« Un pied sur le dancefloor, l’autre dans la poubelle« . Depuis 3 ans et six sorties, Stéphane Bodin et François Marché (Bosco, Blackmail) s’évertuent avec une précision maniaque à rendre crédible le slogan de leur propre label, Delodio. Après l’exhumation réussie des musiques minitel de Patrick Michaud, le duo s’attaque cette fois aux démos de minuit de Charlotte Leclerc. Ça s’appelle « Bingo », et ça peut rapporter gros.
Quiconque a déjà tenté de poser sur disque dur des mélodies, des bouts de chansons, le sait : rien n’est jamais plus beau que la première prise, aussi imparfaite et bancale soit-elle. On appellera ça le revers de jean qui ne tombe pas droit, le bout de barbe mal rasé ou simplement, l’art de la démo. Certains tentent en vain de polir la pierre jusqu’à aboutir à de parfaites daubes stériles et inécoutables, puis finissent leur carrière sur Discogs crédités comme producteurs électroniques d’obscurs maxis passés en rotation sur des radios internet polonaises. D’autres tentent, en vain, d’effacer leurs premiers jets, convaincus à tort que tout cela n’ira pas bien loin.
Dans cette catégorie, il y a Charlotte Leclerc. Vous n’aviez certainement jamais entendu son nom jusque là, et c’est bien normal : elle n’a pas joué de live d’une minute et trente secondes chez Quotidien. Bodin et Marché, les deux têtes pensantes de Bosco et Blackmail, ont quant à eux récupéré ces bouts de chansons en plein vol avant leur atterrissage dans la poubelle. Extrait de la rencontre :
Charlotte, à propos de « Bingo » : « Quand je rentre tard le soir chez moi, avant de me coucher, j’aime bien brancher ma vielle boîte à rythmes Vermona et mes synthés. J’enregistre des trucs qui ne sont pas des morceaux, que j’oublie et que je ne réécoute pas parce que ça doit être nul. »
Stéphane Bodin, à propos du même album : « Bingo est une compilation qui regroupe 9 titres enregistrés par Charlotte Leclerc quand elle rentrait chez elle tard le soir entre 2011 et 2018. Elle ne voulait pas que je sorte ses morceaux qui trainaient au fond de son ordi et qui auraient certainement fini par disparaître avec. Il a fallu que je la relance beaucoup et que je sois très patient pour y arriver, je crois que ça valait le coup« .
D’où le nom, bingo, à ne pas confondre avec la compilation publiée par Born Bad en 2017. Soit neuf pistes accouchées à moitié et pourtant, totalement vivantes. La récréation synthétique s’écoute juste en dessous, et si vous cherchiez à quoi aurait pu ressembler le rayon objets trouvés d’un Bricorama situé à Synthé-les-Deux-Accords, nous y voilà.
En bonus, pour tous les millenials disposant d’une capacité de stockage supérieur à celui d’une disquette 3,5 pouces, Charlotte nous a envoyé dix cartes postales commentées à sa manière, c’est-à-dire avec des démos de mots, eux aussi retrouvés dans les cartons. Pour le reste, ça se passe par là.
2 commentaires
la caca est un cas
Parfait pour la sortie de bureau (j’ai testé).