« San Francisco dans les années 2010's était un espace-temps très spécial où se trouver »... Une réincarnation paresseuse d'Hunter S. Thompson pourrait écrire cette phrase aujourd'hui, quarante ans après l'originale, en découvrant ce qui se trame tout au bout du Golden Gate, à commencer par l'excitant Wooden Shjips et son satellite planant Moon Duo, qui revient en douce avec "Shadow of the sun". Mais certainement pas pour se la couler, douce.

sbr122-mooduo-shadow-300_1024x1024Après « Mazes » et « Circles », les deux premiers LP du moon duo Ripley Johnson-Sanae Yamada qui m’ont soit dit en passant rencardé sur l’existence d’une scène psyché (ou appelle-la comme tu veux) et permis de faire reposer mon oreiller après des années de bons et loyaux services, le binôme de Frisco poursuit sa route à travers les bribes d’énergie résiduelle des sixties qui flottent encore sur la baie. Près de trois ans se sont écoulés depuis « Circles », et malgré ce titre Moon Duo n’avait pas l’intention de tourner en rond, comme en témoigne ce nouvel album, fidèle au label Sacred Bones, qui se démarque tout juste assez de ses prédécesseurs pour faire effectivement figure d’éclipse dans la discographie du groupe.

« Shadow of the sun » est un album spatial. Littéralement spatial. Le premier titre, Wilding, agit comme un décollage en fuzz et due forme, dans la veine des accélérations de « Circles » et « Mazes ». Un morceau qui t’arrache du sol en ne lésinant pas sur les G, une montée soudaine et abrupte sans laisser aux hôtesses le temps de réciter les consignes de sécurité. Pas de compte à rebours ni de « PNC aux portes, armement des toboggans » qui tiennent, juste cinq minutes de rock psyché à la pure histoire de t’envoyer assez haut pour jouir du voyage en orbite que va t’offrir le reste du disque. Littéralement spatial. Entre deux sursauts d’orgueil, la guitare sait se faire plus discrète, tour à tour noyée et assourdie par ces vagues électroniques qu’on sentait prêtes à prendre les choses en main dès les tous premiers EP de Moon Duo. Car « Shadow of the sun » est un album en forme de promesse enfin tenue, la confirmation attendue de tout ce que cette musique avait dans le ventre.

Vu de loin, ça ressemble à de la bonne vieille évolution logique, conforme aux premiers indices semés par Moon Duo depuis 2009, mais le tout s’avère en définitive un véritable retour aux sources, des sources jusqu’ici inconnues, certes, mais néanmoins bien présentes quelque part depuis le début. Les boucles de synthé hypnotiques prennent le pouvoir, à ce point omniprésentes qu’il faudrait songer à populariser le terme « fingergaze » pour espérer coller à ce genre de tableau. Cependant la sauce est loin d’être indigeste, relevée çà et là des guitares nerveuses de Free the skull ou des rythmes lourds qui menacent de t’endommager la rate bien comme il faut dès les premières mesures de Ice. Reste que l’ensemble dégage une forte impression de maîtrise à grande vitesse, l’affirmation catégorique d’une musique assez mature pour ne plus avoir à s’encombrer de faux-semblants tape-à-l’œil.

Moon Duo // Shadow of the sun // Sacred Bones Records
http://moonduo.org/

En concert le 10 avril à la Machine

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