Dimanche 10 mars 2024, Marc Tobaly s’en est allé. Guitariste et fondateur des Variations, groupe pilier du rock français pratiquant un rock zeppelinien de très haute tenue, il défrichera tout le circuit rock pour la génération suivante. Mais les inimitiés du groupe avec une partie de la presse musicale le plongera rapidement dans un anonymat glacial, effaçant pendant presque 50 ans leur existence de l’histoire de la musique électrique française.

J’ai rencontré Marc pour la première fois en février 2017. Nous avions échangé par messages. Ecrivain inconnu, j’avais trouvé le culot de le contacter via un réseau social fort connu pour lui faire part de mon ambition d’écrire l’histoire des Variations. C’est avec politesse qu’il avait accepté mon idée, tout en me conviant pour que nous nous rencontrions et que nous échangions ensemble sur le sujet de vive voix. Ce sera chose faite en ce début d’année 2017.

Marc est un homme agréable, assez réservé mais plutôt sûr de lui. Il est conscient de l’histoire des Variations, et avec le temps, il a acquis la conviction bien légitime que son groupe a fait des choses plutôt intéressantes que d’autres n’ont jamais ne serait-ce que touché du doigt. C’est évidemment un euphémisme, tant la carrière des Variations va être à ce point réussie en bien des aspects qu’elle reste absolument essentielle pour le développement du rock français.

Les Variations — Wikipédia

Au départ, une bande de gamins marocains

Marc n’est, à l’origine, pas français. Il voit le jour à Fès au Maroc le 1er janvier 1950. Le pays est alors un protectorat, et le père de la famille Tobaly est commerçant, et travaille souvent avec l’Armée française. La fratrie vit une enfance heureuse et agréable, à l’abri des difficultés matérielles. La musique rock entre dans la vie du jeune Marc via les stations de radio américaines des unités militaires basées à Port Lyautey. Mais il ne montre aucune curiosité vis-à-vis d’un quelconque instrument, préférant largement consacré son temps à bricoler sa première mobylette. Victime d’un accident, il reste cloué au lit pendant un mois à cause d’un genou abîmé. Son frère André, qui fait des études d’agronomie en France, lui ramène un cadeau de sa sœur Hélène, elle aussi installée en France : une guitare acoustique. Marc commence à gratter sans trop de conviction, avant de tomber amoureux de l’instrument. Un mois plus tard de pratique aura effacé la mobylette de sa vie, même si Marc continuera à faire un peu de moto durant les années 1960-1970.

Marc fonde les P’tits Loups, une formation dans l’esprit twist des Chaussettes Noires, et joue dans des clubs et des fêtes. Parallèlement, il va voir les rares concerts rock dans le pays, qui se jouent essentiellement à Casablanca, à plus de trois cent kilomètres de chez lui. Il y est hébergé par son cousin Marcel, lui aussi très fan de rock. C’est grâce à lui qu’il fait la connaissance d’un jeune chanteur à la réputation déjà flatteuse : Jo Philippe Leb. Un peu plus vieux de deux ans, les deux garçons s’entendent à merveille. Leb est un être habité par une flamme. Il passe alors ses journées à garder le garage de son père. Marc lui rend visite avec sa guitare et les deux se mettent à jammer, Jo s’improvisant batteur en même temps que chanteur en tapant avec des règles en fer sur des bidons d’huile. C’est lors d’un concert des Jets à Casablanca que Marc s’émerveille pour un jeune batteur débutant avec qui il se verrait bien jouer : Jacky Bitton.

Le plongeon anglais et l’idée d’un groupe

En 1966, Marc a seize ans et il part rejoindre son frère Alain et sa sœur Magda. Il est accueilli à Paris par son autre sœur Hélène qui leur apprend que tous deux sont à Londres. Marc prend un aller simple pour la capitale britannique, et les trois frères et sœur s’installent ensemble dans un appartement. La ville est en plein bouillonnement créatif. Le jeune garçon assiste à des concerts décisifs : Rolling Stones, Who, Yardbirds, Kinks, Pretty Things, Small Faces, The Move, Creation… Il commence à jammer avec les premiers beatniks présents à Piccadilly, et se fait un peu d’argent en jouant des tubes anglo-saxons et des chansons italiennes dans une pizzéria nommée Papagayo.
A la fin de l’été, la fratrie revient à Paris. Marc s’y établit avec Alain et Magda, sans autre perspective que de faire de la musique et d’en vivre. Mais le contexte parisien n’est assurément pas celui de Londres. Il n’y a littéralement rien en termes de rock music dans la capitale parisien. Les Chaussettes Noires et les Chats Sauvages ne sont plus depuis longtemps, et Johnny Hallyday et Eddy Mitchell ont basculé vers une musique plus soul inspirée d’Otis Redding. C’est l’époque des Yé-Yé, celle de Sylvie Vartan, Richard Anthony, Antoine, Jacques Dutronc, Françoise Hardy, Michel Polnareff, Christophe… Marc Tobaly n’a aucune espèce de sympathie pour cette variété française popisée. Ce qu’il veut, c’est jouer du rock comme les Anglais le font.
Il tente de s’intégrer dans des petites formations pop, mais rien ne prend. Les temps sont durs. Il n’y a pas beaucoup d’argent dans le petit studio de la Rue de l’Ouest. Alain et Magda ont repris l’université, c’est la rentrée des classes, avec l’automne qui va avec. Le vent et la pluie emportent les feuilles mortes des grands platanes sur les boulevards. A la fois en colère de la médiocrité de la petite scène française et déprimée de ne pas trouver de partenaires à la hauteur de ses ambitions, il traîne les après-midis son spleen chez Paul Beuscher, la principale boutique d’instruments de musique de Paris. Il finit par y faire la connaissance du guitariste Jacques Micheli et du bassiste Guy De Baer. Le courant passe tout de suite, car ces deux derniers reviennent également d’un été passé à Londres, et comprennent parfaitement la frustration de Marc qu’ils partagent pleinement.

Il manque un batteur, et une petite annonce est déposée chez un disquaire du Boulevard Saint-Michel, Pasdeloup. Les Tobali n’ont pas le téléphone, seule une adresse est donnée.

Quelques jours plus tard, Magda ouvre la porte à un jeune homme plutôt typé nord-africain. Il propose ses services de batteur, alors qu’il effectue ses études à Paris. Lorsque Marc le voit entrer dans la pièce, il reconnaît immédiatement le génie des Jets de Casablanca : Jacky Bitton. Aucune audition ne sera nécessaire, il est embauché sur le chant.
Le petit quatuor s’installe dans une petite salle trouvée par Alain sur les Boulevards parisiens, les locaux de répétitions étant une chose quasi-introuvable sur Paris à ce moment-là. Nous sommes en octobre 1966, et le groupe commence à travailler sa musique. Jacky Bitton vient de faire l’acquisition d’un coûteux kit de batterie Ludwig double grosses caisses comme celui de Ginger Baker de Cream. C’est une véritable rareté en France. Le groupe assemble un petit répertoire, Marc chante, mais il est clair qu’il manque un vrai chanteur charismatique. Il repense alors à son ami Jo Leb qu’il a laissé au Maroc. Que fait-il ? Pourrait-il venir en France ? Dans l’attente d’une hypothétique trace du jeune garçon, des auditions sont passées. Littéralement des dizaines de chanteurs sont essayés, sans succès. Mais où est Jo ?

Jo Lebb chanteur des Variations - Rock& Folk novembre 1975 | Rocker, Hot tuna, Confessions

Un soir, Alain va boire un verre avec des amis au café de La Musarde sur les quais de Seine en bas du Boulevard Saint-Michel. A une table, dans un coin, il aperçoit un jeune homme avec des cheveux longs et une gueule à la Mick Jagger. Plutôt entreprenant, Alain va le voir et lui demande si il ne serait pas chanteur. Le jeune homme s’anime et lui rétorque qu’il l’est, évidemment ! Il se lance alors dans une diatribe inarrêtable de ses dernières galères à Londres, avec son matériel bloqué là-bas, qu’il est sans le sou à Paris, et qu’il n’a plus de formation pour jouer dans cette ville. Alain lui propose de passer Rue de l’Ouest, lui expliquant que le groupe de son frère cherche justement un chanteur. Lorsque Jo sonne le lendemain et entre dans l’appartement, Marc n’en croit pas ses yeux. Les deux hommes se tombent littéralement dans les bras. Il n’y aura une fois encore pas d’audition, Jo Leb est l’homme providentiel. Les planètes s’alignent.

Les Variations

Le quintette carbure à bon régime. L’interaction entre Marc, Jacky et Jo est absolument déterminante, et la formation est désormais prête à donner son premier concert. Marc a déjà l’idée du nom du groupe : Variations. Il a depuis le début cette expression musicale : variation sur un même thème. Et puis, cela sonne aussi bien en français qu’en anglais, dans la lignée des groupes Mod de l’époque : The Creation, The Action… Ainsi sont nés les Variations.

Alain Tobaly, très démerdard, leur trouve un plan en or. Il s’agit d’un pub à l’anglaise dans le quartier Saint-Paul, avec plein de petites boutiques à la façon de Carnaby Street autour. Le groupe doit jouer la journée dans le sous-sol pour faire de l’animation rock et attirer le public pour le concert du soir dont ils sont la vedette. Le groupe a à la fois un local de répétition attitré, un engagement stable, le tout pour trente francs par jour chacun et un repas.
Cet engagement est une aubaine, mais les choses deviennent trop professionnelles pour Jacques Micheli et Guy De Baer. Ils décident de s’en aller avant les premières répétitions dans le sous-sol du pub. Avant le premier concert, les Variations ne sont plus que trois. Le 16 décembre 1966 dans l’après-midi, un jeune homme descend pour les saluer, attiré par la musique. Dans la discussion, ils font savoir au jeune homme qu’ils cherchent un bassiste, et que c’est assez urgent. Cela tombe bien, car il a justement un copain Rue de l’Ourcq qui est bassiste. Les Variations le pressent d’aller le chercher tout de suite.
Une heure plus tard, un jeune homme au longs cheveux bruns et raides descend les escaliers. Il a dans les mains un étui de basse et un amplificateur tout neufs. Le karma devient cosmique. Il s’appelle Jacques Grande, et vient de se faire acheter son matériel dans la journée par sa grand-mère, qui, anti-militariste, lui avait promis de lui acheter une basse et un ampli si il se faisait réformer de l’armée, ce qu’il a également appris le jour-même ! Le matériel n’est pas anodin : il s’agit d’une basse Gibson EB3 et d’un amplificateur dédié Fender Bassman. Jacques n’a pas d’expérience de groupe, mais qu’importe, le courant passe. Il a le bon look, la bonne attitude, et le bon matériel. Marc lui montre quelques plans pour suivre les morceaux, et Grande suit immédiatement. Il sera par la suite surnommé P’tit Pois, parce qu’il n’arrêtait pas de chantonner le slogan d’une réclame pour les petits pois en conserve. Le soir du 16 décembre 1966, les Variations donnent leur premier concert.

La grande aventure

Alain Tobaly, décidément doué pour trouver des plans pour son frère, s’improvise manager, trop heureux de prendre un peu part à cette aventure rock’n’roll. Il leur dégotte d’abord quelques sets en banlieue parisienne : le 30 décembre 1966, ce ne sera pas moins que le Tremplin du Golf Drouot. Le concert se déroule le vendredi soir, et le gagnant doit revenir le week-end suivant pour trois concerts en tête d’affiche tout le week-end suivant, du vendredi soir au dimanche après-midi. Les Variations, carburant à pleins cylindres dans le sous-sol du pub de Saint-Paul, arrive au Golf Drouot en pétant les flammes.

C’est une sorte de consécration pour Marc Tobaly, dont le nom sonne pour le style comme le y inspiré par Johnny Hallyday et Eddy Mitchell.

A vrai dire, On trouvera aussi le nom de famille orthographié Tobali. Ce changement sera lié aux premières tournées en Scandinavie. Les Scandinaves ne connaissent pas le y, et pour simplifier la prononciation, Alain et Marc deviendront Tobali.

Le voilà avec son propre groupe justement dans le temple du rock français pionnier des Chaussettes Noires, des Cyclones et des Chats Sauvages. Le groupe y met tout son jus. Marc aimait bien évoquer l’aspect sauvage du groupe, typiquement marocain selon lui, ce truc sanguin. Ils remportent le tremplin haut la main. A la fin du set, Serge Morali, directeur du magasin Music Center et membre du Jury, vient les voir. Il leur confie que dès le premier accord de guitare et le premier coup sur la caisse claire, c’était gagné. Ils ont le son. Ils ont distancé en quelques mois de travail toute la pop française.
Entre la fin 1966 et le début de l’année 1967, les Variations enchaînent le Golf Drouot, le Tour Club Rue de l’Ourcq grâce à des connaissances de Jacques, et des salles parisiennes dont le renommé Bus Palladium. Parallèlement, la petite guitare Hofner de Marc devient ridicule à côté du gros kit Ludwig de Jacky et de la basse ronflante de Jacques. Il ne s’entend littéralement plus par moments. Le père de Marc, qui a compris que son fils est désormais solidement lancé dans une carrière de musicien professionnel, l’adoube en lui offrant une Fender Telecaster rouge métallisé et un amplificateur Vox AC 30 comme Jeff Beck et Eric Clapton dans les Yardbirds. Malheureusement, ce matériel se montrera lui aussi insuffisant, et Marc fera l’acquisition d’un matériel bien plus grondant : une Gibson ES335 et des amplificateurs Marshall trois corps.

Alain Tobaly fait une nouvelle fois preuve de son talent de manager en faisant signer les Variations un contrat avec les marques de vêtement Compton et O’Brial. Le groupe se fait ainsi connaître en posant pour les affiches des marques, et les quatre musiciens sont habillés pop gratuitement. Il a également une drôle d’idée qui lui trotte dans la tête. Ayant voyagé pour ses études de droit, il a eu l’occasion de passer quelques jours en Scandinavie. Là-bas, la pop music y est très appréciée, mais les groupes se font un peu rares. Par ailleurs, il a en tête la beauté des jeunes filles dans le public des concerts. Il pense que ce serait une idée assez géniale d’aller jouer là-bas. Les arguments sont suffisants pour cette bande de gamins entre dix-sept et dix-neuf ans. Alain abandonne alors ses études pour se consacrer à la carrière des Variations.
Il leur dégotte un bus Volkswagen sur lequel il est encore marqué « Transport d’enfants », et le groupe se dote de deux roadies : Robert, dit Rob’s Star, qui a l’avantage de parler allemand, et Jo Sultan, un ancien des P’tits Loups. Tout le monde part en mars 1967 en direction du Nord. Le groupe fait une première étape à Hanovre. Dans l’Allemagne de l’Ouest, les clubs rock sont appelés les Beat Club, qui donneront leur nom à l’émission de télévision mythique de Radio Bremen. Arrivés au petit matin après une nuit entassés à sept dans le petit bus avec le matériel, Alain se précipite dans le Beat Club local. Il fait l’apologie de son groupe, et le patron les accepte le soir en première partie des anglais de The Smoke qui ont eu un tube avec My Friend Jack. Les quatre musiciens se préparent dans les toilettes de la gare, avant de se lancer sur scène avec leurs fringues Compton. Les Smoke refusent de leur prêter leur matériel afin d’éviter de tout démonter et remonter. Aussi, les Variations vont leur coller une correction. Sauvages, comme disait Marc. Les Smoke se font humilier. Les Variations sont invités à boire le champagne avec le patron, pendant que le public tourne le dos aux Smoke après le tube My Friend Jack. Les musiciens découvrent également leur pouvoir d’attraction auprès des jeunes femmes nordiques, avec leur belles gueules et leurs teints hâlés de nord-africains.

Le groupe va répéter ce processus du pied dans la porte partout par la suite au Danemark, en Suisse, en Norvège, en Suède. Le groupe intègre le circuit rock du Nord de l’Europe, se retrouvant sur un quasi-pied d’égalité avec les groupes britanniques qui s’y produisent. Ils vont ainsi jammer en toute décontraction avec les Small Faces, Vanilla Fudge et Jimi Hendrix Experience. Ce dernier fera même leur première partie sur quelques dates ! C’est dans ce contexte qu’ils signent pour un simple pour le label Triola au Danemark. Ils enregistrent sur la scène d’un théâtre et en live deux reprises : « Spicks And Specks » des Bee Gees et « Mustang Sally » de Wilson Pickett. Le disque se vend particulièrement bien. Je vais apprendre à Marc quarante ans plus tard que le simple sera numéro quatre des ventes au Danemark en 1967. Le groupe est en mouvement perpétuel, car les permis de travail ne sont délivrés que pour quinze jours pour les étrangers. C’est une intense période de travail pour les Variations, et particulièrement formatrice, au contact direct des meilleurs groupes du monde en matière de rock, loin, très loin de la faiblesse de la scène française de l’époque.

Retour en France

En décembre 1967, après un an à écumer le Nord de l’Europe, les Variations reprennent la route en France. Les choses sont un peu compliquées, car le groupe a disparu un an. Ils entament leur retour par le Golf Drouot, mais se retrouvent vite coincés par le nombre de salles dédiées au rock. Une fois le Bus Palladium, le Tour Club ou le Navy Club écumés, il ne reste pas grand-chose. Les Variations commencent alors à se créer un circuit de concerts dans des night-clubs en France, et des scènes qui ne reçoivent normalement pas de groupes live. Les Variations développent mine de rien l’esprit des Beat Club trouvé en Allemagne. Dans leur sillage, de nouveaux groupes appelés pop font leur apparition et renforcent le circuit : Alan Jack Civilisation, Alice, Triangle, Zoo, Martin Circus… Mais les Variations ont bien été les premiers.

Le groupe tourne un peu en rond en France et accepte l’offre du Ministère des Affaires Etrangères de jouer sur deux bateaux sur le Rhin. En novembre 1968, malgré les concerts en Scandinavie, la carrière des Variations stagne, et ils réfléchissent clairement à se séparer. Le groupe aligne les concerts en France, mais ne connaît pas la même frénésie qu’en Europe du Nord. Un spleen s’installe. C’est alors que Richard Fontaine, membre de Alice, leur signale un tournage à Joinville. Il s’agit d’une émission filmée pour le Premier de l’An avec tous les meilleurs groupes anglais du moment : Who, Peter Green’s Fleetwood Mac, Small Faces, Jeff Beck Group… C’est l’occasion d’entendre de la bonne musique et de boire un verre gratis. Guy Job, Michel Taittinger et Jean-Pierre Frimbois en sont les producteurs pour leur société Télé 2000.

Marc Tobaly, Jo Leb et Jacques Grande traînent alors sur le tournage. Ils n’osent pas s’incruster dans la cantine avec les stars et les invités. Mais lorsque du matériel traîne, ils se permettent de tester, car tout est branché. Marc ne résiste pas à la tentation d’une magnifique guitare Gretsch verte utilisée par Steve Marriott. Il s’en saisit et commence à jouer. Taittinger le voit et l’entend, et lui demande qui il est : Marc Tobaly des Variations, un groupe français. Il leur propose de jouer des plans de coupe entre les artistes anglais. Ce n’est pas grand-chose, mais c’est inespéré. Taittinger leur demande si ils sont tous là. Ils répondent par l’affirmative, mais ce n’est pas le cas. Il manque Jacky Bitton, qu’il va falloir aller dénicher dans un cinéma avec sa copine, car le premier tournage est à 21h00. Il faut aussi ramener tout le matériel. Ils accompagnent d’abord en play-back la chanteuse PP Arnold qui a aussi joué avec les Small Faces. Puis, les planètes s’alignent de nouveau. Traffic ne peut venir, bloqué à cause de problèmes avec la douane. Il y a donc de la place pour un groupe ! Le groupe commence à jouer, cette fois en live. Le public revient de la cantine pour le dernier jour de tournage, et l’alcool a largement abreuvé les esprits. Une sorte d’effervescence se met à monter, et les Variations doivent jouer un, puis deux, puis trois, puis… six morceaux en direct, poussés par le public qui se met à porter Jo Leb. Le groupe n’a joué que des reprises comme Around And Around des Rolling Stones ou Mustang Sally, mais leur rage scénique a rendu le tournage complètement fou. Finalement, ils seront le final de vingt minutes, en live contrairement aux groupes anglais, pour l’émission Surprise Partie.
Après cette performance inespérée, ils signent sur le label Pathé-Marconi et avec le management Robert Stigwood Organisation (RSO), la maison qui pilote Cream, Traffic et Eric Clapton. Marc Tobaly ne verra pas la retransmission de l’émission le soir du Jour de l’An. Ils sont engagés le 31 décembre 1968 à l’école HEC. Ils ont en première partie une formation encore nommée New Yardbirds, mais qui a opté récemment pour Led Zeppelin. Le batteur John Bonham, saoul, dit à Marc : « Je te le dis, mec, avec ce qu’on fait, dans quelques mois, on sera célèbre aux USA. » Marc rigole, genre « t’as raison mon gars, c’est pas si simple ». Le 12 janvier 1969, Led Zeppelin sort son premier album et atteint la sixième place des ventes en Grande-Bretagne, et la septième aux USA.

Nador

Pour l’heure, et assez étrangement, les Variations ne jouent que les morceaux des autres. Il y a même des adaptations entre Paris et la province. Le dernier tube de Cream ou Jimi Hendrix ne peut pas être joué à Tours, car dans les boutiques de musiques, on en est encore resté à Satisfaction des Rolling Stones et Tomorrow Never Knows des Beatles. Il y a souvent un à deux ans de décalage sonore entre la capitale et la province, à une époque qui produit un disque génial toutes les semaines.
Avec le contrat Pathé-Marconi, Marc Tobaly fait le choix de proposer uniquement des chansons originales. Et l’inspiration coule de ses doigts avec une facilité déconcertante. Le groupe sort deux simples en 1969, Come Along/ Promises en mars et « N°2 » avec What’s Happening et l’instrumental Magda dédié à la sœur de Marc en septembre.

Le guitariste apporte souvent des idées de riffs, qui sont travaillés en commun. Jo Leb, contrairement à une rumeur qu’il a souvent laissé courir, écrit ses textes, et en anglais. Il se fait aidé par sa petite amie pour vérifier la grammaire. Marc fait de même lorsqu’il écrit un texte, c’est Magda, étudiante en anglais, qui s’en charge. Jacky Bitton est lui moins prolixe, mais lorsqu’il apporte des compositions, elles sont achevées et prêtes à l’usage. L’émulation dans le groupe est saine et sincère, et en quelques mois, le groupe a trouvé sa mécanique d’écriture. L’aspect financier, lui, va poser quelques soucis. Marc le reconnaîtra lors de nos discussions : il aurait fallu tout partager équitablement en quatre au niveau des droits d’auteur, comme le reste. C’était de la sagesse, mais le groupe n’en avait pas à dix-neuf ans.
Les enregistrements sont aussi un peu sauvages, car les Variations refusent de respecter les consignes des ingénieurs en blouse du studio, à savoir tout enregistré séparément derrière des paravents. Lorsque le groupe s’installe, il le fait comme pour un concert, et enregistre tout en live, avec quelques ajouts, comme les solos. Après quelques accrochages verbaux avec l’équipe technique, cette dernière finit par s’adapter et positionne des micros dans la pièce de manière à tout capter en live. C’est ce qui va permettre à la musique studio des Variations de conserver encore aujourd’hui tout son impact.

Les simples se vendent à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires. C’est tout-à-fait satisfaisant, et cela permet aux Variations de se retrouver en ouverture des shows de Johnny Hallyday au Palais des Sports de Paris du 23 avril au 10 mai 1969. La salle dispose de trois scènes, comme un festival : deux latérales plus petites avec Devotion et Variations, la principale plus grande pour Aphrodite’s Child et Johnny Hallyday. Le groupe fait rapidement parler de lui grâce à ses sets explosifs dont la durée est raccourcie petit à petit pour éviter de faire de l’ombre à la vedette du show. Le groupe est en représentation permanente à partir de ce moment-là. Il est même invité à des cocktails branchés comme celui de Paco Rabanne en septembre 1969. Jo Leb est un temps pressenti pour assurer le rôle principal de la comédie musicale Hair, mais il décline et laisse la place à Julien Clerc, préférant se consacrer aux Variations qui sont en plein décollage.
A la Saint-Sylvestre 1969-1970, ils retrouvent Led Zeppelin à un concert commun à Château-Malabry nommé Piston 70, mais cette fois, c’est le groupe anglais la vedette. Ils se retrouveront à nouveau sur la route ensemble en septembre 1970 pour des dates communes en Scandinavie, ainsi qu’avec Yes. Les Variations publient en éclaireur deux simples de chansons tirées de leur premier album qui sort en octobre 1970 : « Nador ».

Les deux premiers simples sont dotés de l’énergie et de l’enthousiasme un peu brut des musiciens trop heureux d’être enfin dans un studio. Les chansons sont déjà très abouties, avec une patte sonore indiscutable. Come Along a un côté blues-rock qui se mêle à des percussions nord-africaines subtilement amenées. Ces influences africaines vont peu à peu montées dans le rock anglais avec des formations comme Airforce de Ginger Baker, Traffic, ou le groupe kenyan Osibisa. Promises est un rave-up de pur blues acide rappelant l’influence de Jimi Hendrix. Marc Tobaly est déjà un soliste affirmé, avec une patte mélodique indéniable. Il est très clairement devenu en quelques mois le meilleur guitariste de la scène française, capable d’un toucher proche d’un Jimmy Page ou d’un Eric Clapton. What’s Happening est un uppercut proto-hard, et Magda une petite merveille permettant à Marc de développer toute sa sensibilité de jeu électrique. N’oublions pas les autres, à commencer par le section rythmique absolument impeccable de Jacky Bitton et Jacques Grande, tout en puissance et en virtuosité. Et Jo Leb est un chanteur redoutable, charismatique, gueulant le rock comme les meilleurs de la scène britannique, avec ce léger voile bluesy.

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« Nador » est un album plus abouti que ces premiers essais en studio. La qualité d’écriture a incontestablement progressé. Les Variations ont aussi mieux cerné toutes les facettes de leur musique, qui va du hard-rock à la ballade rhythm’n’blues, en passant par le blues. Le disque débute par le redoutable What A Mess Again, une tornade sonore plus proche du MC5 que de Led Zeppelin. Jacky Bitton accomplit un travail stupéfiant à la batterie, pilotant la chanson par ses changements de rythmes et de licks. Marc Tobaly ferraille avec ferveur un riff assassin qu’il enjolive de chorus saignants. P’tit Pois participe au tronçonnage sonore en règle aux côtés de Bitton et Tobaly, et Jo Leb fait la preuve de son charisme vocale redoutable. Non seulement c’est du jamais entendu en France, mais également dans le reste du monde. Avec le recul, il n’y avait guère que Led Zeppelin, Black Sabbath, les Stooges et MC5 pour faire un tel boucan. Mais les Variations ont fait mieux en croisant un hard-rock blues à la Led Zeppelin avec une approche sauvage plus proche de la scène de Detroit.
Le disque ne baisse pas en intensité avec Waiting For The Pope, pièce proto-heavy acide avec sa petite note de piano électrique inquiétante, et ses phases d’accalmie psychédéliques. Avec ces deux premiers morceaux, les Variations ont déjà assommé la concurrence. La suite permet au groupe de faire la démonstration de son talent, bien plus vaste que ne l’avait révélé les concerts ou les deux premiers simples. Ainsi, Nador est un sublime instrumental acoustique dédié à la ville portuaire marocaine du même nom. Marc Tobaly y joue toutes les parties de guitare, accompagné par les percussions berbères de Jacky Bitton. Ce morceau a toute la sensibilité du meilleur folk anglais, avec cette touche de musique marocaine si particulière et si unique.

 

We Gonna Find The Way est un morceau riche rappelant Traffic, avec Mick Fowley au piano et au chant. Generations est une première tentative historique de rock chanté en français. Jo y évoque avec une certaine naïveté le conflit de générations qui a cours entre les jeunes et celle de leurs parents ayant connu la guerre. Le riff est brutal, la rythmique plombée. Le titre est très réussi, et pose les prémices de Téléphone et Trust. Free Me est un excellent blues-rock mêlé à du folk. Entêtante à souhait, le thème musical comme le chant de Jo reste bien dans la tête. Marc et Jacky joignent leurs forces sur le très heavy Completely Free, avec son riff saignant et sa ligne de batterie brutale. Jo survole de sa voix râpeuse l’ensemble qui nécessite une certaine technicité de par sa succession de changements de riffs et de rythmiques. Mississippi Woman est un boogie fervent avec Mick Fowley au piano et au chant, les Variations assurant les choeurs soul. But It’s Allright est une nouvelle torgnole dans la lignée de What A Mess Again, si ce n’est qu’elle signée et chantée par Jacky Bitton. Marc Tobaly déploie son jeu à la wah-wah. Après un riff particulièrement heavy et menaçant commence la seconde partie du morceau fait d’un solo de batterie accompagné du dabourka de Youssef Berrebi. Ainsi se termine ce fantastique album, un véritable chef d’oeuvre à la richesse unique, et totalement au niveau de la meilleure production britannique de l’époque.

Premiers nuages

Alain Tobaly organise sérieusement le business des Variations avec sa propre compagnie de tournée nommée CBA, qu’il créé avec Jean-Pierre Bertola. Les Variations sont un groupe qui se professionnalise, avec une vraie équipe de tournée, du matériel, des roadies. Ils peuvent jouer n’importe où, car lorsqu’on les engage, ils viennent avec tout le nécessaire pour assurer un show complet, son et lumières.
Cependant, du côté de la presse musicale, les choses se ternissent. Le premier coup est porté par Rock & Folk en décembre 1969. Les Variations sont à l’affiche d’un Musicorama à l’Olympia et diffusé par Europe 1 avec Steppenwolf en vedette. Pris par l’enthousiasme, ils débordent d’un quart d’heure, et ampute le set d’une heure des Steppenwolf d’autant, car le soir a lieu un gala de Charles d’Aznavour. Le journaliste Philippe Paringaux a la dent dure pour ce groupe qu’il trouve prétentieux, osant s’imposer face à l’immense groupe américain. L’article est à charge. Les Variations auront un droit de réponse dans le numéro de janvier 1970 avec Paringaux, où ils s’expliquent sur leurs erreurs. Mais surtout, ils appellent de leurs vœux que la presse française les soutienne plutôt que de les enfoncer. Ce franc-parler va leur causer quelques inimitiés, et notamment quand Jo Leb s’occupe de la communication, n’hésitant pas à dire ouvertement ce qu’il pense, là où Marc se montrera plus stratégique. En ce qui concerne la publicité, Jo est parfait, mais pour ce qui est de se faire des amis, cela ne fonctionne pas vraiment.
Et puis, les Variations sont beaux. La photo de couverture de « Nador » qui est un portrait du groupe dans la nature les montre tel qu’ils sont. Et ils sont parfaits en terme de look rock. Un peu typés mais pas trop, toujours parfaitement habillés à la mode grâce aux contrats dégottés par Alain, ils ont la classe de Led Zeppelin ou des Rolling Stones en France. A cela s’ajoute leur succès commercial réel qui, si il n’atteint pas encore le disque d’or, n’en est pas loin avec 80 0000 exemplaires de « Nador » vendus. Mais en termes de ventes pour le rock en France, c’est conséquent. Led Zeppelin lui-même n’a vendu que soixante mille exemplaires de son « III » en France. Les concerts sont des passages à tabac en règle, et leur réputation est aussi sulfureuse que fascinante. Cool et doués, les Variations volent les petites copines de tout le monde dans les boîtes de nuit parisiennes, y compris celles de certains journalistes. Un petit relent de racisme ne serait éventuellement pas à exclure, même si Marc ne m’en a jamais fait part.
Au-delà de ces accrochages avec la presse musicale, les Variations doivent tout inventer. Il n’y a littéralement pas de circuit rock en France. D’ailleurs, le terme même de concert n’existe pas. On parle de gala. La structure à Alain Tobaly permet de jouer partout, mais à chaque set en province, il faut pousser le matériel du groupe de bal en ouverture et installer le sien. Il n’y a pas de loge pour se changer, pas de soundcheck. Des festivals s’inventent, mais ils ont lieu dans des champs en pleine campagne. Le groupe doit attendre de jouer dans sa camionnette Ford.

Le circuit se structure avec l’arrivée des MJCs en 1971, mais il faut toujours venir avec tout son matériel à installer. Il ne s’agit que de salles vides mises à disposition pour un spectacle. Les Variations se retrouvent malgré eux dans une polémique qui doit autant au contexte politique post-Mai 1968 que de la jalousie. Dans deux interviews, Alain et Marc Tobaly se confrontent à des conceptions intellectuelles presque incompréhensibles. Le premier explique que l’intellectualisation de la musique qui veut descendre les formations trop populaires est un sujet uniquement français. Dans les pays anglo-saxons, on accepte tout le monde, et chacun trace sa route, de Creedence Clearwater Revival à Captain Beefheart. Le second se retrouve en interview sur le rock français avec d’autres musiciens français comme ceux de Martin Circus et Triangle. Clairement, les Variations n’ont pas les mêmes problèmes que les autres. Contrairement à eux, ils n’ont aucun mal à jouer au-delà de Paris de par leur structure technique. Marc ne souhaite que davantage de salles structurées pour jouer, et surtout un peu de soutien de la presse musicale y compris quand ils arrivent à quelque chose comme les Variations. Ces frustrations, le groupe en fait part dans l’émission Pop 2 de Patrick Blanc-Francart diffusée sur l’ORTF le 12 juin 1971. Les musiciens sont interviewés et font état de leurs difficultés sur la scène française. Ils expliquent que le public est bien présent et les soutient mais pas la presse. Les Variations sont ensuite captés dans un de ces festivals boueux, celui de Saint-Gratien dans le Val d’Oise. Le set est redoutable, mais le compte-rendu dans Best accable le groupe. Leur musique est jugée simpliste par rapport au jazz-rock de Martin Circus. Ils ont également des roadies avec des tee-shirts siglés Show Variations qui déménagent le matériel de Martin Circus pour installer le leur, ce qui leur prendra une heure et fera retomber la ferveur. Vues les images, il semble qu’elle soit revenue rapidement.

Désormais tous installés en communauté dans une grande maison à Montrouge, les Variations ne font que constater la descente en flammes médiatique qui les accable alors qu’ils n’ont fait que ce qu’ils voulaient faire : de la musique pour faire plaisir aux gens, et développer une musique rock à la hauteur de la musique britannique. Les salles sont pleines en province, parfois davantage que Johnny Hallyday, les ventes sont plus qu’encourageantes. Mais ils sont désormais les têtes de turcs d’une musique rock pas assez française, pas assez engagée, trop commerciale, trop ou pas assez de tout, alors qu’ils sont les véritables pionniers d’une musique rock originale française.

Jo s’en va… et revient

En juillet 1971, Alain trouve l’opportunité d’une tournée d’une quinzaine de dates en Espagne franquiste. La formation se lance. Durant ce périple, Jo Leb, qui commence à avoir du mal à gérer la fatigue de la route, prend du speed. L’une d’elles se finira mal lorsqu’il avalera la totalité d’un cornet de substance. Il manquera de mourir, juste sauvé par un cachet de Gardénal que sa petite amie, la groupie Zouzou la Twisteuse, avait sur elle. Par la suite Jo aura de gros problèmes dentaires à cause de cette prise malheureuse. Il décide qu’il est temps de quitter le groupe. Marc et Alain, tous deux partis à Stockholm pour trois semaines de vacances, découvre la une du numéro de Pop Music : « Je quitte les Variations ! ».
Les concerts au Golf Drouot sont déjà programmés se joueront à trois avec Marc au chant, avant que David Chevalier, jeune chanteur originaire de Pau, prenne le train après avoir vu la une de Pop Music. Il rejoint après audition les Variations en octobre 1971. C’est un très bon chanteur, très professionnel, et fan du groupe. Mais il n’a pas l’esprit rock’n’roll du reste de la formation. Si Jo était un peu trop too much, David Chevalier est sage et poli. Les deux pistes qu’il va enregistrer avec eux, It Will Come et Oh ! La Liberté au texte signé Philippe Labro sont réussis et efficaces, mais il leur manque ce mordant qui est celui de Jo Leb, même si It Will Come aurait fait un excellent morceau des Rolling Stones à la même époque.

Finalement, la greffe ne prend pas. La réputation du groupe ne faiblit pas malgré tous ces changements de line-up. De son côté, Jo Leb se rend compte de son erreur. Il essaie de faire de la musique solo avec des membres de Triangle et Dynastie Crisis, mais rien ne fonctionne. Jo Leb finit même par venir voir les Variations en répétition avec son successeur. Le 13 février 1972, lors d’un concert au Golf Drouot devant six cent personnes, les Variations se présentent en trio sans leur nouveau chanteur. David Chevalier est remercié officiellement en mars 1972. C’est le signal. Lors du concert suivant au Navy Club, Jo Leb saute sur la scène et prend le micro. Le retour n’est cependant pas apprécié par Marc, Jacky et Jacques. Les musiciens s’engueulent, un an d’animosité se vomit. Sacha Reins, de Best, vient alors à la rescousse. Il leur propose un deal : ils reprennent Jo, ils ont droit à un papier élogieux de huit pages dans Best. Les esprits se calment. L’opportunité de repartir sur de bonnes bases, y compris avec la presse musicale, est une chance que les quatre refusent de laisser passer. Jo revient, et le groupe reprend son œuvre.
La grande maison commune vers Montrouge est abandonnée au profit de logements indépendants afin d’éviter de se taper sur le système hors des concerts et des répétitions. Un nouveau simple sort, déjà entamé avant le retour de Jo. Only You Know (And I Know) de Dave Mason est interprétée par Marc au chant. La face B est le grand retour vocal de Leb avec I Was Down, une épaisse tranche de heavy-rock qui annonce le disque futur.

Mais pour l’heure, les Variations restent ancrés en France, avec une presse toujours hostile, et la fatigue de la route qui commence à user les corps et les esprits. Si les Variations vendent bien, ils ne peuvent s’arrêter trop longtemps, car les finances sont toujours tendues. Ils n’ont pas l’ampleur financière des Rolling Stones ou de Led Zeppelin.

« Take It Or Leave It » et le départ pour les USA

En juin 1972, le groupe est à nouveau au bord de la séparation. Pour le concert de Nancy, Jacques Grande a abdiqué. Il est brièvement remplacé par Alain Suzan d’Alice. Les Variations sont totalement découragés. Ils ont l’impression de se battre contre des moulins à vent, et même le retour de leur chanteur ne change rien. Il n’y aura pas d’article de huit pages dans Best, même si Sacha Reins soutiendra avec ferveur les Variations. Ils sont à nouveau au bord de la séparation.

Jacky Bitton a pris un peu d’air à New York, et il a accroché un contact dans une soirée avec Doug Yeager, qui est intéressé pour les faire jouer aux USA. En novembre 1972, les Variations lâchent tout et partent s’installer à New York. Doug Yeager tient sa promesse, et les Variations se produisent en tête d’affiche dans des universités du Middle West américain : Cincinnati, Cleveland, Dayton… le premier séjour des Variations dure trois mois. Ils vivent dans la même bâtisse que le groupe new-yorkais New York Dolls, et ils jamment ensemble. C’est là-bas qu’ils enregistrent le simple Je Suis Juste Un Rock’n’Roller/ The Jam Factory.

je suis juste un rock n'roller (M. tobaly - P. michel) 3'37 / the jam factory (M. tobaly - J. bitton) 4'03 | Rakuten

La première chanson est en français, et sera un joli tube en France, 7ème des ventes. La face B sera enregistrée en live avec les choristes afro-américaines du premier titre, et totalement improvisée sur le moment. A l’origine, les Variations devaient capter une version de Big Boss Man.
Lorsque les Variations reviennent des USA, le regard a changé sur eux, grâce au tube Je Suis Juste Un Rock’n’Roller, mais aussi par les dates assurées avec Allman Brothers Band, Flash, et Hall&Oates. Les articles sont plus complaisants, car quelque chose se passe avec les Variations. En mars 1973, ils reviennent en conquérants. Sacha Reins va assurer sa promesse avec un article de quatre pages le même mois racontant les concerts des Variations devant 2000 à 3000 personnes, ferventes. La pochette intérieure de « Take It Or Leave It » rappelle tout cela, avec son texte signé Reins à l’intérieur, et des photos de scène prises aux Etats-Unis.
Fort de cette position flatteuse, les Variations sont à nouveau en posture d’imposer leur choix. Ils vont enregistrer aux USA, et avec Don Nix, l’auteur de I’m Going Down, que Marc admire. L’album est capté en avril 1973 aux Studios Ardent et Stax. Les chansons ont été patiemment assemblées par Marc, et sont de sa plume pour la quasi-totalité, hormis C’Mon Joe de Jacky Bitton et deux titres aux textes signés par Jo, Silver Girl et Rock’N’Roll Jet. Le son du disque n’est clairement plus hard-blues saignant. Les années et l’expérience acquise aux USA ont permis aux Variations de s’enrichir de multiples influences rock anglo-saxonnes. Il y a du rock sudiste, du hard-rock, de la soul, et du blues dans « Take It Or Leave It », avec la classe d’un Allman Brothers Band ou d’un Doobie Brothers dans l’interprétation. Il y a même des accents de Lynyrd Skynyrd sur certaines chansons, alors qu’il ne publiera son premier album qu’à la fin de l’été 1973. La qualité tant de la composition, de l’interprétation que de la production est absolument exceptionnelle. Les Variations sont très largement à la hauteur des meilleurs groupes US. Jo Leb est superbe au chant. Son chant rocailleux et écorché est fantastique. Jacky Bitton et Jacques Grande ont maîtrisé leur rythmique pour se concentrer sur l’impact et le swing plutôt que sur la compétition technique. Mais ils sont doués, les bougres. Le swing développé par les lignes de basse de Jacques « P’tit Pois » est superbe. Lui aussi a beaucoup appris au contact du son américain. Jacky Bitton retient sa virtuosité à la batterie pour se concentrer sur l’efficacité. Et nos quatre héros conjugués vont produire ce très grand disque, dont la qualité est largement équivalente à la production US de l’époque. Par ailleurs, j’ai toujours trouvé la richesse de ce disque équivalente au double « Eat It » d’Humble Pie publié la même année.

 

En position de force avec un grand disque qui atteint la 48ème place des ventes françaises, le groupe aurait pu tranquillement tourner intensivement en France et cueillir enfin les fruits de leur travail. Mais toujours amers de leur réputation en France, et plutôt ravis des retours de leur départ réussi aux Etats-Unis, les Variations d’aller jusqu’au bout, et s’installent à New York en juillet 1973. Ils vont aller se cramer les fesses dans la canicule new-yorkaise, et se faire piquer une partie de leur matériel avant un show-case pour un label en vue d’un contrat. Ils vont atterrir dans une grande baraque qu’ils partagent avec les New York Dolls. C’est grâce à eux qu’ils rejoignent le circuit des clubs de New York, dont le Max Kansas City, un peu interlope. C’est aussi grâce à eux qu’ils font la connaissance de Leber & Krebs, une société de management de la Côte Est qui a des formations comme Kiss et Aerosmith en signature. Le peu d’argent du groupe file, Alain Tobali pète un plomb, mais les Variations réussissent à signer sur un label américain : Buddah Records, celui des mythiques Flamin’Groovies.

Moroccan Roll

Le patron du label, Lewis Merenstein, leur conseille rapidement de quitter le créneau du hard-blues-rock. Il y a bien trop de groupes anglo-saxons qui jouent aussi bien qu’eux. Et beaucoup peinent à décoller, comme Aerosmith qui existe depuis 1970 ou Kiss depuis 1972. Les Variations doivent trouver leur truc, et il leur suggère leurs origines marocaines. Marc et Jacky sont enthousiastes, Jo un peu moins.
Marc et Jacky vont être les architectes enthousiastes d’une fantastique fusion blues-rock/musique marocaine, qui fut baptisée par la presse locale « Moroccan Roll ». Marc me fera la démonstration sur sa table de mixage de la fusion des rythmes rock et marocain traditionnel en me tapant les rythmes, puis les fusionnant en apportant sa guitare acoustique Gibson qui fut achetée sur la tournée US de 1973. Pendant ce temps-là, Jimmy Page de Led Zeppelin passa toutes ses rares vacances au Maroc pour comprendre la fusion des sons entre ces deux musiques entre 1970 et 1975. « Moroccan Roll » lui en apporta sûrement une réponse en 1974 qui conduira à Kashmir en 1975.

Moroccan Roll - Album by Les Variations - Apple Music

Le quatuor se réunit dans les studios Pathé. Jacky amène une connaissance : le violoniste/houdiste Maurice Meimoun qui va devenir le cinquième membre des Variations. Meimoun et Jacky ramènent de multiples musiciens traditionnels marocains, des joueurs de kanoun, de darbouka, de houd ou de mizmar. Dans le studio à l’automne 1973 à Paris, c’est l’esprit familial, avec le couscous à partager. Lorsque les Américains de Buddah débarquent, ils découvrent toute cette générosité, et sont totalement conquis. Le groupe effectue également une partie des enregistrements aux Etats-Unis, entre deux concerts. Ils interprètent d’ailleurs le nouveau morceau I Don’t Know Why à l’émission Midnight Special. L’album « Moroccan Roll » est une réussite totale, fusionnant avec génie toute les influences blues-rock, proto-hard, soul et marocaines. Moroccan Roll, Did It, ou Growing Stronger sont autant de pépites de cette nouvelle voie, qui va probablement tomber dans l’oreille d’un Jimmy Page qui cherche depuis 1970 à fusionner rock et musique marocaine en vain.

Tout semble aller pour le mieux pour les Variations, qui assurent de nouvelles tournées avec Bachman Turner Overdrive, Kiss, et Aerosmith. Ils tournent énormément aux USA, la presse américaine est charmée, y compris le pourtant très acide Lester Bangs de Creem. Ils finissent par délaisser quelque peu la France, et la presse nationale n’est pas très enthousiaste avec « Moroccan Roll », se demandant où sont les Variations de « Nador ». Jo Leb n’est pas loin de penser la même chose, lui qui a été moins impliqué au chant sur ce troisième album, Jacky Bitton ayant largement contribuer à l’écriture de ce nouveau disque, qui est avant tout le bébé de Marc et lui. Le concert à l’Olympia en juin 1974 vient rassurer le public français. C’est un évènement, car c’est une première pour un groupe de rock français. Patrick Eudeline et François Ducray encensent se montrent enthousiastes dans Best. Jo commence aussi à être gêner par la présence de Maurice Meimoun à ses côtés sur le devant de la scène, le violoniste étant un second soliste avec Marc Tobaly.
Lorsque Buddah vient rencontrer les Variations à Paris pour réfléchir au nouvel album qui doit être décisif, Jo Leb préfère partir en vacances avec sa petite amie. Marc lui demande de repousser de quelques jours afin d’être présent, mais il refuse et claque la porte. Malgré ce coup dur, les trois autres ne veulent pas voir leur chance s’effriter.

Café de Paris et la terrible déconvenue

Marc décide de recruter Robert Fitoussi, alias FR David, qui a été son coach vocal pour la préparation du simple Only You Know And I Know enregistré en trio. Fitoussi accepte bien volontiers, et les Variations partent pour les Etats-Unis à l’automne 1974. Ils répètent dans la maison prêtée par le guitariste de jazz fusion Larry Coryell pendant un mois. La formation s’est encore élargie, avec outre Meimoun désormais membre à part entière, le claviériste Jimmy Morris. Ils apparaîtront les six sur la pochette du nouveau disque. Le départ de Jo Leb a entériné un tournant musical plus progressif, à une époque où le jazz fusion et le rock prog sont au sommet de l’affiche avec Mahavishnu Orchestra, Yes, ou Jethro Tull. Là encore, les Variations s’inscrivent dans une démarche originale, et conservent une fidélité à la structure de la chanson rock tout en apportant de la richesse instrumentale.

Café de Paris - Album by Les Variations - Apple Music

« Café De Paris » sort en début d’année 1975 avec une superbe pochette de Guy Pellaert qui a signé celles de « Diamond Dogs » de David Bowie et de « It’s Only Rock’N’Roll » des Rolling Stones. Le groupe joue encore habilement avec son identité française sur le titre du disque et sur la frivolité parisienne imaginée par les Américains dans un esprit très Toulouse Lautrec. Robert Fitoussi est un interprète plus technique, à la voix plus mélodique et séduisante, mais moins rock’n’roll. Mais ce n’est pas l’objectif de cet album qui regarde du côté des Doobie Brothers, de Chicago et de Fleetwood Mac, tout en conservant sa patte marocaine liée au violon de Maurice Meimoun. Cela est notamment assez notable sur le titre Sit Back Home Again, qui aurait dû être un tube des radios FM américaines, et sur lequel la voix de Fitoussi est impeccable. Effectivement, les Variations ne sont plus ce groupe furieux et pétaradant de 1969-1970, mais une formation ambitieuse qui a développé un son sophistiqué aux nombreuses influences américaines.
Les guitares rugissent encore sur Superman Superman, quant à Berberian Wood, c’est un funk … marocain ! On y sent l’influence de James Brown, des artistes Stax. Les Variations ouvrent une nouvelle voie dans la scène US entre la musique blanche et la musique noire avec une vision internationaliste ouverte sur le monde, les cultures fusionnant sans retenue.

 

Le disque entre dans le Top 200 américain, et le simple Superman Superman atteint la 36ème place des ventes. Fort de ce beau succès, les Variations se voient proposer des dates en ouverture de la grande tournée de retour des Rolling Stones aux USA avec leur nouveau guitariste Ron Wood. Malheureusement, cette chance va être loupée.

Alors en tournée avec Aerosmith au printemps 1975, Robert Fitoussi connaît quelques problèmes de voix à cause d’un rhume lié à la climatisation systématique aux Etats-Unis entre les véhicules, les coulisses et les hôtels. Le chanteur a un manager, les Variations sont toujours managés par Alain Tobaly. Le premier cherche à évincer le second, il finit par convaincre le chanteur à se faire soigner en France plutôt qu’aux Etats-Unis. Le groupe donne son dernier concert à six le 25 mai 1975 à Fort Wayne dans l’Indiana. Fitoussi ne reviendra pas à temps pour les concerts avec les Rolling Stones, obligeant à, suprême erreur, annuler sa participation. Or, on ne refuse rien aux Rolling Stones, sauf si l’on s’appelle Jeff Beck.
Après cette terrible déconvenue, Maurice Meimoun et Jacques Grande sentent que le vent tourne mauvais, et préfèrent s’en aller. Le chanteur Carl Storie et le bassiste-chanteur Albritton McClain viendront colmater les brèches d’un line-up d’un groupe dans la tempête mais pas encore coulé. Cependant, leur réputation est fortement abîmée, et les différents départs ne sont pas les signes d’un groupe en bonne santé, alors que pendant ce temps-là, leurs partenaires de scène Kiss, Aerosmith et Bachman Turner Overdrive atteignent enfin le devant de la scène avec des line-up stables. Les Variations se battent valeureusement jusqu’à leur dernier concert le 7 décembre 1975 à l’Academy Of Music de Philadelphie. Leur séparation officielle est prononcée par un Marc Tobaly meurtri le 21 décembre. Pendant ce temps-là, en France, on les a déjà oublié.

Survivre

Lorsque Marc me raconta la fin du groupe, il y avait autant de colère que de tristesse. Il mettait fin à dix ans d’une aventure magique et unique dans le rock français à seulement vingt-cinq ans. Devenu croyant, il avait tempéré par la sagesse et la destinée divine. Il en était ainsi. Je suppose que Jacky Bitton, devenu rabbin à New York, avait suivi le même cheminement. Pendant ce temps, Jacques Grande et Jo Leb continueront à former des groupes ensemble ou séparément, répandant parfois du venin sur le groupe et Marc pour le plus grand plaisir de magazines trop heureux de capter un fiel si intéressant pour les ventes, mais bien peu glorieux pour des titres de presse qui se veulent être l’incarnation de l’ouverture musicale et la promotion de la musique rock.
Après une année 1976 où il vit entre farniente et déprime, à la fois physiquement épuisé par dix ans de route et brisé moralement, Marc revient au Maroc chez ses parents pour se reposer. Il est alors recontacté par Robert Fitoussi pour un nouveau projet. Il s’agit d’un enregistrement d’un simple avec le chanteur Richie Havens, initié par les managers américains Doug Yeager et Charles Benanty. La chanson s’appelle Shalom, Salem Aleicum, et sort en 1977 sous le nom de Richie Havens with Les Variations, Jacky Bitton ayant rejoint le projet. Le titre célèbre la volonté du président égyptien Anwar Al-Sadat initiant une paix possible entre Palestiniens et Israéliens, qui se concrétisera par une allocution de Al-Sadat à la Knesset, et qui aboutira aux accords de Camp David en 1978. Le titre sera numéro un en Israël.

 

Puis, Marc Tobaly reste à New York pour devenir musicien de studio apprécié. David Krebs reprend contact avec lui, et le groupe Kings Of Hearts est assemblé autour du guitariste et de Marc Fitoussi. Le disque Close But No Guitar sort en 1978, mais s’éloigne encore un peu plus de l’esprit des Variations. C’est un album de musique très professionnel, avec des musiciens comme Nicky Hopkins et Steve Porcaro aux claviers.

Ce sera le début de toute une série de projets plus ou moins morts-nés, entre deux sessions avec Steve Marriott, Mick Jones de Foreigner et Felix Pappalardi de Mountain. Mais la vie new-yorkaise est dissolue, et Marc sent qu’il lui faut quitter tout cela rapidement. Il revient chez Magda en banlieue parisienne qui l’héberge le temps de reprendre pied.
Marc devient professeur de guitare, et monte des orchestres pour des mariages ou des fêtes. Il sort une poignée de simples, sans trop de conviction sur leurs destinées commerciales, juste pour le plaisir de sortir un disque à son nom. Il fonde une famille, et ouvre la porte à sa foi juive. Elle lui apportera de la sérénité après des années de bouillonnement créatif et de grand-huit émotionnel.

Lorsque nous discutions avec Marc Tobaly, il est franc, direct, mais aussi lucide et déterminé. Il sait que les Variations ont été un grand groupe, dont le coeur se situe entre 1966 et 1975. Les tentatives de reformation avec Jo Leb en 2007 au Petit Journal, puis Laura Mayne avec les New Variations ne seront que de belles étincelles dont le but fut de faire revivre une heure la magie d’un groupe à la destinée magique. Marc restera aussi en lien avec Jacky Bitton et Jo Leb. Sur le plateau de RCJ, à l’occasion de la publication du livre Moroccan Roll, La Fascinante Histoire Des Variations en 2018, nous avions partagé ensemble un plateau Marc et moi, et nous avions appelé Jacky et Jo, Jacques étant hélas décédé en 2011. Jacky était heureux de ce livre, Jo se montrera plus bougon, un peu fatigué par ce passé musical qui lui collait à la peau. Mais il reconnut que oui, ce fut une sacrée aventure. Du Jo en barre, en fait toujours entre deux émotions extrêmes, jamais dans la demie mesure.

photo : Julien Deléglise

Il y aura des dédicaces avec de nombreux fans devenus musiciens professionnels, et même ce show-case à la librairie Parallèles avec une poignée de morceaux des Variations joués en acoustique avec un Marc Tobaly dont la voix parfaitement revint au bout d’une chanson, laissant rapidement sa timidité pour se replonger dans sa musique le temps de quelques chansons.

Pour aller plus loin : La fascinante histoire des Variations par Marc Tobaly et Julien Deleglise, Edition du Camion Blanc.

Amazon.fr: Marc Tobaly: books, biography, latest update

3 commentaires

  1. Merci pour cet hommage vibrant et ce récit passionnant. C’est réconfortant de savoir que les Variations ne sont pas oubliés et aujourd’hui reconnus à une valeur proche de celle qui était la leur en tant que pionniers d’un style larger-than-life dans un pays trop petit. Je garde votre ouvrage comme une référence de pointe à laquelle me ressourcer fréquemment. Salutations, et merci encore.

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