Quand j’étais ado, je rêvais d’être un skater. J’avais tout l’attirail : des chaussures très épaisses, des pantalons et des t-shirts bien trop larges, des cheveux longs, et bien sûr un skate, sur lequel je n’ai jamais réussi à faire grand-chose, à peine tenir debout.

A l’époque, adopter cet accoutrement, c’était une sorte de suicide social. Dans la cour de mon collège de banlieue parisienne où régnait un conformisme très strict, ressembler à un skater, voire pire à un gothique, c’était ne pas ressembler aux autres et cela vous condamnait à l’opprobre. Il y a sans doute plein de raisons qui peuvent pousser un ado à se distinguer de cette étrange manière, mais pour moi cela tenait en deux mots : Tony Hawk.

Avant d’être un personnage de chair et d’os puis un poster dans ma chambre, Tony Hawk était pour moi un personnage de fiction, le héros d’un jeu vidéo, d’une saga découverte sur la PlayStation 2 d’un pote avec Tony Hawk’s Pro Skater 3 en 2001 (je suis né en 1993). J’ai d’abord été surtout spectateur avant de squatter davantage la manette, avec un point culminant au moment de la sortie Tony Hawk Underground 2 dans lequel figuraient les membres de Jackass, une émission complètement débile qui cartonnait sur MTV avec ses chutes, ses cascades et ses défis improbables. Au-delà de l’intérêt purement ludique de la chose, les jeux Tony Hawk avaient surtout le mérite d’avoir une bande-son impeccable pour tout adolescent refusant de choisir entre Motörhead et Redman, Dead Kennedys et OutKast, Fu Manchu et Naughty by Nature, Rancid et Johnny Cash. Comme pour Gran Theft Auto, la musique des jeux Tony Hawk a façonné le goût musical d’une génération de joueurs. Ce qui tombait bien c’est qu’au même moment émergeaient des logiciels de peer-to-peer comme Kazaa puis eMule et consorts, permettant de poursuivre presque sans fin sa quête de nouveaux frissons musicaux. Mais c’est une autre histoire.

Tony Hawk fait partie de mes souvenirs d’ado, de ces choses qu’on assume vaguement, loin de les porter fièrement comme un étendard, mais qui font indéniablement partie de nous. Quand Tom d’Howlin’ Banana m’a fait écouter l’album d’Avions, il a réveillé l’adolescent qui sommeille en moi qui rêve de rider comme Tony Hawk en écoutant du punk-rock. C’est un sentiment assez fort bien qu’assez difficile à décrire ou à partager : ce disque semble s’adresser spécifiquement à cet ado fougueux et un peu cœur d’artichaut qui sommeille en moi et peut-être en chaque adulescent ayant été bercé trop près des amplis Marshall dans les années 90. La musique du groupe incarne une certaine idée du cool, avec ses airs faussement négligés et sa vraie science de la mélodie. Les morceaux alternent entre fureur de vivre et langueur post-amourettes. Pas sûr que ces potes de lycées aient vraiment joué à Tony Hawk, mais pour moi leur musique est une savoureuse madeleine de Proust pop-punk qu’il me plaît de partager.

Avions // Avions // Disponible le 02 décembre en vinyle et en digital chez Howlin’ Banana, Teenage Hate Records, HVIV Records). Précommande par ici.

 

 

 

 

 

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