Ecrire sur un disque d’indie pop en 2014 est probablement aussi excitant que de disserter sur le dernier opus des X-Men. L’impression tenace d’avoir déjà lu tout ce qui devait être écrit, entendu tout ce qui pouvait être dit sur un style musical qui n’excite plus que les trentenaires et quelques teenagers nostalgiques. Comme le rock’n’roll, la popular music vogue doucement mais sûrement vers un musée qui commence à sentir bon la naphtaline. Cette sensation diffuse de surfer sur l’ultime écume des années pop n’empêche pas l’amateur éclairé ou non de prendre un plaisir certain lorsqu’il tombe sur un bon cru. Pale Grey, donc. Au premier abord, un disque pop aisée et agréable à l’oreille. Mais sans plus. Et puis, au fil des écoutes, un truc plus profond, des mélodies qui font mouche (bordel, j’aurais enfin réussi à le placer celui-là, tiens. Cheers). Bref, une vraie réussite indie pop comme l’époque n’en produit pas forcément à la pelle.
Direction le hall cossu d’un hôtel parisien où je dois rencontrer le groupe en promo pour la journée. Le batteur, qui joue également au sein d’Hollywood Porn Stars, est absent. Accueil franc du collier, et déjà, des bonnes vibrations. Quand on leur demande de se présenter, Gilles, Yann et Maxime le font très simplement. Une zone géographique : « On est originaire d’un petit village situé à côté de Liège, près du circuit de Spa-Francorchamps ». Une démarche artistique qui tient en une phrase: « Le projet a beaucoup évolué en quelques années. On est passé de débuts assez post-rock à quelque chose de beaucoup plus accessible, de l’indie pop de facture très classique. Au départ, on était deux avec un laptop sur scène, mais nos live ne décollaient pas. Alors on a finit par renforcer l’équipe avec deux autres musiciens ». Le groupe existe depuis 4 ans et notre conversation démentira avec élégance le titre de ce désormais vieux film de Laurence Ferreira Barbosa : Les gens normaux n’ont rien d’exceptionnel.
« Best Friends » aussi d’ailleurs. Il répond parfaitement aux canons pop (10 titres, 40 minutes, et une impression d’ouvrir un sachet d’Haribo en appuyant sur Play) même si c’est un album diesel à côté duquel les étourdis passeront facilement s’ils ne font pas l’effort de s’y attarder. Deux titres (Homeland, bottle) franchement moyens en guise d’introduction, un Confession qui peine à décoller, et puis The Gold Rush, feu vert vers des sommets pop que le disque ne quittera plus. Impossible de savoir pourquoi, mais la deuxième partie de cet album m’a tout droit renvoyé vers les émotions que j’éprouvais, adolescent boutonneux découvrant les premiers disques pop que des camarades de classe me refilaient « pour voir ». Ce disque, c’est de la mélancolie en filigrane, une sorte d’album-photo sépia d’un âge d’or révolu. Un âge qu’on ne souhaite pas retrouver mais auquel on ne peut s’empêcher de penser avec tendresse. Shame, Spiral ou Milopoy sont des morceaux que j’aurais certainement écouté en boucle pendant des semaines si j’étais scolarisé dans un lycée en 2014. Bien sûr, j’entends déjà ici et là certains d’entre vous s’écrier que la musique de Pale Grey est simple, convenue, immédiate, qu’elle ne révolutionne rien, qu’on a déjà entendu ça…Et j’aurais bien dû mal à trouver des arguments pour les contredire, car jusqu’ici, ils n’auront pas forcément tort. A un détail près. Ce disque contient des mélodies à tomber, parvient à provoquer des émotions parfois oubliées des dingues de pop, et a fini par trouver le moyen de tourner en boucle sur ma platine pendant des semaines sans que je songe à l’en déloger. Belgique : seven points.
Pale Grey // Best Friends // Jaune Orange
http://www.palegreymusic.com/
1 commentaire
Merci Albert.
Benoît