Pour son projet parallèle Nivhek, Liz Harris (Grouper) propose une heure de musique ambient, expérimentale et crépusculaire. Ça pourrait être chiant à mourir, mais c’est magnifique.

L’appel à la méditation serait-il devenu une valeur refuge en ces temps troublés ? Personne n’en sait rien mais les disciples de Brian Eno pullulent ces dernières années avec plus ou moins de réussite. Œuvrant habituellement sous l’alias Grouper, l’Américaine Liz Harris est pourtant une habituée du genre. Pas forcément via le registre  New age qui rythme les enseignes « Nature et Découvertes » et autre vague ASMR, mais dans une veine plus sombre et contemplative comme en témoignait déjà son excellente collaboration avec Jesy Fortino nommée Mirrorring en 2012.

C’est la voie qu’elle emprunte encore pour son nouveau projet Nivhek. La Californienne délaisse ainsi momentanément le folk squelettique piano/voix survolé de son infime voix qui a fait sa gloire depuis une grosse dizaine d’années avec Grouper. Enregistré entre les Açores et Mourmansk en Russie Arctique dans le cadre d’une résidence, ce disque d’une heure prend la forme d’un double album appelé « After Its Own Death/Walking In A Spiral Towards The House », sorti sur son propre label et déjà épuisé. La cote sur Discogs devrait probablement exploser sous peu. Et vu l’objet, ce serait plutôt mérité.

Résultat de recherche d'images pour ""Liz Harris" Nivhek"Comme indiqué dès le départ, il est ici question d’une musique « d’ambiance », répétitive au caractère expérimental prononcé mais dont l’ensorcellement minimaliste opère très rapidement. Il y a quelque chose de religieux, de spirituel ou de cosmique selon comme on voudra l’appeler dans ces longues plages instrumentales qui prêtent autant à la rêverie qu’à l’effroi.

La première partie « After Its Own Death », elle-même scindée en deux actes, s’ouvre sur la voix céleste d’Harris qui semble sortir d’un vieux cantique avant l’arrivée de drones menaçants rappelant Tim Hecker, eux-mêmes vite balayés par des enchevêtrements de cloches et autres vibraphones. La face B – probablement la pièce la plus marquante – sur laquelle Liz Harris est accompagnée de Michael Morley (The Dead C) et deux autres compères, prend la même trame. Elle y ajoute une guitare mélancolique très Labradford et des éléments de « field recording » et autres dialogues. Le tout donnant une sensibilité toute particulière à ces 21 minutes ayant certainement attrait au passage de vie à trépas dans un emballement final étourdissant.

Plus lumineuse, la deuxième partie « Walking In A Spiral Towards The House » donne la part belle au mellotron qui devient quasiment le seul élément palpable. D’une beauté désarmante, la face A renverrait presque au grand Moondog en carillonnements divins qui se poursuivent jusqu’à une nouvelle conclusion exaltée. Avec une étonnante cohérence dans son ensemble, ce disque pas banal possède un charme sombre et envoutant. Il est une excursion hautement réussie pour la ténébreuse Liz Harris avant de retourner se terrer dans son refuge de l’Oregon.

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