Quatre ans après un deuxième album extrême, le duo de Bruit Noir revient avec un disque encore plus radical. Ca s’appelle « IV / III », c’est certainement le disque le plus anti-commercial de 2023 et cela chante le monde actuel tel qu’il est vraiment, entre déclin du rock pour vieux mâles blancs, fin du monde, impasses écologiques et avenue Greta Thunberg. Un disque impossible à écouter en open space mais qui s’avère pourtant essentiel pour mieux comprendre la mort des chanteurs engagés, et dont on parle avec les deux principaux intéressés dans cette interview long format.

Le massacre des Ouigours, un jeune émigré de République centrafricaine fuyant son pays et se heurtant la misère humaine, le syndrome de Tourette en 4 minutes, l’impuissance de François Hollande et la désertion des Smacs… franchement, on aurait bien aimé être dans le bureau de Stéphane Grégoire, patron du label Ici d’Ailleurs, quand ce dernier reçut les démos du nouveau Bruit Noir, intelligemment nommé « IV/III » alors qu’il s’agit du troisième album de Pascal Bouaziz et Jean-Michel Pirès.

Au-delà de la pochette – qui pourra certainement finir dans les tops de fin d’année, un disque massif comme un parpaing et triste comme un clown au chômage à coté duquel même une élégie de cimetière ressemblerait à une musique publicitaire pour du déodorant. Radical, extrémiste, suicidaire ? Certes. Un disque, surtout, où l’auteur des thèmes se plait à regarder le monde comme il est vraiment, dans la grande tradition perdue des chanteurs engagés des années 60 et 70, mais sans lyrisme ni couleurs. Une succession d’histoires brutes dont on ne sait pas trop comment le patron d’Ici d’Ailleurs arrivera à les vendre dans un monde où tout est désormais non seulement gratuit, mais poussé par la folle envie de se cacher les yeux plutôt que de témoigner de la violence sociale et écologique qui frappe à tous les coins de rue.

IV / III | Bruit Noir

Dans un style ressemblant à celui d’un Stupeflip schizophrène, Bouaziz empile les histoires vraies (ou pas), les coups de marteau sur les autres et sur lui-même et c’est cette sociologie chantée comme un sport de combat, pour citer Bourdieu, qui fait de « IV/III » un album difficile d’écoute, parce que semblable à une photo de meurtre sans filtre Instagram. La documentation d’un monde sur la corde raide, avec quand même Prince (Le petit prince) et Larry David (Calme ta joie) en arrière-plan, et où Bouaziz confirme que sa discographie ressemble désormais à une batte de baseball dans la gueule d’un public qui écoute « un peu de tout » sur son smartphone à 1000 € fabriqué par des petits enfants chinois. Brillant ? Ce n’est même plus le mot. A minuit moins le quart avant l’apocalypse, Bruit Noir permettra au moins aux quelques courageux de relire une dernière fois leur propre histoire. Et peut-être que l’orchestre du Titanic, s’il avait connu les symphonies abyssales de Ian Curtis, aurait joué cet album à son propre enterrement.

Pour revoir l’interview réalisée en 2017, c’est par ici. Et pour acheter l’album avant de mourir (ou même après), c’est par là.

7 commentaires

  1. Pascal bouaziz je suis fan mais il a fini par me gavé grave ,je ne suis pas du tout client de son pseudo humour noir ultra cynique qui en réalité transpire à fond la frustration du manque de succès publique de Mendelson etc ,…Que soit sur disque ou en entretien ou en concert je trouve qu’il cabotine trop , j’en ai vraiment soupé de sa musique , je préfère quand il chante vraiment comme sur le titre  » je Ne Veux Pas Mourir » car son spoken word à la frenchy d’album en album depuis 27 ans à la longue c’est pesant et glauque , Bruit noir j’aimais beaucoup le 1er album ,mais la formule c’est pour moi tres vite épuisé depuis ,chaque album étant moins bien que le suivant et pour conclure le label ici d’ailleurs a trop misé depuis une bonne dizaine d’année sur les ex artiste de chez lithium ,et je trouve cas la longue le label manque d’identité propre ,Stéphane gregoire marche un peu trop sur les pas de Vincent Chauvier ,je préfère les signatures des années 2000 ( fugu , ribot ,bed et consorts) ici d’ailleurs avais alors plus d’identité et il y avais une vrai pluralité et diversité dans leur catalogue

  2. formule épuisée (dixit Père Sévérance), sévère et vraie critique.
    Bloubiboulnoise !
    J’te mettrais tout ça au turbin dans une galaxie lointaine.

  3. pas lu + 9 fois sur dix les interviews d’artistes sont vides de sens, ils répondent du vide, ou hors sujet ou : la droite est méchante et la gauche gentille.
    oui je sors de l’interview sleaford mods sur magic rpm.
    leurs lyrics sont puissants mais passé le rôle d’artiste,passé la poésie ces gens n’ont rien à dire et sont la haute.

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