L’une des règles d’or dans ce métier, si tant est que cela en soit, est de ne jamais écrire deux fois (ou plus) sur le même artiste (règle compte double si le musicien est un ami à qui vous pourriez prêter 15 balles sans crainte de ne jamais les revoir). Il y a des exceptions bien sûr : Bertrand Burgalat par exemple (qui n’a pas besoin de notre argent), mais aussi Joakim. Leur point commun, au delà du fait qu’ils soient défendus depuis plus de 10 ans dans ces colonnes, c’est cette envie de démolition permanente qui, au fur et à mesure que leurs discographies deviennent illisibles pour les presbytes, donne une trajectoire claire pour celui qui sait entendre.
Ainsi donc, Joakim. Après avoir publié ce « Samouraï », qui devrait avoir définitivement perdu tous ceux qui croyaient encore que Tigersushi était un resto référencé chez Uber Eats, le Français expatrié à New York a pris un appart Airbnb (Hancock, pour ceux qui aiment l’humour) à Rome, dans le studio temporaire de Xavier Veilhan qui, pour la 57e Biennale de Venise en 2017, eut la bonne idée d’inviter 70 artistes parmi lesquels Chassol, Zombie Zombie, Jonathan Fitoussi, Chloé et quelques autres (dont un certain Brian Eno, apparemment). Qu’on nous pardonne le fait de l’avoir mis entre parenthèses, mais cet Eno peut-être fier de sa carrière ; sans le savoir il infuse l’œuvre récente du plus grand taiseux des producteurs français à casquette (on parle de Joakim là) et après le très planant « Samouraï », c’est encore plus clair sur ce pas-vraiment-disque nommé « The Studio Venezia Sessions ».
Guerre de ces sessions
Le mot n’est pas utilisé n’importe comment : si l’Ovni est Ovni, c’est bien parce que la structuration de cette « chose » n’est pas à proprement parler un disque qu’on écoute entre amis trentenaires évaluant leurs positions sociales respectives avec un commentaire malin toutes les 15 minutes sur la musique d’ascenseur qui s’échappe de derrière la cafetière Nespresso. Pensé comme un « field recording » où les visiteurs de l’exposition (cf la vidéo ci-dessous) interagiraient avec le Créateur, « The Studio Venezia Sessions » est le résultat d’un échange entre Joakim et ces mêmes passants auxquels il demandera de choisir un mot, une lettre, un tempo, afin que le matos prêté par Nigel Godrich (vous savez, le producteur du groupe qui a fait chialer les années 90) serve de robot-cuisinier pour 9 morceaux oscillant entre du Charlemagne Palestine et les premiers essais ambient de sieur Eno. C’est précisément là que le « disque » mérite sa comparaison à Ricoré ; c’est un disque de réveil ou de semi-conscience ; quelque chose qu’on pourrait presque écouter en frottant des bols tibétains dans lesquels on verserait ses cornflakes.
A ceux qui en doutaient, la carrière de Joakim fonce donc tête baissée, âge aidant, vers celle de Roedelius, moitié de Cluster auquel ce disque rend hommage très consciemment. Ecoutable dans son intégralité ? Pas sûr. Bricolé ? Surement. Atypique ? La réponse est dans la question. Pourtant, loin d’être coussin rembourré pour mélomanes vegan confondant yo et yoga, c’est une nouvelle preuve du talent polymorphe de ce Joakim, qui refuse de se laisser étouffer par la musique d’ascenseur d’aéroport.
Joakim // The Studio Venezia Sessions // The vinyl factory
3 commentaires
ébouons, ébouons, sinon, çà fera de la sauce pour cafards.
amies français de souche, je vous donne des cours de hockey sur table de fakir apres ce soir
jtetsecrabouilles les nouilles si tues cloitré @ brooklyn