Avec son attitude irascible, son lead féminin et sa plume francophone acerbe, Ménades bouscule la rentrée avec son deux-titres « Par Terre » / « Baignoire ».

Comme de nombreuses et parfois intrigantes nouvelles formations dans le paysage musical français, la configuration actuelle de Ménades intègre cette vague surgie des affres de la pandémie. Leur premier EP cochait déjà toutes les cases pour secouer les confinés idéalistes qui s’imaginaient que le « monde d’après » serait plus juste et harmonieux. 

Leur nom, choisi en référence à ces femmes sauvages, extasiées et subversives qui, avec les satyres, forment le cortège de Dionysos, semble incarné à merveille. Le mythe raconte que les Ménades démembrèrent l’esseulé Orphée, personnification de la musique, qui ne cessait de se morfondre sur la perte d’Eurydice, sa nymphe bien-aimée. À la manière d’une allégorie, Ménades, leur premier quatre-titres, affichait d’emblée le ton avec des riffs turbulents sur lesquels la voix tapageuse de leur chanteuse Eva invective, enragée de paroles caustiques, comme sur « Hydrate toi » qui lacèrent les injonctions à l’égard des femmes de se comporter en potiche. Les Ménades ne pleurent pas sur leur sort, elles piétinent les conventions archaïques, comme lorsqu’elles réduisent en lambeaux Penthée, roi de Thèbes qui représente la norme, l’ordre, s’oppose au culte dionysiaque et confine les femmes de son royaume à leur rôle de mère ou d’épouse.

 

Puisqu’avec un nom qui colle si bien à cette rage transposée en musique il n’y avait aucune raison de s’arrêter en si bon chemin, Ménades envoie Cramée en 2022, un deuxième EP que le label Themsay décide d’intégrer à son catalogue. Les paroles y demeurent aussi sincères que directes, furieuses, parfois macabres, plaquées sur une instrumentation virulente qui oscille entre punk et garage. À l’instar de leurs précédents titres, Eva continue de gerber sur la vision rétrograde de la femme avec un humour caustique, du type : « J’suis pas vraiment bonne à marier / J’ai le tonnerre au corps, je vais tout casser », pour la chanson Papier, ou bien « J’ai vomi partout dans mon lit, ça sent la clope dans mes cheveux » sur le morceau Cramée.

Près d’un an plus tard, le groupe signe sa rentrée 2023 avec un deux-titres. Entre-temps, les cinq musicien·nes de Ménades ont tourné pendant la moitié de l’année entre la France et l’Allemagne avant de retourner le Point Éphémère en septembre, puis le Trabendo en ouverture des Britanniques The Heavy avant de baptiser le nouveau tiers-lieu parisien Césure, installé dans l’ancien campus de Sorbonne-Nouvelle Censier. J’y étais et je peux assurer que désormais rodé·es à la scène, leurs concerts, toujours démentiels, subjuguent spectateurs et spectatrices en ébullition devant l’énergie viscérale que dégage la formation.

Dans la lignée de leurs précédentes chansons, Par Terre et Baignoire affirment leur jeu mais, même si le franc parlé de la chanteuse demeure une composante essentielle, les textes semblent adoucis, moins corrosifs, dans une démarche davantage commerciale peut-être ? De ce qui se dit, maintenant que Ménades a conquis son public qui se hâte de voir le patriarcat se balancer aux quatre vents sous la potence, la prochaine étape serait l’enregistrement d’un album.

1 commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages