 2025.

Kit Sebastian

À la différence des autres groupes qui figurent ici, Kit Sebastian a découvert Stereolab sur le tard. Mais vraiment sur le tard, quoi. C’est à dire au moment de la sortie de leur dernier album officiel, Chemical Chords. Il faut dire que Kit Martin (un multi-instrumentiste français) et Merve Erdem (une chanteuse turque) sont jeunes, ils ont seulement pu assister aux derniers soubresauts discographiques du groupe culte auquel la presse les a souvent comparés. D’abord, pour leur son à la patine rétro – sans jamais être passéiste – mais aussi pour la variété de leurs influences, de la musique brésilienne à la pop psychédélique en passant par le rock anatolien ou les B.O de polars millésimés. « C’était la promesse de la presse de « kautrock psychédélique » qui, dans notre prime jeunesse, nous a amenés à cette musique, mais ce sont les textures et les formulations harmoniques de ce que les journalistes appellent l’easy listening/lounge qui nous y ont fait adhérer », nous expliquent-ils. « Nous ne savons pas si nous sommes directement influencés par eux, mais c’est probablement une combinaison du fait de grandir en écoutant des disques très similaires à ceux qu’ils auraient écoutés et de leur son qui s’imprime dans notre subconscient, comme le font de nombreuses expériences adolescentes ».

Songwriting impeccable, vocalises charmeuses, production classieuse…on est rudement bluffé par les deux premiers albums que le duo a réalisés. Le tout joué au millimètre avec un sens du groove redoutable et une panoplie de claviers analogiques du meilleur goût qu’ils accompagnent de quelques touches discrètes d’instruments traditionnels (tablas, darboukas, ziths, congas, balalaïkas…). Si les titres chantés en anglais tiennent franchement la route (le désarmant Elegy for Love, tout en évidence pop), c’est quand Merve gazouille dans sa langue d’origine (les irrésistibles Yeter ou Yalvarma) que les enregistrements du tandem prennent encore plus d’ampleur ; la greffe entre musique d’inspiration anglo-saxonne et folklore turque fonctionnant à merveille. En témoigne, la reprise du mythique French Disko de Stereolab, le temps d’un single où la puissance rock de la version originale se pare de teintes légèrement funk et arabisantes. Pour ceux qui voudraient juger sur pièces, le groupe se produira le 13 octobre prochain à Paris, sur la scène du Point Ephémère. On y sera.

 

Alexander von Mehren

Un peu de la triche car Alexander von Mehren n’est pas français mais norvégien. Son premier album Aéropop est cependant bien imprégné de culture française, à tel point que la moitié de ses titres sont chantés dans la langue de Bertrand Burgalat.

À sa sortie en 2013, j’avais l’impression qu’il avait été conçu exclusivement pour moi : il synthétisait toutes mes obsessions musicales d’alors, de la pop sixties à la library music en passant par la musique de film, le jazz et évidemment l’axe High Llamas/Stereolab. De sa petite ville de Bergen, le musicien surdoué (il compose écrit, joue, arrange et produit tous ses morceaux quasiment seul) avait imaginé une sorte de concept album où il creusait du début à la fin une même idée, en citant clairement ses références sans jamais faire de la décalque ; comme s’il avait voulu reprendre les choses là où les avait laissées les High Llamas et Stereolab il y a quelques années

Comme pour Pearl and The Oysters, la découverte de Stereolab est chez lui indissociable de celle des High Llamas, un groupe qu’il croise à l’adolescence grâce à un article dans un magazine musical. Il commence alors à s’intéresser à la science des arrangements en étudiant méticuleusement le travail de Sean O’Hagan. « J’ai beaucoup utilisé All Music Guide pour trouver des artistes proches de ceux que j’appréciais, et j’ai rapidement découvert Stereolab grâce à l’implication de Sean », nous résume Alexander. « Aluminium Tunesa été le premier disque que j’ai acheté, j’ai été immédiatement captivé par la façon dont ils abordaient l’arrangement et l’écriture de chansons – et par la façon dont leur musique était à la fois sensible et complexe tout en restant ludique et accessible, belle et rythmiquement intéressante. Peu de temps après, Sound Dust est sorti, et c’est l’album qui m’a vraiment amené à me lancer dans la production musicale, qui m’a montré définitivement la voie à suivre, en mettant à l’épreuve mes capacités, en influençant profondément la façon dont j’allais aborder l’écriture musicale et l’enregistrement, et ainsi progresser énormément dans ma musique et mon développement technique ».

La figure tutélaire de Sound Dust plane donc sur Aéropop et sa bonne vingtaine de chansons-millefeuilles parsemées de ruptures stylistiques lumineuses, de sonorités cyber-rétro-pop aériennes et d’arrangements luxuriants. Quelques années auparavant, le musicien avait même participé à un disque de tribute de Stereolab baptisé The Politics Of Photosynthesis dans lequel il reprenait habilement l’oublié Hillbilly Motobike. « Même si ces 10 à 15 dernières années, j’ai puisé mon inspiration dans d’autres sources […] mais également en explorant des musiques plus récentes, la découverte des High Llamas et Stereolab a définitivement été un tournant et fait partie intégrante de la façon dont j’ai progressivement trouvé ma propre identité musicale », conclut Alexander qui, entre deux collaborations avec les voisins Berguénois Kings of Convenience ou Sondre Lerche (la classe), prépare un second album dont la longue maturation arrive bientôt à son terme.

Grand Veymont

On les a vus dans le Vercors. Grand Veymont porte le nom du point culminant du célèbre massif montagneux, un endroit que Josselin Varengo et Béatrice Morel, les deux membres du groupe, connaissent bien pour avoir grandi dans la vallée, juste en face. Mais plutôt que d’en concevoir, comme on pourrait s’y attendre, une bande-son acoustique et terrienne, eux préfèrent livrer une vision synthétique de ce vertigineux panorama. Après un premier EP qualifié par un média plutôt clairvoyant de « chainon manquant entre Stereolab et Aquaserge », les musiciens ont sorti deux disques qui n’ont pas démérité.

Leur initiation Stereolabienne s’est faite en deux temps. Pour Béatrice, il y a un axe Pram-Broadcast-Stereolab qu’elle découvre via son grand frère au début de l’adolescence. Pour Josselin, la première rencontre avec le groupe remonte à l’époque Mars Audiac Quintet et Emperor Tomato Ketchup. Il a d’abord une forme de rejet devant cette musique qu’il trouve trop cérébrale et lui faudra un certain temps avant de l’apprécier, notamment à partir de l’album Cobra and Phases... « La production devenait plus fine, la batterie sonnait plus vraie, elle était mixée plus en dedans avec un son moins gonflé que sur les précédents disques. Les expérimentations sonores prenaient une place plus importante, l’instrumentation devenait aussi plus intrigante à mes oreilles. Je crois que c’est mon disque préféré, pour toutes ces raisons et aussi pour le côté symphonique ou cinématographique, il y a pas mal de morceaux à tiroirs avec une écriture mélodique et rythmique très foisonnante et satisfaisante […]. Peut-être que justement le côté un peu prog, d’une certaine manière, de ce disque, avec des sonorités nouvelles ou en tous cas rares dans la « pop indé » de l’époque (marimba, clavinet, cordes…), et aussi une espèce de fil conducteur tout du long, ont pu être des formes d’influences dans notre musique ».

Auparavant, on avait déjà croisé la voix spectrale de Béatrice dans Tara King Th., un autre projet très Pram/Broadcast/Stereolab compatible. « Je crois que je suis imbibée depuis longtemps des couleurs harmoniques, des voix simples, blanches, franches, sans manière et très touchantes, des jeux de voix et de chœurs en contrepoint sur des pampams, houhous, lalas, des couleurs de l’instrumentarium et du foisonnement mélodique, des intensités tenues longtemps dans les morceaux plus krautrock, et aussi des structures à tiroirs, les morceaux en plusieurs mouvements comme Spacemoth ou certains morceaux de Cobra and Phases…, toutes ces choses qui me plaisent particulièrement chez eux ! », dit-elle. « On s’est jamais dit dans Grand Veymont ou avant, qu’on voulait essayer de faire un morceau à la Stereolab mais régulièrement en entendant ce qui sort de moi, je me dis « ah tiens ça sonne un peu comme-ci ou comme ça ». Je suis imbibée… une sorte de rejeton de ces trois groupes ». Josselin : « C’est vrai qu’on a plein de points communs en terme de sonorités et d’instruments utilisés sans pour autant avoir cherché à sonner pareil. On aime beaucoup le même genre de synthés que Stereolab ou même Broadcast ont pu utiliser, avec beaucoup de finesse pour ces derniers en particulier, mais en dehors de ça notre musique naît plutôt d’improvisations avec ce qu’on a sous la main […] ».

À propos d’improvisation, allez donc jeter une oreille sur leur dernière sortie, Persistance & Changement, un long morceau de quarante minutes, entre trip hypnotique et pop vallonnée, idéal pour une bonne randonnée sous psychotropes.

Laetitia Sadier

Et si la gardienne du temple Stereolab la plus émérite était au final…la chanteuse de Stereolab ? Hé ouais. Certes, les autres membres ont aussi développé des projets annexes dans lesquels on discerne toujours l’empreinte du groupe, à commencer par le bassiste Simon Johns et son Imitation Electric Piano (le grisant Blow It Up, Burn It Down, Kick It ‘Til It Bleeds) et surtout Tim Gane, architecte (de génie) en chef de l’entité krautrock Cavern of Anti-Matter. Mais la carrière solo de Laetitia Sadier reste à la fois très proche de la musique du collectif britannique tout en étant, par bien des aspects, assez éloignée.

Proche car sa voix blanche si singulière – qui a pu rebuter certains avant qu’ils ne finissent par succomber – restera éternellement associé à Stereolab. Tout comme ses textes en anglais et en français qui mêlent poésie onirique, slogans socialistes et messages humanistes avec une solennité parfois un peu déconcertante. Éloigné car la musicienne a ses propres instruments fétiches, ses motifs mélodiques et ses progressions d’accords bien à elle. Après quatre albums traversés de morceaux mémorables (on se souvient notamment de Fragment pour le Future de l’Homme ou Release from the Centre of your Heart), elle a publié l’an dernier Rooting For Love – son plus beau disque – où elle brasse instrumentations électriques et électroniques, harmonies vocales, embardées kraut-pop et expérimentations jazzy au cœur de chansons joliment sinueuses.

Débarrassée de la grosse machinerie Stereolab et de son statut de groupe culte parfois encombrant, elle sillonne désormais les routes de France et de Navarre pour délivrer la bonne parole dans des salles, certes moins prestigieuses qu’auparavant, mais devant un public resserré tout acquis à sa cause. On l’a d’ailleurs vu tenir le terminal de carte bancaire pour nous vendre un vinyle à la sortie d’un concert au Petit Bain au printemps dernier. Un signe d’humilité pour celle qui reste, au bout du compte, l’une des musiciennes les plus importantes – voire la plus importante – de la pop moderne hexagonale.

Quant à une éventuelle reformation discographique de Stereolab à l’avenir, la chose paraît nébuleuse mais la principale intéressée laisse la porte ouverte. « Je n’ai pas dit non », assure-t-elle.

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