Mon premier porte des bottes en croco’, mon second n’est pas toujours agréable et mon tout fait couin couin dans la bassine. Détrompez-vous, ce n’est pas le retour de Philippe Manœuvre, mais le nouvel album de ma vie. Je mise tout sur le rouge et joue banco sur le cosmique de la lumière infinie ; nouvel album de Lightning Dust. Un album de plus qui ne fera sans doute pas la couverture du prochain Rock’n’Folk.
Une fois n’est pas coutume, c’eut été justifié. Du rock, du folk, Infinite light en est pétrie comme la patrie de l’oncle Sam. Mais écouter ce deuxième album de la chanteuse des Black Mountains, c’est à la fois beaucoup plus et terriblement moins qu’un mélange de cordes et de poudres. Pianos disloqués d’Eno Brian sur Antonia Jane, voix chevrotante qui s’étire sur plusieurs mesures, Lightning Dust, sous le poids des écoutes successives, c’est surtout un drap de fantôme passé, repassé, tabassé par le fer métallique. Avez-vous déjà rencontré un ectoplasme sortant du pressing ? Moi non. Alors j’écoute Never Seen, tellement belle d’étrangeté. Tellement puissante que même Kate Bush pourrait s’affaisser sous le piano en polystyrène. Un bateau hanté, ni plus, ni moins.
Et puis il y a le concours de pigeons crucifiés sur I knew, une ballade au Korg qui fait penser que Dolly Parton aurait parfaitement pu faire parti de Goldfrapp, que Morricone aurait pu composer la B.O. de Bladerunner et que les éperons pour danser nightclubbing c’est pas top of the pop. BANG ! La voix d’Amber vibre comme un cercueil en plein chantier, roulage de tractopelle au Mississipi ; c’est au moins aussi parfait que Dean & Britta, Nancy Sinatra & Hazlewood ou Ben & Jerry. Monstrueux de beautés et rempli de chansons tristes qui font croire qu’un jour ca ira mieux. En attendant, on se bouffe par la racine, une chanson sur deux (History, Waiting on the sun to rise) ne vaut pas le coup et toutes les trois minutes c’est une décharge sur la tempe. Wondering what everyone knows, c’est le concept de la roulette russe en pleine expansion : une chance sur deux de mourir. Aussi fatal que Some velvet morning et ses roucoulades de chemin de fer.
On rechigne souvent à lustrer les disques pour en percevoir la splendeur ; Infinite Light est pourtant à la hauteur des efforts. La pochette, comme l’album, reflète l’ouverture sur le monde, les mouettes à l’horizon et un sentiment majuscule : SURPRISE. Pourquoi vouvoyer la médiocrité quand on peut tutoyer l’excellence ? Vous pourrez toujours poser la question à votre entourage, tenter de comprendre que ce cherche le lectorat des Inrocks et pourquoi Myspace n’a pas encore mis la clef sous la porte, il reste qu’avec ses accents new country, novö-folk et cosmic-pop, Infinite Light s’accorde avec toutes les pièces de mon intérieur. Tout le monde finit toujours par entrevoir midi à sa porte, j’ai enfin vu la lumière entrer chez moi.
The Lightning Dust // Infinite Light // Jagjaguwar (Differ-ant)
http://www.myspace.com/lightningdust