La pureté des leurs mélodies ferait fondre un régiment de la Légion étrangère. Les Lotus Eaters, groupe originaire de Liverpool, n’ont pourtant jamais rencontré de véritable succès commercial malgré l’album « No Sense of Sin » publié voilà pile 40 ans. Un classique méconnu de l’époque, à classer entre les premiers enregistrements des Smiths et des Pale Fountains.
Il est des disques si délicatement beaux qu’on évite de les écouter trop souvent, de peur de rompre leur charme fragile. « No Sense of Sin » est assurément l’un d’eux. Et l’on peut affirmer sans crainte que le LP des Lotus Eaters, paru chez Arista en 1984, est l’un des enregistrements les plus sous-estimés de sa décennie.
Ce joyau pop est l’œuvre d’un collectif formé deux ans plus tôt à Liverpool, autour du guitariste Jeremy « Jem » Kelly, du claviériste Gerrard Quinn – tous deux ex Wild Swans – et du chanteur Peter Coyle. Liverpool où les musiciens semblent naturellement portés sur la mélodie. Même durant l’après-punk, alors que le détachement et une certaine rigidité dominent le rock “sérieux”. Kelly, Quinn et Coyle seront à ce propos rejoints dans leurs aventures musicales par Michael Dempsey, bassiste issu de la première incarnation de The Cure, puis passé par les Associates. Et qui ne souhaitait visiblement pas s’enfoncer dans l’épais brouillard de Seventeen Seconds en compagnie de Robert Smith.
Si elles ne s’inscrivent pas dans le registre neurasthénique de la cold wave, les compositions des Lotus Eaters ne lorgnent pas pour autant du côté de « l’escapisme » d’un Duran Duran et des nouveaux romantiques. Et bien que certains de leurs morceaux ne manquent pas d’exaltation, rien ou presque ne les rapproche de la passion sans objet du Simple Minds de Sparkle in The Rain, également sorti en 1984.
Car les Lotus Eaters visent le cœur. Et ils tapent juste. C’est d’ailleurs ce qui, au mi-temps des eighties, distingue cette formation, et une poignée d’autres originaires de la perfide Albion, des différents courants que l’on associe encore à la “New-Wave”, terme aussi vague que commodément fourre-tout.
Avec les Ecossais d’Orange Juice et d’Aztec Camera, les Pales Fountains et China Crisis (deux autres groupe nés sur les bords de la Mersey), les Colourfield de Terry Hall, ou encore Prefab Sprout, nos mangeurs de lotus défendent alors une pop “easy listening” aussi romantique qu’élégante, sur laquelle planent les influences de Burt Bacharach, de Scott Walker ou de Steely Dan. Et, bien sûr, des délices psychédelo-baroques des Zombies, du Love de « Forever Changes » et autres Left Banke. Ces friandises sont souvent présentées dans un emballage sonore propre et lustré, relatif aux années 1980. Et que d’aucuns qualifieront de “daté”.
Dévoilé sous forme de single dès l’été 1983, le titre First Picture of You envoûtant atteindra la quinzième place des charts britannique au mois d’août. Le groupe ne fera jamais mieux, commercialement parlant.
Ce qui n’a pourtant pas altéré la fraîcheur de « No Sense of Sin », disque mixé et en grande partie produit par le talentueux Bob Sargeant (The Monochrome Set, XTC, Haircut One Hundred…). D’un raffinement exquis et porté par des mélodies ravissantes, cet ensemble de douze titres séduit dès la première écoute. Dès les premières notes de piano du dynamique “German Girl”. Guitare tourbillonnante, batterie métronomique, chœurs qui montent en colimaçon… Le morceau est un petit ouragan émotionnel. Une tempête dont l’auditeur n’a pas le temps de se remettre. Car suivent immédiatement les entêtants “Love Still Flows” et “Can You Keep a Secret”. Mais peut-on encore parler de “secret” et de confession tant Peter Coyle semble ici dévoiler ses sentiments sans pudeur, d’une voix aussi caressante que perçante ? Et ce, au point de susciter une hébétude et un vertige proches de ceux associés aux premiers émois amoureux. Alors que, dans les rêveurs When You Look at Boys et Alone of All Her Sex, la finesse du jeu en arpèges de Jem Kelly tutoie ceux de Johnny Marr (The Smiths) et de Viney Reilly (The Durutti Column).
Ce lyrisme est alors un exutoire. Un cri poussé par de jeunes gens désireux de porter comme un fier étendard une sensibilité qui, dans la brutale Grande Bretagne de Margaret Thatcher, leur est souvent présentée comme une coupable fébrilité. Mais, au-delà de cet aspect conjoncturel, à l’instar de celle des Smiths, la musique des Lotus Eaters, sa douceur et sa franche mélancolie, transmet à l’auditeur une étonnante forme de consolation.
Malgré d’incroyables atouts, les Lotus Eaters n’obtiendront pas de succès public durable. Demeure à leur actif le succès (relatif) de First Picture of You, pièce maîtresse de « No Sense of Sin ». Dévoilé sous forme de single dès l’été 1983, ce titre envoûtant atteindra la quinzième place des charts britannique au mois d’août. Le groupe ne fera jamais mieux, commercialement parlant : diffusés après la parution de l’album, les simples You Don’t Need Someone New et Out On Your Own ne confirment pas les espoirs placés en eux. Et lorsque paraît It Hurts, en 1985, le groupe est déjà séparé.
Peter Coyle signera par la suite deux albums solo dans un registre bien différent, parfois proche du funk déstructuré de The Pop Group, en 1986 et 1988. Jeremy Kelly reformera les Wild Swans avec le chanteur Paul Simpson, pour enregistrer le très beau Bringing Home the Ashes, paru chez Sire en 1988. Avant de reprendre ses études (il est désormais enseignant en arts de la scène à la Buckinghamshire New University).
Au début des années 2000, alors qu’une nouvelle génération de mélomanes exigeants succombe aux charme de « No Sense of Sin », Coyle et Kelly ne résistent pas aux sirènes de la reformation. Deux albums attribués aux Lotus Eaters naîtront de leur réunion : « Silentspace », publié en 2001 par le label nippon Vinyl Japan, puis l’acoustique « Differance », paru en 2011, en édition limitée, chez Sylvan Records. Bien que plaisantes, ces nouvelles réalisations ne possèdent pas le singulier pouvoir de séduction du premier LP. Mais une telle magie aurait-elle pu seulement opérer plus d’une fois ?
this motal coil, colourbox, the pastels, ivanohé (en france norde) ..pouf! je sais plus,je repasse là les gueunilles de gens gens heureux….;
oublions les pale saints, les go-betweens, les blue rondo allah turk, les gueniillles séchent