Groupe en The à lui tout seul avant la vague des groupes en The, Neil Hannon montre donc à nouveau les crocs de velours. Et les montre bien. Défenseur d’une certaine vision étrangement devenue passéiste de la pop (en gros, ma mélodie peut être sifflée sous la douche sinon c’est de la merde), Hannon ânnone finalement assez peu sur ce disque réussi et emballé sous une pochette bigarrée aux airs du ‘No Other’ de Gene Clark.
Même si il n’a pas forcément les moyens de son ambition – quelqu’un peut ressusciter Georges Martin svp ? – ‘Foreverland’ reste une excellente surprise. Car voilà, Neil aurait pu finir comme un Frédéric François des Highlands ou un Daniel Guichard de la Saint Patrick. Le désir des fanatiques s’était fait la malle, et c’est avec une politesse convenue que certains avait accueilli ‘Bang goes the knighthood’, son dernier « effort » de 2010. La musique de l’irlandais ressemblait alors à une vieille maîtresse qu’on ne baiserait plus trop. Ou alors avec tendresse et ennui poli. La faute à cette trilogie pop fantastique et monstrueuse (‘Liberation’/’Promenade’/’Casanova’) sortie dans les années 90. Monstrueusement pompeuse, diront quelques allergiques aigris. A tort.
En 12 titres (l’édition Deluxe en comporte apparemment 19 supplémentaires qu’on vous laisse découvrir), cette nouvelle production conforte l’ex tête à claques irlandaise comme un champion toute catégorie du songwriting. Longtemps considéré comme précieux et pédant (i.e : pétant plus haut que son cul), le lutin de Dublin assume enfin complètement son côté chic et décalé parfois digne d’une bloggeuse mode en fin de règne. Maniant l’ironie comme personne, ce faux timide grand amateur de Burt Bacharach ou de Scott Walker passe ci-dessous aux aveux en raillant en permanence la musique qui passe dans le hall de l’hôtel.
Tu as vécu ta jeunesse en Irlande à Enniskillen. Tu y retournes régulièrement ?
C’est une toute petite ville. Mes parents vivent encore là-bas.
A tes débuts, tu disais que cette ville était ton seul foyer et qu’une fois plus vieux, tu retournerais y vivre.
J’ai dit ça, moi ? Impossible. Je n’ai jamais pu dire ça. Je n’ai jamais eu l’intention d’aller vivre en Irlande du nord, que ce soit à Enniskillen ou ailleurs.
Samuel Beckett et Oscar Wilde sont des gloires locales. Penses-tu désormais avoir atteint leur degré de célébrité ?
J’aurais tendance à penser que ces deux là sont un tout petit peu plus célèbres que moi. Oscar Wilde est probablement dans le top 100 des gens les plus connus de tous les temps. Il est tout là-haut, avec Jésus. Je me demande si je suis dans le top 100 000.
Après Enniskillen, tu as vécu à Londres et à Dublin. Plus généralement, on sent chez toi l’européen convaincu. Quel est ton sentiment sur le brexit ?
Tout d’abord, je voudrais dire très clairement que je ne suis pas un citoyen de Grande-Bretagne. D’une certaine manière, je le suis quand même un peu puisque j’ai un passeport anglais. Mais je ne vis pas là-bas. Donc je ne me sens pas le droit de dire quoi que ce soit là-dessus. Tout ce que je peux dire, je le fais en position d’observateur. Contrairement à beaucoup de personnes que je connais, j’ai toujours pensé que la Grande-Bretagne pourrait un jour sortir de l’union européenne. Même si c’est une idée stupide. La seule chose que je peux dire pour les défendre, c’est que les parlementaires de Bruxelles n’ont jamais vraiment pris au sérieux ce scénario et qu’ils n’ont rien fait de concret pour que ce Brexit ne se produise pas. Maintenant, ils savent.
« Je suis vraiment consterné par cette question. »
Revenons à la musique. Il y a quelques années, tu disais que tu t’arrêterais dès que tu n’aurais plus rien à dire sous le format pop. T’en es où, de ton « pop brexit »?
Je ne renie pas l’étiquette pop, bien sûr. C’est un label évident. Mais j’ai l’impression que je ne fais plus vraiment de la pop. Je reste un songwriter, mais mes chansons ont souvent à voir avec tout sauf la pop music. Je n’ai plus rien en commun avec les charts ou les programmes de pop à la télévision – si jamais il en reste. Je suis déjà en dehors de la pop, sans jamais avoir décidé de la quitter. Ma musique a évolué, voilà tout. C’est pour ça que des gens continuent à me suivre. Il n’y a rien de plus affreux que d’anciennes stars pop ou britpop qui continuent à faire la même musique qu’à leurs débuts. C’est même embarrassant, et j’ai jamais voulu tomber là-dedans.
N’est-il pas temps de te lancer enfin dans cette symphonie que tu promettais à tes débuts ? Tu disais vouloir la faire à 50 ans. T’en reste encore cinq pour pas être en retard…
Jesus-Christ ! C’est déjà mon enterrement ? Ca pourrait me prendre cinq ans pour en écrire une. Je veux bien, mais je dirais que c’est toi le responsable. En vérité, je n’en ai jamais fait. Même ‘A short album about love’ n’était qu’un amas de sept chansons très orchestrées. On était bien loin d’une symphonie. J’aime les orchestres, les arrangements symphoniques mais je n’aurais jamais la prétention de dire que je fais ou que je saurais faire de la musique classique. J’adorerais évidemment écrire un jour une symphonie. J’ai quand même fait des choses dans cette veine. Il y a une série à la télé anglaise qui demande à des artistes d’écrire un « opéra » d’une trentaine de minutes. Et j’en avais fait un. Ca m’avait pris des mois, et je dois avouer que ce n’était pas une réussite. La plupart de mes amis m’avaient dit que c’était un essai correct, mais rien de plus.
Tu parlais de songwriting. Scott Walker a été une de tes influences majeures. Est-ce que quelqu’un comme Jimmy Webb a eu autant d’importance dans ton parcours ?
La liste des songwriters qui ont pu m’influencer est sans fin. Certains sont bien sûr tout en haut : Scott Walker, Kate Bush, Michael Nyman. Et plein d’autres, de façon moins évidente : Burt Bacharach, Jimmy Webb,,…La liste est sans fin, et par conséquent, je n’arrive pas à en retrouver plus de quelques-uns. Ce qui compte, c’est que tu entends encore leurs chansons à la radio après toutes ces années. Et qu’elles sonnent parfaitement, du début à la fin.
« Je voudrais entendre moins de selfie music et plus de songwriting. »
La disparition progressive de la mélodie dans les productions actuelles doit te rendre bien triste. On a l’impression que le côté percussif et la production ont phagocyté les chansons.
Ca ne va pas me faire pleurer, puisque ça laisse plus de place pour mes morceaux. Mais bien sûr que je voudrais entendre moins de selfie music et plus de songwriting. Je ne sais pas si on traverse une période assez courte, ou si cette tendance va s’inscrire sur du long terme. (Entendant Coldplay passer à la radio). J’aime Coldplay, ah ah !
Coldplay ?
Honnêtement, je n’ai rien contre eux. [Ce sont] Des gens charmants. J’ai vraiment adoré ce groupe pendant un album et demi. Et puis, progressivement, il a changé. Ils ont intégré des éléments presque technos à leur music. Et aujourd’hui, Coldplay, c’est de la dance music aussi chiante que celle de David Guetta. Je suis désolé, mais c’est terrible. Si un groupe comme ça décide soudainement que la guitare est un instrument accessoire, alors ils perdent beaucoup de leurs fans. Comme tu le sais, je ne suis pas à proprement parler un groupe à guitares. Mais j’aime les sentiments qui sont générés par la musique indie, par la musique alternative. J’aime l’idée derrière ça, cette idée que ces groupes essayaient de faire quelque chose de différent. Coldplay a perdu ce mojo.
Divine Comedy n’est certes pas un groupe à guitares, mais sur ‘Fanfare for the comic muse’, votre tout premier album, tu en étais quand même le guitariste.
A l’époque on faisait du sous-REM. Un groupe indie très chiant. Ce n’est qu’avec ‘Liberation’, mon premier LP solo, que j’ai découvert tout le reste.
Je me souviens que tu étais fan de Graham Coxon.
C’est vrai, et c’est toujours le cas d’ailleurs. Je l’ai vu l’autre jour. Il…va bien. Et j’adore son jeu de guitare. Blur a toujours été un groupe très créatif, chaque membre l’est et a une tripotée de bonnes idées. On doit les admirer pour ça, pour cette recherche permanente. Ils auraient pu se contenter de répéter sans cesse la même chose.
« J’ai fait quoi en six ans ? Oh, un album sur le cricket. »
Venons en à ‘Foreverland’. C’est quand même pas un hommage détourné au Neverland de Mickael Jackson ?
Non… Je suis vraiment consterné par cette question. Et si ça parlait d’un Neverland, ce serait celui du Peter Pan de J.M Barrie. Mais ce ne serait pas vrai non plus. Foreverland, dans mon esprit, c’est un état que tout le monde recherche, chacun en ayant une vision et une idée très différente. Une forme de plénitude. Ca peut être un objet, un état d’esprit, la qualité d’une relation amoureuse… ‘Foreverland’, c’est ce que représente ce Graal dans notre esprit.
Quel est ton propre ‘Foreverland’ ? La vie de famille ? Ta fille ?
Hum, non…C’est un endroit où rien n’est à prouver, où tu n’as pas a t’inquiéter, où tout est calme. Le morceau Foreverland, c’est comme le récit d’une exploration par le capitaine d’un bateau. Il tente de persuader ses troupes de continuer à chercher, à naviguer vers cet endroit fantasmé. C’est aussi une sorte de conversation intérieure que chacun peut avoir chaque jour avec lui-même. Parfois, ta conclusion c’est que tu devrais tout arrêter et prendre de la drogue. Mais le lendemain, tu continues à chercher.
‘Foreverland’, ce pourrait aussi être l’Europe, non ?
Tu peux le lire comme tu veux.
Au cours de ta carrière, tu as connu 3 périodes très différentes. Setanta, un label indépendant, puis la major Parlophone/Emi et enfin ton propre label, Divine Comedy records.
Oui, on peut presque dire que je suis dans le DIY désormais. On peut ajouter une quatrième période, celle d’avant Setanta. Probablement celle où tu te prends le plus la tête sur ce que tu peux faire ou pas faire. Tu ne sais pas trop ce qu’il se passe, tout va très vite et c’est beaucoup de fun. Et ensuite tu signes quelque part…Et c’est seulement après tout ça, après avoir vendu quelques disques que tu finis par te dire : « Mais où est donc passé tout l’argent ?? ».
C’est à cause de problèmes d’argent que tu avais quitté Setanta ?
Pas vraiment, même si j’ai toujours eu le sentiment que quelque chose ne tournait pas rond avec eux. Sans savoir quoi. Et puis tout est devenu limpide quand on est parti ailleurs. Ensuite il y a eu Parlophone, une autre période intéressante. ‘Regeneration’, je le vois comme une impasse. Je ne savais pas ce qui aller se passer, j’expérimentais un truc nouveau…
Que regrettes-tu sur ‘Regeneration’ ? La production de Nigel Godrich ?
Je ne regrette rien du tout. J’ai surtout le sentiment que ce disque, ce n’est pas vraiment moi. Je ne ressens pas beaucoup d’attachement envers lui. Sûrement parce que c’est celui sur lequel j’ai eu le moins d’influence. C’est Nigel qui l’a dessiné, pas moi. Mais ça reste un bon album. J’aime bien l’écouter…parce que ça ne sonne pas comme du Divine Comedy. Et puis après il y a eu Absent friends’, ‘Victory for the comic muse’. C’était une période où j’avais envie d’aller de l’avant. Ma carrière est de toute façon un processus progressif. A aucun moment tu ne peux dire « Ce disque ferait une belle conclusion ». Pour en revenir à ta question, on s’est barrés de Parlophone avant d’en être virés. C’était un vrai bordel chez eux à ce moment là, et en plus je n’étais plus du tout une priorité dans leur développement. Ils étaient en train d’être rachetés par Universal et on a bien senti qu’on allait se faire lourder. Alors on a monté notre micro-structure.
Quel est ton rôle exact dans Divine Comedy records ?
J’en suis le directeur adjoint, avec Nathalie, ma manageuse. Voilà, tu as l’organigramme complet du label.
‘Regeneration’ n’est manifestement pas ton album favori dans ta discographie. Alors, lequel…
Pfff…Mon dieu, c’est difficile de dire lequel de mes albums je préfère. C’est me demander de juger l’impossible, parce que je ne vois pas sur quel critère juger un disque. Mais « Promenade » est sans hésitation possible celui qui possède le plus de sens du début à la fin. Même si pas mal de passages m’embarrassent quand je les réécoute aujourd’hui. C’est normal, ce disque, c’était moi à 23 ans. Et penser à toi à cet âge-là, c’est vraiment embarrassant. Mais ce disque reste très cohérent du point de vue du son. Donc je dirais ‘Promenade’.
« Signer avec un nouveau label, ça signifiait céder énormément de contrôle sur ma musique sans avoir grand-chose en retour »
Après avoir quitté Parlophone, pourquoi avoir décidé de monter ton propre label ?
Quand tu parles de label, cela veut dire signer des contrats, trouver un logo, etc. Mais on n’a évidemment pas de bureaux, on fonctionne en mode ultra-léger, et c’est normal dans une industrie musicale dégradée. Pour être franc, on aurait pu signer dans d’autres labels. Il y en avait plein qui nous voulaient, qui nous ont fait des offres. Mais j’avais l’impression que signer avec eux, c’était céder énormément de contrôle sur ma musique sans avoir grand-chose en retour. A chaque fois que tu signes sur un label, peu importe ce qu’on te dit à la signature, la vérité, c’est qu’à un moment ou à un autre, ils se mêlent de l’artistique et mettent le nez dans tes affaires. Ils posent des questions, genre « Est-ce qu’on va avoir des hits ? ». Et je ne veux plus jamais avoir cette conversation.
Peut-être parce qu’avec ‘At the indie disco’, tu avais déjà essayé d’avoir un hit ? Et que tu avais échoué.
Mais j’essaierai toujours d’avoir un hit ! Même si je sais que c’est une vision démodée. Comme les radios, les singles…
Youtube et les plateformes de streaming ont donc tout changé ?
Oui, et raisonner en hits aujourd’hui, ça ne veut plus rien dire. Mais je suis très vieille école. Je viens d’une période où on enregistrait sur des cassettes. Ou on dupliquait de cassette à cassette. A la main. Le truc cocasse, c’est que même sans label, je parviens à me mettre de la pression. Pas parce que je veux faire du cash avec des singles, non…(Parce que cela n’arrivera jamais, bien sûr)…mais parce que j’adore la pop-music. Et j’ai envie que les gens sifflotent mes morceaux comme moi avec ceux de Burt Bacharach.
Gamin, comment découvrais-tu tous ces songwriters ?
Paradoxalement, c’était plus simple alors, même si je vivais dans un petit village. Parce qu’il y avait des émissions de télévision que tout le monde, je dis bien tout le monde, regardait. Top of the pops, par exemple. Et quelques stations de radio qui étaient entendues par tout le monde. Comme Radio 1 où j’ai découvert toute la musique britannique. La soul, la musique irlandaise, c’était pareil. Quelques programmes en parlaient, et c’était tout. Même si certains étaient plutôt pourris. A l’époque, l’underground était vraiment caché. C’était comme une énorme vague de pop à laquelle personne ne pouvait vraiment échapper. A présent, c’est très différent. Tout le monde a accès a tout, mainstream, underground, salsa, opéra, rock tchécoslovaque…En ayant accès à tout, tu as finalement accès à rien. Le truc cool dans le « bon vieux temps », c’était qu’en regardant Top of the pops, tu avais accès à plein de choses. Le spectateur se retrouvait à regarder des choses vers lesquelles il ne serait pas forcément naturellement allé. C’était plus ouvert, et des choses qui a priori ne devaient pas marcher finissaient parfois par se retrouver en haut des charts. C’est impossible aujourd’hui.
Qu’as-tu fait depuis ton dernier album ? Ca fait déjà 6 ans…
Un album sur le cricket, déjà. C’était fantastique parce que Thomas [Walsh] et moi partageons cet amour pour le cricket, ELO, les Beatles, les Kinks… Une période fantastique, la période 67-72. On a fait ce disque en respectant cette période sans tomber dans les clichés qui vont avec. Probablement pas le plus grand album de tous les temps, mais beaucoup de plaisir. Et aussi pas mal d’autres choses que je ne vais pas détailler ici…
Tu écoutes des groupes actuels ou uniquement des oldies ?
J’essaye d’écouter des groupes d’aujourd’hui. En vérité, je n’ai pas besoin d’essayer énormément puisque je suis juste à côté de Dublin. Dès que j’y pénètre, je suis envahi par les radios, et donc les groupes du moment. Il y en a des bons mais aucun que je voudrais citer pour lui faire de la publicité. Qu’ils se débrouillent !
Tes parents ont-ils eu une forte influence sur ton goût pour la musique ?
Mon père était un excellent joueur de piano. Des trucs très romantiques comme Chopin ou Rachmaninov. C’est probablement l’origine d’une partie de ma musique, de mes débuts qui sonnaient parfois comme une étude de piano. Je ne savais pas trop quoi faire de certaines miniatures et au final je me disais « hey, si j’en faisais une popsong ? ». Mais je crois que j’ai été plus influencé par mon frère aîné. Il écoutait énormément la musique des charts. C’est là que j’ai trouvé mon fétiche ELO : Jeff Lynne. Mon frère qui avait cinq ans de plus que moi était un fan absolu d’ELO. Il m’a presque forcé à écouter ‘Out of the blue’ jusqu’à ce que je crie au génie. J’adore aussi ‘A new world record’, ‘Discovery’, ‘Time’, etc.
Je suppose qu’il t’avait aussi forcé à écouter The Idle Race, le premier groupe de Jeff Lynne ?
Je ne connais rien de ce groupe. Thomas n’arrête pas de m’en parler mais je ne connais absolument rien d’eux. Et je m’en fous. C’est pour les collectionneurs de disques. Je suis vraiment très bon pour ignorer le travail des gens.
A propos, doit-on vraiment ignorer ton premier album, ‘Fanfare for the comic muse’ ?
Je n’ai qu’un conseil à donner : n’écoutez jamais, jamais, ce disque. L’EP ‘Europop’ à la limite, même s’il n’y a aucune originalité dedans. Ce n’est pas bon. Je suis ravi par contre que ce disque coûte cher sur Discogs. Ca veut dire qu’il devient rare et que de moins en moins de personnes vont souffrir en l’écoutant. Personnellement j’en ai un seul exemplaire que je conserve pour les jours pluvieux. Ma fille ne l’écoute jamais, elle est plus dans l’EMO. Elle a le temps, elle n’a que 14 ans.
Tu donnes l’impression d’avoir toujours été fasciné par la bourgeoisie qui s’effrite, par les mondanités démodées. Tu en parlais d’ailleurs magnifiquement dans A lady of a certain age.
Je l’ai été, même si je n’ai jamais raisonné en terme de classes. J’essaye de toucher les gens sur des sujets que je comprends, pas forcément des choses dont j’ai l’expérience. Et je connais énormément de gens issus de ce qu’on appellera rapidement la haute société. Des gens bien nés et généralement désargentés. Et cette idée d’être bien né, de faire parti d’une lignée est si démodée que ça en devient presque touchant. Je lisais Noël Coward à cette période. Et il parlait de ses vacances avec ceux qui avaient été fortunés mais ne l’étaient plus. Des gens qu’on trouvait près de la Méditerranée, à Nice. Sa description me rappelait des amis de ma mère, croisés quand j’étais enfant. Des gens qui se rendaient dans leur maison tout en haut de la colline en Triumph Spitfire, avec des lunettes de soleil dignes de Jackie O et d’immenses écharpes. Je suis peut-être l’un des rares à pouvoir écrire des chansons sur ces personnes. Alors, je le fais.
J’ai toujours pensé que tu avais quelque chose à prouver, à te prouver. Souffrais-tu plus jeune du complexe de Napoléon, face à tes idoles de jeunesse ?
Certainement. Et j’ai toujours voulu faire du rock de stade, ah ah ! L’idée habituelle derrière ce complexe de Napoléon, c’est que les gens de petite taille ont besoin d’en faire plus que les autres pour pouvoir avoir une influence importante. Mais ça a aussi avoir avec le besoin de contrôler ton environnement, tes sentiments, le pouvoir. C’est un besoin de tuer toute forme de fantaisie dans ta vie. Et ça, je ne l’ai pas en moi. Ce titre, « Napoleon Complex », je l’ai positionné en ouverture de l’album parce que tout part de là. De ce besoin d’y échapper. Crois-le ou pas, mais je suis bien moins égocentrique qu’il y a 10 ou 15 ans.
En fait tu aurais dû naître en 1940.
Ce serait une énorme avancée. La plupart du temps on me dit que je viens des années 1860. Mais je suis ravi d’être né en 1970. Vraiment. Je n’ai aucune envie de retourner vivre à l’âge de pierre, même si je peux quand même te faire un aveu : j’ai jeté mon iPad par la fenêtre.
The Divine Comedy /// Foreverland // Divine Comedy records
http://thedivinecomedy.com/
4 commentaires
He’s ‘ »TRICKY' »
he’s « ‘tricky DICKY »‘
he’s « ‘dreeky queenie »‘
Si les trentenaires qui écoutent LCD Soundsystem sont « nostalgiques d’une jeunesse qui lentement leur échappe », alors que dire des quadras qui retournent écouter The Divine Comedy…des vieux croulants qui font sous eux ?