Pour leur troisième album, les new-yorkais de Parquet Courts convoquent l’esprit punk et le Do It Yourself, associés à… une production léchée. Imaginez un punk à chien en costume trois pièces.

« Sunbathing Animal » est un album qui rappelle les vieilles recettes du garage-rock primitif, à la fois minimaliste et spontané, mais le tout est soigneusement mis en scène, avec élégance et coquetterie. Parquet Courts se tient fier comme un paradoxe.

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C’est du rock garage, l’odeur de renfermé en moins. On est passé de la cave au salon, troquant la bière bon marché contre un flacon d’eau de Cologne. Mais qu’importe le flacon : le tour de force de Parquet Courts, c’est d’avoir réussi à conserver le sentiment d’urgence qui émanait de leurs premiers morceaux tout en changeant radicalement leur façon de concevoir un album. Enregistré en trois fois plus de temps, cette suite marque un tournant à la fois esthétique et formel. La conception et la production sont tout sauf laissées au hasard, et il est assez rare aujourd’hui de voir un album où l’enchainement des titres est à ce point cohérent. Les morceaux les plus lents comme She’s Rollin’ ou les sept minutes d’Instant Disassembly contrastent avec l’intensité de morceaux comme Bodies made of  qui ouvre l’album, Black And White qui suit ou bien encore le morceau-titre Sunbathing Animal, du punk féroce en moins de quatre minutes, riche en testostérone et en adrénaline. A la fois sauvages et délicats, les membres de Parquet Courts jouent dans les registres les plus éloignés et dans des formats plus longs qu’auparavant, capables en cela de plaire autant à la secte garage qu’aux oreilles hérétiques.

La beauté brute de Light up gold fait certes la place à une production plus soignée mais sans altérer la virulence de la création. C’est crade et très structuré dans le même temps. Une sorte de DIY très contrôlé, paradoxalement. Le groupe souhaite à l’évidence élargir son audience et s’inscrire durablement dans le paysage new-yorkais, mais c’est plus de l’intelligence que de la compromission. Parquet Courts avance sans se renier et façonne son style. Les guitares sont joliment criardes, et des morceaux comme Vienna II et She’s Rolling sont à mettre entre les mains de tous les afficionados de la dissonance et de la cacophonie. Simples sans être simplistes, certains morceaux sont frénétiques et entêtants, dignes des rythmiques du meilleur Wire par endroits. De la même manière que les premiers garageux jouaient du mauvais blues joué à toute blinde, Parquet Courts sonne parfois comme un groupe de blues futuriste, empruntant au blues ses structures élémentaires pour mieux les piétiner. Dodgin and duckin’ est un clin d’œil à un blues enregistré par Alan Lomax, mais c’est bien plus ici un champ de mines qu’un champ de coton. Raw Milk, l’avant-dernier morceau est un morceau planant qui témoigne lui aussi d’une sérieuse inspiration blues, avant qu’ Into the Garden achève l’album sur une note apaisée.

« Sunbathing animals » est construit à partir de vieux matériaux de récup, et on retrouve ici encore les mêmes influences, les mêmes échos perçus dans le travail du groupe jusqu’à aujourd’hui (The Velvet Underground – en particulier sur Dear Ramona qui commence vraiment comme une Face B du Velvet, Modern Lovers, Television, The Gun Club, Pavement…). Et pourtant, il n’y a pas grand chose à jeter là-dedans. Un bel album, gueulard à souhait, trop soigné pour être totalement punk, et pas non plus franchement visionnaire, mais réussi, assurément. Dans l’ère du temps.

Parquet Courts // Sunbathing Animal //  What’s Your Rupture
http://parquetcourts.wordpress.com

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