Ils sont deux, ils sont anglais et veulent vous montrer qu’ils sont le meilleur groupe de rock du moment. Interview avec Sons of Raphael, deux petits malins qui ont plus d’un tour dans leur sac.

On a du mal à les croire. Loral et Ronnel, deux frères qui viennent de la très chic banlieue londonienne d’Hampstead, sont du genre à raconter pleins d’histoires loufoques, au point où l’on sait jamais s’ils déconnent, disent la vérité ou se foutent de ta gueule. Ils donnent l’impression d’être complètement barrés mais sont, en réalité, calmes, gentils et attentionnés, soit l’inverse de l’image qu’on s’en était faite. Le premier EP du groupe, « A Nation of Bloodsuckers » est sorti en septembre. Mais pour vraiment savoir qui se cache derrière Sons of Raphael, il va falloir lire cette interview.

Commençons par une histoire, celle qui décrit le mieux l’état d’esprit de Sons of Raphael ?

Ronnel : Quand j’étais petit, je m’étais mis pleins de Smarties dans le nez et on a du m’emmener à l’hôpital. Il y a eu des conséquences sur nos vies ensuite.

Lesquelles ?

Loral : On a été privés de Smarties.

Ronnel : « Leur gosier est une tombe ouverte, ils se servent de leur langue pour tromper« . J’aime cette citation de la Bible pour résumer le groupe. Ça ne nous résume pas nous, mais ça décrit quelque chose que j’aime bien.

Vous êtes allés à une soirée bingo à Belfast ?

Loral : Attends, je vais te montrer des photos.

Ronnel : Un ami à nous, David Holmes, nous a invités à jouer à l’une de ses soirées à Belfast. C’était notre premier concert. Il fait jouer les groupes dans un pub pour vieux des années 60. C’est marrant parce que d’un côté, tu as tous les anciens qui se retrouvent pour jouer au Bingo et de l’autre, les jeunes qui viennent au concert. Mais nous, on préfère traîner avec les vieux, ils sont plus cool.

Loral (qui me montre les photos) : Ça, c’est le videur. C’est le même depuis des années. Ça, c’est la salle de bingo. Et donc juste à côté, tu as cette pièce qui est la salle de concert…

« On écrit les meilleures chansons. Et t’as encore rien vu. »

Comment s’est passé ce tout premier concert ?

Ronnel : C’était il y a plus d’un an et personne ne nous connaissait. On n’avait rien mis en ligne et en fait, on n’avait même pas de nom de groupe.

Comment vous avez été booké pour jouer ?

Ronnel : David est un bon ami. Il est un peu comme le maire de Belfast, le maire culturel. S’il dit qu’on est un bon groupe, alors les gens le croient.

Vous rêviez de devenir musiciens ?

Loral : Non pas du tout. En fait, la première vidéo qu’on a faite pour le morceau Eating People, on n’était pas un groupe quand on l’a tournée. Je voulais juste filmer. Et pour une raison qui m’échappe, j’ai décidé de le rejoindre et j’ai laissé un ami filmer. On a bien aimé la vidéo, alors on en a fait une deuxième et puis après, on s’est dit qu’on devrait former un groupe.

D’ailleurs, le tournage pour Eating People s’est mal passé d’après ce qu’on nous a dit…

Ronnel : On a tourné dans l’église de mon école privée et le professeur de musique nous a coupé le son au bout de deux chansons. On devait faire un petit concert mais nos morceaux n’ont pas dû plaire.

Ils vous ont dit pourquoi ?

Ronnel : À moi non, mais le professeur l’a dit au directeur adjoint qui m’a ensuite suspendu du lycée et m’a forcé à jouer au Rugby.

©Jenna Foxton

Pourquoi la musique et pas une autre forme d’art ?

Ronnel : C’est un excellent moyen de communication. C’est aussi une bonne manière pour qu’on se souvienne de nous après notre mort. 

Loral : On a appris la musique tout seul. On fait tout nous-même, on enregistre et on produit nos chansons. On veut rester maître de nos créations. On ne s’est pas lancé pour l’aspect business. Pour gagner de l’argent, on fait des paris. On est plutôt bons pour ça d’ailleurs.

Ronnel :  Se lancer dans la musique pour le business n’est pas une bonne raison.

Il faut bien gagner sa vie à un moment donné…

Loral : Bien sûr, mais il ne faut pas baser ses décisions créatives autour de l’argent.

Ronnel : L’argent, ce n’est pas la raison pour laquelle on fait de la musique. On peut se faire de l’argent autrement. On se démerde bien pour ça.

Vous vous voyez faire ça toute votre vie ?

Ronnel : Pas vraiment non, la musique, c’est un truc de jeune. Quand tu vieillis, je ne pense pas qu’il faille te mettre en avant. Tu peux produire par exemple. Mais tu joues pas à la rock star à 60 ans. Il existe des exceptions, mais généralement, c’est pathétique. Le rock, c’est censé être dangereux, être un truc de jeunes mais de moins en moins en font.

Le rock n’attire plus les jeunes ?

Loral : Les gens aiment bien dire que la musique « guitare » est en train de mourir mais peut-être que le rock est en train de crever parce que les groupes actuels n’écrivent pas de bonnes chansons.

Et vous pensez écrire des bonnes chansons ?

Ronnel : On écrit les meilleures chansons. Et t’as encore rien vu. Celles qui sont disponibles ne représentent pas totalement notre univers. On prépare un album très différent. Il est déjà écrit et arrangé et on a déjà fait quelques démos. Et je peux te dire que le niveau d’écriture est au top. J’en ai bien chié pour l’écrire, ça été difficile mais je pense que si les choses arrivent trop naturellement, ce n’est pas un bon signe. C’est facile de se persuader que ce que t’as fait, c’est bien, alors que souvent, ça ne l’est pas.

« Je n’écris pas à chaque fois en pensant à dieu, mais il est toujours là quelque part. »

En Grande-Bretagne, les gens sont souvent bienveillants, pour ne pas dire hypocrites, et te disent rarement quand les choses ne vont pas… En France, on est plus direct.

Ronnel : C’est aussi la raison pour laquelle on a signé sur un label français, pour avoir des meilleurs retours. En Angleterre, les gars viennent te voir à la fin du concert et te disent que c’était super même si c’était nul. En France, les gens te disent « ce n’était pas un bon concert. » On préfère cette attitude.

Pourquoi la religion est un thème central dans la composition de vos chansons ?

Ronnel : La Bible, une bonne partie de ce que tu vas y lire, c’est toujours d’actualité d’une manière. Et ce besoin pour quelque chose qui est au-dessus de nous ne partira jamais. J’ai décidé d’étudier la théologie pour mieux comprendre la Bible et pouvoir mieux écrire sur ce sujet. Je n’écris pas à chaque fois en pensant à dieu, mais il est toujours là quelque part.

Dernière question, si on vous donne un paquet de cigarettes, une casquette plate et 100 euros, comment la soirée va se passer ?

Loral : On ne fume pas, donc on va vendre les clopes pour se faire plus d’argent. On va les vendre pour 10 euros donc on aura 110 euros. On peut même essayer de les vendre pour 20 euros.

Ronnel : Avec l’argent, on ira manger dans un restaurant japonais à Paris. Pour la casquette, on la jette où on la vend pour se faire encore plus d’argent.

Ok.

Ronnel : J’ai l’impression de t’avoir déçu avec ma réponse…

L’EP « A Nation of Bloodsuckers » est disponible depuis septembre sur Because Music.

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