Une émission qui se propose, chaque mois, d’ouvrir la voix à une figure de la marge. Au café ou dans sa cuisine, deux heures durant, un illustre excentré nous propose sa grande vie. Un crawl radiophonique désynchronisé au cœur d’un entretien fleuve. Faites entrer la farandole des grands vivants… Aujourd’hui, Mehdi Belhaj Kacem ou la gloire du cancéreux.

Mehdi Belhaj-Kacem se présente comme un malade à vie, qui ferait légende de ses pathologies. Son premier trouble, celui de l’écriture, il l’attrape à 17 ans avec Cancer, un roman d’adolescent enragé, publié trois ans plus tard chez Tristram, cette maison spécialisée dans les écrivains dangereusement lucides, d’Isodore Ducasse à Lester Bangs. A cette époque, Mehdi crise aux diners de famille, buissonne sa scolarité et se sape en gothique ; son imagination névrotique refuse de se plier aux d’obligations socio-normées du « passage à l’âge adulte » pour leur préférer une farandole de publications marginales. D’abord viennent les romans: Cancer, 1993, Vie et Mort d’Irène Lepic, puis arrivent les essais Antéforme, Esthétique du chaos, Society. Autant de parutions qui font du joli rebelle le dernier addictif à la mode: une sorte de mondainderground.

Fin 90, l’œuvre pullule. L’homme, quant à lui, s’annule. C’est que l’acteur de Sauvage innocence entend sacrifier ses yeux couleur horizon pour son travail littéraire. Il faut quitter la médiasphère pour « devenir minoritaire » et évoluer souplement dans l’inapparence. Belhaj Kacem flirte alors avec TIQQUN et EXISTENZ, ces communautés de la désertion insurrectionnelle. Puis, à elles aussi, il finit par tourner le dos; un nouveau cancer l’appelle.

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A l’aube du 21ième siècle, MBK entame une série d’écrits sur l’Esprit du nihilisme. Avec, il entend penser le symptôme du renoncement, cette bactérie rongeant la conscience contemporaine. Ses genoux khâgneux, c’est maintenant le long de son œuvre de penseur qu’il les traine. Sa nouvelle drogue, c’est la philosophie. Mehdi s’éprend d’Alain Badiou et se radicalise en cherchant, à l’instar de « son maître », à faire système. Mais début 2000, c’est la rupture et la dépression. Désillusionné par la systématisation Badiousienne, Mehdi disparait tout à fait. Il dit traverser une « mort antérieure », douloureuse et paranoïaque, avant de ressusciter, en 2011 par le biais de la publication d’un Après Badiou assassin. Belhaj-Kacem tue le père et s’autorise alors enfin à penser de nouveau librement. Comme si, encore une fois, la vie ne pouvait être grande ici qu’en tant qu’elle participe de la mort d’autre chose, là-bas.

Depuis le meurtre du gourou, MBK s’échine à fortifier sa conscience robuste en élaborant un système de la singularité. Dans une petite propriété de Brive la Gaillarde, il étoffe chaque jour son œuvre en vivotant maigrement, de prêts d’amis et de rasades de Whisky. Parfois il se déplace à Paris pour un colloque à l’ENS d’Ulm qui lui est consacré, souvent, il se contente de fumer rêveusement en décortiquant le travail de João César Monteiro. Il ne sort que rarement, mais quand il quitte son cendrier, c’est toujours pour remettre en jeu sa santé – à la drague, au poker ou aux discussions échauffées.

Entretien: Pierre Jouan et Blandine Rinkel
Texte: Blandine Rinkel
Photos: Astrid Karoual

20 commentaires

  1. Comment on peut respecter un mec dont la dernière préface a été écrite par BHL ? Comment on peut s’intéresser à « un fils » qui veut « tuer son père » (c’est raté il n’a que renforcer son pouvoir de chapelle) et surtout après l’avoir fait découvrir à ses lecteurs ? MBK semble être un gros loser avec une seul « o »… Un parasite de la pensée qui a raté sa vocation : écrivain pop ou acteur poseur.

  2. L’enregistrement est très entrecoupé de blancs, est ce du à ma connexion ? Il ne me semble pas pourtant, c’est toujours pointé au mêmes instants, sur les mêmes mots … voilà, pour ceux qui veulent écouter et se faire un avis sur la chose elle même.

  3. Mince ! Des journalistes sans imagination nous avaient déjà fait le coup du « parricide philosophique » au moment de la sortie de « Après Badiou », livre qui rentre tout au plus dans la catégorie « diarrhée éditoriale ». On peut se laisser bercer par les dissertations de Mehdi Belhaj-Kacem, mais la pensée libre… sérieusement ? Il parle de lui la moitié de l’entretien, nous assomme d’écrivains-maudits-morts-suicidés le reste du temps. Un projet politique ? vous voulez rire ! Sa « philosophie » est désarmante et il s’en vante. Ses flagorneries nihilistes sur l’époque, je passe… Si il quittait son cendrier, MBK irait, presque margé lui, grossir les rangs des penseurs réactionnaires. Mais il n’en fera rien : on a compris, la révolte, la pratique, l’engagement (hou le gros mot!), ça ne lui fait « ni chaud ni froid. Sauf quand il peut aboyer contre l’ombre de Pol Pot. MBK n’a pas tué le père, il n’a pas renié, il a accepté c’est tout. Le dernier paragraphe du texte est éloquent. On connaissait le mao renégat, voici la version Tiqqun, tout juste plus branché.

  4. Heureusement qu’il parle de lui, Misère de la philosophie: « Une émission qui se propose, chaque mois, d’ouvrir la voix à une figure de la marge. Au café ou dans sa cuisine, deux heures durant, un illustre excentré nous propose SA GRANDE VIE. »

  5. Heureusement qu’il « parle de lui la moitié de l’entretien », Misère de la philosophie: « Une émission qui se propose, chaque mois, d’ouvrir la voix à une figure de la marge. Au café ou dans sa cuisine, deux heures durant, un illustre excentré nous propose SA GRANDE VIE. »

  6. Incurable Medhi Belhaj Kacem.
    Il n’y a pas une ligne à jeter du court texte que nous avions consacré au petit paon devenu vieux dans le dernier numéro de la Bibliothèque des Émeutes Bulletin N°8, rubrique  » La fosse à potins  » en 1994.

    Medhi Belhaj Kacem, qui avait signé  » Adresse  » dans le bulletin n°5 de la Bibliothèque des Émeutes, mérite, ici, comme d’autres adolescents qui sèchent, un mot d’excuses. En effet, contrairement à ce que ses écrits avaient pu laisser entendre, voilà un brave jeune homme moderne, qui n’a jamais fait de mal qu’aux mouches. Les éditeurs qui nous lisent doivent savoir qu’il a entamé une honnête carrière dans la littérature, et comme il y travaille sans paresse, il n’est pas près de décevoir leurs investissements. Qui, dans un monde qui encourage autant la vanité, reprochera à ce petit paon, qui ne réfléchit qu’aux poses qu’il suppose éternelles, de fuir à l’odeur de la mort lorsqu’elle diffère de celle de son stylo-bille ? Pas, en tout cas les journalistes critiques littéraires qu’il a feint d’insulter avant de se rappeler qu’ils étaient la réclame de son gagne-pain. Né dans une époque où il est plus sage et modéré de parler de ses couilles que de son époque, Medhi Belhaj Kacem trouvera longtemps suffisamment de complaisants ravis de suivre l’évolution de ses branlettes.

  7. MBK est un personnage sympathique et pas un philosophe déméritant. N’en ayant rien à foutre de ces querelles de chapelles badouistes, meillasouillées, anarcho-anticapitalisto-biorévoltaïques ou post-déconstructionofoucaldiobataillohusserlianoheideggerianopoubellistes je rigole toujours un peu quand j’en vois lui cracher au visage et dire « oh ! gros minable, ça y est le roi est nu ». Comme si ça avait un quelconque intérêt de se poser en chevalier blanc i.e. comme si leur parole d’illustre inconnu (ah oui, le fameux numéro de la Bibliothèque des Émeutes Bulletin N°8, rubrique » La fosse à potins » en 1994 …) – ou non – allait amener le monde, enfin la France, enfin la France qui lit MBK, enfin la France qui lit sérieusement MBK (une centaine de personnes ?), à sortir de la caverne post-Tout. S’passe la même chose pour l’horrible Michel Onfray – diantre, moi aussi je m’y mets – tout le monde crache, sauf les idiots (qui ont raison), et rien ne change. Ah si, les litres de crachat déversés continuent de laver la place publique philosophique – tout coule finalement ^^.
    Par contre c’est dommage que les questions des deux interviewers soient complètement insipides et qu’ils soient clairement pas à la hauteur de leur rôle à mes petits yeux. Ça arrive à tous, m’enfin j’avais envie de râler et de pester contre leurs tics qui rendent l’écoute pas très naturelle et contre la fâcheuse tendance qu’ils ont à couper la parole. C’est tout de même bien ouej d’avoir proposé une émission sur MBK.

  8. J’ai tapé son nom et 2013 pour voir ce qu’il devenait. Outch, je pense que tous les gens à qui il a fait du mal à l’époque doivent se sentir soulagés ! Parce que non, Monsieur n’était pas sympa, pour euphémiser. Frappant tout au long de l’entretien ; le name-dropping, les néologismes ou plutôt barbarismes alors qu’il existe des mots tout simples, la torsion du sens jusqu’à dire pornaouak’ « La fidélité infidèle bla bla » l’admiration naïve des 2 interviewers. Pourquoi Mehdi faisait la manche à 18 ans ? Parce que sa famille et ses amis avaient de l’argent (bourgeoisie de Saint Cloud dès ses 13
    ans), qu’il était logé nourri blanchi par eux, et que c’était tellement rebelle de le faire. Il était même propriétaire d’un appart parisien. Pourquoi ne s’est pas soucié de son avenir à l’époque ? Il a été starisé dès son plus jeune âge, il vendait bien (on lui a même acheté les droits cinématographique d’Irène Lepic), il avait l’argent de ses ventes, de sa famille, de certains de se lecteurs qui l’entretenaient (une admiratrice éperdue lui envoyait des sous, il s’est bien gardé de l’en dissuader). Du reste Libé et Les Inrocks le mettaient en couverture et lui faisait croire qu’il étaient le meilleur écrivain du siècle -ce qu’il croyait volontiers- alors pourquoi un grand écrivain connu comme lui aurait pu s’abaisser à faire des études, puisqu’on lui prouvait le contraire en le consultant et le mettant en couverture tel un oracle. Mehdi avait juste son bac sans mention spéciale, de sa publication à très tard dans la vie il s’est pris pour un génie, il ne sait pas écrire sans fautes plusieurs phrases -donc normal qu’il ne voulait/pouvait être normalien, on ne peut pas être normalien quand on écrit « tu est ». Effectivement il n’a concrètement travaillé que 2 mois, dans un supermarché, en tant que pousseur de caddies avant que le jeton pour forcer les gens à remettre les caddies en place ne soit inventé. Quand Houllebecq a sorti « Les particules » il était jaloux, et désormais, quand on lui évoque Chloé Delaume, il est jaloux car elle a réussi là où il a échoué. Il est vrai qu’elle s’appelait Natahlie-Anne, à l’époque. Le mariage ne lui a pas été douloureux (à l’époque il était une superstar et elle une simple étudiante en lettres, c’est surtout elle qui a souffert mais il a du lui dire : « je te suis fidèle dans mon infidélité ») mais ce qu’elle en a dit, oui, et la façon dont elle a réussi encore plus. Je ne comprends pas comment on puisse venir le voir comme si c’était une lumière pour boire ses paroles sous prétexte qu’il est devenu ce qu’il est devenu -c’est à dire pas grand chose. Il ne veut pas écrire des romans : dommage c’est la seule chose qu’il faisait de bien. Il ne parle plus guère de la Tunisie : aoutch il est vrai qu’il avait pronostiqué la révolution comme quelque chose de salutaire, que la Tunisie serait une grande et merveilleuse démocratie. Comment quelqu’un qui est censé être intelligent se prenne un maître à penser pendant 10 ans ? Il se compare à son idole David Bowie : hum il n’a pas changé sur ce point là il était déjà gaga et se prenait déjà pour lui dans les années 90. Il « vit » de poker (activité beauf s’il en est) et sort de sa coquille pour draguer ? Draguer ? Mais qui voudrait de lui maintenant que la déconstruction (ou « déconstructivité » dirait-il) de son visage et l’évolution de sa calvitie sont arrivés à un point de non retour ?

  9. C’est mignon, tout ce ressentiment qui s’étale dans les commentaires. Cela en dit en tout cas plus long sur ceux qui prennent le temps de les rédiger que sur leur cible…

  10. Croisé quelques fois , un manipulateurs qui s’est s’entourer de pauvres ères en mal d’intellectualisme, un parasite économique total . À fuir autant dans la vie que dans les livres.

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