Un nouveau groupe de Birmingham débarque. Emballée par les frères Ravenscroft, la fusion indie punk de Silver Lines promet. Et si c’était eux, la 4567ième révélation made in UK ?

Ne vous fiez pas aux apparences. Lorsqu’ils débutent leur concert, les Anglais de The Silver Lines ne payent pas de mine. Il s’agit probablement du seul groupe de l’univers avec un chanteur au look aussi étrange. Avant eux, on se souvient de partis pris vestimentaires audacieux : le K-Way de Liam Gallagher, la veste Adidas de Ian Brown, les cols pelle à tarte de Jarvis Cocker ou d’autres bien plus récents qu’on taira par compassion. Ceci étant dit, un chanteur d’indie-punk avec coiffure de Frédéric François, tee shirt à manches longues et écharpe noir, on n’avait par encore vu ça sur scène. Ce qui fut le cas aux Transmusicales de Rennes en décembre, pour leur première date française.

The Silver Lines, c’est 4 « nobody » de Birmingham qui se mettent à jouer ensemble pour un résultat tout sauf lambda. Les titres de leurs singles claquent tel le fouet d’une maîtresse domina sur le cul d’un client récalcitrant : Hotel room, Bound, Love made, Cast away,… Aux commandes de cette machine indie-punk, deux frangins : Dan (chant) et Joe (guitare) Ravenscroft. Aux fûts, Kindo, et à la basse, Joe Cartwright. Ne surtout pas se fier à leur dégaine de men next door, ces mecs sont des snipers. Avant quelques concerts en France en avril et une apparition au SXSW d’Austin en mars, en route vers ce qu’on appelle la fraicheur des débuts.

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Vous êtes de Birmingham. Pour commencer, parlons des groupes plus ou moins iconiques de cette ville qui ont peut-être pu vous influencer. Ok pour vous ?

Dan Ravenscroft : Parfait, même si on n’est pas du tout certain de tous les connaître.

« Pour savoir si j’aime un groupe, c’est assez simple. Quand j’aime, j’ai envie d’en faire parti. Et j’ai vraiment pas du tout envie de faire parti d’Editors »

Birmingham est une ville connue pour sa reconnaissance du « jour des vétérans ». On va donc évoquer des groupes plus ou moins vieux. Et on commence par Editors.

Dan Ravenscroft : J’adore Editors, c’est un très bon groupe groupe.

Kindo : Je ne suis pas du tout d’accord.

Dan Ravenscroft : J’aime beaucoup leur musique. Un morceau comme Smokers outside the hospital doors, c’est fantastique. C’est un morceau très puissant, où tout est dit dès le titre. Mais vas-y, tu peux parler.

Kindo : Pour savoir si j’aime un groupe, c’est assez simple. Quand j’aime, j’ai envie d’en faire partie. Et j’ai vraiment pas du tout envie de faire partie d’Editors.

Dan Ravenscroft : Bonne réponse.

On enchaîne. Black Sabbath ?

Dan Ravenscroft : Très bon.

Kindo : Excellent. Incroyable. Je veux définitivement faire parti de Black Sabbath. Pour les fêtes, notamment !

Dan Ravenscroft : La voix d’Ozzy Osbourne est juste phénoménale. J’aurais du mal à la décrire précisément, mais en Angleterre on dirait qu’il a une voix de « bad boy » qui colle parfaitement à la musique du groupe.

Ocean Colour Scene ?

Dan Ravenscroft (en français) : Comme ci, comme ça.

Kindo (en allemand) : Nichts.

The Streets ?

Kindo : C’est ok pour moi.

Dan Ravenscroft : C’est le groupe de Mike Skinner ? Il a fait quelques bons trucs, mais c’est pas pour moi. Ceci dit, c’est un mec cool avec qui on a déjà fait la fête.

C’est peut-être pour ça que tu n’apprécies pas sa musique ?

Dan Ravenscroft : Pas du tout. Pour être honnête, j’arrive pas à savoir si c’est un génie ou si il est atroce. En fait, je n’arrive pas à savoir s’il fait une musique que je ne comprends pas ou si à l’inverse, je comprends tout et il fait vraiment de la merde. Tu vois ce que je veux dire ?

Kindo : Très bien.

« Aujourd’hui, à Birmingham, tu vas trouver plein de groupes qui veulent juste être le nouvel « Alex Turner et ses Arctic Monkeys ». Ca me gonfle ».

Et Duran Duran ?

Dan Ravenscroft : Je les connais. Leur look est meilleur que leur musique.

Si vous deviez choisir un seul groupe de Birmingham qui compte ou a compté pour vous, ça serait lequel ?

Dan Ravenscroft : Il y a un groupe vraiment excellent à Birmingham. Les mecs sont cool et je les adore.

Leur nom s’il-te-plait ?

Dan Ravenscroft : The Silver Lines.

Ok, bien joué.

Kindo : Plus sérieusement, on choisirait probablement Led Zeppelin. Robert Plant est de Birmingham. C’est le groupe vers lequel on lève le plus les yeux, même si on ne fait pas la même musique qu’eux.

Dan Ravenscroft : Et puis c’est quand même Led Zeppelin, merde.

Dans les paroles de vos morceaux, il arrive que vous parliez de masculinité toxique. C’est quelque chose d’important pour vous ou juste une thématique parmi d’autres ?

Dan Ravenscroft : Non, c’est vraiment quelque chose d’important, parce qu’aujourd’hui les garçons de pleurent pas (NDLR : il cite Boy’s don’t cry de The Cure) mais demain les garçons pleureront. Vous voyez ce que je veux dire ? Je ne vais pas me lancer dans un sermon ou me prendre pour un prêtre, car je ne veux rien imposer à personne mais on doit en tenir compte. Je veux dire… On est un groupe de rock et on doit aussi faire avec toutes ces choses là. Je sais pas exactement si tu comprends ce que je veux dire, mais on ne peut plus forcément aller vers où on pouvait aller avant. Y compris avec les fans.

« On fait ce qu’on veut. Si ça te plaît pas, va voir quelqu’un d’autre »

Dans un de vos morceaux, on trouve cette phrase, « Same old story always on repeat ». Ca s’applique aussi au rock et à la pop en 2024 ?

Dan Ravenscroft : Faut être honnête. Pour commencer, ce qu’on peut dire, c’est depuis une grosse dizaine d’années, il n’y a eu aucun groupe à guitares qui a débarqué et qui a tout révolutionné, ni même emporté un public massif. Personne n’a fait quelque chose qui n’avait déjà été fait ou dit par un autre groupe avant lui. Aujourd’hui, à Birmingham, tu vas trouver plein de groupes qui veulent juste être le nouvel « Alex Turner et ses Arctic Monkeys ». Ca me gonfle. Je respecte ce qu’ils font, mais franchement, pourquoi j’irai les voir si ce qu’ils font est mieux fait par d’autres ? Allons plutôt voir directement les Monkeys, dans ce cas. Ce qu’on essaye de faire avec The Silver Lines, c’est d’apporter un truc en plus. Bien sûr, ça reste du rock ou de l’indie punk. Mais avec un truc en plus. Tu vois ce que je veux dire ? On fait ce qu’on veut. Si ça te plaît pas, va voir quelqu’un d’autre. Mais on ne fera pas parti de l’armada des copieurs.

« Franchement, j’aurais préféré faire du hip-hop, mais les autres membres du groupe ne sont pas assez cool pour ça »

Quand vous avez fondé le groupe, pourquoi avoir choisi de jouer des morceaux proches du punk ou de l’indie ?

Kindo : Probablement parce que c’est la musique que nous écoutions quand on était plus jeunes.

Dan Ravenscroft : Franchement, j’aurais préféré faire du hip-hop, mais les autres membres du groupe ne sont pas assez cool pour ça.

Kindo : En vrai, on écoute pas mal de hip-hop. En venant on écoutait Headie One, par exemple. Ou Skepta. Ou toute la drill qui est venue d’Angleterre. Ils sont là, les trucs cool. Les groupes de pop ou de rock ne sont plus aussi cool.

Dan Ravenscroft : Probablement parce qu’ils sont trop timides pour effrayer les gens avec leur musique et surtout leurs paroles.

Kindo : Pas d’accord. J’en ai rien à foutre de ce que je chante.

Dan Ravenscroft : Il y a ce morceau de Central Cee, Doja. Je vais pas parler de lui ni du morceau mais juste de la phrase d’ouverture. Il dit « How can i be homophobic ? My bitch is gay ». Rien que ça, ça tue tout ce qu’ont pu faire les groupes de rock ou de pop depuis dix ans. Tous les groupes. Cette ligne, c’est le punk d’aujourd’hui. Il a juste changé de forme et de codes. Allez-y, écoutez ce morceau, et vous verrez.

 

Maintenant qu’on a parlé de hip-hop, on va revenir vers votre musique. Quel avis portez-vous par exemple sur la Britpop des 90’s ?

Dan Ravenscroft : Evidemment, il y a dans notre musique quelques influences Britpop. Mais prenons par exemple un groupe que tout le monde connaît : Oasis. Oasis a fait un truc vraiment bon. Quand je dis un truc, je parle de « Definitely Maybe », leur premier album. Pour moi, c’était du punk. Je n’arrive pas à retrouver un morceau de rock avec une énergie aussi massive que Supersonic. Mais en Angleterre, les gens ont choisi la version waterproof d’Oasis. Celle qui est arrivée dès le deuxième LP et dont je me fous. Quand Oasis est devenu inoffensif, plein de groupes se sont mis à les copier en Grande-Bretagne. Et ça, ça craint.

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Les temps ont pas mal changé depuis. On est passé à l’ère du single streaming. Pour l’instant, vous en avez sorti plusieurs sans passer au format album. Il y a une stratégie derrière ça ou c’est juste devenu normal ?

Kindo : Ne parlons pas de stratégie, mais l’idée c’est quand même de sortir des singles espacés pour se laisser le temps de grossir tranquillement. Un album, ça serait l’effet big bang. Et puis un album, c’est 11 morceaux, 6 mois de taf. On y est pas encore. Le fait de sortir des morceaux seuls et de façon espacée, ça permet aussi de donner à chaque morceau suffisamment d’exposition pour qu’il puisse être reconnu.

Dan Ravenscroft : On n’est pas encore assez gros pour sortir un album. Ca serait une erreur. Quand on en sortira un, je veux que ça soit important.

Vous allez venir en avril jouer en France, et vous avez joué en décembre dernier à Rennes aux Transmusicales.

Dan Ravenscroft : C’était notre tout premier concert en France. Et seulement la deuxième fois de ma vie que je mettais les pieds dans votre pays.

Kindo : C’est vraiment cool de jouer en Europe, et particulièrement ici, chez les Froggies. On était hyper excités de vous apporter toute notre énergie anglaise. Toute notre sueur.

Dan Ravenscroft : Nous sommes très bons en live.

Kindo : C’est certain. On adore ça, on n’est pas du tout nerveux à l’idée de jouer devant un public important. L’énergie, on la prend aussi de la foule. Le trac s’en va dès le premier morceau.

Dan Ravenscroft : Si tu es nerveux avant un concert, je te conseille de ne plus en faire. A Rennes, on s’était retrouvé la veille du concert dans un café du centre-ville. Ca a été l’occasion pour moi d’avoir une bonne engueulade avec des Français à propos du rugby. Qui est le meilleur ? Vous ou nous ?

Kindo : Rien à voir avec la musique.

Dan Ravenscroft : En tout cas, pour l’instant, ça a été le festival le plus cool dans lequel on a joué.

https://thesilverlinesuk.bandcamp.com

11 mars 2024 – Austin, Texas
3 avril – Annecy (Le Brise-glace)
4 avril – Besançon (L’entonnoir)

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