Je m’étais dit qu’après cinq ans d’absence, cette discussion avec les New-Yorkais allait être fluide. Mais c’était sans compter sur un intervieweur mal préparé et quatre bonhommes sur les rotules après une longue journée de promo pour défendre leur prochain album. Voici un court résumé de 25 longues minutes.

En face de moi, assis sur une banquette d’un hôtel parisien, Grizzly Bear au complet. Quatre Américains d’une trentaine d’années avec tous plus ou moins de choses à dire. Ils sont à Paris pour la promo de leur cinquième album « Painted Ruins » prévu pour le 18 août. Rodé à l’exercice, le groupe déballe certes quelques évidences en interview (« Pour te donner une réponse ennuyeuse, on voulait juste faire un album », ce genre) mais se réveille quand on aborde le sujet de la récente campagne électorale américaine, se replonge facilement dans le passé pour évoquer le premier disque qu’ils ont acheté et, malgré un journaliste qui balance questions sur questions sans vraiment savoir où il va, joue le jeu. Et tout ça sans me faire voir que ça les emmerde un peu. Bref, si vous avez déjà lu jusqu’ici, bravo. La suite, c’est une interview publiée deux mois avant la sortie de l’album, histoire de vous laisser le temps d’en lire des meilleures. On est comme ça à Gonzaï, on pense à vous. 

Un mot sur la campagne électorale américaine, Edward, tu t’es engagé auprès de Bernie Sanders. Pourquoi ?

Edward : Ces dernières années, pas mal de choses se sont passées, de manière globale et personnelle. Je postais des messages sur la politique et j’ai été contacté par l’entourage de Bernie Sanders pour savoir si je voulais devenir un représentant pour quelques semaines. Je n’avais jamais donné de discours en public donc c’était un peu effrayant mais je me suis lancé pour aider du mieux que je peux. Sur le plan politique en ce moment, l’agenda est chargé, ici et ailleurs. Une fois que t’as conscience de ces choses-là, c’est difficile d’imaginer arrêter de s’y intéresser. Ça restera à vie maintenant. Je suis devenu moins complaisant.

Est-ce d’autres artistes ont suivi et se sont aussi engagés contre Trump ?

Chris : Oui, mais pas assez ! Beaucoup ont préféré ne rien dire, pour ne pas faire baisser les ventes de leurs albums et garder leurs fans. Je ne vois pas d’autres raisons. Ça me parait impossible de cautionner ce que fait Donal Trump. 

Edward : En fait, ça me fait réfléchir sur leurs réelles motivations et c’est décevant de voir que des gens que tu admires ne disent rien. Même des gens moins connus. J’ai dit à une connaissance « Ta musique est influencée par les sons afro-américains, tu devrais peut-être dire quelque chose sur les violences policières. » Je n’ai pas eu de réponse. C’est bien de voir que des artistes se mobilisent, contre Trump et pour des causes dans lesquelles ils croient.

Vous pensez qu’il va tenir quatre ans ?

Daniel : Je pense qu’il va faire quatre ans oui.

Edward : Je dirais que non !

Daniel : J’adorerais que t’aies raison.

Edward : Mais le vice-président est tout aussi terrifiant.

Christopher : Mais au moins lui, c’est vraiment un politicien.

Edward : La chose positive, c’est qu’on n’aurait plus de tweet irréfléchis, ni de menace nucléaire.

Daniel : Ouais, faut l’éloigner des dossiers sur le nucléaire, ça serait déjà une bonne chose.

Qu’avez-vous à dire sur ce nouvel album « Painted Ruins » ?

Chris : Pour te donner une réponse ennuyeuse, on voulait juste faire un album. Il n’y a pas un thème central, mais plusieurs éléments dont on voulait parler. C’est rare qu’on se focalise sur un seul thème à vrai dire, ça ne marche pas pour nous. On a plutôt essayé de s’inspirer de l’énergie du groupe. Je pense qu’on est assez confiants maintenant, on a une voix et un public qui nous aime. Donc on a continué d’explorer et de développer notre style au lieu de changer complément de genre et modifier de manière radicale ce qu’on fait. Ça vient peut-être du fait d’être un peu plus âgé, de ne pas avoir les mêmes préoccupations qu’avant. Je pense même que ça a nous a aidé dans la création de cet album.

Edward : Je pense qu’on arrive à mieux travailler ensemble maintenant, sans trop se marcher dessus.

« Le premier label qui nous a signé, Kanine Records, nous a dit : ‘Il faut absolument faire des concerts et des tournées’. Donc on l’a fait, mais on jouait devant personne. »

Donc pas trop difficile après cinq ans de retravailler ensemble ?

Chris : On a dû s’ajuster au début pour se re-familiariser avec notre manière de travailler, prendre en compte ce que chacun à aimé ou aime en ce moment. Une fois qu’on s’y est mis ça a bien fonctionné.

Edward : Durant 10 ans, on a fait que tourner et faire des albums. Du coup, on s’est focalisé sur nos amis et nos familles, sur les amis qui ont eu des enfants, etc. On avait besoin de recharger les batteries et là, on est prêts à repartir sur la route.

Vous vous souvenez du premier disque que vous avez acheté ?

Edward : Ça devait être UB40, l’album « Labour of Love » en K7, acheté avec mon argent de poche.

Chris : Probablement un truc Rnb des années 90’s, peut être Mariah Carey ou MC Hammer.

Christopher : Pour moi, c’était sûrement Vanilla Ice !

Chris : Tu te souviens du film qu’il avait fait, Cool As Ice ? Je l’ai revu à la télé et j’avais complètement oublié ce film. Il est pas mal, regarde le !

Edward : J’ai envie de fumer un joint et de regarder ce film.

Chris : Je me souviens avoir essayé d’acheter l’album de Van Halen « For Unlawful Carnal Knowledge », mais ma mère l’a rendu au magasin, elle pensait que c’était un acronyme pour dire Fuck.

Daniel : Je dirais Young MC ou peut être les Guns N’ Roses mais je ne suis pas sûr.

Edward : J’aime encore Young MC. Je faisais semblant d’aimer les Guns N’ Roses au lycée parce que tout monde les aimait.

Chris : Je me souviens aussi de « Born In USA » de Bruce Springsteen mais je crois que c’était à mon père.

Le meilleur conseil qu’on vous a donné en tant que musiciens ?

Edward : Le premier label qui nous a signé, Kanine Records, nous a dit : « Il faut absolument faire des concerts et des tournées ». Donc on l’a fait, mais on jouait devant personne. Mon conseil, maintenant, ce serait : « Tu n’es pas toujours obligé de partir en tournée. Sois sûr que des gens veulent te voir avant d’y aller. Sinon, c’est une perte de temps énorme et c’est démoralisant ». Et puis aussi : ne jamais lire les commentaires.

Grizzly Bear // Painted Ruins // sortie prévue le 18 août sur RCA
En concert le 16 octobre à l’Olympia à Paris
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