"Dépêche toi John, le monstre arrive!", "Attend moi ici Barbara, j'ai oublié ma carte bleue dans le salon! Ah! Noooon! le monstre est dans la salle à manger! Vite, cours Barbar

« Dépêche toi John, le monstre arrive! », « Attend moi ici Barbara, j’ai oublié ma carte bleue dans le salon! Ah! Noooon! le monstre est dans la salle à manger! Vite, cours Barbara, arghhhhhhhhhhh ».

Entre frisson cousu de fil rouge (sang) et répliques en carton-pâte, le B-Movie des late seventies reste un modèle cinématographique indépassable. Fait de bric et de toc, sans budget, que reste-t-il de nos zombies hagards, trente ans plus tard? Une musique, une ambiance, une rétrospective: Pulsion Phantom.

Ils se prénomment John Carpenter, George Romero, Ridley Scott ou Dario Argento. Tous, à leur manière, ont succombé à leurs succès, prisonniers d’une époque où les morts-vivants n’avaient pas besoin de courir pour effrayer les passants. A l’étroit entre l’apparition du SIDA et l’avènement de Jean-Luc Lahaye, leurs films ressemblent désormais à des mausolées, des pierres tombales ridicules qu’on regarde désormais avec plaisir, passion, humour. Nostalgie d’outre-tombe, ou véritable fulgurance mélodique, les bandes-sons de films tels qu’Assault, Dawn of the Dead ou Ténèbres ont pourtant de beaux restes et le parfum morbide de la modernité qui refuse de crever. Du clapotis synthétique à deux notes, des boites à rythme qui bégayent, une nappe de clavier pour habiller l’entrée du lead monster dans la scène principale et du sang couleur tomate sur la jupe plissée de Barbara; la recette d’un bon B Movie c’était surtout un bon synthé, du suspense et une mauvaise actrice pour se faire rouler avec les zombies couleur farine.

Lent travelling sur l’acteur au look de pompiste, zombie dans la brume

Tout comme les B-Movies auraient du se rétamer la gueule, on ne donnait pas cher du projet Pulsion Phantom; du moins rigolait-on patiemment en mangeant le pop-corn du samedi soir, avant le film d’horreur. Imaginez: un projet musical « animé » par Philippe Bouvet (que celui qui connaît lève la main) et Marc Collin (le serial-toucheur de Nouvelle Vague, qui celui qui aime lève l’autre), des dédicaces aux musiques de zombies CASIO, et du guest improbable au micro avec Julie Delpy et Helena Noguerra… Franchement, Soan aurait rendu un hommage musical à Michel Legrand qu’on n’aurait pas pu glousser plus fort. Moteur, action, le Cd s’introduit dans la fente, on ne retient pas franchement son souffle.
Lente introduction en ooh-ooh sur Panter Car, moteur de Kawasaki vrombissant, lente attaque des synthétiseurs. On sourit encore, persuadé que le monstre est dans la commode et que c’est le Colonel Moutarde qui a fait le crime. On se persuade, la compilation Pulsion Phantom est un vague concept marketing pour les amateurs de rétro-futurisme. Et ce n’est pas le très raté Virus System avec Elli Medeiros qui fera trembler les muqueuses. Le coup de la tronçonneuse cachée en embuscade, merci, j’ai déjà donné; tu ne m’attraperas pas.

Knock Knock. Allo, Ween? Saturday night fever with dead men walking

Arrivée sur la piste 4, More human (feat Julie Delpy). Premier tremblement. Les synthés claquent comme des fouets, la méthode John Carpenter (auteur de ses propres B.O.F., rappelons le) fonctionne à merveille et le ratio émotion/angoisse surpasserait presque les pièces originales. Songwriting en dramaturgie, peu de paroles et des ambiances à ramper comme une chienne (morte vivante, of course), Pulsion Phantom dépasse toutes les espérances; ça sent le village désert, la contagion massive, les vestiges d’un futur sonore qu’on n’imaginerait plus dans la science-fiction contemporaine, les campagnes américaines avec du corps décharné qui fait son jogging en poursuivant les humains et le mauvais esprit de Satan reconverti en démonstrateur de synthés Vintage sur les salons provinciaux. Après tant d’émotions surjouées, Ideal City, Body Resistance et Mort Vivant (feat l’incroyable Bernard Szajner, qu’on croyait aussi mort, ici ressuscité en fantome Gainsbourien) enfoncent le clou de la pulsion.
Au théâtre comme en musique, le spectateur est souvent crédule; c’est l’une des forces de ce disque mille-feuilles. Au troisième acte, proche de la porte de sortie, c’est Pulsion Fantôme (feat Helena Noguerra, qu’on croyait elle-même vidée de son cerveau) qui étourdit définitivement l’auditeur:  » Quelque chose est ici / Dans la pièce / Quelque chose qui circule / Qui nous traverse », ballottée entre l’influence du Virgin Suicides d’Air et les suffocations « à la manière de » Goblin, le groupe fétiche de Dargento, on est dedans et dehors, la pulsion nous dévore et le disque est bien plus qu’un exorcisme. C’est un bel essai.

Après quarante minutes de transpirations, le « film » Pulsion Phantom se finit, l’écran se rallume, qu’en retenir? Un beau générique de fin, la désagréable impression de s’être encore fait avoir par un projet no budget, comme au bon vieux temps. Celui où Carpenter titrait en gros, pour les faces apeurées, un message pourtant simple: THEY LIVE. Encore et toujours, comme tous les bon morts-vivants.

Pulsion Phantom // Pulsion Phantom // Kwaidan
http://www.myspace.com/pulsionphantom

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